AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Eric Reinhardt (782)


Ce que cette lettre de Bénédicte Ombredanne me révélait, c'est que plusieurs personnes vivaient en elle qu'elle peinait à concilier. Il lui fallait les emmurer presque toutes dans le silence de son intimité, cela ayant pour conséquence qu'elle n'était pas parvenue à se déployer comme elle l'aurait voulu, ou selon ses désirs véritables, ou bien encore dans ses nuances les plus subtiles.
Commenter  J’apprécie          110
(…) il est sans doute impossible d’envisager son père comme un être humain. Ceux qui s’y risquent, ils s’y perdent. La seule manière de construire son identité est d’occulter la dimension, la profondeur humaine du père – pour n’y voir à la place qu’un paramètre d’autorité, une loi à respecter ou à détruire. Comprendre que ton père n’est pas seulement un rouage fixe et immuable auquel son seul statut légal donne sens, mais qu’il est un être humain au même titre que toi, qu’il possède une vie intérieure dont la nature et les exigences sont comparables aux tiennes, c’est accepter l’expérience des gouffres, ne plus s’appréhender soi-même comme un absolu mais comme une donnée relative. Par exemple, c’est affronter l’idée que ton père n’aime plus sa femme et que c’est légitime. (…) C’est affronter l’idée qu’il puisse se dire que s’il n’avait pas eu d’enfant il n’aurait pas gâché sa vie. Envisager ton père comme un homme libre dont la vie a la même valeur que la tienne, c’est accepter l’idée qu’il puisse te sacrifier à son bonheur. Ces confrontations, la plupart des enfants n’y résisteraient pas. De la même manière qu’instinctivement on ne regarde pas fixement le soleil, on ne regarde pas à l’intérieur de ses parents.
Commenter  J’apprécie          110
A partir de ce jour, Sarah revint chaque soir se cacher derrière le tronc. Sa propre vie se déroulait sous ses yeux comme sur un écran de cinéma, mais elle n’avait pas la possibilité de s’immiscer dans les images pour infléchir la narration. Elle était condamnée à la fonction de spectatrice. Sa vie était devenue une fiction écrite par d’autres, une fiction où des personnages qu’elle ne connaissait pas n’arrêtaient pas d’apparaître, dont elle était privée des dialogues. (p.215)
Commenter  J’apprécie          102
(...) elle lui avait confié à différentes reprises que son mari lui rendait la vie sinistre, qu'il n'y avait aucune gaieté dans leur maison, qu'il ne pensait qu'à son travail et à l'organisation du foyer, à la gestion du budget familial et au respect de cette abominable discipline budgétaire. Tout était quadrillé, rationnel, répertorié, anticipé et planifié, sans aucun sens de l'improvisation et du mouvement, du spontané, de l'instinctif, du poétique.Sans aucun sens de la vie et du bonheur.

( p.313 )
Commenter  J’apprécie          100
Le moment où nous ferions l'amour se différait en permanence, notre relation s'enroulait sur elle-même comme une vague qui se serait avancée vers le rivage sans se briser jamais ; c'est sans doute une expérience spécifique à l'extrême jeunesse, assez belle, pleine d'incessants vertiges.
Commenter  J’apprécie          101
Il y a ceux qui ont la faculté de discerner la chance qui passe, et ils la saisissent, et ils repartent dedans. Et il y a les autres. Ceux qui ne savent pas la discerner, ou qui, s'ils la discernent, comme moi ce soir, ne savent pas la saisir. Ou ne sont pas assez rapides. Ou n'ont pas le courage. Ou peut-être ont peur. De réussir leur vie, d'être heureux. Courir vers son bonheur, comme j'aurais pu le faire ce soir en allant la voir dès que je l'ai remarquée, c'est dans le fond la chose la moins naturelle à l'être humain.
Commenter  J’apprécie          100
Le regard est quelque chose de merveilleux : un miracle inexplicable.
Commenter  J’apprécie          102
La circonstance était de celles, en effet, où tous deux avaient à se rappeler, s’ils en étaient dignes, qu’ils étaient de la race de ceux qui font les convenances, et non de la race de ceux qui les subissent.
Commenter  J’apprécie          100
Car c'est ça ma grande terreur, c'est que ma vie s'écoule inutilement comme de l'eau d'un robinet qu'on a oublié de fermer, ou d'un robinet qui fuit, quelque chose comme ça, tu vois.
Commenter  J’apprécie          100
Il a voulu savoir s’il s’agissait d’un nouvel amant, je lui ai répondu non avec la plus grande fermeté : non seulement je n’avais pas de nouvel amant, mais il voyait bien que ces messages étaient tendres, amicaux, affectueux, sans plus ! Ça commence comme ça, par de la tendresse, et on sait comment ça finit, ça finit dans un lit ! lui a dit son mari.
Commenter  J’apprécie          100
Son mari n’utilisait jamais ses lèvres pour enchanter les siennes, exception faite des smaks qu’ils échangeaient quotidiennement, matin et soir, de pure routine, comme une carte magnétique qu’on passe sur une cellule optique pour entrer et sortir d’un bâtiment.
Commenter  J’apprécie          100
Ecrire, pour moi, depuis toujours, c’est inventer une forme.
Commenter  J’apprécie          100
Depuis, j’ai compris que différer constituait le principal travers de mon tempérament, différer est un réflexe d’idéaliste, contre lequel il m’a fallu lutter pendant longtemps pour en débarrasser mes pratiques quotidiennes. Remettre au lendemain, se dire qu’on a le temps, estimer que les meilleures conditions ne sont pas réunies, supposer qu’il serait préférable d’attendre encore un peu pour entreprendre telle ou telle chose, affronter tel obstacle, s’interroger sur tel ou tel sujet, se mesurer à telle épreuve intimidante, c’est sur ce mode d’une projection perpétuelle vers le futur que j’ai longtemps vécu, ce qui implique une étrange absence à soi-même pour tout ce qui concerne le faire et le concret, et en revanche une relation exacerbée avec le monde extérieur sur un plan émotionnel et sensitif, en deçà de toute prise de position. Cette attitude dérive d’une position qu’on pourrait qualifier de cérébrale et qui consiste à considérer que la vie est moins ce qu’on vit chaque jour en se levant le matin que la pensée qu’on peut en avoir. Tous ceux qui rêvent leur vie adorent la voir irradier dans leur mental comme un absolu ; et naturellement on ne peut que différer le moment de partir à la conquête de l’absolu, puisqu’il est inscrit dans sa définition qu’il se situe au-delà de toute circonstance. C’est en désacralisant la vie, c’est en se déclassant soi-même dans la représentation qu’on peut s’en faire (au lieu de sanctifier la réalité et d’en attendre des évènements qui en seraient l’écho sacré), c’est en envisageant l’existence comme un lieu de hasards, d’efforts, d’accidents, de volonté, de transactions, de compromis, de trahisons ou de rapports de force – c’est alors qu’on peut décider de ne plus différer et de se mettre à vivre, de se jeter avec les autres dans la fosse aux lions et de s’y battre. C’est quelque chose que j’ai mis des années, des années, des années à comprendre.
Commenter  J’apprécie          100
[…] Susanne, à l’inverse de son mari, accordait une importance considérable à la lumière […]. Elle apportait un soin extrême à la disposition des sources lumineuses. C’était primordial, comme si chaque pièce était une scène de théâtre et qu’elle devait en régler les éclairages en fonction du climat qu’elle souhaitait y créer, de la luminosité requise et de l’humeur du moment. Il était d’ailleurs troublant, elle s’en rendait compte seulement aujourd’hui, à Longvic, en réfléchissant à l’aménagement de son appartement, que le « texte dramatique » tout comme la « cellule d’habitation » soient désignés par un seul et même mot, le mot « pièce », comme quoi. (p.150)
Commenter  J’apprécie          90
«  Rien ne s’était émoussé .jusqu’à leur invisible et silencieuse rupture, elle et lui continuaient de faire l’amour avec passion.
Ça avait toujours été fabuleux entre eux de ce point de vue- là .
Comme son mari ne parlait pas, et qu’elle s’était un peu lassée , à table, de monologuer , ils dialoguaient de cette façon.
Leurs corps étaient faits l’un pour l’autre. »
Commenter  J’apprécie          90
Moi aussi je suis sensible au recul des siècles.Ce que je préfère, en moi, c'est ce qui me relie au passé. Si j'avais pu, j'aurais choisi de faire votre connaissance en 1883.
- En 1883 ?
- C'est l'année où Villiers de L'Isle-Adam a publié le livre sur lequel j'ai fait mon mémoire de maîtrise. (...)
-Son nom ne me dit rien
- Il n'est pas très connu.Il appartenait au mouvement symboliste, il était l'ami intime de Mallarmé, il fréquentait Huysmans.Avant de les écrire, il éprouvait l'impact de ses récits en les disant dans les cafés, en public, et il éblouissait par son charisme, son ironie, la puissance visionnaire de son verbe.C'était un rêveur, c'était un idéaliste. Il accordait la plus grande importance à l'expérience sensitive, en ceci qu'elle peut nous révéler la vérité du monde.

( p.104)
Commenter  J’apprécie          90
D'être possédé par l'autre nous rend à nous même.
Commenter  J’apprécie          92
Des éclairs se succédaient dans son regard, elle m’implorait, elle s’accrochait à mes bras comme si une vague allait l’emporter. Je l'entendais hurler, je la voyais violentée par les décharges qui parcouraient son corps, il se cabrait, il avait l’air de réagir à de puissantes morsures. Il arrivait que Victoria reste contractée plusieurs secondes, culminante, douloureusement paroxystique, et que ses doigts terrorisés tentent attraper quelque chose qui aurait dû éclore dans la nuit, comme la main d’un noyé qui seule dépasse de l’eau et essaye de se saisir d’une perche imaginaire, avant de disparaître à son tour.
Commenter  J’apprécie          90
La volonté raidit tout, c'est bien connu - il ne faut rien vouloir nettement, mais se mettre en situation de tout obtenir, presque en fermant les yeux. S'abandonner. Se faire confiance. Les choses les plus belles se produisent toujours naturellement, sans qu'on y ait songé.
Commenter  J’apprécie          90
... je pense que c'est un moyen de se disculper à bon compte, ce sont des larmes à l'américaine, c'est de l'émotion immédiate, naturelle, à laquelle tout le monde cède. Après avoir pleuré sur le sort des ouvriers, on a bonne conscience... on repart de l'avant et on continue à détruire.
Commenter  J’apprécie          90



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Eric Reinhardt Voir plus

Quiz Voir plus

Souvenirs en littérature

Son meilleur souvenir se prénommait Madeleine

Mauriac
De Gaulle
Proust
Apollinaire
Levi
Yourcenar
Cohen

8 questions
343 lecteurs ont répondu
Thèmes : biographie politique , biographie romancée , fiction réalitéCréer un quiz sur cet auteur

{* *}