Citations de Fabrice Colin (647)
-Je dois continuer à étudier. Je ne voudrais pas prendre trop de retard pour après.
-Pour après? Si j'ai un conseil à te donner, c'est de penser à l'après quand il sera là, c'est à dire pas maintenant.
-L'avenir ça se prépare...
-L'avenir, c'est des choses qui oublient d'arriver ou qui arrivent alors que t'en voulais pas.
-La culture ça élève !
- Je n’ai jamais vu autant de gens pleurer.
- Ils sont en vie.
- Quoi?
- Les gens qui pleurent. Au moins, ils sont en vie.
"En toute chose, agis selon ton bon plaisir".
- Mais vous allez voir : question gastronomie, en France, on se débrouille pas mal non plus. La nourriture, chez nous, c'est fondamental. Sélectionner les meilleurs ingrédients, veiller à une cuisson parfaite, soigner la présentation, naturellement. Toujours cette obsession du raffinement... Enfin bref. Macaronis premier prix avec beurre en quantité et sauce tomate "à l’américaine". Si vous voulez plus de ketchup, n'hésitez pas à le dire.
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01
Tu t'appelles Alix. Tu n'as ni frère ni soeur, mais tu as un chien, que tu adores : Ficelle, un jeune golden retriever un peu foufou.
Il y a quelques mois, tu as eu 11 ans.
Des vents contraires s'étaient levés, mais nous avons tenté de vivre. Je crois, aujourd'hui, que nous étions coupables, que tout le monde, toujours, est coupable. La vie était si intense. Nous étions Rimbaud. Des rois nus et grisés. avec la mort qui, comme une vieille pute, se trémoussait derrière la paroi de verre.
Rater le RER. Rester dans des bars, à regarder un rat traverser au petit trot la place des Innocents. Eaux gazeuses à 20 francs. American Psycho, Le Maitre des illusions, Baise-moi, chaque titre parlait de ma vie, et je crois que c'est à cette époque que jai commencé à me demander le plus sérieusement du monde ce qui était réel et ce qui ne l'était pas.
Nous croyons nous souvenir, mais que reste-t-il ? quelques vignettes, deux-trois images volées au temps.
Il existe une vie, après les camps. Il existe une vie, lestée de ces atrocités, de ces horreurs, obscurcie par d'impénétrables fumées noires, une vie qui porte, telle une étoile brûlante attachée à un revers, la trace indicible de ce qui a été, et qui pourtant se projette, trouve cette force, la force d'épouser l'avenir.
Ne montre pas tes émotions. Forte : on te dit que tu es forte, plus forte que les autres. Alors prouve-le. L'espoir est tout, mais il est aussi frêle que la flamme d'une bougie. L'amour n'est rien, mais c'est tout ce que tu possèdes.
Elle pense que le courage, c'est de ne pas réfléchir trop longtemps.
Aimer les gens, c'est accepter de souffrir, c'est accepter l'inacceptable : tout ce qui n'est pas soi.
Les gens disent qu'ils sont heureux quand ils ne le sont pas. Et disent qu'ils sont malheureux quand c'est vrai.
Elle posa ses lèvres à l'endroit où il avait mis les siennes. La lune souriait, à présent.
L'écrin n'est rien sans la finesse du joyau.
Chapitre 4 LES TROIS FANTÔMES.
Ils sont trois
Sur le coup, je mets ça sur le compte de mon imagination. Mais non, je ne rêve pas : il y a bien trois inconnus devant moi.
Vermeille Absinthe
Quand point la lune constellant les trottoirs,
Quand les femmes des pavés se font l'ombre,
Sous les toits telle une nue si sombre
Me vient l'envie de m'exclamer: "À boire!"
N'ajoute mot, mon âme dilatoire,
Car à l'ivresse à présent je succombe
Et je connais des frissons d'outre-tombe
En abreuvant mon rutilant ivoire.
D'incarnat est ma dive absinthe
Que je bois sans verre ni cuillère
Avec pour seule chanson des plaintes.
Je suis tel l'éternel ivrogne,
L'errant aux lèvres rubicondes,
Qui fait fi de toutes vergognes.
Aujourd'hui, Auschwitz s'est volatilisé. Ce qu'était Auschwitz n'est plus visible à l'oeil nu. Demeure une chose souterraine et secrète que seuls ceux qui ont vécu ici connaissent. Une vibration.
Les autres peuvent en parler. Ils peuvent filmer le décor. Ils peuvent imaginer, essayer. Essayer, c'est tout ce qu'on a.
Boughera El Ouafi a tendance à disparaître. Il se confond à la pluie. C'est une chose qu'il faisait déjà de son vivant : s'effacer, sans rien exiger en retour. Il s'est tellement fait oublier qu'un bus lui est rentré dedans. Ce talent pour l'acceptation et la résignation, j'ai, pour ma part, beaucoup de mal à l'accepter. Je voudrais prendre cet homme par le bras et lui dire de se ressaisir, l'exhorter à faire valoir ses prérogatives. Ne pourrait-il pas, ne serait-ce que quelques minutes, acquérir une consistance ? Il y a une classe de 2de à La Courneuve, avec laquelle je parle de lui. Les questions de l'immigration, de l'identité, ainsi que celles du mensonge en littérature. Ces jeunes seraient, je crois, ravis de le rencontrer.
- (...) la fin du monde est arrivée, non ?
- Beaucoup de nos semblables ont cru que le monde périrait avec eux. Pense aux Romains lors des invasions barbares, par exemple. Aux juifs pendant l’Holocauste. Aux Russes déportés par Staline. Nous sommes des histoires, conclut-il. Des malheurs en mouvement. Et pourtant, nous avançons.