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Citations de Erckmann-Chatrian (189)


On descend rarement dans ce défilé, car le Blutfeld a quelque chose de sinistre, surtout au clair de lune d'hiver. Les gens instruits du pays, le maître d'école de Dagsburg, celui de Halzach, disent qu'en cet endroit s'est livrée la grande bataille des Triboques contre les Germains, lesquels voulaient pénétrer dans les Gaules sous la conduite d'un chef nommé Luitprandt. Ils disent que les Triboques, des cimes d'alentour, précipitèrent sur leurs ennemis des masses de rochers, les broyèrent là-dedans comme dans un mortier, et que de ce grand carnage, la gorge a conservé le nom de Blutfeld (champs du sang). On y trouve des pots cassés, des fers de lance rouillés, des morceaux de casques et des épées longues de deux aunes, en forme de croix.

2150 – [Le Livre de poche n° 5075, p. 118/119]
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J'aurais voulu lui faire comprendre qu'un véritable artiste est aussi quelque chose de respectable ; que ses oeuvres traversent parfois les siècles et font l'admiration des générations futures, et qu'à la rigueur, un tel personnage peut bien valoir un conseiller, y compris la perruque. 
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 Kasper, me dit-il à l'oreille, te voilà riche ! Jusqu'à présent, tu n'as poursuivi que de vains fantômes... L'amour, les plaisirs et les arts ne sont que de la fumée... Il faut être bien fou pour s'attacher à la gloire... Il n'y a de solide que les terres, les maisons et les écus placés sur première hypothèque... Renonce à tes illusions... 
La vision de cette nuit singulière me paraît signifier que si la terre, les vergers, les prairies ne passent pas, les propriétaires passent !... Chose qui fait dresser les cheveux sur la tête si on y réfléchit sérieusement.
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L'État ne peut pas employer tous les bacheliers que l'Université fabrique chaque année, un grand nombre restent sur le pavé. Que peuvent faire ces malheureux avec leur grec, leur latin et leur philosophie? Rien du tout! On n'en veut pour commis ni dans l'industrie ni dans le commerce; ils sont déclassés, irrités, et naturellement trouvent tout mal.
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En classe, nous parlions de harangues, de discours, d'Athènes, de Rome. Nous comparions Démosthène, le dialecticien terrible, à Cicéron, le pathétique ; l'oraison funèbre des guerriers morts dans la guerre du Péloponèse, de Périclès, par Thucydide, à l'oraison funèbre du grand Condé, par Bossuet. On bataillait, on se disputait. (...) M. Perrot, assis au milieu de la salle, ses grosses lunettes sur le front et le nez en l'air, excitait les uns et les autres ; et quand par hasard l'un de nous trouvait un argument nouveau, une réplique décisive, il se levait comme transporté d'enthousiasme (...)
A la fin, quand la cloche sonnait la sortie, l'excellent homme fermait la discussion, et toute la classe tombait d'accord que ces anciens-là savaient écrire et parler. (...) et nous aurions été bien heureux de pouvoir assister à quelques unes de ces fameuses discussions, où tous les citoyens écoutaient d'un bout de la place à l'autre, et jusque sur les toits en terrasse, les terribles lutteurs aux prises pour ou contre la guerre à Philippe, les lois agraires, l'arrestation des Gracques et d'autres grandes mesures semblables.
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Lorsque Zacharias Kobus, juge de paix à
Hunebourg, mourut en 1832, son fils Fritz Kobus,
se voyant à la tête d’une belle maison sur la place
des Acacias, d’une bonne ferme dans la vallée de
Meisenthâl, et de pas mal d’écus placés sur
solides hypothèques, essuya ses larmes, et se dit
avec l’Ecclésiaste : « Vanité des vanités, tout est
vanité ! Quel avantage a l’homme des travaux
qu’il fait sur la terre ? Une génération passe et
l’autre vient ; le soleil se lève et se couche
aujourd’hui comme hier ; le vent souffle au nord,
puis il souffle au midi : les fleuves vont à la mer,
et la mer n’en est pas remplie ; toutes choses
travaillent plus que l’homme ne saurait dire ;
l’œil n’est jamais rassasié de voir, ni l’oreille
d’entendre : on oublie les choses passées, on
oubliera celles qui viennent : – le mieux est de ne
rien faire... pour n’avoir rien à se reprocher !
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-- Paris! ville antique, ville sublime, s'écria Weiland avec une ironie poignante; Paris idéal, Paris sentimental, ouvre tes larges mâchoires : voici venir, par tous les points de l'horizon, du liquide et du solide pour renouveler tes esprits animaux. Mange, bois, chante et ne t'inquiète pas du reste; la France entière s'épuise pour te nourrir.
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Pauvres fées, bientôt vous n'aurez plus d'abris ! Nos bois disparaissent. La civilisation empiète chaque jour sur le domaine de la nature et, je le crains, une nuit ou l'autre, l'homme, dans sa chasse cruelle aux vestiges du passé, vous délogera sans pitié du roc où vous tournoyez encore, sans qu'une voix amie s'élève pour protester contre cette proscription impie, contre cette spoliation barbare. Dansez donc, danser vos rondes silencieuses ! Mais, de crainte de vos ennemis en éveil, enveloppez-vous d'un voile de brume et cachez vos derniers bonheurs dans l'ombre mystérieuse où nul œil haineux ne découvrira jamais les suprêmes joies de vos occultes assemblées. (p.206 - France Loisirs)
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Adieu donc, vivez en paix dans l’honnêteté et la justice ; tout le reste n’est rien !…
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M. Picot et moi, debout à côté d’eux, nous étions graves, recueillis, nous rappelant tous les deux des joies semblables dans le lointain de la vie ; de ces joies qui ressemblent, au milieu des douleurs sans fin de l’existence, des chagrins, des inquiétudes, à ces étoiles brillantes qu’on voit toujours luire derrière les nuages ; les nuages passent, sombres, tristes, ils vont, ils viennent, et l’on se dit : – l’étoile est là… toujours là ! – Aux moments les plus sombres, elle reparaît éclatante et limpide. Ainsi de l’amour et de son souvenir !…
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Je me disais que les lois de l’Éternel sont impénétrables ; je m’écriais en moi-même : « Que votre sainte volonté soit faite, ô Seigneur ! » sans pouvoir obtenir la résignation de mon cœur, car l’extinction de la beauté, de la jeunesse, de l’amour, de tout ce qui donne et fait aimer la vie, est en quelque sorte contre nature ; notre faible esprit ne peut le concevoir.
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Que voulez-vous, ça me suivait partout ; ça m’entrait tout doucement comme une vrille dans le cœur… Je n’en pouvais plus !… Je la voyais toujours : au bois, au village, derrière la haie de leur jardin, dans les blés, à sa fenêtre… À la fin j’ai vu qu’elle était comme moi, monsieur Florence ; sans nous chercher, sans nous dire un mot, sans nous regarder, sans avoir l’air de nous connaître, nous étions partout ensemble.
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Il m’écoutait tout rêveur. Nous avions repris notre route et je lui racontais la magnifique collection de pétrifications que j’étais en train de faire. Il ne répondait pas, et me dit seulement à la fin : « Vous êtes bien heureux, monsieur Florence, vous aimez toujours quelque chose. - Oui, j’ai d’abord eu mes fleurs, lui répandis-je, et puis mes insectes ; maintenant, j’ai mes fossiles. » Je souriais, réjoui par l’ombre et par le vin que je venais de boire. « Vous êtes heureux ! », reprit-il tout pensif.
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Ah ! l’idée de Dieu peut seule nous soulager dans de pareils moments, l’idée de Celui qui récompense la vie du juste, et qui le recueille dans son sein, après le travail pénible, les chagrins et les soucis supportés avec courage en ce monde.
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lorsque Zacharrias Kobus,juge de paix à Henebourg,mourut en 1932,son fils Kobus,se voyantà la tète d'une belle maison sur la place des Acacias,d'une bonne ferme dans la vallée de Meisenthâl,et de pas mal d'écus placés en solide hypothèques,essuya ses larmes ,et se dit avec l'Ecclésiaste:"Vanité des vanités,tout est vanité!"Quel avantage a l'homme des travaux qu'il fait sur terre ? une génération passe et l'autre vient ; le soleil se lève et se couche aujourd'hui comme hier; ...
_le mieux est de ne rien faire ...pour n'avoir rien à se reprocher; .......
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En rentrant à la maison, je dis à Marie-Anne que M. Jean m'avait prié de l'accompagner le lendemain à Lutzelbourg. Nous soupâmes en silence. Les enfants allèrent se coucher; et songeant alors qu'il fallait partir de bonne heure, je tirai de l'armoire mes habits du dimanche, une chemise blanche, des bas de laine, mon feutre et mon manteau. Marie-Anne m'aidait, les enfants dormaient bien, leur couverture sur le nez. Enfin, tout étant prêt, rangé sur une chaise en bon ordre, nous nous mîmes au lit, causant quelques instants du froid qu'il ferait avant le jour et des précautions qu'il fallait prendre.
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La guerre va mal, Hullin, nous avons tout le monde contre nous, on ne veut pas de notre Révolution, vous le savez comme moi. Tant que nous étions les maîtres, que nous remportions victoire sur victoire, on nous faisait bonne mine ; mais, depuis nos malheurs de Russie, ça prend vilaine tournure.
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Je ne sais pas ce que les camarades étaient devenus. Les uns avaient pris à droite, les autres à gauche, comme dans une église ; car toutes ces salles superbes aboutissaient les unes dans les autres, toujours avec la même beauté. Emmanuel et moi nous allions seuls ; il me disait :
– Tout cela, c’est le bien de la nation, Jean-Pierre. Il faut tout respecter… C’est notre bien !…
 
Je lui répondais :
– Ça va sans dire ! Nous l’avons gagné, et si ce n’est pas nous, ce sont nos pères, les bûcherons, les vignerons, les marchands, les laboureurs, tous ces malheureux qui travaillent et suent du matin au soir pour l’honneur de la France. Nous serions bien bêtes de gâter notre propre bien. Et nous serions des gueux d’avoir l’idée de rien prendre, puisque c’est à tous.
 
J’avais des idées pareilles, qui m’élevaient l’esprit et me faisaient voir les choses en grand ; mais j’ai bien reconnu par la suite que ce n’étaient pas les pensées de tout le monde, ni le moyen de s’enrichir. Enfin, j’aime pourtant mieux être comme cela.
 
Et regardant de la sorte ces richesses, nous arrivâmes au fond, dans une autre salle en travers de la nôtre. Je ne saurais pas dire si c’était la salle du trône, ou la chambre à coucher de Louis-Philippe. Elle était plus large que la première et moins longue, éclairée par les deux bouts, remplie de peintures, et sur la gauche, dans l’épaisseur du mur, se trouvait une niche en forme de chapelle, recouverte de tentures à franges d’or. Dans le fond, entre les tentures, je voyais une sorte de lit ou de trône. Emmanuel et moi nous ne voulûmes pas entrer, pensant que cela ne convenait pas.
 
Nous étant retournés au bout de quelques instants, nous vîmes devant une table ronde et massive en marbre rose, un homme assis, qui mangeait un morceau de pain et du fromage dans un papier. Nous ne l’avions pas vu d’abord. C’est pour vous dire combien ces salles étaient grandes, puisqu’un homme ne se voyait pas, en entrant du premier coup d’œil. Emmanuel lui dit :
– Bon appétit !
 
L’autre, avec un chapeau à larges bords et une camisole brune, la figure pleine et réjouie, le fusil en bandoulière, lui répondit :
– À votre service !… Tout à l’heure nous irons boire à la cave.
 
Il riait et clignait des yeux.
Dans ce moment, on commençait à entendre un grand murmure dehors, un tumulte, des coups de fusil. Nous allâmes regarder aux fenêtres ; c’était la grande masse du peuple qui s’approchait au loin sur la place du Carrousel avec défiance. Nous pensions :
« Vous pouvez venir sans crainte ; on ne vous gênera pas ! »
 
Et songeant à cela, nous continuions à marcher lentement, regardant tout avec curiosité. Nous arrivâmes même dans un théâtre, où la toile du fond représentait un port de mer. Plus loin, nous entrâmes de plain-pied sur le balcon d’une chapelle ; la chapelle était au bas, avec des vases d’or, des candélabres et le saint-sacrement. Il y avait des fauteuils, et, sur le devant du balcon, une bordure en velours cramoisi. C’est là que Louis-Philippe écoutait la messe. Comme nous étions fatigués, nous nous assîmes dans les fauteuils, les coudes sur ces bordures. Emmanuel alluma sa pipe, et nous regardâmes longtemps cette chapelle avec admiration.
 
À la fin il me dit :
– Si quelqu’un m’avait annoncé hier, quand cinquante mille hommes défendaient les Tuileries, que je fumerais aujourd’hui tranquillement ma pipe dans l’endroit où la famille du roi, la reine, les princes, venaient entendre la messe, jamais je n’aurais pu le croire.
 
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Au milieu de ces pensées, je repris le chemin de la maison, la bretelle de mon vieux fusil rouillé sur l’épaule. Jamais l’idée ne me serait venue que la bataille continuait encore le long des quais ; que M. le duc de Nemours avait oublié de prévenir les municipaux de suspendre leurs charges, et de leur dire qu’ils en avaient assez fait, qu’il n’était plus nécessaire de massacrer les gens ! Eh bien, en repassant par la place du Châtelet je les vis encore là, prêts à charger. Leurs chevaux tremblaient sous eux de fatigue et de faim, eux-mêmes grelottaient de froid ; mais la rage d’entendre crier : « Vive la ligne ! À bas les municipaux ! » durait toujours.
Presque toute la troupe de ligne s’était alors retirée vers l’Hôtel de ville et les Tuileries.
Sur le pont Saint-Michel, un brancard marchait lentement, deux hommes le portaient. Presque tous les autres blessés de la rue Saint-Martin allaient à l’Hôtel-Dieu. Dans la rue de la Harpe quelques femmes entourèrent le brancard. Moi je tombais de fatigue, et j’entrai dans le caboulot, où je mangeai seul au bout de la table.
Mme Graindorge paraissait désolée ; elle me dit que pas un seul d’entre nous n’était venu dans la journée, et que M. Armand lui-même avait fini par s’en aller, en criant qu’il ne voulait pas passer pour un lâche !
Pendant qu’elle me racontait cela, je tremblais de froid ; mes habits, ma chemise, mes souliers, tout était trempé, et seulement alors je sentis qu’il fallait me changer bien vite : mes dents claquaient. Je sortis dans la nuit noire et je courus à la maison. Le portier, en me reconnaissant sur l’escalier, me cria :
– Eh ! monsieur Jean-Pierre, vous en avez fait de belles ! vous êtes signalé dans tout le quartier. On est venu demander de vos nouvelles.
Et comme il était sorti sur le pas de sa loge, en apercevant mon fusil il s’écria :
– Ah ! ah !… Je pensais bien… On va venir vous agrafer !
– Celui qui viendra le premier, lui dis-je en ouvrant le bassinet, n’aura pas beau jeu ; regardez… l’amorce est encore sèche.
Il ne répondit rien, et je montai quatre à quatre.
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J'ai toujours professé une haute estime et même une sorte de vénération pour le noble vin du Rhin ; il pétille comme le champagne, il réchauffe comme le bourgogne, il lénifie le gosier comme les liqueurs d'Espagne, il nous rend tendres comme le lacryma-christi ; enfin, par dessus-tout, il fait rêver, il déroule à nos yeux le vaste champ de la fantaisie.
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