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Critiques de Celia Levi (57)
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La Tannerie

Comme une sorte d’OLNI….[ Objet Littéraire Non Identifié ] tant ce texte est d’un genre atypique, difficilement classable…



Un roman tout à fait étonnant nous offrant à la fois une radioscopie sociale du XXIe dans la vie parisienne, doublé d’un roman d’apprentissage…sans oublier une promenade magique , continue dans le Paris d’aujourd’hui…à travers les yeux d'une très jeune femme qui aborde sa vie d'adulte !



Une jeune femme, ayant fini ses études, et après un stage en librairie, décide de quitter sa Bretagne natale pour « monter à Paris » , trouver sa voie, un emploi, commencer une nouvelle vie, plus aventureuse…plus valorisante que la vie routinière de province .Ses parents sont agriculteurs…



Jeanne sera embauchée à la Tannerie, nouveau lieu culturel d’avant-garde, qui démarre un projet ambitieux dans un quartier populaire du 19e parisien, entre Pantin, Stalingrad et sa Rotonde, les quais de canal de l’Ourcq…Elle s’immergera dans ce lieu professionnel, observera les uns et les autres pour acquérir de nouveaux codes sociaux…car, si il y a une chose qui n’a pas changé, c’est l’aura, le prestige irradiant de la Ville-Lumière !...Elle se veut plus Parisienne que les natifs de la Capitale…Une sorte de fraîcheur, naïveté rafraîchissantes…nous faisant songer à la fable du "Rat des champs et du rat des villes" !!



Il est aussi beaucoup question de la Solitude en milieu urbain… l’envers de la médaille !!

« Jeanne se mit à réfléchir au sentiment de solitude. Quelque fois cela lui plaisait d'être seule, de se soustraire au regard d'autrui. Elle avait été seule au cours de son existence, peut-être que c'était parce qu'elle était enfant unique, on disait que généralement les enfants uniques étaient des solitaires. Mais depuis qu'elle habitait à Paris, cela lui pesait. Elle s'était mise à rechercher la compagnie des autres, à éprouver un désir fou de les entendre, de savoir comment ils vivaient, ce qu'ils pensaient, elle était prise d'une curiosité insatiable pour eux, elle devait les connaître à tout prix. (p. 107)”



De très belles et très nombreuses descriptions de la Ville, des différents quartiers de la Capitale, au fil des saisons.. !

Une balade ininterrompue dans Paris, ses architectures , ses arrondissements bourgeois ou populaires, nous offrant l’Histoire à chaque coin de rue !



L’auteure nous fait, également, le récit de l’actualité, des mouvements sociaux, de l’émergence du mouvement « Nuit debout » , en 2016, pour réagir contre la Loi Travail !!....L’occasion d’analyser, d’observer notre société, les dérives du capitalisme, de la technologie à outrance.. Notre narratrice reste, malgré sa volonté de trouver sa place dans ce monde, une observatrice, souvent en décallé…perplexe, hésitante…en marge !



Amoureuse de Julien, jeune intellectuel, occupant des responsabilités à La Tannerie…elle se cultive, va aux expositions, par curiosité mais aussi pour acquérir les codes sociaux des Parisiens cultivés ainsi que pour séduire et intéresser Julien…



Au quotidien, les difficultés durables de jeunes diplômés, sous-payés, allant de CDD en CDD…dans un monde de précarités multiples. Célia Lévi aborde tous les aspects de la vie d’une jeune femme dans notre quotidien, souhaitant trouver un travail valorisant, un sens à construire pour son avenir d’adulte responsable… On ne peut que s’étonner ou admirer la lucidité et la maturité de cette jeune écrivaine, qui autopsie « notre monde » de tous les jours : le monde culturel, le monde du travail, la politique, les mécontentements, les dérives multiples, les drames des migrants, des plus pauvres, la protection de la nature, de l'environnement, l'amour des animaux dans notre "monde de brutes" !! etc…





« De toute façon, on vivait dans une société qui sacralisait le travail, n'avait-elle pas remarqué que quand on rencontrait une personne pour la première fois, on lui demandait immédiatement ce qu'elle faisait comme travail, et non ce qu'elle aimait par exemple, comme si le travail définissait l'être. (p. 69)”



Un roman qui m’a d’autant plus semblé proche qu’il mettait en valeur des lieux qui me sont très familiers, que j’ai hantés, arpentés jusqu’à l’été 2000, après 15 années face au Parc de La villette, la Cité de la Musique… les bords de l’Ourq, la transformation d’un quartier mal aimé : entre Paris, le 19e arrondissement, le Canal de l’Ourq, la réhabilitation de quartiers délaissés en lieux branchés… La Rotonde de Ledoux ( à Stalingrad ), les quais de Seine, etc…. sans oublier l’évocation de la Bretagne de son enfance, et de ses parents !



Merci aux éditions TRISTRAM nous offrant un catalogue des plus tonifiants et éclectiques. La couverture de l’ouvrage est à remarquer ; son extrême sobriété de dessin et de couleurs est très évocatrice de « nos solitudes modernes » ….et du noyau central de ce roman.



Cette lecture a été si plaisante, attachante, riche, que , poussée par la curiosité, je me suis empressée de me commander deux autres textes de cette jeune auteure d’origine chinoise : « Les Insoumises » et « Dix yuans un kilogramme de concombres »… toujours aux éditions Tristram…







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La Tannerie

Le journal de la génération sacrifiée



Dans «La Tannerie», son quatrième roman, Celia Levi retrace le parcours d’une jeune bretonne qui va chercher les clés de son avenir à Paris. Et perdre presque toutes ses illusions, entre violence économique et désert sentimental.



Jeanne est un peu perdue. Engagée comme intérimaire à la Tannerie, un immense espace culturel au bord du canal de l’Ourcq à Pantin (derrière lequel on reconnaîtra les Magasins Généraux), elle est chargée de guider les visiteurs, mais manque d'instructions précises et a encore de la peine à s'orienter. Lorsqu'on lui confie la tâche de retrouver un enfant de quatre ans qui a échappé à la vigilance de ses parents, elle est proche d'un fiasco. Mais finalement tout va finir par s’arranger. Elle a sauvé sa place et garanti son emploi pour quelques mois au moins.

Durant l'entre-saison et ses promenades dans Paris, elle a plusieurs fois songé à regagner sa Bretagne natale qu’elle avait quitté pour un stage dans une librairie, mais qui s’est avéré décevant.

La nouvelle saison à la Tannerie va lui permettre de mieux apprivoiser cet espace de 60000m2, de se familiariser avec les défilés de mode, les expos d'art contemporain, le théâtre, le cirque et les soirées festives.

La chronique qui suit va retracer en détail les journées de Jeanne, ses rencontres, ses sorties, sa vie entre le Paris du quartier latin où elle trouvé une colocation et son immense vaisseau culturel installé à quelques pas d’un campement de migrants.

Celia Levi a choisi de nous dévoiler la prise de conscience politique et sociale à partir des témoignages rassemblés, de l’expérience acquise au fil des jours, des discussions qui vont devenir de plus en plus intéressantes: «Jeanne sentait que des bases théoriques lui manquaient, qu’elle n’était pas rompue à l’art du discours. Elle réussissait désormais à intervenir, apporter des précisions, des miettes recueillies ici ou là, mais dès qu’il s’agissait de convaincre ou de réfuter, elle était démunie, tout s’effondrait, n’était plus sûre de rien, pas même de ce qu’elle défendait.»

Elle va vivre sa première manifestation un peu comme une sorte de happening, elle va chercher auprès de Julien et de ses amis les lectures et les arguments pour décrypter cette curieuse société qui n’a guère de mal à poser un diagnostic sur les maux qui la ronge, mais hésite à vraiment les combattre.

Le livre, construit comme un long – trop long? – journal intime, revisite le roman d’apprentissage en plaçant une jeune fille un peu timide et maladroite, mais pleine de bonne volonté, au centre du récit. On la voit chercher les clefs d’un monde dont elle se sent exclue et dont elle aimerait tant pouvoir faire partie. En entendant le récit des aventures amoureuses de ses amies, elle va d’abord s’inventer une relation avant d’espérer pouvoir intéresser quelqu’un. Une éducation sentimentale du XXIe siècle qui se lit avant tout comme le difficile constat de la précarité à tous les étages. Jeanne va longtemps espérer un contrat à durée indéterminée, gage de davantage de stabilité. Une quête dont Celia Levi va faire le symbole de cette génération sacrifiée. Ajoutons que les temps difficiles que nous vivons du fait de la pandémie ne vont sans doute pas arranger les choses…




Lien : https://collectiondelivres.w..
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La Tannerie

Pfiouuuuu….J'ai bien cru que je n'arriverais jamais au bout de cette tannerie, pourtant chaudement recommandée par les critiques et surtout par une de mes libraires préférées. Mon dieu que j'ai peiné pendant cette lecture.



Les personnages évoluent dans un milieu parisien très contemporain et branché. La tannerie est un ancien site industriel de Pantin reconverti en milieu culturel, un lieu imaginaire mais qui ressemble à bien des endroits existants.



Jeanne jeune provinciale arrivée fraîchement de sa Bretagne, a réussi à décrocher un CDD dans ce lieu à la mode. Elle est accueillante (en bref elle indique les toilettes). Emploi précaire et mal payé comme la plupart de ceux qui travaillent dans ce haut lieu culturel. Jeanne est fascinée par ce milieu branché et parisien et rêve de s'intégrer. Elle est amoureuse de son supérieur, beau parleur imbu de sa personne.



Les responsables sont animés de belles intentions (la culture pour tous, l'aide aux migrants installés à proximité, le soutien de Nuit debout etc) mais en réalité ils maltraitent leurs salariés et font bien peu de cas des problèmes du monde extérieur. Tout ce petit monde parle beaucoup mais n'agit pas et se contente de brandir de belles idées jamais mises en pratique.

Le sujet est donc plutôt bien traité et l'auteure a un regard ironique bien vu.

Mais que de répétitions : l'action ne progresse pas et les deux années de Jeanne qui sont décrites dans le roman m'ont semblé interminables !



Et les personnages principaux sont globalement à claquer soit parce qu'ils sont d'une naïveté et passivité incroyables comme Jeanne, soit parce qu'ils sont d'une prétention insupportable. Je ne me suis attachée à aucun…



Voilà un roman intéressant sur le « papier » mais qui au final m'aura fait périr d'ennui

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La Tannerie

Avis des 100 pages



Ce livre doté d’un style d’écriture plaisant, une fois les premières pages lues, on est assez vite plongé dans le decorum mis en place par l’auteure, Celia Levi. La Tannerie, d’où le roman tire son nom, est un grand complexe culturel qui a pris place sur une ancienne friche industrielle à Paris. On peut l’apprécier comme un microcosme de notre société : les différentes classes sociales, les idéaux propres à chacun, …



Le personnage principal de « Jeanne » représente assez fort le stéréotype de la petite ingénue provinciale qui débarque à Paris en n’y connaissant rien. Au fil des jours, elle tente d’en déchiffrer les codes. Je l’ai parfois trouvée un peu godiche et agaçante par son manque de jugeote et cet esprit candide dont elle fait preuve. Peut-être que le reste de l’histoire me la rendra plus sympathique au delà de ces 100 premières pages. Je n’arrive pas à m’y attacher.



Malgré cette animosité à l’égard du personnage principale, j’aime assez bien ce roman. Il n’y a pas de grandes surprises jusqu’à maintenant mais je m’y sens bien et vais donc poursuivre avec intérêt cette lecture.



Ma chronique finale



Ce livre doté d’un style d’écriture plaisant, une fois les premières pages lues, on est assez vite plongé dans le decorum mis en place par l’auteure, Celia Levi. La Tannerie, d’où le roman tire son nom, est un grand complexe culturel qui a pris place sur une ancienne friche industrielle à Paris. On peut l’apprécier comme un microcosme de notre société : les différentes classes sociales, les idéaux propres à chacun, etc. Le personnage principal de « Jeanne » représente assez fort le stéréotype de la petite ingénue provinciale qui débarque à Paris en n’y connaissant rien. Au fil des jours, elle tente d’en déchiffrer les codes. Je l’ai parfois trouvée un peu godiche et agaçante par son manque de jugeote.



Mon ressenti premier s’est finalement poursuivi tout du long de ma lecture. Cette façon stéréotypée d’appréhender la jeune adulte qui quitte tout pour débarquer à Paris, eldorado pour cette petite provinciale, a déjà été vu et revu. Ou bien faut-il l’appréhender comme une satire de cette idée de la métropole et de ses lumières ?



Celia Levi appréhende le lieu culturel qu’est la Tannerie, comme une entreprise, ce microcosme où les tensions contre les fonctions dirigeantes s’exacerbent lorsque les desiderata ne sont pas accordés, où les contrats précaires se multiplient en vue d’éviter les charges et les frais par la direction. Cela est abordé de façon totalement réaliste et le parallèle est évident.



Une fois les 100 premières pages passées, le monde merveilleux de La Tannerie s’effondre petit à petit : les berges sont occupées par des migrants de plus en plus nombreux, le mouvement Nuit Debout se met en place avec de multiples rassemblements et manifestations,… C’est ainsi que l’auteure intègre à sa fiction des événements et faits réels.



J’ai trouvé des longueurs rébarbatives à ce texte. Avec parfois l’impression de lire des pages remplies de descriptions inutiles et futiles de lieux ou de sentiments dans le seul et unique but inavoué de remplir des pages. Autant certains passages étaient intéressants et donnaient du sens à l’histoire, autant certaines pages comportaient des phrases très longues n’offrant aucune plus-value au récit à part provoquer une certaine lassitude auprès du lectorat.



Même si l’idée principale de ce livre était originale, la manière d’en extrapoler des pages inutiles en fait perdre la saveur. Je dois avouer avoir lu certains passages en diagonale, me rendant compte que je n’en perdais aucune information primordiale. Alors que ce livre comporte 377 pages, il aurait pu être épuré et en garder toutes ses qualités et originalités. Ce choix éditorial est bien dommage et risque de freiner certains lecteurs dans leur façon d’apprécier ou non ce livre. Pour un premier roman, j’aurai pu l’ « excuser » mais vu qu’il s’agit quand même du cinquième de l’auteur, je me devais d’en tenir rigueur quant à l’appréciation de ce bouquin.



Bien entendu, toutes ces constatations ne sont que mon humble avis personnel. Je ne souhaite pas l’imposer aux autres lecteurs et c’est la raison pour laquelle je vous conseille de vous faire votre propre avis par la lecture de ce livre.



Lu dans le cadre des Explorateurs de la Rentrée littéraire 2020 du site lecteurs.com
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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La Tannerie

J’ai eu le plaisir de découvrir de titre grâce à ma participation aux explorateurs de la rentrée 2020, vaste opération de découverte des nouveaux livres sortant fin de l’été. Une organisation extrêmement sympathique à l’actif de Lecteurs.com sous la baguette de Karine Papillaud. Merci pour la confiance accordée.

Cri de révolte susurré, roman social saupoudré d’Histoire ou pavé dans la marre de nos tranquillités bourgeoises de gauche ? La Tannerie est un roman qui ne m’a pas laissé indifférent. Mais, sous peine de passer pour un roman coupe-faim qui nourrit la réflexion en abordant de vraies questions sans rassasier les esprits parce qu’il n’en dit pas assez, les amoureux de révoltes sociales, les passionnés d’Histoire, les obsédés de références littéraires, psychologiques ou artistiques de tous poils auront besoin d’un mode d’emploi. Comme Alice aux pays des rêves merveilleux, le lecteur doit, s’il veut apprécier, lire au-delà des mots, du style, des références et du non-dit. Celia Levi, l’autrice qui s’est livrée au public avec Les insoumises, Intermittence et Dix yuans un kilo de concombres, continue sa galerie de personnages submergés de rêves mais incapables de les transformer en projets et d’agir pour qu’ils se réalisent.

A la Tannerie, microcosme du monde où nous retrouvons les métiers du spectacle qu’affectionne l’autrice : artistes, ouvreuses, techniciens, agents de sécurité, responsables des planning, ressources humaines ou formation, Jeanne, jeune oie blanche bretonne naïve comme il n’est pas possible, est projetée dans le monde culturel de Paris dans le seul but d’assouvir ses rêves de frivolités et de fuir la ferme familiale et son manque d’avenir à ses yeux. Elle rejoint donc, dans des conditions précaires et de rémunération proche de l’exploitation, la Tannerie, grande friche industrielle où les promoteurs politiques et financiers annoncent un vaste projet porteur de multiples développements à condition qu’il soit soutenu par chacun des membres de cette grande famille dont dépend sa viabilité. Il s’agira d’une offre culturelle ouverte, alimentée par des artistes, des spectacles et des conférences plutôt avant-gardistes s’inscrivant dans la droite ligne (de gauche) de l’éducation des masses, le questionnement des modèles de société et l’intégration des publics défavorisés. Enthousiasmant, non ?

Ce qui n’est pas dit, bien sûr, c’est que ce projet porté par tous, devra rapporter de substantiels bénéfices en vue de garantir les salaires mirobolants des quelques cadres et ce, en dépit de l’avalanche de contrats précaires et des promesses d’avancement non tenues pour les petits salaires, tous métiers confondus. Ce qui ne manquera pas de soulever de vives contestations de ces derniers ? Pas sûr !

Le lecteur est donc au cœur d’une entreprise d’économie sociale. Une minorité vise la seule rentabilité financière, la masse se trouve plongée et plombée dans le rêve fumeux d’une révolution sociale, cadre qui n’empêchera ni les mesquineries, ni les coups foireux destinés, égoïstement, à se garantir une place, un pouvoir dans la structure, un CDI plutôt qu’un CDD.

Dans une telle bulle où les frustrations sont quotidiennes, le monde est refait tous les soirs lors des virées dans les bars de Paris. Dans cette ville, on n’existe que si on s’affiche. Le lecteur devra donc absorber une dose d’alcool incommensurable et suivre, à défaut de participer, les joutes oratoires des refaiseurs de monde qui s’étourdissent à coups de références culturelles, cinématographiques et pseudo-philosophiques, toutes participant à la diarrhée de mots et la constipation d’idées qui président ces grands moments à venir. Chacun en est plus ou moins conscient, ces soirées où tout le monde s’agglutine autour d’un verre ont pour seul but de fuir la solitude que personne ne veut pourtant avouer.

Le choix de l’autrice a été de mettre au centre du récit Jeanne, anti-héros, jeune-fille lambda qui pourrait réagir mais qui ne trouve aucune balise, aucun cap à suivre, aucun phare pouvant la mener à bon port. Dieu, qu’il m’a parfois été pénible de suivre Jeanne, les pages et les pages tournant sans jamais un soupçon de révolte ne la conditionnant à se prendre en mains. J’ai été ulcéré par cette complaisance à subir la vie, par cet effacement, ce manque d’assertivité, bref, ce rôle poupée de chiffons qui ne se préoccupe que du cosmétique pouvant la jeter dans les bras d’un Julien convoité, un cuistre, poseur d’apparat lors de toutes les virées nocturnes n’abordant la vie qu’avec un vernis de culture qui se craquèle avant même de sécher. Il joue, pose et impose son regard clair, mais non lucide, sur ses proies, arrose les échanges pseudo philosophiques qu’il mène dans les bars d’un pédantisme de dandy qui camoufle à merveille la totale absence de lecture critique et révolutionnaire du microcosme de la Tannerie. Si ces deux personnages sont le centre, alors le cri de révolte de l’autrice ne peut que paraître trop retenu et silencieux. Bien sûr, me direz-vous, je pouvais lire entre les lignes… mais le message n’aurait-il pas été plus mobilisateur si le cri avait eu un petit côté Munch ?

En déconstruisant les propos et les actes des membres de la Tannerie, en dépassant le vide sidéral des considérations philosophiques, j’ai pu, mais bien sûr, comprendre que le message est le non-dit de l’autrice. Ce qui est tu est criant, criant de vérité. Et les nombreuses citations surgies du passé, soulignent la réédition de ces exploitations du travailleur pris en otage par un discours participatif et un management opposé. Par moment, j’ai été intéressé par ces retours au passé. Il me paraît approprié de ne pas oublier l’Histoire. Encore faut-il ne pas y vivre reclus. Or, j’ai eu plus d’une fois cette impression d’être emprisonné dans des argumentations d’un autre âge. Observant la crue de la Seine, était-il indispensable de citer Pissarro où les passants et les fiacres semblent patauger dans la boue ? Cette culture-confiture, parfois pertinente mais devant être dépassée, mises à l’heure du jour ne me semble utile que quand elle débouche sur des actions, des actes qui engagent, transforment, modèlent l’avenir. Or ce retour sur le passé, procédé, répété tout au long des pages, ne modifie en rien la trajectoire de vie. Cela a fini par user mon attention, m’insupporter même. Je suis en plein accord avec Jeanne qui, à la page 342, demande ‘n’as-tu pas l’impression que l’on revit toujours la même chose ?’ Et, un peu plus loin quand Jeanne, enfin, a quitté la Tannerie, je me surprends, comme elle, à me dire que tout son récit là-bas n’a couvert qu’une petite période de deux ans de vie ! Cela m’avait semblé une éternité, une même situation qui ne se modifie pas d’un iota, ce qui, après tout, est bien la caractéristique de l’éternité ! Dieu que c’est long cet état !

Cela étant dit, la Jeanne dépasse tout de même la bienséance lorsqu’elle se reproche d’avoir osé comparer sa vie aux personnages des Raisins de la colère, œuvre culturelle à laquelle on ne peut toucher et qu’elle enchaîne, sans remord cette fois, en pensant qu’elle et les migrants qui plantent leurs tentes de plus en plus près de la Tannerie (attendant sans réagir que les CRS les expulsent) partagent le même sort, personne n’en veut ! C’est pousser le bouchon un peu loin et faire preuve d’une totale absence de capacité à juger la ‘Res Publica’, non ?

Alors oui, la Tannerie peut être un cri, une révolte analysée sur base des expériences antérieures et provoquer des rides sur le miroir de nos tranquillités si nos oreilles s’ouvrent aux cris rassembleurs d’un appel au partage des ressources, droits et salaires. Encore faut-il que nos cœurs s’ouvrent aussi, saignent face à la misère du monde et qu’en nous circule un sang nouveau, celui d’une évolution éthique et programmée de ce monde du travail et de ses valeurs.

Celia Levi, par l’écriture de la Tannerie, participe à cet éveil des consciences, assurément. Elle aurait pu le faire avec autant d’à propos et plus d’efficacité encore. Néanmoins, La Tannerie est un livre à lire, à réfléchir et à agir. Bonne lecture à tous ceux qui l’ouvriront.

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La Tannerie

Jeanne est une jeune bretonne qui décide de venir travailler à Paris. Elle vit en colocation et va trouver un poste d'accueillante au sein d'un lieu culturel , une ancienne friche industrielle, qui vient d'ouvrir à Pantin et s'appelle " la Tannerie". On y présente des expositions, des artistes, des spectacles de danse, du cirque, des concerts. Jeanne va apprendre à connaître ce lieu gigantesque et découvrir le monde du travail. L'ambiance est plutôt bonne, les employés sont jeunes et sortent boire des verres, au restaurant le soir après le travail.

On découvre Paris avec les yeux de Jeanne, on visite la capitale, Pantin, Belleville, le canal de l'Ourcq. On est en 2016, Jeanne et ses collègues assistent à des manifestations de Nuit debout.

C'est un peu une tranche de vie, un regard sur un microcosme parisien.

Ce sont beaucoup de clichés, des personnages un peu stéréotypés et pas franchement sympathiques. Jeanne en particulier est gentille mais très passive. J'avoue m'être un peu ennuyée car, au final, il ne se passe pas grand chose.
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La Tannerie

La Tannerie (site fictif) c’est un lieu, une petite planète, à Pantin, si près de Paris, qu’on y va à pied, boire un verre après la journée de travail, dans les quartiers du nord-est de la capitale, où les cafés de Belleville sont incontournables.

Implantée au bord du canal pour la proximité de l’eau nécessaire aux activités de tannerie, l’usine est devenue au vingt et unième siècle, un lieu de culture à l’heure où les friches industrielles renaissent au regard des contemporains, pour leurs volumes, leurs espaces, le charme d’un monde perdu. Voilà donc la Tannerie en plein essor, accueillant expositions, salons, défilés et pour faire vivre cette fourmilière, il faut du monde. La Tannerie embauche donc, pour guider le public, renseigner, animer, surveiller… les jeunes qui s’y retrouvent ont des rêves d’ascension sociale qui s’appellent CDI, ils se retrouvent bien vite confrontés à un travail difficile et précaire qui exige beaucoup et donne peu de compensations.

Voilà ce que Jeanne va découvrir et le livre a le mérite de nous faire partager cette découverte, jour après jour, mois après mois, au rythme de la vraie vie, car s’apercevoir que rien n’est à la hauteur du rêve, ça prend du temps, deux années, deux étés défilent sous nos yeux et la Tannerie prend forme dans le quotidien de Jeanne et ses collègues, avec un contexte social et politique qui prend progressivement sa place dans leur horizon quotidien, dont les limites se dessinent de plus en plus clairement.

L’écriture du livre est fluide, claire, poétique souvent. Les personnages sont bien campés, Jeanne, personnage principal est particulièrement crédible tant la relation de sa vie intérieure, ses interrogations, ses doutes, sont présentés avec précision, le lecteur l’accompagne tout au long de son parcours. Ce parcours est multiple et attachant : qu’il s’agisse de la découverte de Paris dans ses paysages et ses quartiers, de ses soirées arrosées qui donnent l’illusion qu’on n’est pas tout seul alors qu’en fait la solitude n’est jamais bien loin, de ses déceptions amoureuses car elle attend beaucoup et reçoit peu. Progressivement le caractère illusoire de ce bonheur parisien superficiel et froid, prend forme, les images de la Bretagne, ses camaïeux, sa douceur, viennent faire contre-point. Jeanne se sent perdue.

La force du livre c’est aussi de nous montrer comment cette déception qui se découvre progressivement dans sa vie personnelle, épouse la dureté des réalités sociales, qu’elle découvre également, aussi peu armée pour affronter l’un comme l’autre. C’est d’abord la dure réalité des migrants qui viennent s’installer tout près de la Tannerie avant d’être chassés sans ménagement, ce sont les mois qui précèdent le vote de la loi travail, avec les cortèges de manifestants, pourchassés sans ménagements par la police, Jeanne affronte ce printemps 2016, se prend à espérer au rythme des nuits debout, place de la République. Sans que l’auteur n’appuie sur cette réalité politique et sociale, elle montre bien que Jeanne y trouve un point d’appui sans tout comprendre sans s’engager, presque de manière intuitive, comme une réponse inconciente à ce qu’elle vit tous les jours : les relations humaines décevantes, au bout du compte le CDI qui ne vient pas et le retour à la case départ.

Un livre plein d’humanité, qui met le lecteur en face de son temps.

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La Tannerie

Je me suis plongée dans ce livre après avoir été vivement recommandé lors d’un café littéraire à la médiathèque des Halles. J’espérais découvrir une lecture à la fois enrichissante, engagée et humoristique. Si pour la première attente, j’ai été comblée, la seconde s’est fait attendre. Le roman nous fait suivre Jeanne, une Bretonne venue s’installer à Paris pour travailler dans une tannerie. Elle est fascinée par la vie parisienne et se lie rapidement d’amitié avec ses collègues de travail. Cependant, elle se rend vite compte que derrière les paillettes se cachent des réalités moins reluisantes. Les thèmes abordés sont intéressants, notamment les relations sociales à l’heure des réseaux sociaux et les difficultés d’intégration. Néanmoins, l’histoire est parfois longue et les émotions de Jeanne sont peu développées. J’aurais aimé ressentir davantage d’émotions et d’attente. La fin du livre laisse également un sentiment d’inachevé. En somme, même si certaines thématiques m’ont interpellée, ce livre n’a pas su retenir mon attention jusqu’à la fin.

Mon avis détaillé :


Lien : https://lesparaversdemillina..
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Dix yuans un kilo de concombres

Celia Levi a séjourné un an à Shanghai pour améliorer son chinois, la langue de sa mère. De ce séjour est né ce roman, un récit sur la disparition de la Chine d’avant et sur la cruauté de nos sociétés contemporaines entièrement soumises au pouvoir de l’argent.



Xiao Fei vit avec sa vieille mère, qui devient attachante en devenant sénile, ses deux sœurs Mei Mei et Bei Bei, et son neveu, rivé jour et nuit à son ordinateur, dans un quartier insalubre de Shanghai voué à la destruction.

Xiao Fei, rêveur désœuvré et immobile, est incapable d’agir dans ce monde qui lui échappe ; alors il échafaude des rêves de grandeur ou d’amour -être reconnu comme un lettré, admiré pour ses calligraphies ou en tant que héros résistant face aux spéculateurs qui menacent le quartier, être aimé de sa cousine exilée en Amérique et qui revient en Chine pour étudier la langue-, et il oscille entre ses fantasmes et la colère ou l’humiliation de ne rien accomplir.



"Il ne savait pas de quoi il faisait partie, de rien sûrement, il n’était ni un prolétaire ni un bourgeois. Il sentait pourtant son âme tendre à de grandes actions, à de grandes idées."



Avant l’arrivée des communistes au pouvoir, ses parents étaient des lettrés, déchus au moment de la Révolution culturelle. Xiao Fei se rêve en grand homme de cette Chine d’avant imprégnée de culture et respectueuse de la nature, le pays de son enfance et de la grandeur de son père, tandis qu'il en voit les dernières traces disparaître sous ses yeux.



"Tandis qu'il rêvait Xiao Fei aurait voulu être sur la barque de son enfance, une longue barque fine qui l'aurait ramené sur cette rivière intacte, il aurait regardé les poissons, les algues, la nature lui souriant. Aujourd'hui se disait-il, il ne devait rien en rester, si ce n'était une rive boueuse où les usines pétrochimiques et les incinérateurs crachaient leurs déchets radioactifs."



Alors que ce monde s’émiette, encerclé par les pelleteuses et les spéculateurs, le dernier rempart de la tradition reste la cuisine, jusqu'à ce que même les aliments deviennent inaccessibles (Dix yuans le kilo de concombres), au fur et à mesure de l’écrasement des plus modestes par la société marchande.



"Les raviolis étaient particulièrement réussis, le jus était abondant, il brûlait la langue et se répandait délicieusement dans la gorge. La pâte était délicate, elle glissait entre les baguettes. C'est cela le bonheur, manger de bons xiaolongbao, le reste n'a pas d'importance. Il pensa à la peinture, aux stèles, à l'Histoire, et se souvint que son père lui avait appris que le bonheur ne pouvait venir des parties basses du corps mais du cœur et de l'esprit."



Xiaolongbao : raviolis à la vapeur, spécialité shanghaienne.
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La Tannerie

Dès les premiers chapitres, j’ai eu la sensation de découvrir en Jeanne, le personnage principal de ce roman, un nouvel avatar de Frédéric Moreau, ce cher personnage flaubertien à qui j’ai, à chaque fois que je relis L’Education sentimentale, encore plus envie de botter les fesses devant sa force d’inertie .



Jeanne est en effet une jeune femme qui, tout comme Frédéric, arrive de sa province natale, ici la Bretagne, pour faire ses armes, professionnelles comme personnelles, à Paris. Elle va très vite comprendre, en commençant à travailler comme accueillante à la Tannerie, ancienne tannerie de Pantin reconvertie en centre culturel qui mêle lieux d’expressions diverses et variées, galeries d’expositions, et plus encore au fil du roman, que cela n’ira pas de soi. Lorsque l’on n’est pas parisien et que l’on n’a pas les codes de la vie parisienne, il faut bien du temps pour s’acclimater. L’arrivée à la capitale est donc pour Jeanne, discrète, plutôt passive, particulièrement rêveuse, un coup de massue, une désillusion qui n’ira qu’en s’accentuant, notamment car tout ce en quoi elle croyait, ambition, reconnaissance du travail accompli, amitié, amour… sera balayé d’un revers de main cruel, mettant en travers de son chemin la réalité de la société française, et parisienne, au XXIème siècle.



Tout y est en effet artifice, hypocrisie, superficialité, que ce soit dans les comportements au travail ou en dehors : les évènements du roman se passent alors qu’un camp de migrants s’est installé au niveau du canal jouxtant la Tannerie, avant son démantèlement, puis lors de l’apparition de Nuit Debout et des premières manifestations qui ont suivi, contre les diverses réformes, et qui ont été réprimées très violemment. La majorité des personnages s’implique dans ces évènements d’un seul mouvement, celui d’un effet de mode qui est scruté par tous dans les premiers temps, mais qui lasse très vite en raison de la trop grande énergie qu’il demande. Les seuls qui sont sincères, qui refusent le monde qui leur est proposé, qui s’engagent réellement dans les causes à défendre, comme Saïd, qui symbolise à mon sens le plus justement cet état de fait, disparaissent progressivement de la surface du récit pour n’être que des êtres évanescents, croisés au détour d’une rue, d’une station de métro, comme si l’omniprésence d’un climat surfait, nombriliste, éminemment cynique, était désormais la norme de notre société actuelle.



Et c’est ce climat, grâce à des descriptions et des portraits précis, toujours motivés bien que nombreux, riches sans être rébarbatifs, que l’auteure parvient à retranscrire, souvent sans jugement, parfois avec une petite pointe d’ironie mordante – du moins en ai-je eu l’impression -. Retranscription qui se fait par l’intermédiaire d’une plume fluide, qui suit à la perfection les questionnements et états d’âme de son personnage principal, dans la découverte, avec toute sa candeur juvénile, de ce climat, finalement, et malheureusement, banal.



La Tannerie est en somme un roman social comme je les apprécie particulièrement. Je remercie les éditions Tristram et Babelio de m’avoir permis de le découvrir grâce à la dernière Masse Critique.
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Intermittences

Après "Les insoumises" et avant le très beau "Dix yuans un kilo de concombres", ce deuxième roman de Celia Levi (2010) est un véritable envol, le journal sur une année, au rythme de saisons de durée très inégale puisque l’automne et l’hiver en occupent la plus grande partie, d’un jeune homme sérieux, plutôt routinier, qui cherche à obtenir par des rôles de figuration au cinéma le statut d’intermittent du spectacle, afin de pouvoir peindre - sa véritable vocation - entre ses périodes d’emploi. Mais sa bonne volonté se heurte aux difficultés de décrocher des cachets, à l’exploitation des figurants sur les plateaux de tournage, à la complexité difficilement surmontable des textes régulant le statut des intermittents et aux pièges tendus pour limiter le nombre d’individus obtenant effectivement ce statut.



Sur les plateaux de cinéma face aux autres acteurs, sous les yeux du chat Belzébuth adopté par son amie Pauline, et sous le regard de "La folle" de Soutine, tableau dont la reproduction est accrochée au-dessus de son bureau, il se sent perdu et inadapté, par contraste avec l’insouciante Pauline, mobile et brillante comme une petite flamme qu’on ne peut attraper. D’ailleurs tout semble échapper à cet homme, lui glisser entre les doigts, non seulement Pauline, son statut d’intermittent, la possibilité de peindre, entravé par les barrières administratives sans visage auxquelles il est confronté dans les agences pour l’emploi, et en proie à une angoisse qui dérive vers la folie.



«Ce journal avait pour but d’ordonner ma pensée.»



Cette tentative d’ordonner devient le témoignage de la dissolution d’un homme sensible, désarçonné par le mouvement du monde contemporain et par son inhumanité.



Avec une écriture très simple, le journal de cet homme dont l’égarement et l’exclusion se creusent, face aux procédures absurdes des agences pour l’emploi et aux désordres du monde, rappelle (parmi ses contemporains) la nouvelle "Avant Cuba !" dans "Brûlons tous ces punks pour l’amour des elfes" de Julien Campredon, ou encore les "Extraits des archives du district" de Kenneth Bernard.



«En bas de l'immeuble, les ouvriers ouvrent le sol avec leur marteau piqueur, je ne m'entends plus penser. Ils se fondent dans la morosité du demi-jour, ce ne sont que des silhouettes courbées, enchaînées au bitume, à leur machine infernale, à ce monde des ténèbres qui repousse la vie vers des profondeurs insondables, maléfiques. Ils doivent détester leur vie, peut-être eux aussi ont-ils eu affaire aux Assedic. Soutine a bien compris ce qu’était le contraire de la vie, il a fait apparaître au grand jour ce que l’on enfouit dans ses viscères, les secrétions, les os, les tourments du corps. À la première occasion, les voilà qui sont expulsés de leur cachette, incontrôlables, ils s’emparent de nous, ils gangrènent notre fluide vital, nous portant à la mélancolie puis à la psychose. Les ouvriers sondent la terre, les entrailles de la ville, ils ne la débarrasseront pas si aisément de ses humeurs.»

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La Tannerie

Le roman de Celia Levi promettait d'être une satire sociale. A la lecture du quatrième de couverture, je m'attendais à au moins quelques rebondissements quant à l'attitude des personnages qui baignaient dans l'univers de la Tannerie, qui, loin d'être bienveillant, se révélait être un véritable panier de crabes. L'idée était bonne.



Malheureusement, un style d'écriture lourd et pénible, des descriptions interminables et confuses, des personnages ectoplasmiques, et une platitude de l'intrigue ont eu raison de mon enthousiasme du départ. Lasse de piquer du nez, et sur le point de capituler, je me suis résignée à une lecture en diagonale, pressée d'en finir.



Grosse déception !
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La Tannerie

Oulala, ça y est j’en suis venu à bout.

Quel étrange roman. De très bonnes critiques, une nouvelle « Éducation sentimentale » , un sujet original : Pénétrer en même temps que Jeanne dans La Tannerie, clone du vrai Espace 104 lieu pluri culturel, polyphonique et branché de Paris XIXe.

Alors on va vraiment la suivre de près , cette jeune bretonne à la capitale,pendant 380 pages étonnantes de futilité, vaguement flaubertiennes mais au total très ennuyeuses. On vous rassure tout de suite : il ne se passera rien. Par contre on saura tout sur ce type de lieu et la galère des jeunes en quête de CDI dans le monde de la culture.

Peut-être plutôt pour le lecteur trentenaire, nostalgique de sa post-adolescence et de ses années de célibat....
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Dix yuans un kilo de concombres

Shanghaï de nos jours. Au milieu des quartiers pauvres, Xiao Fei vit avec sa vieille mère, ses sœurs, son neveu, la jeune cousine américaine en visite.

Issu d'une famille d'anciens lettrés il se sent humilié, déshonoré par un présent d'une situation sociale et financière qu'il subit.

Nostalgique, désabusé, il se raccroche à sa calligraphie et se perd dans ses pensées philosophiques et poétiques.

On découvre le quotidien des laissés-pour-compte de la société, c'est triste et frappant de réalisme. Décrépitude et misère. Une Chine meurtrie.



(Lecture interrompue au tiers.

Déçue j'aurais aimé apprécier le style, la narration, mais pour le moment, je n'y parviens pas. Le sujet m'intéresse. Peut être reprendrai-je ultérieurement).
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Les insoumises

Celia Levi avait à peu près l’âge de ses héroïnes lorsque fut publié en 2009 son premier roman – roman épistolaire et d’apprentissage inspiré de la littérature du XIXème siècle, la correspondance entre deux amies très proches Renée et Louise, l’une contemplative, l’autre combattante, toutes deux portées par des rêves de justice et de grandeur.



Renée quitte Paris pour s’installer en Italie et y poursuivre ses études. Rêveuse, frivole et velléitaire, elle jette sans cesse des ponts entre les scènes de sa vie et ses lectures des classiques, s’imagine devenir une grande artiste peintre ou une réalisatrice de cinéma reconnue, mais n’aime rien tant que de flâner et rester dans son lit pour lire, découvrir les ruelles ou encore la cuisine italienne, profiter de la douceur de la vie tant qu’on peut la saisir.



Louise, restée à Paris, est une idéaliste combative et enragée de son impuissance, méprisant et puis haïssant la société marchande et l’exploitation, un monde qu’elle veut à tout prix changer en le dynamitant de l’intérieur.



«Ceux qui contestaient profondément la société spectaculaire marchande et qui ont vu leur révolution échouer ne s’en sont pas remis. Ils se sont tués. Ils se sont reclus. Les autres étaient des opportunistes. Ils ont dévoyé Mai 68. Ils se souviennent honteux ou nostalgiques. Mai 68 est devenu une image d’archive. C’est un souvenir confectionné, surgelé et prêt à servir, une madeleine de Proust sous vide.»



D’une forme très classique comme les œuvres qu’admirent Renée et Louise, «Les insoumises» émeut par la palette des émotions, la langueur, la rage et la naïveté brute des deux jeunes femmes, qui empruntent des voies multiples à l’issue incertaine, un récit imprégné de la profonde tristesse de la désillusion.



«Ne plus avoir de travail ne m’inquiète pas. Se rendre compte que rien ne changera est autrement plus pénible. Je reste dans mon trou. Le ciel bleu et l’odeur de l’été me sont insupportables.»

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La Tannerie

La Tannerie de Celia Levi est l'un des romans de cette rentrée littéraire qui m'intriguaient le plus. J'ai vraiment beaucoup aimé cette lecture. J'ai trouvé fascinant la manière dont l'auteure a su saisir notre époque et le désenchantement d'une génération.

🔸

Jeanne a grandi près d'Auray dans une famille d'agriculteurs. Après des études dans les métiers du livre, elle décide de quitter la Bretagne pour Paris. Elle va être embauchée en CDD pour travailler à l'accueil d'un lieu culturel en pleine évolution à Pantin, La Tannerie.

Ce roman se déroule sur deux années et englobe aussi tout le contexte social et politique sur cette période. On assiste aux manifestations, à l'effervescence du mouvement Nuit debout. On perçoit également la détresse des migrants qui installent leurs campements de fortune de plus en plus près de la Tannerie.

Pour l'image, la Tannerie va d'abord soutenir la cause des migrants, puis très vite, à mesure que les campements se rapprochent du Lieu, lui tourner le dos avant de s'y opposer fermement. Celia Levi exploite avec talent la frontière mince entre bien-pensance et hypocrisie. Le fossé entre les employés de la Tannerie se creuse : entre ceux qui défendent corps et âme leurs idées, à l'image de Saïd, et ceux qui n'ont que leurs grands discours, ceux qui parlent creux, qui citent les grands philosophes à tout bout de champ et qui aiment surtout s'écouter parler. Celia Levi arrive à écrire tout ça avec une telle maîtrise et une telle justesse. C'est épatant.

Nous vivons tout ça à travers les yeux de Jeanne, ce personnage un peu desincarné qui s'efface encore plus derrière cette image de la parisienne à laquelle elle veut à tout prix ressembler, qui se prépare pour aller à une manif comme on se prépare pour aller à une soirée. Jeanne fantasme sa vie et particulièrement sa relation avec un collègue, Julien. Jeanne est un personnage très agaçant et pourtant extrêmement intéressant parce qu'elle incarne notre société axée sur les apparences. Jeanne se crée un monde, et finalement elle se crée un personnage, on n'a pas l'impression de la connaître vraiment, elle agit toujours dans l'intention de séduire. Même quand elle se rend aux manifestations, on se pose la question de l'écho que la cause a vraiment pour elle, tant on a l'impression qu'elle est là pour être là, pour plaire, pour exister aux yeux de ce Julien qui l'obsède tant.

La Tannerie est une chronique sur le cynisme de notre époque, sur les espoirs et les désillusions d'une génération. Un roman qui vise juste et bien.

"Le lieu c'est le lien."
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La Tannerie

Jeanne voulait quitter sa Bretagne natale, sa petite vie étriquée. Il lui semblait que travailler à Paris allait l'aider à s'épanouir. La voilà donc à Paris, dans une colocation avec un CDD en poche. Elle sera "accueillante" à La Tannerie, friche industrielle réhabilitée en lieu de culture. Elle va avoir du mal à s'adapter, dans la compréhension de ce que l'on attend d'elle, dans le lieu même où elle se perd, dans ses relations avec ses collègues. Mais elle reste sans bien savoir pourquoi, avec l'espérance de jours meilleurs.

J'avoue que je n'ai éprouvé aucun plaisir à lire cette histoire. La qualité d'écriture ne suffit pas, je déteste les personnages de "loser". J'avais envie de dire à Jeanne : Va-t-en, ne reste pas là, bouge-toi ! Tout le long de l'histoire on se demande si elle va se jeter dans le canal Saint-Martin voire pire.

De plus, la fin m'a exaspérée.

Même si je sais que ainsi va la vie, j'aime trouver autre chose dans mes lectures.
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La Tannerie

On suit le parcours de Jeanne, une jeune bretonne qui commence à travailler à ''la Tannerie'', une entreprise dédiée à la culture se situant à Paris. On la voit découvrir la vie parisienne, se lier d'amitié avec des personnes et s'éloigner d'autres, rêver et être rappelée à la réalité. En somme on suit le parcours d'une jeune jeune femme dans un environnement nouveau où elle ne connait personne. Bien que des actions politiques soient abordées dans ce roman comme l'évacuation de camps de migrants ou Nuit Debout, il s'agit, de mon point de vue, avant tout d'un roman sur les relations humaines. C'est pour cela que je pense que l'on peut tous se retrouver un peu dans Jeanne à travers les joies, les rêves, les tristesses et les déceptions qu'on a connus.



Sans être un coup de coeur, c'est un roman qui se lit bien et par lequel on se laisse porter sans se prendre trop la tête.
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La Tannerie

Sa formation de libraire terminée, Jeanne quitte la Bretagne pour tenter sa chance à Paris. Carrière, amours, amitiés : tout un monde, aussi excitant qu’angoissant, s’ouvre à elle. Mais, dans l’incapacité à trouver un emploi stable, Jeanne va enchaîner les contrats courts à la Tannerie, lieu artistique alternatif implanté sur le canal de l’Ourcq. Dans ce microcosme dont les voeux d‘inclusivité dissimulent mal la précarité effective des employés, Jeanne fera ses premières expériences de l’engagement politique, apprendra les codes d’un entre-soi fondé sur la distinction culturelle, et tombera éperdument amoureuse.

S’il nous plonge dans un monde immédiatement contemporain, La Tannerie évoque plutôt, par sa forme très classique, les grands romans initiatiques du XIXe siècle. A la manière d’un héros de Flaubert, Jeanne court d’illusions en déceptions, et la narration indolente comme les dialogues très écrits permettent à Celia Levi d’épingler toutes les postures de ses personnages, sans jamais céder à une caricature trop facile. Analysant finement les mécanismes de domination sociale, La Tannerie dévoile ainsi, à travers l’expérience de la jeune ingénue qu’est Jeanne, les processus d’exclusion qui se jouent aussi bien à l’échelle des individus qu’à celle, plus large, de l’espace urbain gagné par la gentrification.


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La Tannerie

La Tannerie de Celia Levi, un roman social qui dénonce l’imposture du monde du travail contemporain

J’ai lu ce roman dans le cadre du Prix du Roman des Etudiants Télérama & France Culture, je fais en effet partie du jury pour cette édition ! Je suis ravie d’avoir découvert ce roman et cette autrice à l’occasion car je ne suis pas sûre que je l’aurais lu autrement.



Au début, je n’ai pas aimé ce roman, non pas parce qu’il était mal écrit, mais dans le sens où il je sentais que ça n’était pas une lecture plaisir mais plutôt politique, un peu froide et hermétique, car tout comme l’héroïne Jeanne, on se sent perdu et extérieur à l’action, comme si on était voué à échapper au cœur de l’histoire pour toujours. On suit en effet une héroïne qui est très romantique, en retrait de l’action et toujours dans l’observation. La narration, comme contaminée, paraît donc au début peu dynamique, empotée ou empêtrée, et assez endormie. Elle reste aussi impersonnelle finalement, bien que racontée du point de vue de Jeanne. Le monde dans lequel elle pénètre, celui de la Tannerie, et par extension le monde du travail et de la ville, lui semble opaque et elle lui oppose une attitude un peu endormie, niaise, mollassonne. Jeanne a ainsi des difficultés à s’intégrer dans ce monde nouveau dont elle ne comprend pas les codes, et dès le début elle se perd, littéralement, et se sent fatiguée. Elle n’ose pas poser de questions de peur de se révéler inculte et de perdre sa place. Elle rêve d’amitiés fortes, mais a une fausse idée des liens qui l’unissent à ces collègues de la Tannerie. Sa solitude est lourde, pesante. De même, lorsqu’elle assiste aux spectacles avec ses collègues, elle ne les comprend pas et se retrouve de nouveau en décalage avec les autres. Finalement, elle ne parvient jamais vraiment à comprendre les codes, et est donc condamnée à répéter le même discours pour présenter La Tannerie aux visiteurs. En réalité, Jeanne est toujours extérieure à l’action, cantonnée à un rôle d’observatrice, et on ne sait jamais ce qu’elle pense. A travers elle, l’autrice Celia Levi souligne le décalage des codes campagne/ville et a fortiori avec les codes très parisiens des autres membres de la Tannerie, qui semblent à Jeanne extraordinaires de bon goût et d’élégance, lorsqu’ils ne semblent être que des attitudes très convenues et snobes.

Dans ma lecture, j’ai eu l’impression qu’il y avait deux parties dans le livre: une première durant laquelle je me suis un peu ennuyée, car je me suis sentie toujours en dehors de l’action, et une deuxième, qui m’a davantage embarquée dans l’histoire et où j’ai pris davantage de plaisir à lire ce roman. C’est en effet à partir du moment où Jeanne est intégrée dans le groupe des techniciens et des employés de la Tannerie qu’elle paraît un peu moins niaise, elle semble avoir davantage de recul sur certaines choses et comprendre qu’elle est en décalage avec les autres. Sa passion pour Julien, un de ses collègues, qui tourne à l’obsession, donne un intérêt nouveau à l’intrigue, même si elle ne fait que renforcer la naïveté de Jeanne qui se fait l’archétype de l’Emma Bovary de notre société contemporaine. Une héroïne plongée dans ses fantasmes toutes la journées et qui fait tourner toute sa vie autour d’une image idéale de La Tannerie, sans voir que derrière ce nouveau lieu culturel se cache toujours un espace déshumanisé de lutte, précarité, compétition, violence et brutalité. Jeanne, par son manque de clairvoyance et par ignorance des codes de la société urbaine qu’elle découvre, devient finalement la victime de ce système inhumain.





En conclusion, j’ai beaucoup aimé cette lecture malgré une entame un peu difficile, l’écriture de Celia Levi est très forte du fait de descriptions précises et d’une narration maîtrisée, elle sert parfaitement bien sa critique de la société et du système du travail absurde et vain, qui reste opaque à qui n’en maîtrise pas les codes. Je le recommande fortement !






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