Tout d'abord, il y a une couverture de livre qui tout de suite "met dans l'ambiance", un long et interminable chemin de réfugiés jetés sur l route avec ce qui leur reste de biens.
Puis il y a le récit de cette jeune fille, qui rencontre le pire à 14 ans et qui en fait un témoignage plus que poignant. J'ai mis un certain nombre de citations et j'aurais pu en mettre encore et encore mais je crois que ce qui peut le plus l'illustrer est de le lire tout simplement car ces citations, si pour moi ont du sens, hors contexte réel, en ont-elles vraiment...?
Bref, on commence la lecture de ce récit d'Angélique et on bascule d'une vie simple et heureuse dans l'horreur, l'incompréhension, la peur, l'envie de survivre et même l'amour.
Des premières attaques contre les Tutsis aux vengeances du FPR de Kagame, et la vie telle que décrite par Angélique dans les camps de réfugiés, nous suivons cette dernière dans sa terrible fuite (avec pour seul tort d'être Hutue... et d'avoir peur...) qui nous fait ressentir (et encore, ne l'ayant pas vécue, je ne pense pas pouvoir vraiment "ressentir" ce qu'elle nous raconte mais du moins ses mots simples m'ont énormément touchés et j'ai eu à de nombreuses reprises les larmes aux yeux par tant d'horreurs vécues par une petite fille avec sa mère et ses frères et soeurs.
Elle marche, encore et toujours, pour échapper au FPR qui les talonne. Elle lutte contre la maladie, la faim, le désespoir. Elle se bat. Elle perd ses proches. Elle les retrouve. Elle les perd à nouveau mais cette fois de façon plus définitive... le Zaïre est traversé de façon épique et on voit la Communauté Internationale dans toute sa lâcheté de ne pas agir.
On parle du génocide Tutsi, qui est une réalité et une atrocité dans l'Histoire de l'Humanité, mais les massacres perpétrés par le FPR en représailles et la "chasse" organisée par a suite des Hutus est tout aussi inhumaine! le silence et le dédain du HCR et autres organisations humanitaires est déplorable.
Ces réfugiés deviennent le jouet d'une situation géopolitique difficile, avec le FPR qui aide Kabila a installer son pouvoir puis qui change de côté. le HCR qui ne mesure vraiment pas l'étendue du désastre (ou ne veut pas le faire) et qui se moque presque de ce que ces réfugiés peuvent devenir à partir du moment où ils remplissent leur quota de personnes "sauvées".
Et enfin, le soulagement, des mains qui se tendent, un refuge auprès du couvent en République Centrafricaine et le voyage vers le Danemark qui les sauvera définitivement, Angélique et sa soeur Goretti.
C'est terriblement bouleversant. Ses mots sont bruts et la suivre dans ce périple est émotionnellement terrible parce qu'on ne s'imagine pas pouvoir être capable de faire la même chose.
Elle nous dresse une volonté hors du commun pour ne pas renoncer et c'est ce qui en fait un témoignage à lire absolument!
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Ce livre est le témoignage d'Angélique, jeune fille Hutue de 13 ans au moment du génocide des Tutsis par les Hutus : après le génocide au cours duquel périrent près d'un million de personnes en 3 mois, et bien que sa famille n'aie à aucun moment été impliquée, Angélique est contrainte de fuir vers les camps de réfugiés à l'ouest du pays, puis au Zaïre, avec sa maman et ses frères et soeurs. Commence alors un exode de 7 ans et plus de 3000 km à travers le Zaïre, le Congo et la République Centrafricaine, où la faim, la maladie et l'épuisement font des milliers de victimes quotidiennes : sur près de deux millions de réfugiés rwandais en fuite, environ 12000 parvinrent au Congo et en République Centrafricaine... et parmi eux, Angélique.
C'est ce calvaire que raconte Angélique ainsi que les mouvements complexes des forces en présence qui se sont pourchassées sans répit au cours de cette période troublée, la vie dans les camps de réfugiés, les retournements d'alliances politiques, l'attitude équivoque du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, l'extrême misère des réfugiés enfin, cibles pour les uns, fardeau pour les autres.
Ce n'est absolument pas un document littéraire bien sur, mais un témoignage inédit et poignant qui montre ces événements épouvantables sous un jour différent que celui présenté habituellement par les média et qui font froid dans le dos.
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Plus tard sur la route, nous avons appris par les Zaïrois qui n'approuvaient pas cette chasse aux réfugiés rwandais, que le HCR s'était établi à Mbandaka, d'où était organisés des retours forcés de réfugiés rwandais en fuite. Pour les capturer, le HCR donnait une prime par homme aux volontaires.
Nous étions à Hundborg, Danemark, et nous connaissions déjà une personne: Jean-Pierre. C'était parfait. Nous l'attendrions le lendemain, car sinon- sinon nous serions absolument perdues dans ce petit village étranger, Hundborg, à des milliers et des milliers de kilomètres de notre pays, le Rwanda, qui n'était peut-être plus notre patrie.
Ce fut pour nous une expérience humaine frappante que ceux chez qui nous avions rencontré le plus d'humanité aient été des Pygmées, un Français inconnu et des prostituées rwandaises de Botombo.
Il n'y avait pas d'aide d'urgence. Au-dessus du gigantesque camp de Shanji passait souvent un avion frappé des lettres UN. Nous pensions donc que l'ONU était en train de nous localiser et que nous aurions bientôt de l'aide. Nous attendions, nous attendions, mais rien n'arrivait.
Nous avions le sentiment que le HCR gardait ses distances avec nous autres, les réfugiés de Tingi-Tingi, alors que les besoins étaient énormes, et nous l'interprétions comme un manque manifeste de soutien de l a communauté internationale, et surtout de l'ONU. La communauté internationale ne semblait pas connaître l'existence de plusieurs milliers de réfugiés au Zaïre! Etions-nous des sous-hommes?