Légers flocons de neige
quelle merveille
au clair de lune
Que d'excitation !
les mochi fleurissent
dans les branches du saule
Mochi : galettes de riz rondes, très minces et parfois légèrement colorées. On en décore les branches des saules au nouvel an pour s'attirer les faveurs des dieux.
Vole loin dans la brume
envole-toi loin loin dans la brume
oiseau libéré
On libère les oiseaux domestiques le quinzième jour du huitième mois au cours d'une cérémonie religieuse, hôjôe. On les libérait aussi à l'occasion d'une cérémonie funèbre.
J' avance en rampant
de sous la passerelle
s'envole un coucou
Il s'agit d'une passerelle suspendue, très instable. Nous pouvons imaginer la profondeur de la vallée, l'instabilité de la passerelle et la fragilité de l'homme. Ce haïku rappelle un haïku de Bashô :
Un pont suspendu - la vie est enlacée -
de lierre grimpant
Petits moineaux
écartez-vous, écartez-vous,
Sieur Cheval passe
Les tortues n'ont pas de cordes vocales mais les paysans pensaient qu'elles pouvaient chanter
La tortue aussi
veut bien annoncer l'heure
sous la lune du printemps
Il était d'usage que, le jour du nouvel an, un serviteur aille puiser la nouvelle eau, ou recueillir l'eau de pluie tombée la dernière nuit de l'année.
A ma place
prenant un bain dans l'eau neuve
un corbeau
Se joignant à la brume printanière
s’envolent
les draps blanchis
Au-dessus des montagnes
même au voleur de fleurs la lune
accorde sa lumière
A l'ombre d'un arbre
Un papillon me rejoint
Karma d'une autre âme
"Après sept jours de fugue,
Mon chaton m'est revenu -
Ronron sur ronron !" (p. 62)
(Carnet de l'ère Kyowa, 1803)
On dit ceci,cela
mais ça ne dure pas
bonhommes de neige
nos coupes de saké vide
prenons enfin nos places
pour regarder la lune
Écoutez bien
cette flûte imitant
la voix du cerf
dans ma maison isolée
les mouches aussi
vivent en famille
4. En apparence, ce poème évoque des taillis fleuris, mais remplis d'épines qui gênent la progression des voyageurs sur leur chemin. En fait, sur la route d'un retour à Kashiwabara au début de la quatrième lune de 1791, Issa voit deux femmes parmi les voyageurs du bateau se faire sévèrement repousser par les gardiens de la Barrière de Nakagawa; le batelier lui indique alors, ainsi qu'à deux de ses compagnons de voyage, un sentier dérobé à travers les taillis, et il peut ainsi contourner la barrière sans encombre.
Relatant l'histoire dans son journal de voyage de 1791 (le Kansei Sannen Kikô [K S], il fait semblant d'approuver les consignes du gouvernement qui imposait un strict contrôle des femmes entre Edo et les provinces, mais il note avec ironie:
"(...) vraiment, vraiment, quel magnifique régime nous avons, qui laisse demeurer des zones d'ombres dans les coins, comme lorsqu'on nettoie un récipient carré avec un bâton rond." La littérature de l'époque, et notamment le senryû dont Issa était friand amateur, indique que les citadins d'Edo étaient de longue date passés maîtres en l'art de découvrir les moindres failles dans les innombrables édits du gouvernement.
31. Précédé de la note: "Les puissants et les gens sérieux traitent de désœuvrés les gens comme moi, mais qu'y puis-je?" Inclassable, comme les autres poètes et artistes dans la rigoureuse hiérarchie sociale qu'imposaient les autorités de son époque, Issa est un parasite improductif méprisé des pouvoirs de tous étages comme de ses voisins. Mais il n'a cure de déplaire, et aborde l'année 1806 avec l'un de ces poèmes où apparaît au mieux sa manière si personnelle du "rire dans les larmes": que l'on se moque ou qu'on le morigène, à quarante-quatre ans, il est déjà allé trop loin dans la solitude et la pauvreté pour s'inquiéter plus de l'opinion publique.
S’il y avait un visage lui ressemblant
S’il y avait un visage lui ressemblant,
j’entrerais
dans la danse
// Rakugo
/ Traduction Brigitte Allioux
Pour rafraîchir
mon chapeau de paille
l'ombre d'un arbre
On dit que les grenouilles ont appris l'art de voler à un ermite chinois et qu'elles ont laissé une réputation guerrière horrible dans la grande bataille de Tennôji. Cependant c'est une histoire du passé et maintenant, s'adaptant à notre époque bien gouvernée où la paix est établie, elles vivent en paix avec les hommes.