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Citations de Colm Toibin (210)


Elle scrutait ce ciel oppressant, devinait l'air saturé d'humidité au-dehors, et savait en même temps qu'elle aurait beau observer cette scène, l'étudier intensément en réfléchissant aux couleurs, elle n'arriverait jamais à la rendre comme elle le voulait.
Elle simplifia ; laissa tomber l'immobilité, la lumière écrasée tombant du ciel bas. Elle accumula les nuages à l'aquarelle sur le papier en accentuant la matière, le gris et le noir, le blanc métallique. Puis elle interrompit son travail et se tourna à nouveau vers la fenêtre.
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Deux platanes élagués entouraient une fontaine. Les arbres avaient été réduits à l'essentiel : des branches noueuses déformées et grotesques comme des moignons de bras et de jambes. On n'arrivait pas à imaginer qu'ils puissent repousser un jour.
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incipit :
"Eilis Lacey, sitting at the window of the upstairs living room in the house on Friary Street, noticed her sister walking briskly from work. She watched Rose crossing the street from sunlight into shade, carrying the new leather handbag that she had bought in Clery's in Dublin in the sale. Rose was wearing a cream-colour cardigan over her shoulders. Her golf clubs were in the hall ; in a few minutes, Eilis knew, someone would call for her and her sister would not return until the summer evening had faded."
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She wished now that she had not married him, not because she did not love him and intend to return to him, but because not telling her mother or her friends made every day she had spent in America a sort of fantasy, something she could not match with the time she was spending at home.
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- Vous ne devriez pas venir ici toute seule, dit sœur Thomas. J’étais à Blackwater ce matin rendre visite à une amie. Après elle vous a vue, vous dormiez dans votre voiture, et ensuite vous avez pris la route de la mer. Elle se faisait du souci pour vous, alors elle m’a appelée. Et je suis descendue sur la plage dans l’espoir de vous voir.
- Qui m’a vue à Blackwater ?
- Je me suis dit que j’allais descendre au bord de l’eau, enchaîna sœur Thomas avec douceur. Je ne quitte pas souvent la maison. Aujourd’hui, avec cette lumière, on a plus l’impression d’être au ciel que sur terre…
- Je l’ai repérée, bien sûr. Une femme qui ne peut s’empêcher de se mêler des affaires d’autrui.
- C’est une façon de voir. Ou une femme qui se soucie de vous.
Sœur Thomas lâcha les mains de Nora.
- Je n’ai pas été surprise de vous voir. Il était écrit que nous nous reverrions. Ce sont les voies du Seigneur.
- Ne me parlez plus des voies du Seigneur. Ne me parlez pas ainsi !
- Quand Maurice était aux dernières extrémités, j’ai prié le Seigneur de soulager ses souffrances et les vôtres. Je n’ai pas de besoins personnels, et je ne Lui avais rien demandé depuis longtemps. Mais je Lui ai adressé cette prière, et Il ne m’a pas exaucée. Il devait y avoir une raison à cela et cette raison nous est cachée. Mais je sais qu’il veille sur vous, et peut-être est-ce pour cela que nous nous sommes croisées aujourd’hui afin que je puisse vous le dire.
- Il ne veille pas sur moi ! Personne ne veille sur moi !
- J’ai su en me réveillant ce matin et en disant mes prières que je vous verrais.
Nora resta muette.
- Alors rentrez maintenant avant que le brouillard ne tombe et que vous ne puissiez plus voir la route en conduisant. Les garçons ne vont pas tarder. Vous les trouverez à la maison, de retour de l’école, à vous attendre.
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- Maman, il n’a pas le droit d’entrer dans notre chambre.
- Conor est la discrétion personnifiée.
- Ça veut dire quoi, « la discrétion personnifiée ? demanda Conor.
- Ça veut dire que tu es un sale petit fouineur, répliqua Fiona.
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Mark avait une phrase qui avait toujours fait beaucoup rire Nora et Maurice : « Un objet n’est cher que le jour où on l’achète. »
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Thomas commença à se rendre à des réceptions où il pensait pouvoir croiser Schönberg. De tous les artistes allemands, Schönberg était selon lui le plus important.

Avec son invention du dodécaphonisme, il avait établi de façon très claire la théorie de l’atonalité en composition classique. La musique allemande en avait été changée de façon fondamentale.

Thomas ne souhaitait pas devenir proche de Schönberg ni parler avec lui de son travail. Il voulait l’observer, se faire une idée de lui. Depuis le début, depuis leur toute première rencontre, il savait presque ce qu’il était en train de faire.

Pour son roman, il imaginait un compositeur vivant en Allemagne dans les années 1920 ; un homme qui avait scellé un pacte avec une force obscure afin de réaliser sa grand ambition. Il voyait déjà la forme du livre qu’il écrirait. Son narrateur s’appellerait Zeitblom ; ce serait un humaniste allemand, ami du célèbre compositeur. Zeitblom, dans le roman, serait l’observateur, celui qui notait et filtrait l’information. L’autre protagoniste, le musicien de génie, serait un personnage hanté, sombre, inaccessible. Il semait la destruction, y compris, à la fin, la sienne propre. L’âme de ceux qui l’approchaient se flétrissait à son contact.

Thomas sourit à la pensée que les doux cieux californiens, les beaux matins calmes où il prenait son petit déjeuner au jardin, l’abondance, la beauté sans faille, n’avaient pas réussi à le faire changer. Les ciels gris, les printemps pluvieux, les longues nuits d’hiver, la lumière rasante sur l’Isar, la météo rétive de Lübeck, tout cela avait forgé une sensibilité si compacte qu’elle ne pouvait être modifiée ni même affectée par un séjour prolongé au paradis. Ainsi; son roman ne montrerait aucun signe qu’il ait jamais quitté l’Allemagne.
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Mes parents aiment la musique, les livres, la peinture et la compagnie des gens d’esprit, tout comme mes frères et tout comme moi. Il est impossible de réduire tout cela à une religion que nous ne pratiquons même pas. C’est une idée absurde.
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Quelque chose lui apparut alors. Il vit dans son entièreté le roman auquel il songeait depuis un certain temps. Il allait se réinventer lui-même dans le rôle d’un enfant unique et il transformerait sa mère en une riche héritière allemande délicate et musicienne. Il ferait de sa tante Elisabeth une héroïne fantasque. Le héros ne serait pas une personne. Ce serait la firme familiale elle-même…
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Elle s'agenouilla devant la cheminée et commença à les déposer une à une dans le feu. Elle pensa à tout ce qui s'était passé depuis que ces lettres avaient été écrites, et qu'elles appartenaient désormais à un temps révolu, et qui ne reviendrait pas. C'était ainsi.
C'était ainsi.
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Ce fut au bout d'un mois seulement, après quatre ou cinq leçons, qu'elle s'aperçut que la musique l'éloignait de Maurice, l'éloignait de la vie qu'elle avait eue avec lui, et de la vie qu'elle avait avec les enfants. Ce n'était pas seulement le fait que Maurice n'avait pas l'oreille musicale et que la musique était une chose qu'ils n'avaient jamais partagée. C'était l'intensité de ces moments ; elle était seule avec elle-même en un lieu où il l'aurait jamais suivie, même dans la mort.
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- La vie a été dure pour elle, dit-il. La vie elle-même semble être à l'origine de sa maladie.
- La vie est dure pour nous de façon générale, répliqua Constance. L'écart est si grand.
- Vous voulez dire entre l'imagination d'Alice et ses limites ?
- Je veux dire, pour une femme, entre le fait de se servir réellement de son intelligence et les conséquences sociales de cela. Alice a fait ce qu'elle devait faire, et je l'admire.
- Elle n'a rien fait, sinon rester au lit.
- Précisément.
- Je ne comprends pas.
- Ces conséquences s'insinuent jusque dans la moelle de l'âme.
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Le fait que la porte de sa chambre demeure fermée et que les autres respectent sa solitude devinrent pour Henry les conforts cardinaux de l'existence. Il faisait une apparition au moment des repas et se laissait taquiner de bonne grâce sur son silence, sa pâleur, son sérieux et son austérité. Rien n'avait plus d'importance désormais que le temps magique qu'il passait en compagnie de la Revue des Deux Mondes, mais aussi de Balzac, dont les livres parlaient d'un pays qu'il n'avait pour sa part qu'entraperçu - assez cependant pour comprendre que lui-même ne disposerait jamais d'un sujet aussi riche, complexe, suggestif et vivant que la France de la Comédie humaine.
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Henry offrit à son histoire tout ce qu'il connaissait : sa vie et celle d'Alice au cours des années où ils avaient été seuls en Angleterre ; la crainte, qui avait toujours hanté sa famille, que la forme noire menaçante puisse un jour revenir, se manifester à la fenêtre et contraindre leur père à se recroqueviller en hurlant de terreur ; et les années qui l'attendaient, lui, dans une vieille maison où il irait bientôt vivre comme sa gouvernante, plein d'espoir, mais aussi d'une appréhension qu'il ne pouvait effacer.
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Henry pensait qu'une histoire devait être capable de suggérer tout et n'importe quoi, y compris le plus invraisemblable. Ainsi, il autorisait sa gouvernante à se raconter des histoires, chose qu'il n'avait permise à aucun de ses personnages auparavant ; il lui permettait de jouir du danger, de lui faire signe, de l'aguicher, de le désirer. Il prenait un immense plaisir à lui faire peur. Il transforma la solitude, l'isolement de son héroïne en un désir brûlant de rencontrer quelqu'un, d'apercevoir un visage à la fenêtre ou une silhouette au loin.
Ce désir, il le savait, lui viendrait à lui aussi quand la porte du jardin grincerait, quand les branches des arbres fouetteraient ses vitres pendant qu'il lirait le soir à la lueur de la lampe, ou qu'il s'allongerait sans trouver le sommeil dans la vielle maison de Rye, et alors - juste avant que de plus nobles pensées aient l'occasion de faire surface - sa première impulsion serait d'accueillir à bras ouverts ce qui se présentait ainsi pour rompre la triste et impuissante monotonie du moi ; il éprouverait l'espoir forcené que cela soit enfin arrivé, quel que soit cela. Même sous sa forme la plus sombre, cela lui offrirait le même instant de décharge pure et intense que la foudre à un paysage craquelé par la sécheresse.
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Il se demanda si pareille chose était arrivée à d'autres écrivains avant lui, si Hawthorne ou George Eliot avaient écrit pour faire revivre les morts, travaillant jour et nuit, tel un magicien ou un alchimiste, défiant le destin, le temps et tous les éléments, dans le seul but de recréer une vie sacrée.
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De retour chez lui, la terrasse était sa loge d'opéra, du haut de laquelle embrasser du regard tous les royaumes de la terre. Sa terrasse, pensait-il, était aussi aimable qu'une personne, et peut-être plus encore.
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Il s'aperçut qu'il ne voulait même plus que le passé lui soit rendu ; il avait appris à ne pas demander cela. Ses morts ne reviendraient pas. Libéré de la crainte de les voir partir, il éprouvait cet étrange contentement de ne rien désirer désormais sinon que le temps passe avec lenteur.
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Elle s'observait elle-même avec intérêt, guettant les premiers signes d'agonie, aussi intrépide face à la mort qu'elle était craintive face à tout le reste. Elle n'appréciait guère le clergyman qui occupait l'appartement en dessous du sien, et exprimait souvent une angoisse à l'idée que, si son état venait brusquement à s'aggraver en pleine nuit, il pourrait s'aviser de lui administrer les derniers sacrements avant que quiconque ait pu l'en empêcher.
- Imaginez cela, ouvrir les yeux pour la dernière fois et découvrir en face de soi ce clergyman aux airs de chauve-souris.
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