« Personne ne soupçonne l'existence des Murs Blancs. Pourtant cette propriété a marqué l'histoire intellectuelle du XXème siècle. Elle a été aussi le lieu, où enfants, nous passions nos dimanche après-midi : la maison de nos grands-parents
Après la guerre, ce magnifique parc aux arbres centenaires niché dans le vieux Châtenay-Malabry, est choisi par le philosophe Emmanuel Mounier, pour y vivre en communauté avec les collaborateurs de la revue qu'il a fondé : Esprit. Quatre intellectuels, chrétiens de gauche et anciens résistants, comme lui, Henri-Irénée Marrou, Jean Baboulène, Paul Fraisse, Jean-Marie Domenach, le suivent avec leurs familles dans cette aventure. Ils sont bientôt rejoints par Paul Ricoeur.
Pendant cinquante ans, les Murs Blancs sont le quartier général de leurs combats, dont la revue Esprit est le porte-voix : la guerre d'Algérie et la décolonisation, la lutte contre le totalitarisme communiste, la construction de l'Europe. Et bien sûr, Mai 68... Une vingtaine d'enfants, dont notre père, y sont élevés en collectivité. Malheureusement, les jalousies et les difficultés nourries par le quotidien de la vie en communauté y deviennent de plus en plus pesantes
Peut-être est-ce une des raisons pour lesquelles cette histoire est tombée dans l'oubli, et que personne n'avait pris la peine de nous la raconter jusqu'alors. Pourtant, beaucoup d'intellectuels, d'artistes et d'hommes politiques y ont fait leurs armes : Jacques Julliard, Jean Lebrun, Ivan Illich, Chris Marker, Jacques Delors et aussi
Emmanuel Macron. C'est grâce à leurs récits et confessions que nous avons pu renouer avec notre histoire : transformer un idéal difficile en récit familial et politique. »
L. et H. Domenach
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L'enfance (de Saint-Augustin) est contemporaine des dernier sursauts de la force romaine ; son âge mûr verra -le 24 août 410- les remparts de Rome succomber devant les wisigoths d'Alaric (...) il devait mourir 20 ans plus tard dans sa ville épiscopale d'Hippone assiégée par les vandales. (...) Toute la vie de Saint Augustin se déroule sur cet arrière-plan, et c'est là, pour le lecteur d'aujourd'hui, la première valeur de son enseignement : il nous apprend, par son exemple, un art de vivre par temps de catastrophe. (...) C'est en méditant sur la chute de la capitale du monde civilisé, de cette Rome qui s'était crue éternelle, qu'il a élaboré un de ses chefs-d'oeuvre où s'entrelacent deux thèmes : celui de la caducité radicale des civilisations et celui de la vocation surnaturelle de l'humanité, et qui demeurent le traité fondamental de la théologie chrétienne de l'Histoire.
: la santé d'une discipline scientifique exige de la part du savant une certaine inquiétude, le soucis de prendre conscience de son comportement, un certain effort de connaissance des problèmes relevant de la "théorie de la connaissance "impliqués par celui-ci.
Le "sens historique" devint une caractéristique de la mentalité occidentale.
(Depuis le XIXe)
Parodiant la maxime platonicienne , nous inscrirons aux frontons de nos propylées :"Que nul n'entre ici s'il n'est philosophe" - S'il n'a d'abord réfléchi sur la nature de l'histoire"
Parodiant la maxime platonicienne, nous inscrirons au fronton de nos Propylées : « Que nul n'entre ici s'il n'est philosophe » s'il n'a d'abord réfléchi sur la nature de I'histoire et la condition de l'historien : la santé d'une disci- pline scientifique exige, de la part du savant, une certaine inquiétude méthodologique, le souci de prendre conscience du mécanisme de son comportement, un certain effort de réflexion sur les problèmes relevant de la « théorie de la connaissance » impliqués par celui-ci. [p.9]
J'imagine le lecteur assez déconcerté : plus nous accumulons de témoignages en faveur de l'antiquité tardive, de son originalité, de sa fécondité, plus s'estompe à ses yeux l'image traditionnelle de la fin du monde antique. Il est bien vrai que l'historien est embarrassé lorsqu'on lui demande d'apporter un témoignage ayant directement enregistré l'événement. C'est un fait, les contemporains de l'écroulement de l'Empire romain d'Occident n'en ont pas pris conscience.
Nous avons peine à comprendre un tel zèle : pour nous, modernes, la rhétorique est synonyme d'artifice, d'insincérité, décadence.
Dans le temps où nous sommes, chaque jour arrive afin de cesser d'exister. Chaque heure, chaque mois, chaque année, tout passe. Avant d'arriver, ce sera ; une fois arrivé, cela ne sera plus.
La foi chrétienne implique toute une théologie de l'histoire : elle affirme l'existence et l'application progressive dans le temps d'un plan conçu et disposé par Dieu pour réaliser le salut de l'homme, rachetant le péché, et conduisant la création à la fin voulue par le Créateur : la véritable histoire de l'humanité est cette histoire du salut, Heilsgeschichte ; la réalisation de ce plan divin, de cette oikonomia, implique toute une pédagogie divine, une éducation graduelle de l'humanité devenant peu à peu capable de recevoir la révélation plénière et le don de l'Esprit. (pp. 74-75)
Je disais et je pleurais dans toute l’amertume d’un cœur brisé. Et tout à coup j’entends sortir d’une maison voisine comme une voix d’enfant ou de jeune fille qui chantait et répétait souvent : « PRENDS, LIS ! PRENDS, LIS ! » Et aussitôt, changeant de visage, je cherchai sérieusement à me rappeler si c’était un refrain en usage dans quelque jeu d’enfant ; et rien de tel ne me revint à la mémoire. Je réprimai l’essor de mes larmes, et je me levai, et ne vis plus là qu’un ordre divin d’ouvrir le livre de l’Apôtre, et de lire le premier chapitre venu.
(Les Confessions)