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Citations de Emily St. John Mandel (366)


Les premières années, il leur était arrivé de jouer davantage de pièces contemporaines, mais le plus étonnant, ce qu'aucun d'entre eux n'aurait imaginé, c'était que le public semblait préférer Shakespeare aux autres oeuvres de leur répertoire.
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Si ça avait été un autre que Hua, Jeevan ne l'aurait pas cru, mais il n'avait jamais connu un homme aussi doué pour l'euphémisme. Si Hua disait qu'il s'agissait d'une épidémie, c'est que le mot épidémie n'était pas assez fort. Jeevan fut soudain terrassé par la certitude que cette maladie décrite par son ami allait être la ligne de démarcation entre un avant et un après, un trait tiré sur sa vie
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Liste non exhaustive :
Plus de plongeons dans des piscines d’eau chlorée éclairées en vert par en dessous. Plus de matchs de base-ball disputés à la lumière des projecteurs. Plus de luminaires extérieurs, sur les vérandas, attirant des papillons de nuit les soirs d’été. Plus de trains filant à toute allure sous la surface des métropoles, mus par la puissance impressionnante du troisième rail. Plus de villes. Plus de films, sauf rarement, sauf avec un générateur noyant la moitié des dialogues – et encore, seulement les tout premiers temps, jusqu’à ce que le fuel pour les générateurs s’épuise, parce que l’essence pour voitures s’évente au bout de deux ou trois ans. Le carburant d’aviation dure plus longtemps, mais c’était difficile de s’en procurer.
Plus d’écrans qui brillent dans la semi-obscurité lorsque des spectateurs lèvent leurs portables au-dessus de la foule pour photographier des groupes en concert. Plus de scènes éclairées par des halogènes couleur bonbon, plus d’électro, de punk, de guitares électriques.
Plus de produits pharmaceutiques. Plus aucune garantie de survivre à une égratignure à la main, à une morsure de chien, à une coupure qu’on s’est faite au doigt en éminçant des légumes pour le dîner.
...
Plus d’internet. Plus de réseaux sociaux, plus moyen de faire défiler sur l’écran des litanies de rêves, d’espoirs fiévreux, des photos de déjeuners, des appels à l’aide, des expressions de satisfaction, des mises à jour sur le statut des relations amoureuses grâce à des icônes en forme de cœur – brisé ou intact –, des projets de rendez-vous, des supplications, des plaintes, des désirs, des photos de bébés déguisés en ours ou en poivrons pour Halloween. Plus moyen de lire ni de commenter les récits de la vie d’autrui et de se sentir ainsi un peu moins seul chez soi. Plus d’avatars.
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Ce qui a été perdu lors du cataclysme: presque tout, presque tous. Mais il reste encore tant de beauté: le crépuscule dans ce monde transformé, une représentation du Songe d'une nuit d'été sur un parking, dans la localité mystérieusement baptisée St Deborah by the Water, avec le lac Michigan qui brille à cinq cents mètres de là.
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Elle avait l'impression d'avoir franchi la frontière du globe et atterri sur une planète plus froide, plus éloignée du soleil. Des aurores boréales éclairaient le ciel quasiment toutes les nuits, ondoyantes vapeurs de vert et de jaune qu'elle observait des heures durant, assise seule devant la fenêtre de sa chambre d’hôtel, toutes lumières éteintes, enveloppée dans des couvertures.
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FD : Les autres villes que vous traversez sont-elles très différentes d’ici ?
KR : Celles où nous allons plus d’une fois sont assez semblables à New Petoskey. Il y en a d’autres où nous ne retournons jamais, parce qu’on sent tout de suite qu’il s’y passe des choses très déplaisantes. Les habitants ont peur, ou alors on a l’impression que certains ont de quoi manger tandis que d’autres meurent de faim, ou encore on voit des fillettes de onze ans enceintes, ce qui prouve qu’on est dans une zone de non-droit ou que la population est sous l’emprise d’une secte quelconque. Parfois, nous passons dans certaines villes qui ont un système de gouvernance parfaitement raisonnable, logique, mais quand on y retourne deux ans plus tard, elles ont sombré dans l’anarchie. Chaque ville a ses propres traditions. Ici, par exemple, vous vous intéressez au passé, vous avez une bibliothèque publique…
FD : Plus nous en saurons sur le monde d’avant, mieux nous comprendrons pourquoi il s’est effondré.
KR : Mais tout le monde le sait, ce qui s’est passé : le nouveau virus de la grippe porcine, les vols en provenance de Moscou, ces avions remplis de patients zéro…
FD : Néanmoins, je suis partisan de comprendre l’histoire.
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Les trois caravanes de la Symphonie Itinérante sont identifiées en tant que telles, le nom inscrit en lettres blanches de chaque côté, mais la caravane de tête arbore une ligne de texte supplémentaire : Parce que survivre ne suffit pas.
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Les caravanes étaient d’anciens pickups aux roues en bois et en acier, aujourd’hui tirés par des attelages de chevaux. On avait retiré toutes les pièces rendues inutiles par la disparition de l’essence – moteur, système d’alimentation en carburant, tous les autres composants qu’aucun humain de moins de vingt ans n’avait jamais vus fonctionner – et on avait installé un banc sur le toit de chaque cabine pour les conducteurs. Les habitacles, dépouillés de tout ce qui ajoutait du poids inutile, étaient par ailleurs intacts, avec des portières qui fermaient et des fenêtres en verre trempé difficile à briser, parce qu’il était appréciable d’avoir un endroit relativement sûr où mettre les enfants quand la troupe traversait des territoires à risques. Les structures principales des caravanes – bâches en toile goudronnée arrimées sur des armatures – avaient été érigées sur le plateau des pickups. Les bâches des trois chariots étaient peintes en gris acier avec, sur les côtés, en lettres blanches, l’inscription LA SYMPHONIE ITINÉRANTE.
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« Tu penses qu’il va se propager à l’extérieur de l’hôpital… ? » Jeevan avait des difficultés à raisonner clairement.
« Non, je sais que c’est déjà fait. Il s’agit d’une épidémie foudroyante. Si elle se répand ici, elle se répand dans toute la ville, et je n’ai jamais vu ça.
– Tu penses que je devrais…
– Je pense que tu devrais partir immédiatement. Ou si tu ne peux pas, fais au moins un stock de provisions et ne sors pas de chez toi. Je te quitte, j’ai d’autres coups de fil à donner. »
Il raccrocha. Le portier de nuit tourna une page de son journal. Si ç’avait été un autre que Hua, Jeevan ne l’aurait pas cru, mais il n’avait jamais connu un homme aussi doué pour l’euphémisme. Si Hua disait qu’il s’agissait d’une épidémie, c’est que le mot épidémie n’était pas assez fort. Jeevan fut soudain terrassé par la certitude que cette maladie décrite par son ami allait être la ligne de démarcation entre un avant et un après, un trait tiré sur sa vie.
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Le silence retomba. Quelqu’un fit observer qu’il neigeait abondamment, et ils purent constater à travers les portes vitrées du hall que c’était vrai. Vue du bar, la neige était presque une abstraction, un film sur le mauvais temps dans une rue déserte.
« Eh bien… buvons à Arthur », dit le barman.
Dans la loge des enfants, Tanya donnait à Kirsten un presse-papiers. « Tiens, dit-elle en lui mettant l’objet dans les mains. Je vais encore essayer de joindre tes parents, et toi tu arrêtes de pleurer, et tu regardes cette jolie boule… » Et Kirsten, haletante, les yeux larmoyants, à quelques jours de fêter son huitième anniversaire, contempla l’objet en pensant que c’était le cadeau le plus beau, le plus merveilleux, le plus étrange qu’on lui ait jamais offert : une boule en verre dans laquelle était emprisonnée une nuée d’orage.
Dans le foyer, les personnes rassemblées au bar trinquèrent à Arthur et restèrent encore quelques minutes à boire avant de se séparer, chacun partant de son côté dans le tourbillon de flocons.
De tous ceux qui étaient présents ce soir-là, ce fut le barman qui survécut le plus longtemps. Il mourut trois semaines plus tard, sur la route, en quittant la ville.
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Gavin dressa une liste des choses dont il n’avait plus besoin. Primo : l’électricité. Il acheta des bougies dans un drugstore et les ficha dans de vieilles canettes de bière, qu’il remplit d’eau à moitié pour en contrebalancer le poids ; ainsi préparé, il put accueillir sereinement l’extinction des lumières. Secundo : le téléphone de l’appartement, mais c’était redondant puisque cet appareil à affichage numérique se branchait sur une prise et, par conséquent, ne fonctionnait plus depuis que l’électricité avait été coupée. Tertio : le gaz. Là, ça allait de soi. Il ne faisait plus la cuisine et, de toute façon, il n’avait pas ouvert le frigo depuis les jours où les interrupteurs avaient cessé de fonctionner. Au début, il avait envisagé de le vider, de le nettoyer et de déposer la nourriture avariée sur le trottoir ; en ce moment, il songeait plutôt à en condamner la porte avec du gros scotch.
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– Vous avez tous de quoi être fiers, déclara le directeur d’Anton à son personnel réuni pour l’occasion. C’est votre bon travail qui nous a permis d’en arriver là.
Il était monté sur une chaise pour s’adresser à ses troupes. Le contrat pour New York City avait été annoncé la veille et une petite fête était organisée au bureau pour célébrer l’événement. Anton buvait du vin avec deux membres de son équipe : Dahlia, avec qui il aurait bien aimé boire un verre plus souvent s’il n’avait pas déjà été fiancé, et Elena, son assistante, dont il était secrètement amoureux depuis qu’il l’avait rencontrée dans des circonstances criminelles, deux ans et demi plus tôt.
– Maintenant, comme vous l’imaginez bien, poursuivit le directeur, les systèmes que nous allons être amenés à étudier présenteront un intérêt significatif pour des terroristes.
Il prononça le mot terroristes en baissant un peu la voix, comme s’il pensait qu’al-Qaida pouvait donner une petite fête concurrente dans un bureau voisin.
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Pour des raisons qu’il était difficile d’analyser en détail, et a fortiori d’expliquer à sa femme à New York, Anton avait loué une chambre sur l’île d’Ischia pour la morte-saison. Moyennant cent euros par mois et l’obligation de laver lui-même ses serviettes, il se vit offrir une petite chambre peinte en bleu qui donnait sur la mer Tyrrhénienne, avec les côtes de Capri qui se découpaient par temps clair à la lisière du ciel. Les premiers jours, le silence lui parut miraculeux et il se dit qu’il avait peut-être enfin trouvé ce qu’il cherchait.
Son mariage avait été célébré six jours avant son arrivée sur l’île, au terme de fiançailles très longues et franchement désastreuses : Sophie se dénicha une robe, l’acheta, fut prise d’une crise de panique quand elle l’essaya à la maison et annula la cérémonie. Ce fut une manœuvre incroyablement onéreuse qui entraîna plusieurs dizaines d’heure de thérapie à trois cents dollars la séance et l’envoi de deux cents annulations d’invitations : « Le mariage de Sophie Berenhardt et d’Anton Waker a été remis à une date ultérieure pour raisons personelles. Merci de votre compréhension. » Elle l’informa qu’il y avait deux n à « personnelles », se lança dans la méditation transcendantale en sus de la thérapie et vint le voir un mois plus tard pour lui annoncer qu’elle avait eu une révélation : ils étaient destinés à se marier. Deux cent cinquante faire-part de mariage tout neufs furent envoyés, dans des dégradés de violettes de printemps ; les fleurs qui s’épanouissaient dans les coins du carton d’invitation, lui dit-elle, symbolisaient la renaissance. Anton venait de lire un article où on expliquait qu’à une certaine époque, des violettes épinglées au revers d’une jeune fille symbolisaient le lesbianisme, mais il préféra garder cette information pour lui. Deux cent une réponses arrivèrent sans provoquer d’incident. Sophie se présenta en larmes au bureau d’Anton, pendant sa pause-déjeuner, serrant dans son poing la deux cent deuxième. Le message disait simplement « Nous sommes tellement heureux pour toi ! Nous serons de la fête ! » et provenait d’une quelconque tante incontournable, mais il sut avant même qu’elle ait ouvert la bouche que le mariage était de nouveau à l’eau. Elle avait le trac, expliqua-t-elle. Il n’y était pour rien. Elle avait juste besoin d’un peu de temps.
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Si ça avait été un autre que Hua, Jeevan ne l’aurait pas cru, mais il n’avait jamais connu un homme aussi doué pour l’euphémisme. Si Hua disait qu’il s’agissait d’une épidémie, c’est que le mot épidémie n’était pas assez fort. Jeevan fut soudain terrassé par la certitude que cette maladie décrite par son ami allait être la ligne de démarcation entre un avant et un après, un trait tiré sur sa vie.
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Je n'arrête pas d'espérer que je vais cesser de la voir et trouver, je ne sais pas, une espère de paix en ce monde... mais si elle partait, si elle partait vraiment, j'entends, si je ne pouvais plus me dire qu'elle est quelque part près de moi, je crois qu'elle me manquerait encore plus. Il n'y a donc pas moyen de s'en sortir.
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[…] Je travaille dans une division de soutien logistique. Je fais de la recherche, je rédige des rapports pour les équipes de vente, j’aide à préparer les présentations, ce genre de choses.
– Et qu’est-ce qui te qualifie pour cette activité ?
– La même chose qui me qualifiait pour vendre des cartes de sécurité sociale à des étrangers en situation irrégulière. Un certain vernis de confiance en soi, allié à une témérité sans bornes.
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Ce qu’elle aspirait à atteindre , c’était une sorte de délirante perfection. Ce qu’elle voulait Lilia, c’était voyager, mais pas seulement cela : elle voulait être une citoyenne de partout, insouciante et capable de s’envoler instantanément.
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Ce n’ était jamais très facile d’atteindre Lilia : ça revenait un peu à aimer une personne qui était rarement dans la même pièce. Mais il aurait été difficile d’imaginer , au sens purement abstrait du terme, une fille plus parfaite.
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Si elle n'avait jamais cru au coup de foudre, elle croyait en revanche à la reconnaissance au premier regard, elle croyait au fait de comprendre, en rencontrant une personne pour la première fois, que celle-ci allait jouer un rôle important dans notre vie. C'était comme de reconnaître un visage familier sur une vieille photographie : dans une marée de visages qui ne représentent rien, il y en a un qui se distingue. Toi.
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« …Notre anxiété est justifiée, et il n’est pas déraisonnable de penser que nous pourrions la canaliser par la fiction, c’est que notre anxiété n’a rien de nouveau. Avons-nous jamais cru, depuis le commencement des temps, que le monde n’aurait pas de fin ? »
p.214
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