Le Roman d'Apollonius de Tyr, ou Historia Apollonii Regis Tyri est, à la base, un roman latin provenant d'une source grecque. Si le roman latin date du V ème ou VI ème siècle, le texte grec, quant à lui, date du III ème siècle. le texte latin a connu un succès durant tout le moyen âge et bien au-delà puisque
Shakespeare, dans
Périclès, Prince de Tyr l'a adapté. le texte a été décliné dans toutes les langues et sous toutes formes.
L'une des premières versions médiévales est apparue au XII ème siècle sous la forme d'un roman en vers français.
Le roman commence comme un conte: Un Roi, nommé Tobie, régnant sur les royaumes d'Antioche, d'Arabie, d'Egypte et de Tarse, a, avec sa femme Sarah, un fils, Apollonius. A la mort de ses parents, Apollonius ne peut régner car il est trop jeune. Il n'a en effet que sept ans. On décide alors de nommer un des meilleurs chevaliers du royaume, Antiochus, pour faire la transition. En attendant, notre jeune héros sera envoyé à Tarse pour recevoir l'éducation convenant à son rang.
Le conte se finit alors bien vite. En effet, le véritable point de départ de cette histoire est la relation incestueuse entre Antiochus, et sa fille. Ce roi était devenu impopulaire car il prélevait bien trop d'impôts. le peuple commençait à réclamer son vrai roi, Apollonius, qui avait atteint, entre-temps, l'âge de régner. La femme d'Antiochus lui propose alors de marier sa fille à notre héros. Évidemment, le père ne l'entendait pas de cette oreille. Sa femme meurt subitement. Il demande alors à ses plus fidèles conseillers leur accord pour épouser sa fille. Ceux-ci le lui déconseillent fortement et émettent l'idée du mariage avec Apollonius. N'en faisant qu'à sa tête, le père déflora sa fille la nuit suivante. Elle devint sa maîtresse sans pour autant que cela se sache.
Cependant, cette dernière recevait de plus en plus de propositions de mariage. Antiochus usa d'un stratagème en écrivant une devinette en grec. Les prétendants devraient la traduire. S'ils échouaient, ils auraient la tête coupée et accrochée à la porte de la tour. Il envoya également des chevaliers mettre fin aux jours d'Apollonius. Ces derniers se mirent en route mais ne suivirent pas exactement la consigne car il était le fils de leur suzerain légitime et adoré. Ils l'emmenèrent au royaume
De Grèce combattre un chevalier démoniaque. S'il s'en sortait, ils le ramèneraient à Antioche où il épouserait la fille d'Antiochus. Strangulion, gouverneur et prévôt du pays les reçut et ils expliquèrent tout ceci à Apollonius.
Ce dernier partit avec les chevaliers et fut reçu par le roi
De Grèce, Alexandre. Celui-ci lui annonça que celui qui réussirait à le débarrasser du chevalier démoniaque recevrait un destrier et une cité
De Grèce. Apollonius releva le défi avec succès. Un mois plus tard, il repartit en direction d'Antioche. Lui aussi fut confronté à la fameuse devinette grecque. Il la traduisit en latin. Elle mentionnait la relation incestueuse. Il proposa à Antiochus de n'en rien dire. L'autre le força et Apollonius fut donc contraint de lui révéler la dure vérité. Cependant, le roi nia et lui donna un délai: le jeune héros devait se représenter le lendemain avec "la solution" ou il serait tué.
Apollonius s'enfuit vers Tarse, à bateau, dans la nuit. Antiochus, furieux, lança ses meilleurs chevaliers à ses trousses avec ordre de le tuer. A Tarse, Apollonius demanda l'hospitalité à Strangulion et à sa femme Denise, en échange de nourriture donnée au peuple qui mourait de faim. Au bout d'un an, le prévôt propose à Apollonius de l'aider à partir en direction de Cirène pour s'y cacher. Apollonius, que rien n'épargnait, fit naufrage pendant ce voyage et fut le seul survivant. Il fut aidé par un pêcheur miséreux qui lui donna la moitié de son habit et lui fit partager son repas. Apollonius se rendit à Cirène et rendit service au roi, Archestrate. Ce dernier apprécia et demanda de qui il s'agissait. On lui appris que c'était un naufragé. Il l'invita à sa table et lui offrit de beaux habits afin d'être plus présentable. Cependant, cet invité restait triste et muet. La fille du roi tenta de connaître l'identité de ce jeune homme. Il lui répondit qu'il s'appelait "Naufragé".
Elle joua de la harpe pour le divertir mais rien n'y fit. le roi fut vexé. Il questionna ce personnage sur son mutisme. Apollonius lui répondit que sa fille n'avait pas encore la technique parfaite pour jouer de cet instrument. Il fit une démonstration (cela avait fait partie de son éducation) et enchanta toute l'assistance. Il devint, à partir de là, et selon la volonté de la fille du roi, son précepteur. Elle tomba amoureuse de lui et, selon le schéma classique, en fut malade. Des prétendants se présentèrent. le roi décida que c'était à sa fille de choisir. Il voulait lui laisser faire un mariage d'amour. Après bien des péripéties (je passe sur les détails, histoire de ne pas tout dévoiler), il l'épousa et elle tomba enceinte rapidement.
Un bateau de son pays arriva dans le port. Apollonius apprit alors que le roi Antiochus et sa fille, consentante pour être sa maîtresse, étaient morts foudroyés. Notre jeune héros y vit une punition divine. Il devenait alors maître de son royaume. Il lui fallait y retourner et avec la bénédiction d'Archestrate, sa femme le suivit. le voyage fut plus long que prévu et cette dernière donna la vie à une petite fille sur le bateau. Une hémorragie donna à la jeune mère l'aspect d'une morte et l'équipage força Apollonius, fou de douleur, à se débarrasser du corps de sa bien-aimée. Il fit construire un cercueil bien étanche, y mit une lettre et une somme d'argent conséquente afin que celui qui le retrouverait donne à sa femme des funérailles de reine et, qu'en compensation, il garde une moitié de la somme. Arrivé dans son pays, Apollonius alla voir Stragulion et Denise et leur demanda de s'occuper de l'éducation de sa petite Tarsie, leur laissant sa nourrice et une forte somme d'argent ainsi que des parures et des bijoux afin qu'elle ne manque de rien.
Voilà, j'arrête là, car je ne voudrais pas révéler la fin si vous avez envie de lire ce roman.
Ma version date du XV°s. L'écriture en est agréable, même si quelques vers manquent et quelques erreurs sont relevées par le traducteur (
Michel Zink). En effet, le compilateur a oublié parfois l'histoire et fait revivre soudain des personnages qui sont morts. Cependant, peut-on lui en vouloir face à l'enchaînement des nombreuses actions? Si ce roman est court, il n'en reste pas moins qu'il nous tient en haleine jusqu'à la fin.
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