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Critiques de Andrzej Stasiuk (52)
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L'Hiver

Un petit recueil (84 pages) trouvé dans une déchèterie près de chez moi.

Un auteur polonais inconnu,que j'ai apprécié.

Cinq courtes nouvelles où les personnages nous sont décrits comme des rêveurs ,qui n'attendent rien de la vie ,et qui vivent chaque minute lentement, en prenant le temps d'imaginer, de rêver (cf la 1ère nouvelle : Pawel),en étant détaché au maximum de toute chose matérielle.

Pages de vie,où le concept de matérialisme est mis à mal .

Une autre façon de vivre ,une autre philosophie de vie ,beaucoup de poésie, Et si c'était cela la vie?

-Extrait du dernier chapitre de la nouvelle : L'hiver

《 Au village,tout finit par s'éteindre.L'obscurité des temps anciens descend lentement pour envelopper Edek ,Kaczmarek ,Hrynacz et les autres....Elle gomme les événements et fait disparaître les choses.Elle revigore les corps.Il en était ainsi au commencement du monde ,et il en sera ainsi pour que nous ne mourions pas de surabondance. ( Page 84).

À recommander.⭐⭐⭐⭐

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Mon bourricot

On sait de suite que l'on aura pas un roman classique. Peut-être est ce le thème, ou le dialogue homme- machine qui rend la lecture particulière, ou les origines de l'auteur ? Cependant, même si on comprend qu'il s'agit d'une satyre, d'une caricature de la corruption, du manque de liberté des régimes soviétiques, on se perd dans l'énumération des noms de villages, des noms de personnes et dictateurs, des noms de voitures.... On aurait aimé finalement rester dans ce dialogue homme machine et laisser ladite machine s'exprimer.. Un livre trop confus pour résumer.
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L'Hiver

Retrouver l'écriture d'Andrzej Stasiuk, c'est s'immerger dans un texte de sensations olfactives, auditives et visuelles.

Peu d'écrivains savent, comme lui, restituer les perceptions et bruits quotidiens dans les mots, les rendant à ce point réels. Peu d’écrivains savent à se point rendre perceptibles les petites choses que l’habitude d’être côtoyées rend invisibles. C’est comme si le "zoom" du regard se portait sur des êtres ou des choses qui restent souvent à l’écart chez les autres auteurs, sur ces choses qui se font si discrètes qu’elles en sont oubliées.

Tout comme peu d'écrivains parlent des gens modestes avec autant de bienveillance, autant d'attention, autant d’acuité.



Dans ses textes, il y a toujours des horizons contemplés, des paysages regorgeant de couleurs contrastées, des bruissements du vent dans les aulnes, des ciels annonciateurs de bouleversements, des éclats de lumière du soleil ou plus tamisés de la lune à travers les brumes d’hiver, il y a des senteurs, la terre qui exhale son humidité, le feu de bois qui enveloppe tout. On s’immerge par tous les sens dans le texte. Et tout devient palpable comme réel.

Les voitures sont toujours bringuebalantes, on croise toujours les déambulations de chiens qui errent ou alors qui sont à l’attache et on les entend aboyer. Ils sont toujours présents.



Cinq courtes nouvelles pour cinq histoires de vie, ou plutôt moments de vie car si leur existence passée est évoquée en quelques mots rapides, c'est surtout l'instant présent qui est célébré.

Les personnages de ces courts textes ont tous en commun d'habiter la solitude. Ils ont tous en commun de s'y blottir presque douillettement comme ils se blottissent dans leur vie réglée, pleins de rêves d'évasion ou de projets qu'ils ne réaliseront pas car il faudrait partir, changer... et ils ne le veulent pas. Ils s’immobilisent dans un quotidien qui ne leur promet aucune surprise.

Ce sont des "oubliés" qui vivent à la marge de la vie sociale, un jour là, un jour ailleurs, ils parlent peu, ils écoutent ou ils se parlent à eux-mêmes… Ils sont comme détachés du monde, ne vivant qu’en leur propre compagnie, leurs propres pensées et c’est en cela qu’ils sont seuls même si entourés d’autres personnages.

Et s’ils ne sont pas encore "oubliés" comme ce camelot qui fait les marchés, ou celui qui "vit" en déambulant dans la ville le jour du marché, justement, ils parlent de ceux qu’ils croisent, et qui, eux, le sont, "oubliés", leur vie s’étire, chaque jour semblable au précédent, rythmée par les habitudes, rythmées par l’obligation de vivre… Comme ils écoutent plus qu’ils ne parlent, ils s’incarnent dans les paroles entendues, ils imaginent une vie autre comme s’ils se racontaient un conte… et les contes ne se réalisent pas.



Oubliés dans leur existence, ils ne le seront pas dans nos pensées, un fois la dernière page tournée...

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Le Corbeau blanc

Un roman traitant de 5 jeunes hommes polonais, dans la trentaine, désabusés et qui partent à vau l'eau.



Ils se font vites rattrapées par la rudesse de l’hiver du pays. Nous sommes loin de brûler la Marzanna. Le corbeau blanc qu’ils entrevoient, dès le début de leur aventure, est peut-être un signe annonciateur.



On y rencontrera de la masculinité et de son immaturité. Un seul parmi eux est gay mais ce sera très secondaire, il a été élevé comme un homme, comme les autres.



Le roman se lit comme si c’était un thriller car il y aura débordement, comme vous pouvez le deviner: on traversera une « frontière » qu’on aurait peut-être pas dû.

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Mon bourricot

Alors... un auteur inconnu de mes services, alors qu'il semble très connu pour ses récits de voyages dans l'est de l'Europe et l'Asie, dixit la quatrième. Un auteur qui désarçonne aussi. D'abord le bourricot n'est pas un âne, mais une vieille voiture au kilométrage incertain que l'on devine longuet. Pas pimpante extérieurement, mais bichonnée question mécanique, c'est le style de l'auteur, elle doit être fiable. Ensuite je n'ai pas eu droit directement à un 'récit de voyage', mais des considérations sur le passé de l'auteur et sa passion pour les voitures, son grand regret étant de n'avoir pu devenir mécanicien. Les noms et détails techniques de vieilles 'caisses', j'ai un poil effleuré, je ne connais pas. Et puis la façon de voyager est ici particulière, genre 'on part'. Son compagnon de route est un certain Z, dont il vient de faire la connaissance, et qui parle russe, ça peut se révéler utile.



"Aller aussi loin que possible, et revenir. Sans vraiment me soucier du but. Quelque part en Asie. Rouler jusqu'à une limite infranchissable, la Chine, par exemple, (...). Voici comment je voyais la chose: le monde défile derrière le pare-brise, un air étranger entre derrière la vitre baissée, une poussière inconnue s'amasse, on ne sait pas de quelle manière ça finira. Je voulais que ce soit comme autrefois, quand on prenait un autobus, puis un autre, puis un autre, pour se retrouver dans un endroit inconnu."



Quand même l'idée est de passer en Ukraine, direction le Kazakhstan. L'auteur aime bien la Russie, parfois il divague sur le passé des peuples européens et russes, c'est un peu fou dans sa tête.



En tout cas, il n'aime guère les nouvelles voitures. "Il y a juste un voyant qui s'allume, et c'est mort. Il faut s'arrêter et appeler, s'il y a du réseau. (...) Maintenant on se prend un nid-de-poule et aussitôt tous les voyants s'allument, dix-huit airbags se déclenchent, le satellite annonce un danger mortel et en cinq minutes rappliquent une ambulance, les pompiers et une cellule psychologique."



Pas de tourisme, de descriptions, pas trop en tout cas, les kilomètres défilent. La police veille, elle cherche la faille, l'erreur, et le Kazakhstan n'est pas l'endroit idéal pour discuter.



On laisse nos deux voyageurs en plein voyage. A suivre?



"Z. a ouvert l'oeil et m'a demandé:



- Où on est ?



- A cent bornes de Kobda.



-Il y a quoi à Kobda?



- Difficile à dire;



- Il y avait quelque chose en chemin?



- Pas vraiment.



- Si tu veux, je peux conduire, a-t-il proposé."
Lien : https://enlisantenvoyageant...
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Mon Europe

'Suis retombé sur ce livre trouvé d'occasion au début des années 2010, un ouvrage contenant deux essais, l'un de l'écrivain polonais Andrzej Stasiuk, l'autre de l'ukrainien Yuri Andrukhovych, deux regards sur l'Europe centrale, deux voix pourtant si proches dans ce qu'elles racontent, deux cœurs qui battent à l'unisson, le même rythme, lent et saccadé, mélancolique et habité du souvenir du XXème siècle. On est en effet à la fin des années 90 lorsque les deux écrivains livrent ces textes. Ils y décrivent une Europe qui n'arrivent pas à se détacher de son passé ; il y racontent une Europe centrale déchirée, envahie, conquise et reconquise encore et encore et des peuples qui ne savent plus où regarder, où aller, ni parfois même quoi penser. L'Amérique ? Une illusion. "Mon Europe" est comme un écho de ce qu'écrivait Baudelaire à 17 ans : "Je sens venir la vie avec encore plus de peur. Toutes les connaissances qu'il faudra acquérir, tout le mouvement qu'il faudra se donner pour trouver une place vide au milieu du monde, tout cela m'effraie." Et Andrukhovych de son côté : "Et voila comment tu vis, tout entier fait de peur et de tristesse, d'épitaphes, de cimetières en ruine, de ton héritage centre-européen, d'alcool et de bravade, d'un lourd baroque emberlificoté, d'anecdotes noires, de l'herbe de l'oubli, de Yorick, de Calderón ("Qu'est-ce que le songe ? Toute la vie n'est-elle pas un songe ?" crie à l'unisson un drôle d'être humain, Dostoïevski). Et Dieu serait le Ver-Tcherv pour nous ?!"
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Mon bourricot

Les bourlingueurs férus de mécanique auto vont se délecter en lisant ce récit de voyage de Andrzej Stasiuk.

Le trajet d'Ukraine, Russie, Kazakhstan et Mongolie va se dérouler dans un "bourricot", voiture de douze ans d'âge rafistolée pour tenir le choc devant des kilomètres à parcourir.

Pour l'auteur, le voyage n'a pas lieu d'avoir un but. Avec un langage de mécanicien soucieux d'une machine bien rôdée, il vagabonde dans un paysage où l'espace et la respiration apportent un sentiment d'existence .

Stasiuk n'est pas ce voyageur épris de liberté ou d'émerveillement. Il taille la route avalant les distances, errant avec son compagnon de voyage Z au milieu de camionneurs ou seuls dans des déserts de sable. Il échange très peu avec la population locale mais donne tout de même son opinion sur le pays traversé.

En tant que Polonais il perçoit la Russie comme une ogresse et une prison tandis que sa vision du Kazakhstan m'a paru plus apaisée même si son passé a fait immergé des khans sanguinaires tel Tamerlan.

Peu de monuments sont admirés sauf le mausolée de Yasawi et les portraits sont aussi peu soulignés sauf les flics véreux rencontrés en fin de voyage.

Loin du récit de Nicolas Bouvier et son "Usage du monde" aux accents poétiques, Stasiuk fait ressortir de cette longue aventure un sentiment d'amertume, pas du tout envoûter par une odyssée asiatique.

Une impression de fuite en avant, d'insaisissable s'insinue dans le livre rappelant les déambulations d'un passager clandestin de l'existence comme celles de Cendrars.

Voilà un arpenteur arrachant à la route un regard acéré sur le monde.









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Dukla

“Mais en fait je suis censé parler de Dukla… Cela fait quelques années maintenant que j’essaie de trouver une explication à son étrange force. Mes pensées reviennent toujours tôt ou tard vers cette ville comme si elles devaient, dans ses quelques pauvres ruelles, trouver leur assouvissement. Au lieu de ça, elles flottent dans le vide. Rue Cergowska, rue Zielona, rue Nadbrzezna, rue Parkowa, me Podwale, place de la Mairie. Trois rades, deux églises, deux ponts, un arrêt de bus, quelques magasins et le musée de la Fraternité d’armes. Un photographe et deux vétérinaires. Juste ce qu’il faut pour que l’espace humain garde sa continuité, et que l’étranger puisse avoir le sentiment qu’il va dans une direction familière, quand la géographie pure peine à percer sous la topographie”.





Moi j'ai trouve que c'est un peu juste, que ce n'est pas assez. Stasiuk ressasse ici des lieux, des chemins, des routes, des rues, des gens entrevus en passant, dont il ne rapporte pas les dires, les histoires. Juste quelques anecdotes sur ses grands-parents et les mesaventures d'un solitaire qui accumule des pieces de monnaie, doutant de la valeur du papier. Un amoncellement d'images, un verbiage qui ne conduit nulle part, qui ne m'a meme pas conduit a Dukla. Il m'a manque l'interet porte aux personnes, a leurs histoires, a leurs pensees, ce qui faisait le charme de Contes de Galicie, ou il avait reussi a portrayer une communaute et pas seulement un lieu.



Bien sur Stasiuk continue de dominer une belle prose. Par ci par la se detachent quelques paragraphes ou quelques pages sur des couleurs changeantes, sur des odeurs. Quelques souvenirs d'enfance: la cueillette d'ecrevisses, des oiseaux dechiquetant une biche morte, des cigognes gauches dans le fort vent d'Avril, des hirondelles qui meurent dans les tempetes de Septembre, la riviere qui se desseche en ete, et ce que j'ai prefere, les emois religieux de son grand-pere et la cohabitation de sa grand-mere avec les ames-fantomes d’ancetres disparus, un premier emoi amoureux. Mais cela ne m'a pas suffi. La plus grande partie du livre m'a semble d'un virtuosite vaine. Au peintre paysagiste de ce livre, a ses envolees lyriques sur la luminosite de certaines journees d'hiver, je prefere de loin l'homme qui allait a la rencontre de ses semblables, qui les ecoutait. J'avais aime ses portraits, j'aime moins ses natures mortes.



Si cela se peut, je ferai l'impasse, dans ma memoire, sur Dukla, pour mieux y garder les Contes de Galicie. Jusqu'au prochain livre de Stasiuk que je lirai.

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Contes de Galicie

Des contes sur un village oublie de Galicie, des habitants oublies qui cherchent tout le temps quelque chose ou quelqu'un ailleurs, alors que personne ailleurs ne pense a eux ni les cherche pour quoi que ce soit. Une societe vieillissante, qui n'arrive pas vraiment a s'adapter aux changement des temps, aux debuts de la transition politique en Pologne, apres la liquidation des cooperatives agricoles d'etat. Des desherites, perdus dans une Galicie ou les “eternelles" certitudes d'antan fondent comme neige au soleil.



Un village croupissant, traverse par une rue pavee a moitie, limite par deux sites, deux noyaux enblematiques, le coeur et les poumons, l'eglise et le bar. Les petites vieilles noires se fondent dans l'obscurite de l'eglise, les hommes boivent leur amertume dans la grise poussiere du bar.



Des contes sur des personnages et des lieux. Chaque personnage a droit a un conte, mais des le milieu du recueil il y en a qui reviennent hanter ceux des autres, s'y imbriquent et finissent par tisser une trame qui donne a ce livre une semblance de roman.



Tous un peu paumes. Jozek, le petit demerdard, un peu voleur, un peu simplet. Wladek, grand feignant a l'epoque du kolkhoze, qui se decouvre une nature d'entrepreneur. Kruk, le forgeron retraite, et Lewandowski l'esseule, qui racontent inlassablement les insignifiants details de leurs voyages, a Krakow ou a Varsovie. Janek, le bucheron tractoriste, qui partira travailler a l'etranger. le sergent de police Roux, timide, qui reste chez lui a regarder par la fenetre ce qui se passe dehors. “L'element essentiel du service est l'immobilite, pensa-t-il”. Quelques femmes: la vieille Meme, qui pousse des cris pour faire fuir les loups quant elle fait paitre ses chevres. Son mari s'est noye suite a une cuite et six de ses sept filles sont parties. Quand la foudre s'abat sur sa maison, elle murmure, fouillant les decombres brulees: “Dieu est un homme, Dieu est un homme”. Maryska, sa fille, qui se donne a tout le monde jusqu'a ce que Gacek la prenne en main. Mais que lui est-il arrive de grave, et pourquoi met-on Gacek en prison? Mystere.



Et puis il y a Kosciejny, l'abatteur de cochons. Kosciejny, qui sert de fil reliant les histoires de tous les autres, cousant les differents contes en une amorce de roman. Kosciejny: “son air habituel d'epouvantail echappe du jardin. A quarante ans, c'est a ca que ressemblent les hommes maigres dans leur treillis. Leurs traits sont gommes par le temps, mais en vieillissant, reconcilies avec lui, ils retrouvent leurs visages propres. Peut-etre pour que la mort puisse les distinguer”. Un jour gris il entre dans le bar et plante son couteau de boucher dans un voisin qu'il soupconne de coucher avec sa femme, puis se rend directement au poste de police ou le sergent Roux dans son uniforme deboutonne lui dit : “Dieu te garde, Kosciejny ”. Emprisonne, il meurt de froid lors d'une permission, n'ayant droit ni a une sepulture chretienne ni a une messe. Il devient un fantome qui hante le village et s'introduit dans les maisons et les reves de ses habitants. Il parle au sergent Roux et lui promet des tuyaux sur un homicide (s'agit-il de la mort de Maryska?) s'il commande une messe a son intention. Roux, non croyant, entre pour la premiere fois a l'eglise parler au cure etonne. Et il reussit a organiser une grande messe, embarquant de force tous les piliers du bar pour faire foule et meme convaincant Lewandowski a jouer de l'harmonium. Un final d'apotheose mystique. Mais que lui murmurera le fantome de Kosciejny a l'oreille? On ne le saura jamais.



Contes de Galicie. Contes d'un village de Galicie saupoudres de realisme magique. Contes en une langue qui se veut simple et se revele tres poetique. Contes d'une fin d'epoque en Galicie. L'epoque d'antan n'etait pas tres faste mais la fin est pitoyable. Navrante, comme nous le fait ressentir le conte intitule le lieu, qui decrit un carre de terre rasee ou s'elevait une eglise en bois viellissante, demontee pour etre transportee en un musee lointain; un grand espace vide ou traine encore l'air de l'eglise. Son air, peut-etre reste pour toujours au village: “Les tableaux et les objets, c'est ce qu'il y a de moins fascinant dans une eglise; ils rappellent trop le reste de la realite. Ils essaient de s'en arracher, mais y retombent, preuve de la vanite de tout effort. Par contre, l'air enferme dans le cube, l'espace circonscrit par la voute, les murs et tous les details architecturaux, constituent le plus parfait moulage de la langueur. On y entre, on sent un frolement sur la peau, mais tout coule entre les doigts, on peut juste en garder dans les poumons un bref instant”.



Un village, declinant. Serait-il condamne? Je ne pourrais l'affirmer, mais en cette epoque de capitalisme sans freins et sans remords, c'est une possibilite a envisager. Alors lisez ce livre, le livre que lui a consacre Andre Stasiuk, avant qu'il ne disparaisse. C'est tout court. Quelques pages, une rue, quelques maisons, une eglise, un bar, une poignee d'etres oublies de Dieu. Oublies, mortifies, confus, tellement humains… Que ce soit votre b.a. scout de 2022. Vous en serez recompenses.

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Sur la route de Babadag

Un voyage improbable ,dans un monde improbable ou qui semble tel ,un rêve de voyage ! dans les Balkans ,région dont l'auteur est originaire et dont il essaie de fixer comme sur une pellicule, les images , les instants ,fugaces , éphémères. .Une Europe méconnue qui risque de disparaître .

Il la parcourt à un moment où les frontières existent encore et son plus grand plaisir est alors de collectionner les tampons sur son passeport!

Les grandes villes ,comme Budapest ou Varsovie , ne l'intéressent pas ,son regard est attiré par les petits villages, les gens simples ,paysans ,Tsiganes ,chauffeurs de taxis , il veut figer les images ,les odeurs ,les paysages .D'où l'impression parfois de regarder un vieux film en noir et blanc ou des vieilles photos de famille .

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Un vague sentiment de perte

"Un vague sentiment de perte" est un recueil de nouvelles.

Tout petit recueil par le nombre de pages mais grand par les questions qu'il fait naitre, qu'il provoque et les idées qu'il agite dans l'esprit à chaque fin de récit.

Quatre nouvelles, trois ne font que quelques pages mais là encore, c'est comme si l'écrivain avait condensé sa réflexion pour la rendre plus intense, pour rendre les dilemnes davantage palpables et malmener la tranquilité (imaginée !) de l'esprit du lecteur. La dernière nouvelle du recueil représente à elle seule la moitié du livre comme si alors qu'il était toujours allé directement où le sujet peut questionner, dans celle-ci, il avait choisi de prendre son temps pour que les questions se posent au fil des phrases, tout en lisant et pas juste à la fin du récit.

Le thème commun à tous ces textes est la mort.Mais pas la mort en tant que terreur ou effroi, plutôt comme la compagne du quotidioen, l'inéluctable avec laquelle il faut cheminer. Celle qui se pose comme un voile, petit à petit sur les existences et les recouvre doucement de son obscurité. Ce voile à travers lequel la grand-mère du narrateur aperçoit ceux qui sont partis, les écoute parfois et surtout tire de leur présence soudaine une prédiction de l'avenir proche : un peu comme si voir à travers ce voile, c'était être clairvoyant, c'était lire le lendemain à la lumière des présages.

Cette mort, comme un sommeil progressif est cette séparation lente qui emporte cette chienne dont l'existence a accompagné l'écrivain. Il ne reconnait plus vraiment cet animal fougueux avec lequel il a tant joué, avec lequel il a tout partagé. Et pourtant, malgré les aléas de l'âge, il ne veut pas hâter la fin, la choyant pour qu'elle glisse simplement vers un ailleurs dont lui-même se refuse à ouvrir la porte.

Cette mort est aussi le bout de la route de cet ami qui ne se souvient plus de ceux avec lesquels il a temps échangé d'idées, de théorises, ceux avec lesquels, il a argumenté sur tous les sujets... Le voilà devenu mutique, n'abitant que l'intérieur de lui-même et n'offrant plus comme compagnie que l'ombre corporelle d'un esprit qui s'est refermé.

Cette mort, enfin, prévue à cause dela maladie, qui s'pprète à séparer ces deux amis d'enfance. L'un se reprochant sa lacheté et de ne savoir en toute compassion accompagner l'autre. La peur de regarder l'absence qui se personnifie, l'agacement de ne plus recnnaitre l'autre qu'on ne devine plus, quand il ne reste que les souvenirs de voyages, de découvertes partagés, de la vie refusée et celle choisie, quand il ne reste que le son de la guitare pour meubler les silences qui sont de plus en plus nombreux et comment accepter le choix de cet ami qui ajoute à l'abscence , la disparition, la demande d'oubli comme s'il voulait s'envoler loin de ceux qui ont peuplé son existence.



Andrzej Stasiuk nous oblige à méditer, à nous interroger, avec la tristesse et la nostalgie pour compagnes, avec la résignation comme fatalité.





(Septembre 2021)
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Sur la route de Babadag

Un anti voyage touristique, au cœur des Balkans.

En voiture, en autobus ou à pied, Andrzej Stasiuk entraîne son lecteur, aux confins de l’ Europe, dans des villages aux noms improbables, des hameaux perdus ou des camps tziganes.

Il aime se perdre dans les zones frontalières, scrute , avec tendresse, les maisons abandonnées et s’ émerveille devant l’ ingéniosité des roms.

Dans des troquets infâmes, il trinque avec joie en compagnie de personnages épuisés, cabossés ou ivres.

Avec un sens aigu du détail, il dessine , avec délicatesse, des paysages insensés.

J’ ai accompagné, avec plaisir, l’ auteur, dans ses périples enchevêtrés, ses allers-retours continuels, ses souvenirs chaotiques.

J’ ai beaucoup apprécié sa poésie, ses ciels changeants, ses deltas infinis, sa destruction et désintégration.

Ce livre insolite et brillant me rappelle l’ œuvre de Ryszard Kapuscinski, chère à mon cœur de lectrice.
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Mon bourricot

Avec une préférence marquée pour les trous perdus, une bonne dose d’humour désinvolte, un peu de cynisme teinté d’amertume et une grande sensibilité, Andrzej Stasiuk ponctue son récit d’envolées imaginaires.
Lien : https://www.ledevoir.com/lir..
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Mon bourricot

Voyage au milieu du rien de l’ancien empire soviétique : départ de Pologne, traversée de l’Ukraine en évitant les zones de guerre, puis les steppes d’Astrakhan, rejoindre les platitudes désertiques du Kazakhstan… Par des routes défoncées, le racket de la police routière, la désertification politique et administrative, autant qu’agricole. Et aussi les nouveaux riches qui se la pètent dans leurs grosses bagnoles aux vitres teintées, gros lards obèses exposant leurs signes extérieurs de richesse : leur gras et leurs prétentions méprisantes. Voyage au bout de la nuit, il fait moins chaud ! Le transsibérien traverse des steppes herbeuses et la forêt, ici sable et désolation, ce qui convient parfaitement à la “recherche du temps oubliéˮ de l’auteur dont l’écriture cynique, froide, et ses diversions ravissent le lecteur. A recommander aux voyageurs à la recherche de rien !
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Mon bourricot

De la Pologne au Kazakhstan, en passant par la Russie, les tribulations d’un écrivain haut en couleur et toujours le pied au plancher.
Lien : https://www.lefigaro.fr/livr..
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Mon bourricot

C'est un roman de voyage. C'est aussi une déclaration d'amour à la mécanique. On devine dans ces mots un vrai goût pour les mécaniques du temps passé, les boites de vitesses, les différentiels, les Warszawa, les GAZ-69, les Zuk, même les Lada.

Par nostalgie d'un temps plus simple, où l'on pouvait réparer un véhicule avec le système D... avant les contrôles techniques et les boîtiers électroniques. Celui ou on consommait vingt litres aux cent kilomètres...

Et bien sûr, il n'y a plus que l'Est et ses étendues sauvages qui puisse permettre à ces souvenirs de remonter . . . Pologne, Ukraine, Russie, Kazakhstan... en point de mire le Kirghizistan, le Sinkiang...

Une langue directe, simple et qui fait mouche, une traduction très réussie puisqu'on dévore ce roman en quatrième : pas de cinquième sur son âne vert ...
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L'Hiver

Andrzej Stasiuk « L’Hiver » traduit par Maryla Laurent (2006, Noir sur Blanc, 86 p.), cinq nouvelles de la vie villageoise en Pologne. « Au village, tout finit par s’éteindre. L’obscurité des temps anciens descend lentement pour envelopper Edek, Kaczmarek, Hrynacz et les autres… Elle gomme les événements et fait disparaître les choses. Elle revigore les corps. Il en était ainsi au commencement du monde, et il en sera ainsi pour que nous ne mourions pas de surabondance». Tout a fini par se déglinguer et tomber dans une infinie ressemblance. « Aujourd'hui, c'est l'écologie avant tout. Le café sans caféine, la bière sans mousse, le cirque sans lions, le son sans image ». Est-ce que les gens sont plus heureux ? « La peur s'installe dans les cœurs parce que, au bout du compte, l'histoire de l'humanité est celle de notre victoire sur la solitude ».
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Le Corbeau blanc

Andrzej Stasiuk avec « Le Corbeau Blanc » traduit par Laurent Alaux et Agnieszka Zuk (2007, Noir sur Blanc, 320 p.). le livre débute par cette phrase inoubliable « Quel merdier !». Quatre jeunes, paumés, partent en expédition dans les Bieszady, montagnes proches de la frontière ukrainienne, emmenés par Wasyl Bandurko avec Kostek, le Jars, le Petit et le narrateur. Et il y a de la neige, un peu moins que l’alcool cependant. Ils n’ont pas trouvé de but à leur vie, pas sûr qu’il en trouve un à leur expédition. Quant au corbeau, c’est un « corvus corax ». « Ca mange tout. Ca ne croasse pas. Les corneilles croassent. C’était peut-être seulement un albinos ». « Corvus corax albus ». Est-ce le héraut des temps nouveaux, en parfaite opposition avec les corbeaux noirs qui rappellent une veille chanson cosaque en vogue à l'époque soviétique. « Où donc, si loin, as-tu volé ? / Toi, noir corbeau, tu m’as apporté, / Une blanche main baguée. // Une blanche main baguée.../ Je suis sortie sur le perron, / Légèrement, j’ai chancelé. // Par la bague, j’ai reconnu de mon ami, / Sa main que tient le corbeau. // Cette main, la main de mon bien-aimé, / Sans doute, qu’à la guerre, il a été tué. ».
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L'Est

Traduction brillante.

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L'Est

Des portes de Varsovie au désert et à la steppe de Sibérie, de Mongolie et de Chine, c’est l’Est dans toute son étendue géographique qui appelle Andrzej Stasiuk, dans ce récit au titre aussi simple qu’évocateur. Plutôt habitué des fin-fonds de l’Europe centrale et des Balkans, qu’il a décrits dans nombre de ses livres, Stasiuk ne se présente pas comme un fin connaisseur de la Russie et des pays situés au-delà : né en 1960, il ne découvre leurs grands espaces qu’après 2006. Cependant les voyages successifs qu’il y fait, et dont il distille le récit dans ce livre consacré à l’Est au sens large, sont guidés par une interrogation née de son enfance dans la Pologne du temps du communisme : il veut « voir jusqu’où cette idéologie s’était déployée, à quel point elle avait transformé le monde et ce qu’il en était resté. »



Voyage géographique et voyage dans le temps – le sien, celui de sa famille, celui de son pays – s’imbriquent et se répondent dans L’Est pour donner une vision toute personnelle de cet espace et de son histoire au XXe siècle.

-- Retrouvez toute ma chronique sur le lien ci-dessous --
Lien : https://passagealest.wordpre..
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