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Citations de Emmanuel Ruben (146)


À quoi bon guetter tous les matins le premier bourgeon, quand on est incapable de sentir craquer la glace sur laquelle on se prélasse ?
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L’hiver est la saison préférée des enfants, la neige une fontaine de jouvence – aimer l’hiver, me disais-je, se réjouir sous la neige, sont les signes manifestes de ce refus puéril de vieillir qu’on appelle le syndrome de Peter Pan. Qu’importe ! Je pouvais m’estimer heureux : par ces temps de réchauffement climatique, ce genre de retour en enfance se faisait rare ou trop bref.
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Les romans, , c’est comme le pâté en croûte, les dehors sont séduisants, ça brille sous la gelée, mais tu sais déjà quel goût tu auras sur la langue, et voici la raison pour laquelle tout ce que tu viens d’écrire me dégoûte, autobiographique ou pas, ton roman te ronge, parce que c’est un roman, parce que ce qui était au départ un carnet de bord, un journal intime, qui se tenait au plus près des faits, au plus près de la perception des faits, qui visait la véracité, ou du moins la sincérité, la spontanéité, l’authenticité, tout ça s’est transformé, tu as fabriqué du roman comme on fabrique une soupière, il fallait renoncer aux retouches, faire confiance au premier jet.
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Étrange, comme on se sent à la fois triste et soulagé à la nouvelle de la fin du périple.
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Car les gens là-bas ne se plaignaient pas, ne geignaient pas, vous parler d'un Goulag où ils étaient nés et leurs parents morts comme une genèse naturelle, feignant parfois l'ironie, souriant souvent à demi pour retenir des larmes, et vous hochiez la tête, avec sur les lèvres un sourire, mais un sourire benêt, sans compassion, parfois même à la limite de rire franchement pour leur insuffler un zeste de cette bonne humeur dont à vrai dire vous manquiez totalement - ou alors, ils vous parlaient de la guerre et vous pensiez papy aussi a fait la guerre, sans voir qu'il y avait du Blitz au plan Barbarossa, de la drôle de guerre à la grande guerre patriotique et du STO au Goulag un abîme infranchissable et que la seule vraie frontière n'était pas sur les cartes, n'était ni naturelle ni arbitraire, n'était pas une ligne rouge bien réelle, une frontière profonde, historique, mémorielle, corporelle, qui n'avait pas tranché l'Europe car il n'y avait jamais eu d'Europe mais qui avait tranché des bras et des jambes, des cous, des cœurs, des langues, des cerveaux. Mais comment comprendre cela quand on avait encore rien vécu soi-même, né douillettement, élevé douillettement dans une Europe aseptisée, privé d'une mémoire qui s'était camouflée d'abord à l'abri de la gloire, ensuite à l'abri de la honte, décorant dans un premier temps les hommes de croix puis décorant les lieux de plaques de marbre noir - si bien que cette absence de vécu vous rendait sourd, borgne, indisponible, voir affecté de cette cécité d'âme, de cette insuffisance centrale.
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Et je sais aussi que c'est de n'avoir osé risquer les bonnes questions, les questions qui délient les langues ou les clouent à jamais, qui me fait prendre cette nuit la plume.
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Dans ces confins incertains d'une Europe pourtant toute proche et qui cogne à notre porte, on ne peut pas encore se fier aux guides de voyagent qui se perdent et nous désorientent. La première fois que je suis venu visiter les Portes de fers, c'était avec un Petit futé dans mon barda : d'après la carte maladroite que l'on aurait crue dessinée par un enfant, la ville de Kladovo se situait en Bulgarie alors que la Bulgarie est déjà loin derrière nous : cette géographie fautive confondait les tracés des fleuves et des frontières !
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Vlad et moi faisons la course contre la montre depuis que nous sommes entrés en Bulgarie - malgré les obstacles du relief, la "furia francese" et l'ivresse de la vitesse nous ont repris, la vitesse à vélo est une drogue, il n'y a que dans la vitesse que j'éprouve la sensation cinesthésique de l'espace, comme si ma bécane n'était pas un instrument de locomotion mais une caméra sur roulettes, un chariot à filmer le paysage, à capturer des émotions, le bruit du temps, le grain de l'instant présent, le frou-frou du fleuve, le tremblé des branchages, le scintillement des feuillages, le souffle diffus de la vie végétale - les paysages défilent par saccades dans un travelling étourdissant, la vitesse ne fait que décupler l'extase géographique, j'ai besoin de la vitesse pour éprouver l'intensité de l'instant, j'ai besoin de la vitesse pour sortir de l'anesthésie européenne, j'ai besoin de la vitesse pour que s'imprime en moi ce bonheur de traverser à la force des mollets tout un vieux continent agonisant.
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Non, il faudrait partir pour de bon, aller toujours plus loin, sauter de ville en ville, de pays en pays, de continent en continent, pratiquer la politique de la terre brûlée, ne jamais rouvrir ses carnets, les semer derrière soi, offrir aux passants ses croquis et ses notes éparses, ou les enfouir sous des rochers, les confier à la pierre muette, aux ronces, à ces fameuses racines que les hommes croient pouvoir emprunter aux arbres. Se détacher de tout, ne rien regretter, ne rien posséder, foncer tête baissée. Mais voilà, je suis revenu ici.
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On a beau voyager, on se retrouve irrésistiblement attiré vers les mêmes lieux, comme une phalène prise toute la nuit au piège scintillant du même néon.
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Une pastèque, c’est le sein d’une déesse, c’est une lune, c’est un globe, c’est une planète, c’est un fruit strié de fuseaux horaires, ça roule entre les mains comme un ballon de basket, ça sent l’été, le sucre, la femme, la terre et le soleil, j’ai tellement soif que je donnerais tous les dinars du monde pour croquer dans cette chair rose, mais pas moyen de caler une pastèque sur mon porte-bagages, et le paysan moustachu ne les vend qu’à l’unité, alors je paie ma pastèque entière, la fait trancher en quatre, en offre les trois quarts aux gamins tziganes qui jouent au foot dans la poussière pendant que la limousine noire du président passe derrière les motards aux sirènes funèbres.
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La seule chose qui m’intéresse, c’est la géographie, la géographie qui se mange et qui se boit, la géographie qui parfume l’asphalte: trouver une bonne pastèque pour y mordre à pleines dents, voilà ce dont j’ai besoin, car il fait une chaleur à rendre maboul, alors je trace, je trace, nez dans le guidon, je ne m’avise même pas que j’ai traversé la Morava, c’est à cause d’elle si j’ai dû faire tout ce détour loin du Danube…
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Ce livre m’est tombé des mains.
D’un ennui mortel.
On se demande encore à la dernière page quand va débuter l’intrigue.
Écriture engoncée et farineuse.
Ce roman finira bien vite dans les bacs à livres d’occasion des mauvaises librairies.
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n’y a pas de honte à être heureux. Mais aujourd’hui l’imbécile est roi, et j’appelle imbécile celui qui a peur de jouir.
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On aurait dit que ses yeux dansaient comme des flambeaux noirs dans la foule ; ils étaient trop éloignés l’un de l’autre pour tenter de se rapprocher ; la houle humaine, compacte et tumultueuse, les emportait toujours plus loin sur le boulevard, les condamnant à dialoguer du regard ; elle jouait avec lui ; il était la proie, elle était la chasseresse ; elle était le tigre, il était la gazelle ; il n’osait plus répondre à son regard, il marchait machinalement, comme aspiré par le flux, entonnant des slogans dépourvus de sens, battant des mains tel un pantin.
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Vous savez pourquoi les Arabes ont massacré les Juifs, mes frères ? Parce qu’il faisait trop chaud. La chaleur leur tape sur le système, ils deviennent fous comme les guêpes qui tournent en rond dans un bocal et ils ont besoin de piquer tout ce qui bouge pour se défouler et oublier quelques minutes cette chaleur qui rend frappadingue.
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Les filles de ce peuple en voie de disparition sont si belles, avec leurs tresses d’amarante et leurs yeux de jade, qu’elles donnent envie de les engrosser tous les neuf mois. Les rivages sont couverts d’ambre jaune, il suffit de se baisser pour en ramasser et pour en faire des colliers qu’on offrira aux belles indigènes afin de les remercier de purifier les gènes de la tribu.
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Le temps est venu de faire table rase du passé. De vivre sur une terra incognita. Sur un archipel lointain et méconnu. Car tous les archipels sont des pays libres : les Britanniques comme les Japonais n'ont jamais subi d'invasion.
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Je n’ai jamais vu de terre plus ingrate et plus désolée ! Voulez-vous vraiment devenir des Juifs bridés et frigorifiés ? Alors, n’écoutez pas cet ignare et faites confiance au brave oncle Chemouel qui va vous dire où nous devrions partir pour fuir les pogroms à venir.
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J’ai visité l’Ouganda. C’est un pays fabuleux et luxuriant. Le climat y est digne du jardin d’Éden. Le Nil, le fleuve qui vit naître Moïse, y prend sa source. Les Massaïs sont les descendants de Cham, le fils de Noé. La chaleur n’y est pas plus accablante qu’ici. Le lac Victoria contient quatre cents lacs de Tibériade. Le théier, le caféier, le bananier, le manguier, tout pousse plus vite que dans les gorges du Rhummel mais, depuis le retour de la commission d’enquête, le projet a été abandonné durant le septième congrès sioniste de Bâle car les moustiques y sont antisémites. Je vous écoute, mes frères, dites-moi quel est le pays où vous rêvez d’implanter les fils d’Abraham, d’Isaac et de Jacob afin de régénérer la tribu d’Israël ?
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