Le connaissant vaguement à travers la série Bloqués diffusée il y a quelques années, Gringe, rappeur et comédien a décidément plusieurs cordes à son arc. Serait-il de cette espèce que l'on nomme artiste complet ? Certainement ! Point de jeux d'acteur ou de musique, le rappeur troque son micro contre le stylo, arme de répartie massive. Récit poétique et mélancolique, l'homme invite son frère Thibault à la confidence, enfant candide déchu de son piédestal depuis qu'un certain trouble nommé schizophrénie a décidé, dans un élan de surprise, de s'imposer dans sa vie.
Alors, que vaut la plume du comparse d'Orelsan ? Sa voix de papier est-elle fidèle à celle du rappeur ?
Ce récit est celui d'une bataille. D'une bataille d'un frère pour l'autre, d'une bataille contre soi-même, aussi. Guillaume Tranchant, alias Gringe, se revendique d'un esprit rageur et calculateur quand celui de Thibault, vit dans le risque et l'immédiateté. Si les deux frères sont opposables, le lien de la mélancolie se reflète, soufflant sa lente agonie.
A l'adolescence, le comportement du cadet intrigue pour inquiéter complétement. Thibault se laisse happer, cède aux sirènes que l'on pense être la dépression, se révélant finalement schizophrénie chronique. Gringe, lui, se blinde. de loin, fidèle à sa réserve, il observe le ballet familial sans pour autant rester insensible au sort du cadet.
Adultes, les cerveaux déraillent. Quand l'un est interné, l'autre fait une amnésie dissociative. Cet autre, c'est Gringe, bientôt sur le chemin du succès où le syndrome du survivant l'attend. C'est dans le regard des autres, changé, que commence son propre sabordage. D'une plume incendiaire, il raconte le tourbillon artistique, parfois mi conscient, toujours en recherche de l'existence immédiate, refusant catégoriquement d'imposer sa réussite à ce frère figé dans l'inertie.
Sincérité crachée sur le papier, il explique les instituts médicaux, le personnel, la rage et la frustration, prêtant parfois son stylo à ce frère poète, voyageur et photographe. Les deux voix s'entremêlent peu, mais assez pour se demander parfois qui raconte quoi, ébauche d'une schizophrénie fraternelle.
Témoignage de la culpabilité d'un frère, de son amour aussi, le récit subjugue par son honnêteté malgré une structure parfois défaillante.
Un énorme merci aux éditions HarperCollins France pour cette découverte !
Quelle est la pâtisserie associée à ce livre ? Réponse sur le blog !
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