
FRANCIS JAMMES
J’aime l'âne si doux
marchant le long des houx.
Il prend garde aux abeilles
et bouge ses oreilles ;
et il porte les pauvres
et des sacs remplis d'orge.
Il va, près des fossés,
d'un petit pas cassé.
Mon amie le croit bête
parce qu'il est poète.
Il réfléchit toujours.
Ses yeux sont en velours.
Jeune fille au doux coeur,
tu n'as pas sa douceur :
car il est devant Dieu
l'âne doux du ciel bleu.
Et il reste à l'étable,
fatigué, misérable,
ayant bien fatigué
ses pauvres petits pieds.
Il a fait son devoir
du matin jusqu'au soir.
Qu'as-tu fait jeune fille ?
Tu as tiré l'aiguille ...
Mais l'âne s'est blessé :
la mouche l'a piqué.
Il a tant travaillé
que ça vous fait pitié.
Qu'as-tu mangé petite ?
- T'as mangé des cerises.
L'âne n'a pas eu d'orge,
car le maître est trop pauvre.
Il a sucé la corde,
puis a dormi dans l'ombre ...
La corde de ton coeur
n'a pas cette douceur.
Il est l'âne si doux
marchant le long des houx.
J'ai le coeur ulcéré :
ce mot-là te plairait.
Dis-moi donc ma chérie,
si je pleure ou je ris ?
Va trouver le vieil âne,
et dis-lui que mon âme
est sur les grands chemins,
comme lui le matin.
Demande-lui, chérie,
si je pleure ou je ris ?
Je doute qu'il réponde ;
il marchera dans l'ombre,
crevé par la douceur,
sur le chemin en fleurs.
De l'angelus de l'aube à l'angelus du soir, 1897
Pourquoi avoir baptisé Scotland Yard, c'est-à-dire "Cour d'Écosse", le quartier général de la police ? Simplement parce qu'il occupa, durant plus d'un siècle, l'emplacement où se dressait jadis le palais servant de résidence aux rois d'Écosse en visite chez les monarques anglais. Ce n'est qu'un 1967 que Scotland Yard abandonna ces locaux vétuste - sans pour autant changer de nom - et vint s'installer dans les deux tours ultra-moderne de Victoria Street.
ALFRED DE MUSSET : TRISTESSE
J'ai perdu ma force et ma vie,
Et mes amis et ma gaîté;
J'ai perdu jusqu'à la fierté
Qui faisait croire à mon génie.
Quand j'ai connu la Vérité,
J'ai cru que c'était une amie;
Quand je l'ai comprise et sentie,
J'en étais déjà dégoûté.
Et pourtant elle est éternelle,
Et ceux qui se sont passés d'elle
Ici-bas ont tout ignoré.
Dieu parle, il faut qu'on lui réponde.
Le seul bien qui me reste au monde
Est d'avoir quelquefois pleuré.
Pour avoir un teint de pêche
Écrasez une pêche bien mûre dans de la crème épaisse et faites une application quotidienne, en massant pour faire pénétrer en profondeur. Ce mélange très hydratant, que vous garderez au réfrigérateur, nourrira votre peau et vous donnera ce fameux teint de pêche dont rêvent toutes les femmes (p. 358)
Cette espèce [coprin noir d'encre] est comestible et de bon goût, mais attention ! Quand on consomme ce Coprin en même temps que des boissons alcooliques, même du vin, on peut être sujet à des phénomènes anaphylactiques très déplaisants : œdème de Quinck, gonflement de la langue, difficultés respiratoires, troubles de la vue. Ces malaises sont dus à une substance dans ce Coprin identique au produit chimique utilisé en Suède sous le nom d'Antabus pour dégoûter les alcooliques.
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CHARLES BAUDELAIRE : LA MORT DES AMANTS
(les fleurs du mal)
Nous aurons des lits pleins d'odeurs légères,
Des divans profonds comme des tombeaux,
Et d'étranges fleurs sur des étagères,
Ecloses pour nous sous des cieux plus beaux.
Usant à l'envie leurs chaleurs dernières,
Nos deux coeurs seront deux vastes flambeaux,
Qui réfléchiront leurs doubles lumières
Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux.
Un soir fait de rose et de bleu mystique,
Nous échangerons un éclair unique,
Comme un long sanglot, tout chargé d'adieux ;
Et pour plus tard un Ange, entrouvrant les portes,
Viendra ranimer, fidèle et joyeux,
Les miroirs ternis et les flammes mortes.
Un trou noir et rond qui perce le fond d'une falaise, l'eau d'un torrent engloutie soudain dans les entrailles de la terre par une trappe naturelle, le jaillissement d'une rivière sortant toute formée de quelque arcade de la roche, ce sont autant d'indices prouvant l'existence sous nos pas, dans le sol, de vastes cavités, les profondeurs vides des cavernes et des gouffres.
....
Cette poésie à l'état pur, faite de cristal et d'eau, plongée dans des ténèbres absolues, peut-être est-ce là le grand attrait des cavernes d'Europe.
En 1961, le médecin de la sixième expédition soviétique fut contraint de s'opérer lui-même d'un appendicite aigue. Il était en effet le seul praticien présent, mais il reçut l'aide de deux assistants qui tenaient écarteur et miroir. L'opération réussit.
Pour répondre à la question posée en tête de ce chapitre : « Les champignons sont-ils des plantes ? », les développements précédents laissent entendre que la réponse n'est pas simple ; elle ne l'est pas, en effet. Dépourvus de chlorophylle, de feuilles et de racines, munis d'un appareil végétatif (le mycélium) formé de filaments souterrains d'une simplicité biblique contrastant avec l'infinie variété des fructifications, soumis à des lois de reproduction qui n'appartiennent qu'à eux, les champignons ont toujours déconcerté les classificateurs.
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CORNEILLE : LE CID (Acte 1 Scène 4)
O rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie !
N'ai-je donc tant vécu que pour cette infamie
Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers
Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?
Mon bras, qu'avec respect toute l'Espagne admire,
Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire,
Tant de fois affermi le trône de son roi,
Trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ?
O cruel souvenir de ma gloire passée,
Oeuvre de tant de jours en un jour effacée !
Nouvelle dignité, fatale à mon bonheur,
Précipice élevé d'où tombe mon honneur !
Faut-il de votre éclat voir triompher le Comte,
Et mourir sans vengeance ou vivre dans la honte ?
Comte, sois de mon prince à présent gouverneur :
Ce haut rang n'admet point un homme sans honneur
Et ton jaloux orgueil, par cet affront insigne,
Malgré le choix du Roi, m'en a su rendre indigne.
Et toi, de mes exploits glorieux instrument,
Mais d'un corps tout de glace inutile ornement,
Fer, jadis tant à craindre, et qui dans cette offense
M'a servi de parade et non pas de défense,
Va, quitte désormais le dernier des humains,
Passe, pour me venger, en de meilleures mains.