AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782818013496
256 pages
P.O.L. (03/03/2011)
2.75/5   2 notes
Résumé :
Soit une jeune femme qui se suicide. Sa meilleure amie, ou qui se dit telle, est traînée en justice par toute une série d'institutions, et d'organisations, de groupements et d'associations qui veillent au respect du vrai deuil, de la véritable affliction, de la peine sincère dont il semble que l'accusée se pare de manière tout à fait illégitime et fondamentalement malhonnête.
Le livre est donc composé d'une série de témoignages, actes d'accusation, expertises... >Voir plus
Que lire après Vous serez mes témoinsVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
----------------------------------------------------------------
RECONNAISSANCE DE DEUIL
Je soussigné, Pérégrinateur Littéraire Compulsif, déclare sur l'honneur considérer le deuil de Mademoiselle Nina Yargekov comme parfaitement légitime.
□ Oui, je veux aider Nina Yargekov à disposer de davantage de moyens pour considérer sa profonde douleur comme réelle.
Ci-joint mon don :
□ 3 cartes de condoléances « je suis parfaitement ému par le deuil qui vous frappe et je tenais à vous faire part de mon soutien dans cette difficile épreuve » (membre simple)
[…]

Signature : PLC

-------------------------------------------------------


Carte de condoléances « je suis parfaitement ému par le deuil qui vous frappe et je tenais à vous faire part de mon soutien dans cette difficile épreuve » #1

Chère Nina Yargekov,

Je suis de tout coeur avec vous dans cette difficile épreuve, certes sans doute moins définitive que celle qu'a subie ELODIE, mais quand même, vous êtes bien à plaindre. Votre deuil est intéressant, mais que Dieu (ou tout autre Entité du même acabit) me préserve d'en subir un à l'avenir. Votre témoignage est poignant, je ne doute pas un instant de la sincérité de votre peine car j'ai versé une larmichette empathique plus souvent qu'à son tour. C'est une preuve de la sincérité de votre deuil, je présume, car je ne pleure pas facilement et encore moins pour des clopinettes simulées. Je vous dis « Bravo ! » et attends avec impatience votre prochain roman qui, je n'en doute pas, me plaira et saura, je le crains bien, m'émouvoir à nouveau.

Bien à vous,

Pérégrinateur Littéraire Compulsif



--- --- ---

Carte de condoléances « je suis parfaitement ému par le deuil qui vous frappe et je tenais à vous faire part de mon soutien dans cette difficile épreuve » #2

Mademoiselle Yargekov,

J'ai lu avec attention votre roman. Je l'ai trouvé nettement plus lisible que votre première oeuvre, nommée « Tuer Catherine ». Votre écriture a en effet gagné en simplicité mais n'a fait aucune concession quant à son efficacité – que je qualifierais de « redoutable », si vous me permettez cette audacieuse épithète. Votre sens de l'humour subtil allié à une forme diaboliquement originale magnifient ce difficile projet que vous avez initié, celui de transcender, par une écriture résolument transficitionnelle, l'expression d'une thématique que votre exigeant lectorat se félicitera sans doute de voir traitée avec autant d'originalité, tant dans la forme que dans le fond. Si je puis me permettre cependant, vos personnages ne seraient-ils pas un brin caricaturés ? En résumé en conclusion et pour finir, il y a cependant en germe dans votre œuvre ce qui fera le succès de votre remarquable « Double nationalité » quelques années plus tard, projet de maturité qui vous permettra d'obtenir le Prix de Flore 2016, de façon très méritoire. Si vous me permettez d'employer le futur simple avec une valeur passée, bien sûr.

Soyez assurée, chère Mademoiselle Yargekov, de mon entière participation à votre profonde peine – résolument crédible, de surcroît – et recevez par ailleurs mes plus sincères condoléances.

Veuillez agréer, Mademoiselle, l'expression de blabla bla bla bla , et bla bla bla. Bla.

Monsieur Pérégrinateur Littéraire Compulsif.



--- --- ---

Carte de condoléances « je suis parfaitement ému par le deuil qui vous frappe et je tenais à vous faire part de mon soutien dans cette difficile épreuve » #3

Chère Nina, ô combien chère et chérie,

Je suis très parfaitement ému par le deuil qui te frappe. En effet j'ai moi-même beaucoup souffert dans mon existence qui s'achèvera peut-être très vite sans réponse immédiate de ta part : j'ai raté trois fois ma vie sentimentale et je suis redevenu célibataire à 43 ans, ce n'est pas facile avec la calvitie naissante, les poils blancs qui s'invitent dans ma barbe de trois jours, et les poignées d'amour qui ne disparaissent plus (même en faisant un peu de sport le dimanche matin) ; en plus je n'ai pas beaucoup d'amis, un de mes cochons d'Inde est mort il y a quelques mois, et le roman que j'ai écrit en 2018/2019, dont le titre est « Tout un tas d'histoires d'amour » comme tu dois t'en souvenir, a été refusé par trois maisons d'édition (dont P.O.L), alors j'ai dû le publier en auto-édition et j'en ai offert davantage à des amis et à des écrivains que je vénère au plus haut point (comme toi) qu'il ne s'en est vendu. J'ai encore assez de doigts sur mes mains pour comptabiliser les prochaines ventes ou, sûrement, les prochains cadeaux que je compte bien faire, notamment à ma cheffe de division (qui aime beaucoup lire) pour son départ en retraite mérité. Bref, c'est moche, je me suis enfermé un an dans une tour d'ivoire pour écrire ce roman, et pourtant, tu imagines, Nina, je ne peux même pas m'acheter un paquet de nouilles premier prix ce mois-ci avec mes droits d'auteur. En plus je suis fonctionnaire, c'est vraiment un statut mal considéré et absurde. Des numéros de dossiers, et pas assez d'hommes libres. Mais je dois me taire, devoir de réserve et vœu de chasteté obligent.

Bref, je suis bien à plaindre aussi. Alors j'espère que quand je mourrai de façon brutale et létale, Nina mon coeur mon amour, mon amour ma bien-aimée et ma beauté fatale (c'est pour la rime mais c'est aussi la vérité), tu seras bien triste pour moi, autant que moi je le suis pour toi.

Pour nous consoler mutuellement, accepterais-tu que nous allions boire un verre (tu choisis, car comme on dit qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse), ou que nous nous sustentions par un petit dîner dans une crêperie (là c'est moi qui choisis, car je suis très difficile à sustenter) ou allions nous frôler les mains comme par hasard dans l'obscurité obscure et sombre d'une salle de cinéma, même si c'est pour voir un film hongrois non sous-titré je prends, rien que pour frôler tes mains endeuillées par l'écriture et la sincérité.

Bien à toi,
Pérégrinateur Littéraire Compulsif, alias Cycy

PS : Je te tutoie car toi et moi nous sommes unis comme les deux phalanges d'un même pouce, c'est pour dire.

PPS : Je te soutiens dans cette difficile épreuve, Nina.
Commenter  J’apprécie          83
Ce livre, sans doute un roman, pourrait avoir pour thème le suicide, ou le deuil d'une suicidée, ou l'éventualité que le statut d'endeuillée apporte des avantages sociaux désirables, ou que ces privilèges puissent être obtenus au moyen d'une imposture au deuil, ou que ce crime lésant la douleur légitime des endeuillés avérés soit poursuivi en justice pénale, dont la procédure aurait pour fondement d'infirmer petit A la réalité de la douleur de l'endeuillée, petit B la vraisemblance des rapports humains de proximité, intimité, affectivité entre la suicidée et l'accusée.

Ce livre, hypothétiquement un témoignage, aurait pour axiome la thèse très post-moderne que toute réalité puisse surgir de – ou bien être remplacée par – la somme des discours, des narrations contradictoires afférents, pourvu que l'exhaustivité soit respectée, que les positions respectives des personnages, de l'auteure, voire des lecteurs convoqués par l'injonction que constitue le titre puissent être secouées ; que la notion de fiction doive être entendue à plusieurs niveaux, même au plus extrême et littéral, et que le surgissement d'états émotifs, notamment par tout ce que le suicide et le deuil convoquent nécessairement dans le psychisme individuel comme dans la conscience collective, particulièrement chez les personnes en ayant fait l'expérience, surgissement donc à l'aune duquel pourra être mesurée l'effectivité et l'efficacité du texte, voire de chaque simple parole, soit suivi instantanément du broyage provoqué par le relativisme des points de vue des titulaires de ladite parole – par ex. celle de « Mme Sagesse Populaire ». [À ce propos, tout en ayant déjà lu quelques ouvrages romanesques sur le suicide et/ou d'auteurs suicidés, ma pensée émue va ici à la grande Nelly Arcan, et étant ainsi parvenu au petit constat empirique que parmi eux les usagers de pseudonymes sont plutôt majoritaires, je me suis demandé si, dans le cas présent, le passage qui s'opère progressivement, à partir de la p. 67, entre le personnage de l'Accusée et NY ou Nina ou Nina Yargekov, aurait pu s'opérer aussi pacifiquement si ce dernier n'avait pas été un pseudo ; et j'ai aussi fait une petite vérifications de dates de naissance et de décès sur Wikipédia, afin de vérifier l'hypothèse que vous, l'amie du grade que vous voudrez, soyez la réincarnation de Romain Gary... en vous souhaitant sincèrement une meilleure fin ! Et ça tient la route.]

Ce livre serait donc pour moi, ou aura été, d'abord et surtout une centrifugeuse à jus. Jus aussi amer que bio. Extractible par propulsion hyper-rapide, contre une paroi au grillage fin et robuste, d'une matière dure déchiquetée, même du céleri-rave-et-curcuma. J'en garderai la frustration de n'en avoir guère compris grand-chose, car beaucoup plus est là que je n'y ai vu ou retenu, et surtout de m'être laissé benoîtement manipuler dans les émotions ambivalentes suscitées par un récit à haute température d'affects : du chagrin et de la colère, de l'empathie et de la détestation, de la répulsion et de l'admiration pour le procédé, de la curiosité pour tout indice involontaire qui laisserait, grand A, supposer un léger penchant vers l'un des points de vue énoncés, grand B, apercevoir en transparence ou en carottage géologique des traces biographiques de l'auteure. du vrai, quoi. Penses-tu ! C'est comme le passage de l'ironie la plus outrancière, que l'on pourrait dire la plus illégitime, à la gravité la plus apte à porter une réflexion, voire un enseignement ; et retour, pour bien triturer le tout : comme les enfants qui s'amusent à l'alterner le c'est pour de vrai avec le c'était pour rigoler.

Ce n'est pas du tout un livre drôle, mais on s'y esclaffe souvent. Ou bien, c'est comme ce recours à l'antiphrase à deux occasions : dans les cinq compétences professionnelles qualifiant l'endeuillée free-lance (pp. 121-132) : « Faire face à la réalité du décès », « Appréhender le geste suicidaire de façon apaisée », « Lutter contre le vécu d'exclusion », « Préserver son couple », « Trouver les mots pour le dire » ; et dans les treize encadrés finaux qui composent le ch. « Le roman » et sont censés le caractériser – mais est-ce réellement et entièrement le contraire qui est véridique ? : « 1. Un texte généreux », « 2. Un message de paix », « 3. Un livre politique », « 4. Une démarche pédagogique », « 5. du mystère et des énigmes », « 6. Un univers féerique », « 7. du contenu », « 8. Un regard singulier sur le monde », « 9. Un récit haletant », « 10. Une chute totalement inattendue », « 11. Une déontologie irréprochable », « 12. Un objet sous garantie » [mon préféré, tous les assureurs au pilori !], « 13. Un roman dont vous êtes le héros » (pp. 233-245).

Non, le lectorat n'acquiescera pas à votre injonction, faute de validation du seuil minimum de vérité, pour la même raison pour laquelle l'électorat post-moderne se dépolitise. Oui, il est légitime et même salutaire de questionner (la mise en acte de) l'assertion que la vie ne vaille pas la peine d'être vécue, que la douleur de la mort soit aussi une gratification, que le suicide, par le reproche qu'il adresse au survivant, puisse lui provoquer un désir d'identification en retour ; il est opportun de s'interroger enfin sur les conditions nécessaires – des conditions de vérité, justement – à l'existence et à la pérennisation du sentiment de « meilleure-amitié » voire du sentiment amoureux (hétéro tout comme homosexuel), « sans quoi, on est juste une cruche [un benêt] qui poursuit de ses ardeurs amicales une inconnue » (p. 196).
Commenter  J’apprécie          10
Mais cette fille est complètement barrée! Déjà avec le gros Double nationalité j'avais eu une idée favorable de cette auteur, là c'est plus court (250 pages) et complètement improbable.

Alors on dirait que se déroule un procès, celui d'une certaine Nina Y., accusée d'avoir voulu tirer parti d'un nébuleux statut de "meilleure amie d'Elodie", jeune femme s'étant suicidée le 14 juillet 2007. Connaissait-elle si bien que cela Elodie, son chagrin est-il simulé, etc., bref, le grand n'importe quoi est parfaitement assumé, le lecteur ne sait trop s'il faut rire ou pleurer, emporté qu'il est par un gros délire.

"Commandant GIGN
Concernant les affabulateurs qui prétendent faussement avoir eu des liens étroits avec des suicidés, nous les considérons au même titre que les imitateurs de tueurs en série et autres imposteurs du genre comme les guignols qui nous font perdre leur temps, passez-moi l'expression."

"Monsieur G., téléphonologue
Les téléphones portables sont de petits êtres sensibles qui peuvent être très affectés par le contenu des données vocales qui les traversent, surtout lorsqu'il concerne des personnes dont le numéro se trouve dans leur répertoire. Il n'est donc pas impossible que dans un moment de trouble, secoué par la triste nouvelle, le petit téléphone ait involontairement déformé les propos qu'il était en charge de transmettre."
Lien : https://enlisantenvoyageant...
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (3) Ajouter une citation
« Parce que ma peine, mon deuil, je veux que vous les voyiez. Vous serez mes témoins. Ce sera votre travail. Votre mission. Votre charge. Moi je ne témoigne pas, j'agis.
C'est une douleur intolérable. Je choisis les mots avec soin. Intolérable, provenance étymologique de qu'il est impossible de tolérer et pourtant on est obligé. Surtout qu'on est si mal préparé. Il n'y a pas de cours de deuil à l'école. Il n'y a pas de département de deuillologie dans les centres de recherche. On vous renvoie vers les thérapeutes, les médecins. Comme si c'était exclusivement un problème personnel. Un malaise singulier, à soigner au cas par cas. Comme si ce n'était pas une affaire collective ce putain de suicide [...] » (pp. 172-173)
Commenter  J’apprécie          20
Pars pro toto :
« Même la déchetterie municipale, dont c'est pourtant le rôle de débarrasser les honnêtes citoyennes comme moi de leurs encombrants, a refusé de me venir en aide, nous sommes navrés chère mademoiselle cependant nous prenons en charge uniquement les objets solides, pour votre affliction post-traumatique voyez éventuellement avec le service dératisation. Bande d'imposteurs. Alors que j'avais coché toutes les cases sur le formulaire et m'étais allongée sur le trottoir à six heures du matin les bras en croix comme stipulé, mais au lieu de me mettre dans la benne des ordures les fonctionnaires de la ville m'ont relevée et ils m'ont dit, remontez chez vous et buvez une petite camomille, il ne faut pas rester comme ça dehors en pyjama. » (pp. 158-159)
Commenter  J’apprécie          10
Témoignage-bénédiction de la « Sorcière free-lance » [pour ses effets thérapeutiques sur le lecteur envers l'Accusée] :
« Que la honte te couvre, te frappe et te défigure, qu'une pluie de crapauds surgelés s'abatte sur ta tête, que des rideaux tressés d'intestins obscurcissent ta vue, qu'un sang nauséabond coule de tes robinets et que tu enfantes une portée de chevreaux morts-nés en plastique cancérigène ! Que ton aspirateur crache des moustiques venimeux ! Que des bêtes sauvages surgissent de tes placards ! Que des vers luisants fassent leur nid dans tes barquettes de carottes râpées ! Et qu'à jamais toi et tous ceux de ta maisonnée voient leurs cheveux infestés de pellicules grasses résistant à tout traitement ! » (p. 73)
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Nina Yargekov (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nina Yargekov
Nina Yargekov - Double nationalité
Les plus populaires : Littérature française Voir plus
Livres les plus populaires de la semaine Voir plus


Lecteurs (9) Voir plus



Quiz Voir plus

Le quiz fou

Il était une fois un malheureux matou, maltraité par ses maîtres, qui se prenait sans arrêt des coups de fou.....

r
et
ace
rrière
rgon
le

18 questions
78 lecteurs ont répondu
Thèmes : mots , humour , vocabulaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}