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Critiques de Loo Hui Phang (197)
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L'imprudence

C'est une jeune femme française, arrivée à l'âge de un an avec sa mère, son père et son frère d'origine Vietnamienne, qui s'étaient exilés au Laos. Elle n'avait que un an à son arrivée à Paris, de toute évidence, elle est parisienne. Seulement son frère lui avait déjà 11 ans à son arrivée et donc n'a pas le même vécu, les mêmes souvenirs, le même enracinement. Au moment où nous est racontée cette histoire, elle a 23 ans, elle est devenue photographe. Alors que son frère lui vit un véritable mal-être, elle est une grande jouisseuse.



Et puis un jour, un appel téléphonique du Laos annonce à la famille le décès de la grand mère ce qui implique le retour de la mère, du frère et d'elle même sur cette terre qui l'a vu naître mais dont elle refuse toute appartenance.



Sa vie rythmée de jouissances, va tout à coup être à l'arrêt. Lors de son séjour aux pays d'adoption de ses parents, elle va créer un joli lien avec son grand-père, elle le découvre, l'écoute quand ce dernier lui confie quelques évènements de sa vie, de sa vie amoureuse d'ailleurs qui fait un écho à la sienne tout simplement.



La construction du roman est originale, il est écrit à la première personne et aussi à la seconde lorsqu'elle s'adresse à son frère dans sa tête bien souvent.



Lui tiraillé par ses deux cultures, elle, femme qui se dit libre ont bien du mal à se comprendre, à communiquer. Mais est-elle d'ailleurs si libre qu'elle le pense ? Chacun d'eux est sous l'emprise d'addiction, quand on est à ce point dépendant pouvons nous prétendre à être libre ?



Pour moi c'est un roman sur la quête d'identité, certes, mais sans vraiment être abouti à mon sens. J'aurai bien aimé entendre davantage la voix du frère par exemple..



Pour être sincère ce roman ne m'a pas transportée car il est trop empreint du déjà lu, des thèmes récurrents ainsi me lasse si j'ose dire. La drogue, le sexe, même si l'écriture peut être sensuelle et poétique, il n' y a rien de positif au final. Est-ce là reflet d'une société en mal d'identité et qui ne sait pas vivre et s'épanouir autrement que dans l'excès ?
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L'odeur des garçons affamés

L'odeur des garçons affamés - ah quel titre !!! Rien que ce titre, dont je ne déflorerai pas ici la signification, m'a poussé vers cet album.



En plus, c'est une collaboration de Frederik Peeters - dont les précédentes créations étaient très appréciables - avec Loo Hui Phang.



Et le graphisme est très plaisant.



Et les quatre cases de la quatrième de couverture avec ce court texte :



"L'Ouest sauvage

Une mission à la dérive

Un type qui rôde

Des Indiens tout-puissants

Un mystère



Et le désir, immense, insolent".



Il n'en fallait pas davantage pour être attiré.



L'odeur des garçons affamés raconte la mission d'une équipée composée de Monsieur Stingley, un géologue aux rêves singuliers de monde parfait, d'Oscar Forrest, un photographe accusé d'escroquerie et en fuite et de Milton, un "gamin" énigmatique. Cette équipée se balade dans le Texas et les territoires des Comanches pour le compte d'une énigmatique organisation**. La mission officielle de l'équipée sauvage est de prendre en photos les Comanches pour les recenser. Et très vite des phénomènes surnaturels entrent en jeu, des fantômes apparaissent, les trois membres de la mission révèlent leur véritable nature et leurs véritables intentions, un quatrième personnage à la figure ravagé et au phrasé particulier, une espèce de "zombi" - c'est celui de la quatrième de couverture - rôde autour de la mission...



S'inscrivant dans le Zeitgeist d'une partie de l'édition, L'odeur des garçons affamés n'est pas pour autant un western même si l'action se déroule dans l'Ouest sauvage, même s'il y a des indiens, des colts, des mustangs, ...



Et il aussi beaucoup question d'un "désir, immense, insolent" mais comme j'ai décidé de ne pas déflorer davantage, c'est à vous de découvrir cette belle histoire.



* dont je ne connais pas les créations.

** et elle le restera.
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Nuages et Pluie

Werner, ancien soldat allemand durant la première guerre mondiale, débarque en Indochine, fuyant son pays et sa culpabilité vers une autre vie.

En effet, Werner ne se remet pas de la mort de son camarade sur le champ de bataille, qui s'est sacrifié pour lui, alors qu'il était marié et père de famille.

Afin de se racheter, il pense que la solution est à son tour de se marier et de fonder une famille.

Cependant, en Indochine, il est considéré comme un étranger, auquel on confie les plus basses besognes. En mode survie, dans un quotidien des plus sombres, il aperçoit une belle jeune femme dont on dit qu'elle est maudite.

Il va alors la rencontrer, assouvir avec elle ses désirs, mais est-ce la réalité ou bien s'agit-il dans les rêves mouvementés de Werner?

L'histoire, tout comme les graphismes sont sombres, le contexte malsain, mais décrit bien aussi la difficulté à se reconstruire après les horreurs de la guerre, sans soutien et dans un environnement et une culture que l'on ne connait pas.

Il me semble que plusieurs lectures sont nécessaires pour pleinement comprendre l'histoire et le message de l'auteur ainsi que s'imprégner du malaise ambiant, en y trouvant néanmoins quelques touches de positif.

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L'odeur des garçons affamés

C’est le titre énigmatique qui m’a attiré en premier : qu’est-ce que ça pouvait être, l’odeur des garçons affamés ? Je me doutais que l’on ne parlait de nourriture.



La deuxième chose qui m’a attirée, c’est le fait que l’histoire se déroule dans les paysages de l’Ouest, au Texas.



Les couleurs de cet album étaient dans des tons très chauds et les dessins ne me déplaisaient pas. Embarqué !



Dès le départ, Stingley le géologue, soulève quelques petits détails qui clochent chez Oscar, le photographe qu’il a engagé pour immortaliser les paysages et les autochtones. Oscar n’est pas aussi net que ses photos et on en saura un peu plus sur lui au fil des pages.



Stingley est, lui aussi, un personnage bizarre, qui se promène souvent les fesses a l’air et le service trois pièces aussi. Sans doute sa mère lui a-t-elle dit qu’il fallait aérer pour les odeurs… En tout cas, j’ai été étonnée qu’il ne se prenne pas un coup de soleil sur sa tchole, son tich, son zeb, son zob, sa bite, son p’tit zizi (qui n’est pas si petit que ça, entre nous, pour celles que ça intéresse).



Ce qui est grand aussi, ce sont ses ambitions : tout raser, extraire toutes les richesses des montagnes, du sol, tout foutre en l’air et surtout, éliminer les Indiens, surtout les femmes et les enfants.



L’autre mystère, c’est Milton, le jeune homme à tout faire. Mystère qui se lèvera plus rapidement pour les lecteurs que pour Oscar… Et puis, dans ses paysages magnifiques, il y a deux personnages troubles : un Indien mutique et souriant et un cow-boy avec une gueule ravagée, sans oublier des chevaux qui disparaissent et que l’on retrouve morts.



Cette bédé est atypique : elle commence normalement et puis ensuite, viennent se greffer des éléments oniriques (jusque là, tout allait bien), puis du fantastique et je me suis demandée ce qu’un tel personnage avait à faire dans ce récit. Non pas qu’il détonne, j’ai déjà croisé un de son genre dans une autre saga, mais dans cette histoire, je n’ai pas compris son rôle, son utilité.



L’auteur n’expliquera pas tout, ne donnera pas toutes les clés pour comprendre le final, laissera des mystères sans réponse, mais au moins, il ne vous prend pas par la main pour vous emmener là où il désire que vous alliez. Ce sera à vous de faire le job. Liberté totale d’interpréter le truc comme vous le voulez. On apprécie la fin étrange ou pas.



Si j’ai aimé les personnages d’Oscar et de Milton, si j’ai aimé ce qu’il se déroule, j’ai trouvé qu’il manquait un petit quelque chose pour que le récit m’emporte. Ou alors, c’est moi qui ai renâclé sans m’en rendre compte quand le truc fantastique est entré dans l’histoire, sans rien y apporter de pertinent.



Trop d’inexplicable n’est pas toujours un problème, il faut juste que tout le reste s’intègre bien dans le récit et n’aient pas l’air tout droit sorti d’on ne sait où, comme si on précipitait la fin et qu’on l’opacifiait un peu plus.



Dommage, parce qu’il y avait des thématiques intéressantes dans cette bédé, de la profondeur et du mystère. Sans oublier deux personnages intéressants et sympathiques.



Une lecture intéressante, sans aucun doute, mais je reste mitigée sur certaines choses. C’est un western fantastique inclassable, ça, c’est sûr !


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L'odeur des garçons affamés

J'ai bien aimé l'ambiance western, le graphisme avec ses couleurs chaudes, et les personnages sont intéressants. Puis au fur et à mesure, le fantastique s'immisce dans cette histoire. Mais voilà, plus la fin approche plus le fantastique prend le pas sur le récit, les étrangetés s'accumulent, se percutent jusqu'à l'overdose, j'ai fini par m'y perdre, certains élément m'ont paru superflus et surtout, je me demandais ce qu'ils venaient ajouter à l'histoire, un peu comme une pirouette pour se sortir d'une impasse scénaristique (comme le chasseur de prime zombie par exemple), mais qui ne règlent pas les questions, au contraire, qui rajoutent de nouvelles interrogations. Au final, cette lecture m'a laissé franchement perplexe,et si parfois j'aime rester dans l'expectative à la fin d'une lecture, ici je n'en ai pas trouvé la justification.
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L'imprudence

Je connaissais l’auteure, Loo Hui Phang, par le biais d’une bande dessinée qu’elle a réalisée avec Frederik Peeters en 2016, « L’odeur des garçons affamés », que j’avais particulièrement aimée.

J’espérais retrouver la fièvre des personnages de ce livre dans ce roman. Hélas, ce ne fut pas le cas… La seule fièvre que l’on trouve dans ce récit est celle qui mène la narratrice de lits en lits, tant elle semble obnubilée par le plaisir sexuel que lui procurent les hommes, même ceux, surtout ceux rencontrés au milieu de la foule et emmenés directement dans une chambre. Alors effectivement, on le comprend vite, ce roman questionne les origines, la narratrice ayant quitté le Vietnam à l’âge de cinq ans, sans connaître réellement ses grands-parents et les lieux de sa prime enfance. Mais de là à excuser cette frénésie sexuelle par le besoin de se démarquer des femmes de la famille, toutes pieuses et soumises à l’Homme, je trouve le raccourci un peu facile.



Ce roman m’a également déçue par son écriture trop éthérée, abusivement abstraite et sans aucune rigueur temporelle permettant au lecteur d’ancrer les informations distillées au fil des pages. C’est dommage car il y a quelques passages très intéressants lorsqu’il est question de l’histoire de la grand-mère Waipo.

Bref, un roman qui n’aura pas réussi à m’intéresser.

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L'imprudence

Comment résister à ce regard, à cette belle jeune femme langoureusement allongée?....La jeune photographe a 23 ans, elle collectionne les aventures, ou plutôt les rencontres amoureuses...Elle aime les hommes, elle aime faire l'amour.

D'origine laotienne par sa mère, chinoise par son père, elle ne ne connait contrairement à son frère que la France, où elle arriva en 1975, bébé dans les bras de ses parents...Elle ne connaît de sa fuite et de son pays d'origine que ce que lui ont raconté ses parents ou son frère. Elle n'en a aucun souvenir.

Elle aime la vie. Lui, ce frère plus vieux de sept ans a quelques souvenirs de ce Laos et de la fuite de nuit vers ce Vietnam. Un frère totalement différent d'elle. Sans ambition et sans passion, il passe ses journées à attendre que le temps s'écoule ; il a récupéré la chambre familiale de sa sœur et n'a pour seul loisir ses shits ...Il avait pourtant toutes les opportunités pour vivre une autre vie, s'il s'en était donné la peine. Champion régional de tennis de table, il aurait pu accéder à des niveaux supérieurs.

Elle au contraire croque la vie à pleines dents. La vie occidentale, une vie bien éloignée de la rigueur familiale.

Trop française, pas assez vietnamienne, selon ses parents....seul son visage trahit ses origines.

Le décès de sa grand-mère, Wàipó restée au Vietnam lui donne l'occasion de rejoindre son pays d'origine, de connaître son grand-père et de vivre quelques jours en total dépaysement.

Les périodes se télescopent, sans dérouter le lecteur, qui effectue ces voyages dans le temps, à partir des propos entendus par la jeune femme, tenus par ses parents ou son frère, jusqu'à nos jours en passant par cette fuite de nuit et cette arrivée en France. Trois temps.

La rencontre avec son grand-père, la complicité de promenades sur le porte bagage du vieux vélo, lui permettra de découvrir ses racines, de mieux connaître, de la voix de cet homme, ses origines. De mieux se connaître et se comprendre. Là-bas, sa mère perdra son autorité, elle redeviendra la fille de son père et lui obéira.

Rencontre émouvante également avec une jeune femme vietnamienne de son âge. Deux vies différentes et pourtant complices

Roman sur les origines, l'intégration dans une culture différente, la mémoire, la filiation.

Un bon moment de lecture!
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Nuages et Pluie

Werner, soldat allemand rescapé de la première guerre mondial, erre en Indochine avec sa cicatrice située au niveau du cœur. Il doit la vie à un frère d’arme, Georg qui s’est sacrifié et a pris la balle mortelle à sa place. Werner se sent coupable de la mort de son camarade et ami, qui était père de famille. Il pense qu’il a une dette envers lui et se met en demeure de fonder une famille. Il est tâcheron, vit de petits boulots mais les colons français le déteste. Il s’arrête alors dans une petite ville du Laos quand il trouve enfin une embauche dans une usine appartenant à une riche et puissante famille chinoise. La manufacture ressemble étrangement à une forteresse et les hommes qui y œuvrent semblent avoir perdu leur humanité, vidés de leurs sentiments, devenu des outils, des mécaniques. Dans la ville, tout le monde craint la famille que l’on dit maudite. Les patrons auraient une fille frappée d’un mal étrange. Elle ne pourrait vivre que la nuit, les rayons du soleil lui seraient mortels. Werner, ne logeant pas dans le dortoir des ouvriers mais dans un petit pavillon situé dans le jardin de ses employeurs, aperçoit la jeune femme au bord de l’eau et tombe sous le charme. Il s’approche d’elle, devient son amant dans la clandestinité. Quand un autre Européen, un Hongrois, rejoint à son tour le personnel de l’usine…



Entre onirisme et mysticisme, les auteurs nous emmènent dans un étrange voyage où la beauté et l’horreur se côtoient. Werner vit avec sa conscience qui a pris l’apparence de Georg, avec qui il converse. Il partage ses doutes, ses espoirs, ses peines et ses joies. Il est atteint psychologiquement, la guerre, ça ne laisse pas les esprits ni les corps intacts. Désespéré de trouver l’amour, c’est alors que la jeune femme, la fille de ses maîtres, lui apparaît comme un songe. Rêve t’il ou est-il dans la réalité. Il rencontre enfin l’amour, la paix mais il lui est impossible de le vivre au grand jour. L’usine est comme une barrière, les murs sont des tabous, dressés contre l’amour, la mixité des origines, des sexes, et s’érigent en des barrières sociales, protégeant le monde des exploiteurs des misères ouvrières. Les auteurs nous comptent tout le poids de la rancune, de la haine, du racisme, de l’intolérance. Ils nous montrent aussi la déshumanisation d’une société asservie à l’esclavage de l’ultra capitalisme. Le conte se veut à la fois moderne, social, romantique et emprunt de tradition. Le trait ressemble aux estampes japonaises, revisitées à la sauce contemporaine, panachées entre l’Asie et l’Europe. Les tons sont pastels, lumineux quand ils expriment le bonheur, sombres quand ils expriment le pessimisme. La beauté donne naissance à l’horreur, le bonheur au malheur. Tout est équilibre. Du désespoir naît l’espoir et réciproquement. Le récit est profond, hautement symbolique et ésotérique. Il m’a touché, m’a ouvert à la réflexion. Je pense que je vais devoir le lire à nouveau car il ouvre la porte à beaucoup d’interprétation, un peu comme le petit prince de Saint-Exupéry dont la perception se mue en fonction de votre âge, de votre expérience, de votre état d’esprit. Complet et complexe, le livre terminé, même fermé, reste ouvert, comme une blessure de guerre, cicatrisée mais avec ses douleurs fantômes, ses traumatismes. Il y a de la haine, de l’amour, avec une pointe d’érotisme. Même ce dernier est ésotérique, symbolique. Ce livre traduit la tradition en modernité, avec comme levier l’humanisme et comme point d’appui notre passé, notre histoire, avec ce qu’elle compte de plus sordide. Avec cette ouvrage, nous effleurons le chef-d’œuvre. Je suis touché et ému de l’avoir lu. Un roman graphique qui vous ouvre le cœur et l’esprit.

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L'imprudence

Bien heureusement : la force d’un livre ne se compte pas au nombre de mots ! Car oui, l’Imprudence, de Loo Hui Phang, est un livre court, mais c’est un livre vif et percutant ! Se sauver, se construire, aimer quand on a été déraciné : comment et à quel prix ?



L’auteur nous entraîne entre la France et le Laos, pays que la narratrice a quitté à seulement 1 an, avec ses parents et son frère aîné, et où elle retourne suite au décès de sa grand-mère Waîpo. Il est donc question dans ce livre, d’exil, d’identité, de recherche de liberté. Et d’incompréhension entre la narratrice et son frère. Chacun a en effet vécu l’exil de façon opposée. Ce dernier a choisi un exil paisible (en apparences du moins), ne remettant pas en question ses racines et les coutumes qu’elles portent, et ne comprenant pas les choix de sa sœur, qui a préféré arracher son indépendance et s’affranchir de racines où elle ne se reconnaissait pas. Mais chacun est déraciné ou plutôt pas vraiment enraciné, et se réfugie dans des addictions pour survivre dans cet entre-deux mondes : l’un à travers la drogue, l’autre à travers un rapport très fort au corps. Le retour au pays sera l’occasion pour la narratrice se mieux se comprendre, de trouver des réponses, et d’apaiser son addiction au sexe.



La force du livre, où du moins ce qui m’a le plus frappé, réside cependant surtout dans la façon dont le sujet est traité.



Tout d’abord, l’auteur révèle une plume engagée : la narratrice ne se cache pas, elle emprunte le JE. Tout comme, elle interpelle très directement son frère à qui s’adresse ce livre. Elle le nomme directement TU. Cette forme de dialogue lui permet de lui écrire des choses qu’elle ne parvient pas à lui dire, mais constitue également un dialogue, une réflexion, avec elle-même. Je, Tu… et la grand-mère Waîpo (qui signifie tout simplement grand-mère en mandarin).



Ensuite, une plume tantôt enragée, tantôt poétique, et des phrases ciselées qui donnent du rythme et de la force au récit. Aucune économie de mots ici. La douleur ressentie par la narratrice face à l’incompréhension de son frère est décrite avec fougue : « Je ne suis qu’une enfant pervertie par l’exil, et ne récolte que ton amertume » lui crie-t-elle. Une plume également très scénographique, qui provient sans doute de la formation de scénariste et réalisatrice de Loo Hui Phang. La narratrice est d’ailleurs (comme par hasard… !) photographe et l’écriture est en effet également souvent imagée, quasiment photographique, comme médium d’une ouverture au monde mais aussi d’une ouverture à soi. Il y a du Duras dans cette écriture.



Enfin, une plume courageuse qui sert parfaitement le propos de cette quête de liberté. Car oui, il aura probablement fallu du courage mais aussi un peu d’égoïsme salvateur à la narratrice pour oser chercher sa liberté et son identité à travers son corps mais aussi à l’autre bout du monde à travers ses racines familiales jusque-là inconnues. Tout comme il en a probablement fallu à sa grand-mère, 60 ans auparavant. Deux très beaux portraits de femmes qui se ressemblent beaucoup malgré l’écart générationnel : toutes deux emplies de soif d’aimer, et de choisir qui aimer.



Un cri d’amour donc à son frère. Un cri d’amour aussi à sa famille restée au Laos. Et un cri d’amour bien sûr à la vie. Est-ce cela l’Imprudence ? Comme le définit si bien Loo Hui Phang, un « abandon aveugle à toute forme de désir ». N’est pas aussi une définition de la liberté ? « Le geste total, l’imprudence, je l’ai commis aussi…. ». Vous l’aurez compris, un livre coup de cœur !



Lecture réalisée dans le cadre des 68premieresfois.
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L'imprudence

Loo Hui Phang nous offre un premier roman à la langue magistrale et où tous nos sens se réveillent.



La narratrice nous narre l'histoire de sa famille qui a fuit le Laos, sa relation conflictuelle avec son frère, ses nombreux amants... À la mort de sa grand-mère maternelle, sa mère, son frère et elle retournent au Laos pour l'enterrer. Seul membre de leur famille restant dans la maison familiale, son grand-père. Ses retrouvailles seront l'occasion d'apprendre des secrets familiaux, d'en apprendre plus sur l'histoire qui unissait son grand-père et sa grand-mère et de tenter de renouer avec son frère.



L'auteure évoque tous les problèmes qu'ont certains enfants issus d'une double culture : la perte de la langue maternelle, la volonté de ne parler que dans sa langue maternelle, la difficulté de s'intégrer dans une autre société, la culpabilité d'être parti, le fait de paraître tel un étranger au moment de revenir au pays. L'auteure se sert de cette soeur et de ce frère pour exprimer tous les conflits intérieurs qui peuvent naître d'une double culture. La soeur a quitté le Laos à l'âge d'un an, elle parle un vietnamien bredouillant, a quitté sa famille une nuit, et ne se sent ni laotienne ni vietnamienne quand elle rentre au pays, et elle est perçue comme une étrangère par les locaux. Son frère quant à lui a quitté son pays à l'âge de douze ans, ne s'en est jamais remis, la culpabilité le rongeait de n'être auprès de ses proches. Il avait tout pour réussir mais a tout lâché du jour au lendemain, s'enfermant chez ses parents et menant une vie à base d'herbe et de jeux vidéos.



La narratrice est très touchante, on voit qu'elle aime sa famille, mais qu'elle ne peut s'empêcher de mettre une certaine distance avec eux. On lit ses doutes, ses tiraillements, son amour.



L'auteure utilise une langue très puissante, chargée de poésie et d'images. C'est une langue vive, incisive, qui se saisit d'un détail et le décortique jusqu'à l'os. Les mots vibrent et virvoltent. C'est beau. La narratrice interpelle souvent son frère en utilisant le "tu", nous plongeant au coeur de cette relation touchante. Le récit oscille entre imprudence et impudeur.



Un très beau roman où la langue est reine.
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Nuages et Pluie

Werner était un soldat allemand de la première guerre mondiale, blessé de guerre, il se retrouve au Laos, à travailler dans une étrange entreprise. Les traits sont fins, le dessin brut et les surfaces de couleurs très profondes et intenses, avec des pages pleines de nuances subtiles, de bleus, d’ocres et enfin de rouges pour les moments érotiques. Les couleurs, comme le récit, sont chargées de grande sensualité, elles font office de rimes et d’allitération pour cette poésie de lumineuse. C’est un conte à l’ambiance orientaliste, avec une note d’érotisme, une fable philosophique sur la vie, la jouissance et la mort... grave et beau.
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L'odeur des garçons affamés

L'odeur des garçons affamés est vraiment une création étrange. J'ai été attiré par la couverture, avec cette caravane passant dans un canyon et le couleurs ocres. J'ai aussi été intrigué par la 4ème de couverture, assez énigmatique finalement et troublante avec la présentation graphique de l'un des personnages.



L'action se déroule au Texas, en 1872. La guerre de Sécession vient de se terminer. Il faut explorer et conquérir de nouveaux territoires, toujours aller vers l'Ouest, toujours à la recherche d'une nouvelle frontière à repousser. Nous suivons une caravane composée de trois hommes. Le géologue Stingley qui a pour projet de répertorier toutes les populations rencontrées (autant humaines qu'animales) mais aussi les ressources géologiques. Il es accompagné par le photographe Oscar Forrest, de Manhattan, véritable dandy à la tenue un peu décalée par rapport à la rudesse des territoires traversés. Le dernier membre de l'expédition est le jeune fermier Milton, venu du Kansas.



Autour d'eux, jamais très loin, évoluent des Comanches qui ne veulent pas céder leurs terres, veulent protéger leurs terres ancestrales et leur culture. Ils sont là en observation.



Milton et Oscar semblent vouloir cacher quelque chose, cacher une partie de leur histoire. Ils semblent vouloir fuir quelque chose, eux aussi sont à la recherche d'un new deal, comme pour se refaire une virginité ou seulement oublier ce qu'ils ont été avant. Oscar semble troublé par le très beau Milton, jeune éphèbe à la superbe plastique.



Oscar a fait sa fortune et sa réputation en faisant croire qu'ils pouvaient faire apparaître des revenants sur des photos mais il a dû fuir quand la supercherie a été découverte.



Notre trio est suivi à la trace par un comanche qui semble veiller. Mais veiller sur quoi et sur qui ? De plus un étrange personnage suit la caravane, personnage très inquiétant, ressemblant à un mort vivant, à un personnage semblant sorti des enfers.



Qui sont ces étranges personnages ayant des attitudes vraiment étranges ? Stingley semble se plaire les fesses à l'air et faire ses croquis sans pantalon, sans caleçon. Oscar avouera une attirance pour les garçon, attirance peu prisée sur à cette époque dans le milieu machiste des conquérants de l'Ouest, qui ne peuvent être que des hommes, des vrais. Milton est en fait u personnage qui se cache sur les frusques d'un garçon de ferme. Qu'a t-il vécu avant ?. Qu'a t-il subi ? Que fuit-il ?



L'histoire est plus que troublante. Est-ce un western ? Est-ce une nouvelle présentation de la conquête de l'Ouest ? Est-ce une ode aux amours homosexuels ? Est-ce une dénonciation de la spoliation des habitants primitifs et de l'oubli de leur culture ? Il y a une forme de magie dans cette histoire, un peu de chamanisme avec une relation particulière de certains hommes avec les chevaux, avec la nature ? D'où vient ce don en particulier celui de Milton ? Est-ce que l'on évoque ici une forme de spiritisme ?



Difficile de classer cette BD. Plusieurs portes restent ouvertes. Comme c'est un one-shot, aux lecteurs de se faire leur opinion et de trouver la suite ou la fin qui leur convient.



Le scénario de Loo Hui Phang est fort bien construit mais très troublant. Le trouble est renforcé par le trait et les couleurs de Frédérik Peeters. J'ai beaucoup aimé les contours cernés qu'il nous propose et les couleurs m'ont rappelé l'ocre de Zion Park en Utah ou bien celles du Colorado provençal, Rustrel.



Bref, une BD inclassable mais faut-il toujours trouver des cases à ce que l'on lit ?





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L'imprudence

Roman court, très court, d'à peine 160 pages d'une écriture fluide et poétique, décrivant l'exil et le besoin de comprendre ses racines.  



La narratrice, une jeune femme photographe d'origine vietnamienne apprend le décès de sa grand-mère et  rejoint son frère et sa mère à  Savannakhet  au Laos



Partie à cinq ans avec ses parents, sur la barque d'un passeur, elle était revenu à trois reprises (re) découvrir ses grands-parents et nouer des liens avec sa grand-mère.



Son frère ne s'est jamais vraiment remis de cet exil survenu à ses 11 ans, et, à 33 ans, c'est la première fois qu'i l revient. Sa séparation d'avec sa grand-mère fut pour lui un déchirement qu'il ne peut réparer.



Au cours des trois semaines de ce séjour, chacun d'eux devra retrouver des repères, faire la paix avec le passé et leur présent et recréer les liens nécessaires avec leurs origines. 



La tendresse qui unit la narratrice à son grand-père ; la découverte de leurs similitudes, toute en pudeur et en non-dits est un fort moment de ce roman 



Une auteur que je découvre et dont je vais rechercher les autres productions  
Lien : http://les.lectures.de.bill...
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L'imprudence

Avec L’imprudence de Loo Hui Phang, j’aborde ma quatrième lecture de cette sélection des 68 premières Fois…

Un roman très court, à peine 140 pages sur le deuil, l’exil, le retour aux origines et le désir de liberté…



Plusieurs clés de lecture me sont venues à l’esprit tandis que je lisais ce livre…

D’abord, il y a le récit à la première personne, un JE omniprésent, direct, brut, sans tabou ni détours : la narratrice pose un regard aiguisé et photographique (c’est son métier) sur les évènements quand, à l’occasion du décès de sa grand-mère, elle revient au Laos que sa famille a fui quand elle n’était qu’un bébé. Face à elle, comme en miroir inversé, se profile la silhouette imprécise de son frère aîné qui, lui, a vécu douloureusement l’expatriation de sa famille ; c’est le TU à qui elle s’adresse, dialogue fantasmé parce qu’impossible dans la réalité.

Puis il y a l’anonymat des personnages, père, mère, frère, grand-père, narratrice dont les prénoms ne seront jamais cités ; seule la grand-mère décédée semble se démarquer mais Wàipó signifie grand-mère… et ainsi, elle ne déroge à ce flou que pour mieux nous y engluer.

Tous les protagonistes révèlent une manière d’être étrangers à la fois du point de vue du pays quitté, du pays d’accueil, des choix de vie... J’ai été frappée par leur profonde solitude. Chacun cherche des réponses et s’invente sa propre uchronie… Le récit porte en filigrane des questions sur la transmission générationnelle.

Enfin, il y a le corps libéré, le sexe vécu de manière instinctive et débridée, comme si la liberté et l’émancipation ne pouvait passer que par cette forme de jouissance, par l’assouvissement du désir…



Un peu perdue, convaincue que je passais à côté de quelque chose, j’ai voulu creuser un peu autour de l’imprudence, terme qui véhicule parfois une légèreté qui ne m’a pas paru être ici le propos.

Je retiens une hardiesse exacerbée, une témérité sans frein qui est à l’origine tant de la fuite en avant des parents que de la conduite à risque de leur fille. Parmi les casseroles que traine la famille, figurent en bonne place diverses maladresses, attitudes hasardeuses, relations compliquées…



Voilà un court roman qui me laisse perplexe.

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L'odeur des garçons affamés

Décor grandiose aux couleurs chaudes pour une histoire qui se passe au Texas, façon western aux thèmes classiques. Fuite, poursuite, amour, indien. Un mélange d’ingrédients réussi à savourer.
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L'Art du chevalement

Galerie du musée et galerie de la mine: approche improbable, mais curiosité titillée...



Je ne sais si je viens de lire un témoignage pour l'histoire et le travail des mineurs et de leurs compagnons à quatre pattes ou une apologie de la culture des masses par l'intermédiaire de l'Art. Sans doute les deux et l'idée d'évoquer une région par l'association de son passé industriel et de sa vitrine culturelle qu'est le musée Louvre -Lens, donne un grand écart insolite.



Le petit mineur qui passe le miroir et se retrouve piégé dans les salles d'expositions revisite le quotidien des hommes de la fosse. Chaque oeuvre du musée évoque au visiteur et son cheval, un souvenir, un récit, une confrontation de vue et de vie.

Les oeuvres s'animent, papotent (ca me rappelle un film, en moins cocasse).

On apprend des événements historiques concernant les puits, des choses plus surprenantes aussi ( la visite "réelle" des mines du nord insiste sur l'image des chevaux ne remettant plus les sabots en surface. Effet de guide touristique accrocheur?).



Le dessin m'a déplu. Comme le thème, il est minimaliste, épuré, cherchant l'élégance esthétique dans le dénuement. Mais je suis passée à coté de la poésie recherchée. Il se dégage même une certaine tristesse de ces pages en demi teinte et le trait pictural ne rend pas justice aux oeuvres. Cet album graphique va-t-il donner envie de visiter la région? Pas sûr.



Au final, pas très enthousiaste.

Il est temps de faire une petite escapade en direct au musée de Lens, pour me faire un vrai plaisir. Quant au devoir de mémoire de la vie de la mine, des associations d'anciens mineurs nous la conservent vivante par la visite des puits.



Mes remerciements à Masse Critique et les Editions Louvre/Lens pour ce partenariat.





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Délices de vaches

Franchement, peut-on résister à des petites vaches aussi craquantes sur une couverture ? Je n'ai même pas essayé.



L'ensemble de ce bref roman est à l'avenant : graphisme adorable, et surtout beaucoup d'humour. Vous n'apprendrez rien sur les vaches, les vraies. Mais vous aurez des réponses très amusantes à des questions inattendues. Comment cueillir les vaches puis les cuisiner en soupe (elles, pas leur viande) ? Comment fonctionne la boîte qui fait 'Meuh' lorsqu'on la retourne (gare aux contrefaçons !) ? Tout est fantaisiste, loufoque et riche de bonnes trouvailles rigolotes. Deux chapitres sont particulièrement savoureux : la soupe de taches de vache, et le sorbet.



Dommage que ce tout petit livre (10x12) n'existe pas en format album : dessins et textes sont minuscules. Pas pratique pour montrer les images aux jeunes auditeurs et lire en même temps, alors que chaque détail est travaillé.



Pour faire rire dès 4-5 ans.
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L'imprudence

Une jeune femme en recherche d'elle-même, via les corps à corps, déchirée entre le désir furieux possible dans sa vie d'occidentale et les injonctions d'une famille vietnamienne du Laos figeant chacun : mère, père, et frère qui ne se remet pas de son départ forcé enfant pour aller vivre dans une France restée terre étrangère.

Je n'ai pas vraiment aimé la narratrice mais c'est un roman qui parle d'une chose peu dite et qui a mis des mots sur une sensation confuse que j'avais enfant en compagnie de copines de classe ayant ces origines : un quelque chose qui les faisait vivre comme à côté de nous... J'ai aimé cette porte entrouverte, imprudente, dans cette famille en souffrance, que nous livre l'autrice.
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L'imprudence

Dans L’Imprudence, l’autrice s’adresse à son frère. Tous les deux nés au Laos d’immigrés vietnamiens, ils sont partis avec leurs parents vivre en France très jeunes. La différence, c’est que son frère a passé ses 10 premières années au Laos, alors qu’elle-même a entièrement grandi en France, c’est une Occidentale.

Ainsi, l’héroïne a décidé très tôt de vivre sa vie loin des attentes familiales conservatrices, que ce soit au niveau professionnel ou sentimental.



Ils sont adultes lorsque leur grand-mère décède. L’occasion pour eux de revenir dans leur pays natal et de mesurer une fois de plus leurs différences culturelles : en ce qui la concerne, malgré son physique, il n’y a rien à faire, elle ne peut pas être prise pour une Vietnamienne, elle ne parle même pas la langue couramment. L’autrice voit son frère souffrir de cette culture perdue, de la déchirure de son enfance lorsqu’il a quitté son pays et le reste de sa famille.



Dans ce roman, l’autrice analyse tout cela : les racines, la culture, le poids des attentes familiales aussi. C’est un roman très court, qui ne m’a pas vraiment embarquée. C’était intéressant, mais l’autrice était peut-être un peu trop détachée de sa propre histoire pour que je sois touchée, même si j’ai eu l’impression de bien comprendre ce qu’elle vivait.

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L'imprudence

Ça commence, chaud comme la braise et puis... hop, je n'y ai plus compris grand chose. Une confrontation à ses origines, un dialogue difficile avec un frère, un deuil...



Dommage, j'ai pas trouvé le chemin de ce livre qui m'a vite perdu.
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