Les livres du moment #179 – jeudi 31 août 2023
Quelles sont les recommandations des lecteurs cette semaine ? 

Article publié le 31/08/2023 par Nicolas Hecht, Pierre Krause et Mathilde Sautou

Connaissez-vous les pages de recommandations par genre sur Babelio ? Chaque jour, l'équipe du site trie et sélectionne les livres les plus appréciés des Babelionautes pour vous faire découvrir des parutions récentes, agrémentées d'une critique de lecteur. Et chaque semaine nous vous proposons désormais de retrouver une liste de dix ouvrages, soit un par catégorie, afin de suivre l'actualité littéraire au plus près.

Littérature française : Sophie G. Lucas, Mississippi
La Contre-Allée, 192 pages, 18 €

Mississippi est le nom d’un fleuve emblématique des Etats-Unis. Mais un fleuve peut être plus qu’un simple cours d’eau qui traverse certes presque entièrement un pays du nord au sud. Un fleuve, c’est une multitude d’embranchements qui sont autant d’histoires, de celles qui, souvent, forment la grande Histoire. C’est une fresque américaine, parfois boueuse mais toujours limpide que propose Sophie G. Lucas dans ce roman.

Jazzynewyork s’est baignée avec plaisir dans ce roman « fleuve » : « L’auteure a une manière bien particulière de nous raconter ce qui semble être une petite histoire et qui s’avère au final une grande histoire, aussi grande que le Mississippi, une histoire qui traverse les époques, qui nous emmène à travers les siècles et les guerres, jusqu’à notre époque, jusqu’au jour où l’ouragan Katrina entraîna le Mississippi hors de son lit. C’est fortement beau, puissant, stylé à l’image du fleuve Mississippi. »

Littérature étrangère : Lídia Jorge, Misericordia
Métailié, traduit du portugais par Elisabeth Monteiro Rodrigues, 416 pages, 22,50 €

Voilà un livre singulier, entre le roman et le témoignage, pour parler d'une femme au seuil de la mort - mais surtout célébrer la vie. Misericordia reprend sous forme romancée 38 heures d'enregistrement audio d'une vieille femme, Dona Alberti, la mère de l'autrice Lídia Jorge. Elle y raconte une année passée dans une maison de retraite entre 2019 et 2020. Une sorte de journal donc, dans lequel on suit les chamailleries des résidents, le manque de moyens de l'établissement, l'absurdité de certaines mesures pour enrayer le Covid-19, mais c'est surtout une occasion d'entendre la voix de cette femme au crépuscule de sa vie, et de son quotidien fait d'espoir, de peines, d'épiphanies minuscules, et de beaucoup d'amour pour sa fille. Un très bel hommage à la relation mère-fille, par l'une des plus grandes écrivaines lusophones.

Une lecture marquante pour viou1108_aka_voyagesaufildespages : « Misericordia est un livre fort, un très beau plaidoyer pour la résistance, l'espoir et la vie, et un superbe hommage, sensible et bouleversant, de Lídia Jorge à sa mère. Un grand livre. »

Polar & thriller : Cristina Alger, Au nom de nos soeurs
Albin Michel, traduit de l’anglais par Nathalie Cunnington, 272 pages, 21,90 €

 
Quand Nell, agent du FBI, revient à Long Island pour les obsèques de son père, elle est loin de se douter que ce retour dans son pays d’enfance va la propulser dans une enquête au cœur même de son histoire familiale. De nombreuses questions assaillent Nell : La mort accidentelle de son père est-elle liée aux meurtres récents de deux femmes ? Et que s’est-il passé exactement lorsque la mère de Nell a disparu alors que celle-ci n’avait que 7 ans ?

LaVieenLivresdeFrancoise a trouvé ce roman très réussi : « Voilà un thriller psychologique comme je les aime. Une histoire qui, de la première à la dernière page, m'a tenue en haleine, sans besoin d'une abondance d'hémoglobine pour me faire vibrer. Une héroïne pour qui on se prend d'empathie. Une enquête qui vient s'imbriquer dans des secrets de famille. Un suspense qui donne envie de tourner page après page jusqu'au fin mot de l'histoire. [...] Un thriller psychologique d'atmosphère. À découvrir ! »

BD : Fabien Toulmé, Inoubliables
Dupuis, 128 pages, 23 €

 
Quels sont les moments les plus mémorables de votre vie ? Ceux qui vous ont changé à jamais et dont vous vous souviendrez quoi qu’il arrive ? C’est l’une des questions posées par Fabien Toulmé à plusieurs personnes qui se sont ainsi livrées sur des moments violents, intenses, honteux ou particulièrement joyeux de leurs vies. L’auteur a mis en scène ces différents souvenirs dans une BD qui dresse un portrait fragmenté et touchant de l’être humain.

La_petite_bibliotheque a aimé cette BD unique en son genre : « Inoubliables, c'est le projet touchant de Fabien Toulmé où il a recueilli des bouts de vie, des récits de cœur, des moments dramatiques. Ceux qui marquent le tournant dans une vie et dont on se souviendra toujours. Des moments qui élèvent ou crèvent le cœur parfois. De l'humanité dans tout ce qu'elle a de bon ou mauvais. »

Manga : Ana Cristina Sánchez, Limbo, tome 1: un monde déformé
Glénat manga, traduit de l’espagnol par Anne-Sophie Thévenon, 264 pages, 9,50 €

Bienvenue dans le monde particulier d’Aurora Edelweiss, jeune fille au talent un peu spécial. Son don en ferait paniquer plus d’un : elle peut voir les esprits des défunts et communiquer avec eux. La lycéenne compte bien utiliser son talent : elle cherche à expliquer les phénomènes surnaturels, notamment ce qui concerne des objets étranges, ceux qu’on nomme « essences de l’âme ». Ses enquêtes ne sont pourtant pas des petits jeux de pistes sans conséquences. Un jour, elle croise le chemin d’un monstre horrifique, et se retrouve projetée dans le monde des Limbes… Qu’en est-il de la vérité sur ces essences de l’âme ? Que lui veut véritablement Lieza, sa camarade de classe croisée au mauvais endroit ?

Pour Lesvoyagesdely, ce manga est une immersion totale et prenante : « Limbo est une très belle surprise, tout y est diaboliquement bien géré pour nous tenir en haleine et littéralement nous emporter. Aurora Edelweiss, presque 16 ans, est un personnage assez singulier et cela pas seulement à cause de son don de voir les esprits mais sa façon de parler, d'être, de penser, c'est aussi comme si elle rejetait son humanité. [...] Le manga mélange habilement tranche de vie, action, amitié et esprits. »

Jeunesse : Ariane Guézouli, La Tourneuse de vent
Rageot, 288 pages, 14,90 €

Pas très adroite, la tête dans les nuages, Solveig n’a pas les pieds sur terre mais elle est toujours dans la lune. A l’auberge du Pays du Nord comme à la maison, pour elle, c’est bourde sur bourde. Pourtant, quand sa soeur Sigrid se retrouve transformée en poule par un mage maléfique, la jeune fille n’hésite pas : elle doit la délivrer de ce mauvais sort. Au cœur de la Forêt du Centre du Monde, elle fait une découverte intrigante : l’index de sa main droite est désormais recouvert d’or… Au gré de ses rencontres entre géants et magiciens, parviendra-t-elle à percer les mystères qui croisent son chemin ?

Des personnages attachants et originaux pour FabtheFab : « L'originalité du roman tient à l'humour du récit, la jeune héroïne est distraite, maladroite et comme ses parents ne lui ont de ce fait jamais accordé leur confiance, elle est peu sûre d'elle-même. [...] Ariane Guézouli tient à merveille le rythme du récit avec un suspense épatant mais elle émaille aussi le récit de situations cocasses et burlesques avec beaucoup d'inventions originales. Un roman de fantasy joyeusement délirant et intelligent avec un beau portrait de jeune fille originale. »

Jeune adulte : Anaïs Sautier (texte) et Claire Fauvel (illustrations), Marseille, bébé
Bayard, 272 pages, 13,90 €

« Chaud comme Marseille ! » chantaient les rappeurs de IAM et de la Fonky Family dans les années 1990. C’est un air que pourrait chanter Louisa, une lycéenne introvertie qui voit la vie revenir à Marseille après plusieurs mois de Covid. Un retour tout aussi craint qu’attendu : la jeune fille a quelques angoisses qui concernent son quotidien (comment se réintégrer dans ce monde ?) mais aussi son futur (que lui réserve l’avenir ?). Heureusement, à Marseille, « le cœur de la ville s'enflamme quand le son entre en jeu ». Et Louisa a une bonne playlist.

De la bombe pour saperlotte : « On s’y croirait ! Où ça ? À l’Estaque Marseille, au lycée, à la plage, dans les poches pleines de sable des deux protagonistes qui s’adorent mais peinent parfois à se comprendre, dans leurs playlists de RAP. Un récit choral super bien écrit. Franchement, j’attends le prochain roman avec impatience. »

Imaginaire : Caroline Deyns, MURmur
Quidam, 172 pages, 19 €

Après un premier roman en 2011 et deux biographies obliques de femmes artistes (celles d'Isadora Duncan et de Niki de Saint Phalle, qui vient de paraître en poche), Caroline Deyns s'essaie avec MURmur au registre de la dystopie - espérons en tout cas qu'il ne s'agisse pas d'anticipation. En conjuguant passé, présent et futur, elle nous raconte l'enfermement d'une femme dont l'unique faute est l'avortement. Une situation qui, si elle nous paraît aujourd'hui relever de la dystopie, s'avère finalement proche d'épisodes historiques. Surtout quand un autre récit s'enchasse au premier, nous rappelant au fameux procès de Bobigny de 1972 qui mena à la dépénalisation de l'avortement en 1975.

Un livre qui a déjà secoué et convaincu une dizaine de lecteurs sur Babelio, dont Charybde2 : « Salutairement cruel, étonnamment poétique, un tour de force littéraire, qui, au carrefour de la science-fiction d’anticipation bien noire, de l’historique procès de Bobigny et de récents retours en arrière un peu partout dans le monde, traque la mainmise ancienne et résurgente du patriarcat sur le corps des femmes. »

Roman d’amour : Luce Emerson, Silently Falling Down
Editions Addictives, 522 pages, 5,99 €

Changer de peau, changer de masque : Alicia a mille visages. En-dessous de ces multiples rôles qu’elle enchaîne les uns après les autres, la jeune fille se perd, de plus en plus loin d’elle-même. Mettre des chaînes sur ses émotions, ne pas ressentir, se recomposer constamment, c’est son credo pour survivre. Sa casquette la plus récente ? Manager dans une aciérie. Au travail, elle côtoie Liam. Liam, qui porte lui aussi ses ombres, dans sa froideur, sa distance. Liam qui n’est pas dupe lorsque la jeune femme ment. Cette attirance est pour eux une véritable mise à l’épreuve, entre le poids des secrets qui les rongent et la voie vers la guérison.

Un moment de lecture qui a profondément ému LiliMatoline : « Slowburn, ténèbres, reconstruction, âmes torturées, secret, espoir, vérité, amour, une belle histoire sombre et lumineuse. La plume est magnifique [...]. C'est dynamique, prenant, accaparant, bouleversant, surprenant, une belle découverte et un moment de lecture époustouflant. »

Non-fiction : Marie-Hélène Lafon, Cézanne : Des toits rouges sur la mer bleue
Flammarion, 176 pages, 21 €

Après un essai sur Flaubert, c'est à un autre monument français que s'attaque Marie-Hélène Lafon : Paul Cézanne. Un amoureux de la nature, un artisan de la toile pour lequel Aix-en-Provence et Auvers-sur-Oise seront des refuges. Un être insaisissable aussi, que Marie-Hélène Lafon tente ici de mieux cerner à travers 5 variations thématiques, pour rendre toute sa profondeur à l'un des maîtres de la couleur. De quoi redécouvrir l'un des plus grands artistes du XIXe siècle, à travers la plume d'une autrice contemporaine de premier plan.

VincentGloeckler a apprécié cette explosion de mots et de couleurs : « Chacun de ces textes peut être lu comme une nouvelle indépendante, et l'on y retrouve tous les charmes de l'écriture romanesque de Marie-Hélène Lafon, son attention aux mots, au rythme, à la respiration, comme à l'observation des détails, à la bonne ciselure des petites scènes. »

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