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EAN : 9782072884467
224 pages
Gallimard (13/02/2020)
4.5/5   17 notes
Résumé :
Paul Valet, de son vrai nom Georges Schwartz, né à Moscou en 1903 et mort à Vitry-sur-Seine en 1987, poète mais aussi pianiste, peintre et médecin (il fut un des pionniers de l'homéopathie) est un de ces grands singuliers libres de toute allégeance dont le parcours et l'oeuvre sont marqués par l'insoumission et la révolte contre toutes les oppressions. Grand résistant, chef de réseau les armes à la main comme Char, il voit tous les siens disparaître à Auschwitz . Il... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
La poésie, pensum pour neurasthéniques, pince-fesse pour esthètes mondains, tartine d'ennui pour écoliers ? Tellement pas.

Du champ libre pour les mots, sortis du rail du langage corseté-endimanché et s'ébrouant tout nus au soleil. Liberté pour celui qui les lit aussi, comprendre une chose ou son contraire, glisser les pieds dans la glaise moelleuse d'un souvenir ou se griser d'un prompt désir.


A l'endroit, à l'envers, ça marche par les 2 bouts .

Et jamais on ne lit tout à fait le même poème, la faute aux vagues, ou aux yeux crémeux des ânes. Un coup de nuage splendide dans le cornet, on s'arrête tétanisé par une délicieuse émotion carnivore qui nous prend par surprise.


J'ai mis les voiles en poésie à 20 ans, perdue dans un boulot de merde dans une saison à la montagne (loin de ma mer aaah !), découverte des hiérarchies sociales des plus minables, et soudain, assise dans le soleil et dans la neige, au milieu de rien, le poèmes d'Yves Bonnefoy me gorgeant de sens, de beauté, de réconfort. Une énorme bouffée de plaisir, une grosse goulée du cidre désaltérant de ses mots. Oasis dans la neige, gratitude éternelle.


Et dans une vie comme celle de Paul Valet, à qui on a tout volé, quels autres mots que ceux de la poésie pour colmater la détresse, exhumer des bribes de sens, être tenté par une fragile beauté, une dernière tendresse.
Il serait un personnage de roman, on l'accuserait d'en faire trop : né en Russie en 1905, jeune pianiste virtuose ; les biens de sa famille extorqués par les bolcheviques, ; exil en Pologne, puis en France, où il devient médecin, puis résistant pendant la seconde guerre mondiale, au terme de laquelle il apprendra la mort de ses parents et de sa soeur à Auschwitz.

Un homme qui a tout traversé, qui peut alors se défaire de tous ses personnages et devenir totalement poreux, laisser vibrer à travers lui roseaux noirs vertes rainettes, à genoux dans les marais d'une vie rendue à son essentiel. Devenir crinière aux vents sans âge, loin des orgues de l'Histoire.


Ce thème qui revient souvent dans ses textes : se délester de soi en se faisant doubler par l'immensité.
« Je suis loin de moi quand j'écris ».
« Il y a cette part en moi qui n'est pas à moi ».


C'est beau, c'est fort ; on a l'impression en le lisant de s'être fait greffer 2 poumons supplémentaires, comme avec la musique ou la mer. On accoste en kayak sur des îles oubliées. C'est la poésie.
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Je ne connaissais même pas de nom ce poète. Enfin, parlons plutôt de pseudonyme...Sur sa tombe, en 1987, son fils fait écrire:" Dr Georges Schwartz, Seguin pour la résistance, Paul Valet pour la poésie".

Une vie hors du commun: né Grzegorz Szwarc d'un père ukrainien et d'une mère polonaise, connaissant l'exil depuis l'enfance, il se distingue d'abord comme jeune pianiste prodige, puis installé en France comme peintre de talent, poète, médecin ayant été un des précurseurs de l'homéopathie. Et grand résistant durant la seconde guerre mondiale, qui apprendra que sa famille a été gazée dans un camp de concentration. Et on comprend alors que le mot" mort" soit très présent dans ses textes.

Une poésie hors du commun aussi: des distiques très souvent, aux mots lapidaires, antinomiques, mêlant rage, colère mais aussi élans de vie, exaltation, nostalgie. Ses poèmes ne peuvent laisser indifférent, ils claquent, dérangent, et en même temps exultent d'un lyrisme sauvage.

" Dans ma volière cérébrale
Dorment des mots de proie"

On peut ne pas aimer du tout, j'avoue avoir complètement adhéré à cette poésie singulière, entre aphorismes à la Oscar Wilde, avec ce goût comme lui du paradoxe, du jeu sur les mots et quête identitaire, angoisse métaphysique.

" Les horloges
sonnent à leurs heures perdues
Dans le grand abîme de ma tête "

A ne pas lire d'une traite, selon moi, on serait vite débordé par ce torrent de mots ! Mais à découvrir, c'est sûr!

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Il y a à première lecture des vers de Valet un pessimisme évident qui prend sa source dans son vécu mais aussi dans sa lecture du monde.
Il y a aussi cet art du distique, forme sobre sinon tranchante particulièrement adaptée aux paradoxes pour lesquels, le poète a une prédilection évidente.
Le seul fait de vivre semble déjà paradoxal dans sa pensée. L'abandon est déjà présent avant l'essai. Nous sommes proches de la pensée de Cioran et, dans un autre style, de Blanchot… la concision en plus.
La concision n'est pas le vide mais une geste où le vide peut se répandre entre les lignes: un vide porteur donc de l'écriture.
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Toute en aphorismes, à la fois drôle et doucement cynique, assenant des évidences dont on ne souvenait plus, telle est la poésie de Paul Valet.
Temps, saisons, création, vie quotidienne, identité, on y trouve son content, cela fait du bien, cela se mange comme un fruit.
Que dire de cette poésie hors-norme comme toute « bonne » poésie. On ne dira jamais si bien que le poète lui-même :

« La naissances et la mort
Deux portes siamoises. »

« Un cercle vicieux
Est un cercle parfait. »

« S'installer dans le malheur
Comme chez soi. »

« Qui sème le mouton
Récolte l'assommeur. »

« Les murs écroulés
Ont perdu leurs oreilles. »


Je tourne le livre au hasard des pages, et à tous les coups l'on gagne, on tombe sur la phrase qui tue…
Belle découverte de cette année.
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Il faut lire l'oeuvre blessée de Paul Valet.
Où les vers sont d'une beauté crue.
Où la plume - meurtrie - exprime une sensibilité douce.

Les poèmes sont sublimes.
Sublimes par la rage de vivre qu'ils racontent.
Malgré la mort qui les entoure.

-

Paul Valet porte ses morts comme autant de plaies mal refermées.
Ces morts sont l'Histoire. Celle des drames du XX ème siècle.
Ils sont la souffrance. Ils sont la mémoire.

-

Ses poèmes sont des bouteilles jetées à la mer.
Autant d'étoiles scintillantes dans un ciel noir.

-

Ce recueil est véritable coup de coeur.
Un coup au coeur, aussi.
Assurément, la plus belle de mes découvertes littéraires jusqu'à présent.

Lien : https://www.instagram.com/un..
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Citations et extraits (30) Voir plus Ajouter une citation
LE RETOURNÉ

Encore hier
J'étais fort
Aussi fort que vous

J'escaladais vos nuages
Aux rampes d'escalier
Je débouchais dans vos villes
Aux crampes écarlates

D'échec en échec
Ma route était sûre

Aujourd'hui
Je me laisse envahir
Par les morts

De puissants chars des morts
Ont déferlé sur mes chemins
Dévasté mes terrains
Renversé mes remparts
Labouré mes limites
Ravagé mes lumières

Encore hier
J'étais rose
Aussi rose que vous

Me voici noir
Comme une terre
Retournée
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LA PAROLE QUI ME PORTE
MA PART


Extrait 9

J’aime la lumière sacrée
Des ombres écartelées


Et la faiblesse qu’on perce
Et la puissance qu’on mate


Et l’angoisse qu’on brise
Et le frisson qu’on viole


Quand la raison s’effondre
Devant la juste parole

p.178
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TABLE RASE


LES AILES

Comment renverser
Toutes les bornes sans limites
Avec des mains qui se nouent ?

Comment caresser
Toutes les ailes qui m'habitent
Avec des mains de proie ?

Les hirondelles ont passé
Et leurs ombres aiguisées
Ont tranché mes doigts

p.101
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La mort est d'une telle exigence
Que dans son plus que silence
Le silence lui fait peur
Avec tout ce bruit qu'il rappelle
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Les mots en liberté
Redeviennent sauvages

Dans mes alpages bleus-muets
Paissent des animaux rares
Et des mots transparents
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Videos de Paul Valet (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Paul Valet
Une compilation des « Chemins de la connaissance », par Pierre Drachline, diffusés du 18 au 22 mai 1987 sur France Culture. Présences : Yvonne Vineuil, Dominique Labarrière, Guy Benoit, Patrice Repusseau et Irène Omelianenko.
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