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Critiques de Christian Kracht (46)
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Eurotrash

Réjouissant ! Du grand helvète underground ! Christian part chercher maman et roule ma poule. Qui a dit que la vieillesse était un naufrage ? Dans ce livre, c'est plutôt un crash aérien. Il y a une certaine noblesse dans la décadence chez les friqués, particulièrement quand le magot se compte en CHF.
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Eurotrash

Christian Kracht a écrit, une fois de plus, un livre grinçant.


Lien : https://www.lesoir.be/571116..
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Eurotrash

Christian Kracht tient ces propos un brin défaitistes dans son excellent nouveau roman, Eurotrash : "Il n’y avait ni musique ni cinéma ni littérature, il n’y avait absolument rien en Suisse, si ce n’est une avidité de luxe, une formidable envie de sushis, de baskets aux couleurs criardes" [...]
Lien : https://www.lexpress.fr/cult..
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Eurotrash

Né dans le canton de Berne, l’écrivain a longtemps vécu, par choix, loin de son pays, forgeant ailleurs ses romans sarcastiques. Il y est revenu, et signe « Eurotrash », critique envers la Confédération mais témoignant d’un certain apaisement.
Lien : https://www.lemonde.fr/livre..
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Eurotrash

J'y suis allé un peu par hasard, sans rien savoir de ce livre et je dois reconnaître avoir été agréablement surpris. C'est un bon roman, très intéressant. Un road trip familial en Suisse dans lequel nous allons croiser les fantômes du passé, notamment son grand-père, dans une face sombre de l'histoire. De discussion en discussion beaucoup de choses vont se dévoiler. Néanmoins, durant ce road trip, il riswue d'arriver quelques bricoles à nos personnages, (la mère est absolument géniale) ce qui ajoute une touche de suspense pas désagréable. Tout est ammené avec une belle dose d'humour, qui vous donnera un roman très divertissant.
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Eurotrash

Le récit vibre de colère sourde et d’autodestruction, dans un étrange cocktail qui mêlerait Thomas Bernhard et Bret Easton Ellis, avec de brusques moments d’émotion.
Lien : https://www.lefigaro.fr/livr..
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Tristesse Royale

« Tristesse Royale » (2001, Ullstein Taschenbuch Verlag; 201 p.) retranscrit une réunion en 1999, suscitée par l’écrivain suisse allemand Christian Kracht avec quatre autres écrivains à l’Hotel Adlon à Berlin. Avec Joachim Bessing, Eckhart Nickel, Alexander von Schönburg et Benjamin von Stuckrad-Barre, ils projettent de jeter les bases d’une « pièce situationniste ». Le livre ne rencontre pas le franc succès éditorial escompté. Plus tard, Kracht qualifiera cet évènement de « grosse erreur ». Le texte aura toutefois l’effet de renforcer l’existence d’une « popliteratur » fondée sur une équipe d’écrivains, dont Kracht serait en quelque sorte à la tête pensante. Tout le monde n’est pas André Breton, ni Guy Debord pour faire tendance, ni même CF Ramuz pour faire plus simplement hélvète.

Déjà « Faserland » (1995) introduisait le thème du voyage, sous forme d’un texte souvent central dans la discussion sur la littérature actuelle allemande telle qu’elle est analysée par les critiques littéraires et les universitaires. En effet, les protagonistes des fictions de Kracht partent dans des voyages qui les emmènent à la recherche d'un moment improbable, et surtout insaisissable, de situations d’immersion, plus ou moins utopiques ou d'expériences spirituelles dans des nations ou du moins des cultures différentes. C’est bien un fantasme allemand.

Mais très vite, le narrateur voyage en avion ou en train ICE à travers l’Allemagne errant de ville en ville pour finalement arriver à Zurich, où il part à la recherche de la tombe de Thomas Mann. Et le roman devient un véritable catalogue de marques, à croire que l’écrivain a été sponsorisé. « Sergio, c’est un de ces types qui portent en permanence des chemises Ralph Lauren roses et une vieille Rolex, et s’il n’était pas pieds nus avec le pantalon retroussé il serait chaussé de mocassins Alden, je le vois immédiatement ». Donc, du déjeuner à Sylt dans les iles frisonnes, la plus grande et la plus septentrionale des îles allemandes de la mer du Nord jusqu'à l'hôtel établi de longue date à Francfort, le narrateur conserve partout cette complaisance. « Donc, au commencement je suis chez Fisch-Gosch, à List-auf-Sylt, en train de boire une Jever à la bouteille. Fisch-Gosch, c’est un restau de poisson très célèbre parce c’est le restau de poisson situé le plus au nord de l’Allemagne. Il est à l’extrême pointe de Sylt, juste en bord de mer, et on croit qu’après vient une frontière, mais en fait il n’y a qu’un restau de poissons. Donc, je suis chez Gosch à boire une Jever. Comme il fait un peu froid et qu’il y a un vent d’ouest, je porte une veste Barbour doublée. Je mange ma deuxième portion de scampi à la sauce à l’ail bien que la première déjà m’ait donné mal au cœur. Le ciel est bleu. De temps en temps, un gros nuage se glisse devant le soleil ». La Jever, ou plutôt Jever Pilsener, c’est une bière allemande blonde. Alors que la veste Barbour est une veste à la coupe classique et droite, généralement en toile coton huilée, à manches raglan.

Dans son dernier ouvrage, on change de moyen de transport. Du train ICE on passe au taxi. Bref Christian Kracht revient en Suisse en plein cœur du monde qu’il a quitté ou fui. C’est la terre de son enfance, Gstaad, Zurich, les glaciers, les banques. Lieu qu’il déteste, mais lieu auquel il appartient. On y croise le fantôme d’un grand-père nazi et plus ou moins sadomasochiste, les traces du gotha des années 1980 entre les chalets du Saarland, devenus depuis les fastes des nouveaux riches russes, avant que la Confédération ne les exile à Dubaï, mais conserve leurs avoirs à Zurich. Il y a en plus du grand-père, l’ombre d’un père allemand qui ne vaut guère mieux.

C’est la fuite en avant « J'ai attrapé la maman, le déambulateur, la bouteille de vodka et les pilules, je suis monté dans le taxi et nous sommes partis pour une folle balade à travers la Suisse. Ils tirent leur arc gaiement, gaiement, grotesquement. Jetez l’argent des poubelles ».

Bref, l’existence d’une « popliteratur » fondée sur une équipe emmenée par Christian Kracht et reprenant des thèmes et de fragments littéraires ou non, ainsi que leur mise en œuvre sous une nouvelle forme via une description superficielle caractérise cette nouvelle littérature allemande. Cependant le caractère subversif initial semble avoir été perdu en route par des protagonistes issus d'une classe supérieure et de CSP++. Le fait d’avoir eu un père qui était le bras droit d'Axel Springer, le manat de l’édition n’est certainement pas étranger au succès d’estime vu par les critiques.

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Eurotrash

qui en principe est une suite de « Faserland » (2019, Phébus, 160 p.).



En 1999, Christian Kracht se réuni avec quatre autres écrivains à l’Hotel Adlon à Berlin. Avec Joachim Bessing, Eckhart Nickel, Alexander von Schönburg et Benjamin von Stuckrad-Barre, ils projettent de jeter les bases d’une « pièce situationniste ». Cette réunion est retranscrite dans le livre « Tristesse Royale » (2001, Ullstein Taschenbuch Verlag; 201 p.) qui ne rencontre pas le franc succès éditorial escompté. Plus tard, Kracht qualifiera cet évènement de « grosse erreur ». Le texte aura toutefois l’effet de renforcer l’existence d’une « popliteratur » fondée sur une équipe d’écrivains, dont Kracht serait en quelque sorte à la tête pensante. Tout le monde n’est pas André Breton, ni Guy Debord pour faire tendance, ni même CF Ramuz pour faire plus simplement hélvète.

Alors que le narrateur de « Faserland » parcourait l’Allemagne en train ICE, là c’est en voiture que cela se passe. Un homme d’âge moyen nommé Christian Kracht, se rend à contrecœur à Zurich pour rejoindre sa mère malade et sénile. Arrivé à son luxueux domicile à Zurich, la vieille femme à moitié ivre l’accueille avec des reproches. Il décide cependant, après que Frau Kracht ait retiré une forte somme d’argent à la banque, d’embarquer sa mère pour un voyage à travers la Suisse. Et le lecteur repart dans une histoire à la fois comique et spectaculaire d'une famille avec ses démons. Existe t’il une culpabilité de la honte d’être riches. Mais ce sont les restes de l’origine de la fortune familiale, soit l’argent nazi. Le roman dresse un portrait touchant d'une mère toxique et de son fils intoxiqué avec les relations mère-fils. La critique dit de ce livre. « La réalité, dans son cas, est définitivement la haine de la Suisse, de ce qu’il trouve être un pays débauché et abîmé par l’argent. La Suisse prend cher dans ce roman, un peu à la manière de ce que Thomas Bernhard infligeait à l’Autriche ».

On connaissait les « Ponk et Replonk », qui sont du Jura, puisque situés à La Chaux de Fonds. Ville dont Francis Blanche a mis en garde ses lecteurs « Ami qui visite la Suisse / Malheur à toi si tu confonds / Pour éviter La Chaux-de-Fonds / Il faut passer par Saint-Sulpice ». Ils ont même traduit leurs cartes postales en allemand. C’est une façon d’exporter l’humour. D’eux j’adore « Le Percement de l’Arc de Triomphe » et l’album de la cavalerie de montagne suisse, avec des chevaux à pattes inégales de chaque côté. Un faible aussi pour l’album de « La Face Cachée du Léman » avec en particulier, une vue de son point le plus élevé. De plus, je ne manque pas de m’offrir leur calendrier, qui m’octroie chaque année un 13ème mois supplémentaire.

Bref Christian Kracht revient en Suisse en plein cœur du monde qu’il a quitté ou fui. C’est la terre de son enfance, Gstaad, Zurich, les glaciers, les banques. Lieu qu’il déteste, mai lieu auquel il appartient. On y croise le fantôme d’un grand-père nazi et plus ou moins sadomasochiste, les traces du gotha des années 1980 entre les chalets du Saarland, devenus depuis les fastes des nouveaux riches russes, avant que la Confédération ne les exile à Dubaï, mais conserve leurs avoirs à Zurich. Il y a en plus du grand-père, l’ombre d’un père allemand qui ne vaut guère mieux. Mais dont les cendres ont été dispersées sur le lac de Hambourg quelques années plus tôt, Ainsi que le grand personnage du livre, la mère, moitié sénile, mais riche, épave alcoolique qui aime à citer Talleyrand et se nourrit de vin blanc à trois francs et fromage en pate moisi. Tournée automobile à travers les paysages alpestres. « Ces sommets glacés, le ciel blanc, les glaciers, dix mille ans de glace. La montagne m’est insupportable ». Pas trop loin des lacs, avant de rêver et de fantasmer sur les grands lacs, où la vieille dame voudrait « voir une dernière fois les zèbres ».

C’est la fuite en avant « J'ai attrapé la maman, le déambulateur, la bouteille de vodka et les pilules, je suis monté dans le taxi et nous sommes partis pour une folle balade à travers la Suisse. Ils tirent leur arc gaiement, gaiement, grotesquement. Jetez l’argent des poubelles ».

Bref, l’existence d’une « popliteratur » fondée sur une équipe emmenée par Christian Kracht et reprenant des thèmes et de fragments littéraires ou non, ainsi que leur mise en œuvre sous une nouvelle forme via une description superficielle caractérise cette nouvelle littérature allemande. Cependant le caractère subversif initial semble avoir été perdu en route pardes protagonistes issus d'une classe supérieure et de CSP++. Le fait d’avoir euun père qui était le bras droit d'Axel Springer, le manat de l’édition n’est certainement pas étranger au succès d’estime vu par les critiques.



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Faserland

« Faserland » est le premier roman du suisse allemand Christian Kracht (2019, Phébus, 160 p.). Il est annoncé comme étant aussi « Eurotrash #1 », donc on peut attendre une suite. Elle viendra avec « Eurotrash » (2024, Denoël, 192 p.). Entre temps, il y a eu « Imperium » traduit par Corinna Gepner (2017, Phébus, 192 p.), qui narre l’histoire vraie de August Engelhardt (1870-1919), « barbu, végétarien, nudiste », qui s'est exilé en 1902 en Nouvelle-Guinée allemande pour fonder une colonie dénommée « les cocovores » reposant entièrement sur la culture de la noix de coco. Il fonde également une secte, appelée l’Ordre du Soleil dont les principes sont ceux d’une vie libre de toute contrainte, près de la nature. « En compagnie du jeune Makeli, il parcourait l’ile tout nu, avec un simple sac sur l’épaule ».

Le roman fait suite à « Ich werde hier sein im Sonnenschein und im Schatten », traduit par Gisèle Lanois en « Je serai alors au soleil et à l'ombre » (2019, Jacqueline Chambon, 142p.), une uchronie révolutionnaire. Il narre l’installation de Lénine en Suisse où il fonde une république de type soviétique. C’est le prélude à un futur où l'Europe vit dans un état de guerre permanent. Les Alpes ont été creusées et transformées en une gigantesque fortification, forteresse imprenable contre les fascistes allemands et anglais.

« Faserland » (1995) introduit le thème du voyage, sous forme d’un texte souvent central dans la discussion sur la littérature actuelle allemande telle qu’elle est analysée par les critiques littéraires et les universitaires. En effet, les protagonistes des fictions de Kracht partent dans des voyages qui les emmènent à la recherche d'un moment improbable, et surtout insaisissable, de situations d’immersion, plus ou moins utopiques ou d'expériences spirituelles dans des nation ou du moins des cultures différentes. C’est bien un fantasme allemand.

En 1999, Christian Kracht se réuni avec quatre autres écrivains à l’Hotel Adlon à Berlin. Avec Joachim Bessing, Eckhart Nickel, Alexander von Schönburg et Benjamin von Stuckrad-Barre, ils projettent de jeter les bases d’une « pièce situationniste ». Cette réunion est retranscrite dans le livre « Tristesse Royale » (2001, Ullstein Taschenbuch Verlag; 201 p.) qui ne rencontre pas le franc succès éditorial escompté. Plus tard, Kracht qualifiera cet évènement de « grosse erreur ». Le texte aura toutefois l’effet de renforcer l’existence d’une « popliteratur » fondée sur une équipe d’écrivains, dont Kracht serait en quelque sorte à la tête pensante. Tout le monde n’est pas André Breton, ni Guy Debord pour faire tendance, ni même CF Ramuz pour faire plus simplement hélvète.



« Faserland » suit un narrateur qui voyage en avion ou en train ICE à travers l’Allemagne errant de ville en ville pour finalement arriver à Zurich, où il part à la recherche de la tombe de Thomas Mann. On ne lui a pas dit que ce dernier était enterré dans le caveau de famille à Kilchberg, située sur la rive gauche du lac, tout près d’ailleurs de l’usine de chocolat Lindt. Il y a un magasin d’usine, à la fin de la visite, où les dames se font morigéner, car faisant des provisions de chocolat dans leurs sacs, provisions qui fondent rapidement. Donc, faute de friandises, peut-être le narrateur est-il diabétique, l’errance se poursuit dans les huit chapitres qui suivent. Le tout est rythmé par les incertitudes, les réflexions et les considérations sur le monde qui l’entoure et observe.

C’est finalement un roman sur l'affirmation des marques et de la culture de consommation. C’est ainsi que l’on retrouve 6 fois la mention de Prosecco sur une page, ce vin effervescent étant un sous-produit de notre crémant. Il faut dire, à décharge du voyageur, qu’il s’ennuie, d’un ennui existentiel », ce qui n’est pas une raison ou justification suffisante pour s’alcooliser, surtout avec du mauvais vin. Il est vrai que Jean Paul Sartre et Simone de Beauvoir buvaient. « Plus d'un litre d'alcool par jour - vin, bière, alcool blanc, whiskies, etc ». On sait que le futur philosophe a vomi sur les chaussures du proviseur du lycée Henri IV, avec son camarade Paul Nizan, pour fêter leur réussite au baccalauréat. Sur la tombe de Chateaubriand, au Grand Bé en face de Saint Malo, il s’est content de soulager sa vessie. Serait-ce un signe d’incontinence des philosophes existentialistes.

Un véritable catalogue de marques, à croire que l’écrivain a été sponsorisé. « Sergio, c’est un de ces types qui portent en permanence des chemises Ralph Lauren roses et une vieille Rolex, et s’il n’était pas pieds nus avec le pantalon retroussé il serait chaussé de mocassins Alden, je le vois immédiatement ». Donc, du déjeuner à Sylt dans les iles frisonnes, la plus grande et la plus septentrionale des îles allemandes de la mer du Nord jusqu'à l'hôtel établi de longue date à Francfort, le narrateur conserve partout cette complaisance. « Donc, au commencement je suis chez Fisch-Gosch, à List-auf-Sylt, en train de boire une Jever à la bouteille. Fisch-Gosch, c’est un restau de poisson très célèbre parce c’est le restau de poisson situé le plus au nord de l’Allemagne. Il est à l’extrême pointe de Sylt, juste en bord de mer, et on croit qu’après vient une frontière, mais en fait il n’y a qu’un restau de poissons. Donc, je suis chez Gosch à boire une Jever. Comme il fait un peu froid et qu’il y a un vent d’ouest, je porte une veste Barbour doublée. Je mange ma deuxième portion de scampi à la sauce à l’ail bien que la première déjà m’ait donné mal au cœur. Le ciel est bleu. De temps en temps, un gros nuage se glisse devant le soleil ». La Jever, ou plutôt Jever Pilsener, c’est une bière allemande blonde. Alors que la veste Barbour est une veste à la coupe classique et droite, généralement en toile coton huilée, à manches raglan.

Et cela continue aussi hors établissements. « Au wagon-restaurant, je vide d’affilée quatre petites bouteilles d’Ilbesheimer Herrlich pendant que le soleil se couche sur Husum. Je regarde au-dehors en tartinant un petit pain avec le beurre Meggle placé dans la coupelle en plastique, et la plaine de l’Allemagne du Nord défile, des moutons ». C‘est pire que la pub à la télé. Même si le beurre aux fines herbes du maître beurrier Josef Anton Meggle dont la composition est secrète, je lui préfère celui aux algues de chez Bordier, ou un tout simple beurre au lait cru d’Isigny qui sent la noisette. Tant que l’on en est aux produits laitiers et à la Suisse, il convient de rappeler la différence d’aspect entre le Gruyère et l’Emmental. Le second a des trous issus des gaz de fermentation, alors que le vrai Gruyère, fabriqué dans la ville du même nom n’en a pas. Les meules sont alors quelquefois envoyées à Bâle pour y ajouter mécaniquement les fameux vides.

Bref, on a hâte de le voir arriver à la Zurich Hauptbahnhof, il est vrai, rebaptisée ShopVille. C’est tout dire. Puis de prendre le train pour Kilchberg, il y en a pour 18 minutes et 7.03 €, on peut même payer en euros. Avec 146 connexions par jour de 01.58 à 21.27, il y a de quoi faire et l’arrêt pour le cimetière est celui de la gare ZH Kilchberg Kirche. Après, il faut voir les heures d’ouverture de cimentière, le « gemeinde friedhof kilchberg », il y a même une adresse mail (friedhof@kilchberg.ch), mais j’ignore qui répondra.

Par contre, en tant qu’usager fréquent es transports ferroviaires, il met en garde les autres usagers. « ça me fait penser qu’autrefois je me penchais toujours par la fenêtre, visage au vent, jusqu’à ce que j’aie les yeux larmoyants, et que je me disais, s’il y a quelqu’un aux toilettes en train de faire pipi, la pisse va s’envoler de sous le train et se pulvériser en minuscules gouttelettes sur ma figure, de sorte que je ne m’en apercevrai pas, sauf que j’aurai comme ça une pellicule d’urine sur la figure, et si je passe ma langue sur mes lèvres, je sentirai le goût de cette pisse d’étranger ».



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Eurotrash

Le retour du fils prodigue dans un lieu où aucune famille ne l’attend, si ce n’est une mère volontairement amnésique. Peut-être est-ce cette absence qui est le véritable sujet [...] qui révèle Kracht, en fils caché de Bernhard, et en écrivain d’une profondeur inattendue.
Lien : https://www.transfuge.fr/202..
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Faserland

Il y a parfois des romans dont je me dis que c'est de la bonne, voire de la très bonne littérature, mais que ça n'est pas pour moi. Faserland en est un exemple typique. Si j'en crois la quatrième de couv, c'est même un roman culte pour une génération. Alors je vois venir ceux qui vont dire que Faserland, c'est le roman d'une certaine jeunesse allemande, et que certainement, je suis trop vieux pour comprendre. Peut-être bien, mais quand le roman est paru en 1995, j'avais tout juste 18 ans. Il n'y quand même pas grand chose dans le fil narratif pour soutenir l'attention du lecteur : le narrateur se déplace de villes en villes, plus ou moins au hasard, il y fait des rencontres toutes plus improbables les unes que les autres, et écluse pas mal d'alcool. Il y a certes quelques passages qui m'ont amusé, ou énervé (plus souvent), mais globalement, je me suis ennuyé, je dois le reconnaitre. Mais encore une fois, cela ne signifie pas que ce soit un mauvais roman ; seulement, la rencontre n'a pas eu lieu.
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Imperium

« T'as le look, coco ! »

Comment associer le nudisme et le végétarisme pour un « avenir sans souci », loin du monde civilisé du début du vingtième siècle ? Se rendre dans une colonie de Nouvelle Guinée pour y fonder « l'ordre du soleil » dédié à la culture de la noix de coco !

Telle est l'histoire d'August Engelhardt, aventurier allemand à la recherche du « pouvoir suprême » - Imperium – dont le Suisse Christian Kracht nous narre la biographie (très romancée) dans un style mettant en évidence l'étendue de l'espace et la longueur du temps.

En effet, un « look » inédit, style et regard confondus, pour mettre en exergue la  Cocos nucifera , « couronnement légendaire de la création, fruit de l'arbre cosmique Yggdrasil ! ». Impossible donc, d'adopter une écriture simple, un style passe-partout, pour raconter les bienfaits d'une plante salvatrice portée aux nues.

Je devrais dire « nus », car c'est l'association d'une végétation luxuriante (luxe et riante) vénérée dans le plus simple appareil qui permet d'atteindre la plénitude d'un ascétisme exacerbé. le style employé par l'auteur est par là-même inversement proportionnel à la façon de vivre du héros de l'histoire, qui végète après s'être planté.

Des phrases interminables, utilisant toute la panoplie des signes graphiques à disposition - virgules, tirets, parenthèses – pour exprimer l'emphase d'un monde idéalisé à construire. En somme, se mettre à nu en empilant des couches successives, de façon à passer inaperçu dans un monde qui ne comprend pas les extravagances des illuminés solitaires.

En voici un exemple.

« Et comme celui-ci lui répondait par la négative, il sortit de son sac quelques pamphlets qu'il posa timidement à côté de lui, sur le banc – les écrits de ce swami indien dont les idées originales et le talent rhétorique venaient de faire sensation dans le Nouveau Monde - , ainsi que, miméographié et attaché avec un ruban (la reliure franconienne s'était décollée dès l'arrivée en mer Rouge, à Aden, sous l'effet de la chaleur), le traité qu'il avait lui-même rédigé et qui parlait de la puissance curative du cocovorisme, malheureusement en allemand, de sorte qu'Engelhardt pouvait certes faire état de l'objet, mais non familiariser son nouvel ami avec ses réflexions, formulées par écrit avec un savoir-faire nettement supérieur ».

Il va sans dire que si le livre avait dépassé les 180 pages j'aurais sans doute capitulé avant la fin de l'histoire. J'ai en effet passé la moitié du temps de lecture à revenir sur chaque phrase, au demeurant très bien écrites et sans fausse note, pour m'imprégner de l'ambiance décrite. Une mention particulière à la traductrice Corinna Gepner, qui a dû jongler avec ce style si particulier.

Aussi, je ne saurai dire si j'ai passé un bon moment avec ce roman d'aventures singulier, pétri de grandiloquence et de démesure, qui décrit l'impérialisme décadent d'un occident qui sombra quelques années plus tard dans un fascisme dévastateur. Ce livre fourmille de références et de rencontres, toutes aussi indispensables qu'anecdotiques. Je n'ai pas envie de vous révéler le déroulement de cette histoire véridique, faite de petits riens étirés à l'extrême, sorte d'exil onirique. Il y a du Conrad et du Rabelais dans le procédé narratif, agrémenté de sauce proustienne. Un cocktail à la noix.

« T'as le look, coco ! »



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Imperium

« Imperium » de Christian Kracht, traduit par Corinna Gepner (2017, Phébus, 192 p.) peut surprendre, c’est le moins que l’on puisse dire. Tout d’abord c’est un roman d’un écrivain suisse de langue allemande. Il est vrai qu’il né à Saanen, là où se trouve la station de Gstaad, dans une famille dont le père est directeur du groupe Axel Springer. Il y a pire comme début dans la vie. Etudes en Allemagne, puis à New York, et voyages dans le monde, dont il tire « Gebrauchsanweisung für Kathmandu und Nepal » (Portrait de Katmandou et du Népal). D’autres ouvrages dont « Faserland » et « New Wave : Ein Compendium », tous traduits dans d’autres langues parfois surprenantes (letton, estonien, hébreu, russe, croate). Certes la proximité des milieux de presse doit aider. A noter aussi qu’il fonde un magazine culturel, un peu décalé « Der Freund » alors qu’il était à Katmandou. Huit numéros ont ainsi été produits pendant deux ans, qui sont maintenant introuvables car très recherchés.

Des suisses allemands, on connaissait Martin Suter et ses romans plus ou moins policiers « Le Dernier des Weyenfeldt », « Le Cuisinier » ou « La face cachée de la Lune », tous chez Christian Bourgois. Ce dernier titre est plus apprécié pour ses recettes de champignons par certains. Une description assez juste des milieux, protestants, de la finance de Zurich, mais avec un humour certain. On connait aussi Jonas Lüscher, lui aussi de Zurich et ses romans « Le Printemps des Barbares » et « Monsieur Kraft ou la Théorie du Pire ». A nouveau un certain milieu de traders et de financiers, de la City pour le premier livre, un professeur de rhétorique pour le second. On connait aussi les « Ponk et Replonk », qui sont eux du Jura, puisque situés à La Chaux de Fonds. Ils ont traduit leurs cartes postales en allemand. C’est une façon d’exporter l’humour. D’eux j’adore « Le Percement de l’Arc de Triomphe » et l’album de la cavalerie de montagne suisse, avec des chevaux à pattes inégales. Un faible aussi pour l’album de « La Face Cachée du Léman » avec en particulier, une vue de son point le plus haut. De plus, je ne manque pas de m’offrir leur calendrier, qui m’octroie chaque année un 13ème mois supplémentaire. A propos de la ville suisse, je ne résiste pas à citer Francis Blanche « Ami qui visite la Suisse / Malheur à toi si tu confonds / Pour éviter La Chaux-de-Fonds / Il faut passer par Saint-Sulpice ».

Pour en revenir à « Imperium » et tout de suite partir dans une autre digression. Lire ce petit livre de moins de 200 pages m’a tout de suite fait penser à Joseph Conrad et son « Cœur des Ténèbres ». Il faut dire que l’action se passe aux alentours de 1900, tout d’abord en Allemagne, puis en Indonésie. Et là, c’est le dépaysement. On voyage en Nouvelle Poméranie « Neu-Pomern » et en Nouveau Mecklenbourg « Neu-Mecklenburg », d’où l’origine de la Mer de Bismarck au Nord-Est de la Nouvelle Guinée. Tout comme Léopold II a annexé le Congo, Bismarck crée la « Schutzgebiet der Neu-Guinea Kompanie » avec le slogan « Le marchand doit précéder le soldat ». On reconnait bien là l’esprit pratique allemand. A la différence du Kurtz de Joseph Conrad, August Engelhardt est naturiste et cocovore. Il est aussi originaire de Nuremberg, ce qui n’explique rien. On imagine Kurtz décorant l’allée qui mène chez lui avec des pots dans lesquels il aurait planté des noix de coco sculptées, leur donnant un visage humain. De même, je vois très bien le capitaine B.J. Willard, de la 1st Cavalry Division, bombarder le village avec des noix de coco dans « Apocalypse Now », comme les anglais l’ont fait sur des terrains d’aviation allemands factices avec des bombes en bois. Le tout sur un air de Chevauchée des Walkyries par Spike Jones, à moins que cela ne soit par P.D.Q. Bach.

On suit donc le projet d’August Engelhardt. Il est sur le « Prinz Waldemar » en route pour Herbertshöhe, maintenant rebaptisée Kokopo, en Nouvelle Bretagne. Décidément, on ne peut plus faire confiance aux cartes. En tout cas, la ville, nouvelle capitale de l’ile, « est située dans la Baie Blanche, près de la Baie des Gazelles ». On y trouve même deux hôtels, le « Fürst Bismarck » et le concurrent « Deutscher Hof ». Ach, le bon temps des Kolonies. Cela me rappelle un authentique BierKeller à Swakopmund, en Namibie, décoré avec les fanions de la coupe du monde de football. Bref le « jeune August Engelhardt de Nuremberg, barbu, végétarien, nudiste » voyage. Non pas pour son plaisir, mais pour acheter une terre, devenir planteur et vanter les bienfaits de « cocos nucifera ». Sur le même bateau se trouve Hartmutt Otto, également planteur et « grossier marchand d’oiseaux », mais qui est dans une chaise longue au doux nom de « Bombay fornicator », « en raison de son repose-jambes en bois, que l’on pouvait faire pivoter vers l’avant ». Pour toute commande, voyez votre marchand de meubles suédois préféré. Il est vrai que le jeune August a des antécédents. Son oncle Kuno n’a-t-il pas essayé de lui faire fumer du jambon, « en roulant un mince lambeau de chair pour en confectionner un cigare rose » avant de l’allumer. Ces teutons sont véritablement des grands enfants.

Donc August arrive sur ses terres. « En compagnie du jeune Makeli, il parcourait l’ile tout nu, avec un simple sac sur l’épaule ». Il vient de publier « Un avenir sans souci » et il va fonder une secte « L’Ordre du Soleil ». Il expose dans son livre les principes d’une vie libre de toute contrainte, près de la nature et dont le régime alimentaire est basé sur la noix de coco. « Le cocovorisme nudiste est la volonté de Dieu. La pure diète de coco rend immortel et unit à Dieu ». Le but de ces efforts est l’instauration d’un « Empire international et tropical du fructivorisme ».

Et puis, comme cela était prévu dans le scénario original, tout se complique, sinon on aurait eu une nouvelle d’une vingtaine de pages. Il y a l’apparition d’autres personnages. Le gouverneur Hahl, qui essaye de justifier sa position en faisant régner un semblant d’ordre. Mais, il y a plus important. L’ensablement de la Baie Blanche qui oblige de transférer la capitale Herbertshöhe à Rabaul. Cela se fera en reconstruisant tout pareil, y compris les deux hôtels « Fürst Bismarck » et son concurrent « Deutscher Hof » à l’identique. Il y a des personnages nouveaux, comme Max Lützow, qui débarque sur l’île avec un piano. Il emménagera chez August, mais les relations vont vite s’envenimer. Tout comme il y eut Aueckens, fervent adepte des théories cocovores, mais dont les tendances homosexuelles le poussent à s’intéresser de près et de dos au jeune Makeli. « Lorsque nous revoyons Aueckens, il est mort […] le crâne fracassé laissant échapper un peu de masse cervicale. Les mouches se délectent ». Le représentant du gouverneur conclut à la chute d’une noix, le tout sans même se déplacer. Il y a aussi le capitaine Christian Slütter, tout droit sorti de « Corto Maltese », avec son cargo le « S.S. Jeddah ». Possible allusion à «La Ballade de la Mer Salée » de Hugo Pratt. Il affronte une tempête digne du « Typhon » de Conrad. Mais je lui préfère la tempête de Malcolm Lowry dans « Lunar Caustic », avec son bateau qui transporte des pensionnaires spéciaux. « Il n’y avait pas que des lions, mais aussi des éléphants, des tigres, des jaguars, tous destinés à un zoo ». Lors d’un de ses ultimes voyages, Slütter ramènera Pandora, « la fille unique de Frédéric Thesiger Viscount Chelmsford, le gouverneur de New South Wales, qui s’est échappée d’un internat à Sydney ». Cette jeune rouquine se fera tatouer sur le dos, la scène de tempête vécue sur le « Jeddah » par Apirana, « le Maori au visage orné de tatouages impressionnants ». C’est le « Queegeg » de Melville qui revient hanter les mers du Sud. Enfin, on découvre les peintres Emil Nolde et Max Pechstein, qui profitent d’une tournée pour revoir leur choix des couleurs et fixer des paysages tropicaux sur leurs toiles. On assiste aussi à quelques scènes de cannibalisme, mais c’était au détriment du missionnaire. Le chef local « tint absolument à consommer en dessert l’oreille bien croustillante du missionnaire, rôtie sur une pique en bois ». Comme quoi ces livres d’aventures sont aussi des sources de recettes culinaires.

On ne peut passer sous silence le scandale que ce texte a provoqué à sa sortie. Il reçoit le prix Wilhelm Raabe « Wilhelm-Raabe-Literaturpreis » en novembre 2012. Mais un violent article de Georg Diez dans « Der Spiegel » l’accuse de proximité avec la « nouvelle droite ». On traite l’auteur de « Céline de sa génération », « Valet de la Bonne Pensée », « très consciemment en dehors de la démocratie ». Bref, il dérange car il rappelle le passé colonialiste allemand. Et pourtant l’auteur est clair sur ses intentions. «Si, par moments, on ne peut s’empêcher d’établir des parallèles avec un compatriote plus tardif, lui aussi romantique et végétarien, qui aurait peut-être préféré rester devant son chevalet, ceci est tout à fait voulu et d’une judicieuse cohérence». A priori, cette référence a dû titiller certains allemands, nostalgiques d’un colonialisme passé et révolu. Il est vrai qu’il y a quelques passages où l’on parle d’un juif, « un émissaire poilu, blême malpropre et levantin de l’antigermanité ». Mais une demi page plus loin, Kracht écrit « Engelhardt n’adhérait pas à cette mode naissante de la diabolisation du Sémite que l’épouvantable Richard Wagner avait sinon inventée, du moins rendue présentable par ses écrits et sa drôle de musique ampoulée ».

Le scandale prend du volume et se termine par un recueil de textes édités par Hubert Winkels « Christian Kracht trifft Wilhelm Raabe » (2013, Suhrkamp, 157 p.). Cet ouvrage reprend une vingtaine d’articles, dont celui original de Georg Diez dans « Der Spiegel », ainsi qu’une réponse de Christian Kracht. Les détracteurs font état d’échanges entre Kracht et David Woodard à propos d’une colonie aryenne « Nueva Germania » au Paraguay suggérée par Elizabeth Förster-Nietzsche, la sœur de Nietzsche. Il est exact que Woodard s’est intéressé à cette ancienne colonie, utopique, végétarienne et féministe. Après une première visite, il ne poursuit pas les relations, mais s’en sert pour des écrits futurs. La réponse de Christian Kracht est brève « Même avec la meilleure volonté du monde, je ne peux y trouver aucune croix gammée ». D’ailleurs la seule allusion est celle d’un « éclat d’obus […] qui s’enfonce, tel un ver blanc, dans le mollet du jeune caporal de la 6e division de réserve bavaroise ». Ce passage évoque, brièvement, il est vrai, la première guerre mondiale, avant que Engelhardt ne soit recueilli à Guadalcanal par les américains où « on lui donne à boire un liquide brun sombre, sucré, absolument délicieux dans une jolie bouteille légèrement resserrée en son milieu ». C’est la déchéance du cocovore.

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Faserland

La littérature n'est pas aussi accessible que le cinéma pour le grand public car l'art de l'écriture, s'il semble plus facilement accessible - nul besoin d'argent ou de moyens techniques - est en fait aussi complexe, et même plus complexe que le cinéma. Combien de fois, d'ailleurs, oublie-t-on de mentionner qu'un film a un livre pour origine ? Un savoir-faire qui n'est pas enseigné car le talent cela ne s'enseigne pas, c'est naturel. Par conséquent, de nombreux lecteurs ne comprennent pas les sens sous-jacents, ils s'indignent qu'un protagoniste boive à chaque page et ne donne pas un sou aux valeurs du monde libéral. Je suis sincèrement déprimée par cette attitude. Mais il n'y a pas d'affaire plus ennuyeuse que d'expliquer des livres...



Christian Kracht, l'auteur de "Faserland", est un garçon talentueux et mélancolique. e protagoniste de Kracht à "Faserland" passe d'une soirée de bar à une rave-partie, puis à une villa sur le lac de Constance et achève enfin ses déplacements chaotiques en Suisse idyllique. Tout, autour, tourmente l'âme d'un jeune alcoolique : les employés de l'aéroport, sous les regards réprobateurs desquels il remplit ses poches de yaourt, une voisine décrépite dans l'avion, dont les taches de rousseur se sont transformées en taches séniles sans transition douce, les homosexuels sur une plage grecque abandonnée et, bien sûr, ses amis lui offrant une drogue et un gangbang avec la participation d'une mannequin noire.



Douloureusement sensible comme un personnage de Proust le protagoniste dans "Faseland" se souvient de ses peines d'adolescence, de sa déception et de la honte associées à son premier amour, car alors qu'il rendait visite aux parents de sa première petite amie, il a fait pipi dans sa culotte et puis il s'est enfui pour de bon.



Kracht est un enfant d'un monde suranné, il est né dans les années soixantes et son modèle de comportement dépassé n'est plus adapté au mode de vie contemporain, sa personnalité est une relique étrange, regardons-le ensemble. C'est comme s'il se trouvait dans le plexus solaire de la modernité, parmi des junkies, des clochards riches et des filles vaguement séduisantes, dont aucune n'ose approcher notre héros douloureusement timide...



Je suis très proche mentalement de ces personnes vulnérables, observatrices qui écrivent dans l'angoisse en écoutant rêveusement les cris des mouettes au loin et avec un pessimisme sombre se rendant compte de tout le besoin pressant d'asservissement corporel et social.
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Imperium

Je n'avais jamais entendu parler ni rien lu de l'histoire tragi-comique, mais vraie (j'ai vérifié sur Wikipédia) d'August Engelhardt racontée avec dérision et ironie par Christian Kracht (rien à voir avec Velcro), auteur suisse de langue allemande que je découvre également.

August Engelhardt est un jeune allemand rêveur, sensible et fragile, adepte du nudisme et du végétarisme, ne supportant plus une société bourgeoise conformiste. Il s'exile au tout début du 20ème siècle en Nouvelle-Guinée, dont une partie était alors un protectorat allemand, pour y fonder une communauté. D'une grande naïveté, il se fera voler son argent et perdra une partie de sa bibliothèque au cours du voyage et se fera escroquer dans la négociation de l'achat d'une petite île.

Ce doux rêveur a une idée fixe : la noix de coco. Pour lui, elle est à la base de toute la vie. Elle permet de se nourrir, de se désaltérer, de se chauffer et, éventuellement, de l'utiliser pour la construction ou la confection d'outils. Vivant nu et ne se nourrissant que de noix de coco, il en fera la culture, aidé par les habitants de la petite île de Kabakov dont il a fait l'acquisition. Il ira au bout de ses idées mais sans jamais parvenir à établir "sa nouvelle société."

Et, comme beaucoup de rêves fous, insensés, utopiques, l'aventure se terminera par un fiasco dans la plus grande confusion.

Kracht nous raconte avec ironie, humour et parfois cynisme, la société coloniale de l'époque , le petit monde des colons allemands « des allemands blafards, hirsutes, vulgaires, ressemblant à des cochons de terre, qui s’éveillaient lentement de leurs sommes digestifs, des allemands au zénith de leur influence dans le monde », français « dans leur élégance autiste, les français étaient certes des snobs patentés, mais comme leur culture se définissait par la langue, et non comme en Allemagne par le mythe ronflant éthnique, la loi du sang, ils paraissaient plus hétérogènes que les allemands chez qui il n’y avait pas de demi-teinte, pas de nuance, pas de dégradé. » , les indigènes nonchalants, avec une écriture subtile, intelligente" et riche de détails authentiques.

A lire pour découvrir l'auteur et son style particulier.
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Faserland

Quel étrange voyage… Curieuse de découvrir ce roman culte de la littérature allemande, j’avais quelques attentes sur les désillusions de cette jeunesse dorée dans les années 90.

Je ne m’attendais pas que ma lecture soit aussi… Déroutante ?



Ce road-trip, teinté de désespoir, se fait en compagnie d’un narrateur cynique, arrogant, et quelque peu dépressif. Il nous relate, dans les moindres détails, son voyage dans une partie de l’Allemagne. Comme lui, lorsqu’ils croisent des connaissances lors de sa pérégrination, j’ étais à moitié attentive à ses dires, tout en grommelant à moi-même que ce n’était que les états d’âme d’un gosse de riche. Je commençais à avoir déjà une lassitude alors que je n’étais qu’au début du roman.



Puis, il commence à nous parler de certains souvenirs de son enfance, de son meilleur ami, même de la première fille qu’il a aimé. Mais chacun d’entre eux se finit sur une note négatif. La lassitude que j’ai ressenti, c’est alors changé pour de la curiosité. Je commençais à voir les fêlures de ce personnage qui se perd dans ses désillusions. Celles-ci paraissent plus évidentes lorsqu’il échange avec ses « amis » qui eux, dénués d’espoir, décident de se perdre dans l’alcool et les drogues. Et encore plus, lorsqu’il parle des villes détruites sous la Seconde Guerre Mondiale qui bien que reconstruite, gardent toujours en elle ses cicatrices. D’ailleurs, je trouve dommage que l’on ne parle que des villes de l’Ouest et qu’il n’y est pas d’illusion sur la chute du mur de Berlin.



Au fil des pages, j’ai continué à marcher au bord du précipice en sa compagnie, me demandant de quel côté la chute du roman allait nous conduire…



Conclusion:



Faserland fut une lecture intéressante, parfois déroutante, par le style atypique de l’auteur qui a su retranscrire la mélancolie de son narrateur dont on ne saura jamais le nom.



Ce roman restera pour moi cet étrange voyage au bord d’ un précipice en compagnie d’un personnage cynique. A vous de voir si cette « promenade » vous attire ou non.



J’ai quitté la dernière page avec le désir de ne pas perdre, malgré les épreuves vécues et celles à venir, cette lueur d’espoir. Elle aura beau vaciller, je la conserverais tant que j’en ai la force…
Lien : https://klolianebooks.wordpr..
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Faserland

J'ai une relation particulière avec l'Allemagne des années 90, et cette génération de jeunes paumés par cette réunification, ou plutôt unification de deux pays qui n'avaient plus grand chose en commun. Comment trouver ces marques dans la nouvelle distribution géopolitique mondiale, qui les affecte de plein fouet ? Cette époque est celle de mon adolescence, celle de séjours en Allemagne et de rencontres pour certaines très marquantes...

J'avais vraiment envie de découvrir ce roman, cette traversée d'un pays en mutation aux côtés de jeunes désabusés. On traverse cependant uniquement l'ex-RFA, aux côtés de jeunes privilégiés de l'ouest, occultant de fait un pan de l'histoire que je pensais trouver.

Passé ce moment, j'ai pu enfin détester en toute quiétude notre anti-héros plein aux as, qui accorde une importance démesurée aux marques comme marqueurs de réussite sociale. Il est désabusé, ironique, accro à toutes sortes de substances, cynique à souhait, bref un sale gosse de riche qu'on a envie de claquer !

Et pourtant je l'ai suivi dans son voyage, j'avais envie de voir si il allait réussir à éviter le mur qui se profilait au bout de sa route... On alterne les moments présents avec des divagations dans le passé, quand, fatigué ou trop stone, les souvenirs remontent à la surface.

Ce court roman a su me retenir jusqu'au bout, jusqu'à cette fin suspensive, même si assez inéluctable, car je voulais justement voir comment la conclusion serait gérée par l'auteur.

Ce roman ne sera pas une lecture inoubliable, loin de là, mais la découverte de la plume d'un auteur, et d'un style atypique.

J'ai reçu ce livre des éditions Phébus dans le cadre d'une masse critique Babelio. Merci à eux pour la découverte.
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Faserland

Une traversée de l'Allemagne du nord - Sylt - au sud jusqu'à la Suisse par un homme sans but, cynique, légèrement misanthrope mais recherchant la compagnie, ayant un penchant pour les fêtes, les beuveries, et un certain souci hygiéniste.





Cet homme, on le voit assez maniaque, pointilleux, méfiant par rapport au manque d'hygiène. Il est seul, et on ne lui connaît aucun but réel à ce voyage avec escales. De ville en ville, il atterrit chez de pseudo vieux amis chez qui il squatte logement et soirées. De cuite en cuite, il revit certains souvenirs, subit quelques déceptions, et puis il se rapproche du sud du pays.



Comme un roadtrip un peu déjanté, on suit un homme qui n'est pas à la rue (il a toujours assez de ressources financières pour loger ou payer le train), qui n'est pas malade, qui est juste un peu dépressif et désabusé sur l'état de la jeunesse allemande des années 90's, et qui heureusement sait parfois être assez drôle.



Initialement paru dans sa version allemande en 1995, Faserland serait un roman culte. Pour moi c'était juste - déjà - un roman.


Lien : https://chezlorraine.blogspo..
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Imperium

Un grand merci à Babelio qui, par les judicieuses informations envoyées à ses membres m'a informé de cette parution chez Libretto. Sans cette aide du site dédié aux livres et à leurs lecteurs, je serais sans doute passé à côté de ce bijou littéraire où il est question d'utopie et d'une vie passée à accomplir son rêve tel un Lawrence d'Arabie. Cela fait du bien d'être rendu en un temps où les hommes avaient assez de cervelle pour ne pas se soumettre aussi aveuglément et impunément à l'ubérisation des esprits et à la dictature des gafa. Un temps aussi où on pouvait envisager de découvrir et de vivre dans des régions du monde où l'universalisme de la mondialisation malheureuse n'avait pas encore aplani toutes les différences.
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Imperium

Voilà l'histoire étonnante d'August Engelhardt (1875 - 1919), un Allemand hors du commun, marginal, végétarien et adepte du nudisme. Il décida de quitter son pays et une société qu'il ne supportait plus et s'exila en Nouvelle-Guinée dont une partie était alors un protectorat allemand. Il investit une petite île pour faire vivre ses idées, vivant nu et se nourrissant uniquement de noix de coco, persuadé que c'était là l'aliment idéal, contenant tous les nutriments nécessaires à l'homme, idée farfelue !

L'auteur nous dresse un portrait cruel de la société coloniale de l'époque, usant d'un style ironique, caustique et sarcastique, multipliant les épisodes les plus loufoques.

Ce livre se lit avec grand plaisir, grâce également, il faut le souligner, à la superbe traduction de Corinna Gepner.
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