Citations de Hélène Vignal (78)
" Malheureusement, la vie va s'occuper de toi, ma petite fille. Personne n' y coupe..."
"- Trop vieille ? A quinze ans ? Tu as été vieille très jeune alors ! "
"-ça va?
Je ne réponds pas. Je ne dis pas si ça va. Ce sont des mots qui n'ont pas de sens, maintenant. Ce sont des mots qui, rien qu'à être prononcés, sont indécents. Et justement, ils sont prononcés."
p. 31
Le fleuve dans Satmine,c'est la seule chose qui bouge et qui change chaque jour si on veut bien lui donner la peine de l'observer.
"Ma mère est une experte en soupirs. C'est un truc qu'elles se repassent de mère en fille. Ma mère fait partie de ces gens qui vont faire un tour plutôt que de dire ce qu'ils ont sur le coeur. Si elle pleure, c'est en cachette. Elle encaisse, ma mère. Elle se résigne. Elle capitule. Elle plie. Elle s'ajuste. S'adapte. Prend la place qu'on lui laisse ou qu'on lui désigne."
"A nous trois, on est les pionnières de rien du tout."
AVIS AUX SATMINIENS
En raison de risques sanitaires,
il est vivement déconseillé
de s'approcher du Fleuve.
Tout contact cutané présente des risques mortels.
Hyper sensible ça veut dire que tu sens trop. Comment on peut être trop sensible ? Hyper sensible, en vrai, ça veut juste dire que la majorité des gens ne sentent pas assez. Mais non, c'est forcément moi qui sens trop les choses, les gens, les vibes... C'est jamais les autres qui ne sentent pas assez. (p.28-29)
Le silence est si lourd qu'on dirait que ça devient difficile de respirer. C'est un silence qui bourdonne et qui rentre jusque dans ma bouche avec la nuit et par ma bouche ça envahit tout mon corps. Je crois que j'ai peur du temps que ça va durer, toutes ces années qu'il reste à vivre encore comme ça, à avoir la nuit qui me rentre par la bouche s'il ne se passe rien. Alors, pour que la nuit ne prenne pas toute la place dans ma bouche, je dis des mots, les premiers qui me passent par la tête. – Au secours, je dis. Au secours.
Là, je m'étends, et j'ouvre le vieux bouquin ramassé en partant. Je l'ai pris sur l'étagère où Jamie a stocké les "livres de la plage". Ce sont les bouquins qu'on peut abîmer, perdre, mouiller, salir. Celui que j'ai pris est énorme, il s'appelle La mère. ça doit être chiant, mais j'aime bien la couverture : c'est un mignon bébé chinois sur le dos de sa mère.
Comment on peut revenir en arrière, après ça ? Comment on peut faire comme s'ils avaient pas écrit tout ça ?
Les humains sont des porcs pire que les truies.
Je grimpe le long de cette tour, dans le bruit des hélicos. Je suis King Kong, en vrai, et la petite meuf dans sa main, c'est moi-même. (p.74)
Mourir noyé, c'est pas plus bête que de vivre en étouffant.
Chacun de mes anciens potes fait tomber des barreaux autour de moi pour planter une cage et m'isoler. Mais contrairement à ceux qu'on harcèle pour rien, moi je sais ce qu'on me reproche. Et je sais pourquoi ça les rend fous. Parce que je me suis comportée comme la plupart des mecs. Ouais. J'ai baisé quand je voulais, qui je voulais, j'ai quitté tout de suite après, j'ai choisi sans attendre d'être choisie. Et ça, ils aiment pas. (p.24)
Et puis il y a eu la voix d'Yvan: ça faisait comme de l'eau sur la soif, de l'entendre me parler à moi.
p. 20
J'imagine bien que mes parents en entendent de toutes les couleurs, me concernant. Je suis différente des autres immatures et je sais qu'on le leur fait souvent remarquer. Alors ma mère ne sait rien d'autre que de se câliner longuement, car le seul remède est de se serrer l'une contre l'autre jusqu'à ce que la douleur s'atténue.
Je marchais avec mon père, on se tenait bien droits, j'essayais de mettre mes sourcils en accent circonflexe. j'avais mis le clown otage dans mon cœur, bien au chaud pour ne pas l'abandonner, ne pas l'oublier. j'avais bien frotté mes chaussures pour en retrouver le rouge d'origine.
« Et nous, broyés dans cette trahison, notre amour en baluchon inutile sur le dos, partis sur des chemins séparés sans jamais rien en dire, sans que jamais rien ne nous en soit dit »
Je regarde défiler les noms et les pseudos que je connais par coeur. Ils sont tous là. Tous. Toutes. Ceux avec qui j'ai dansé aux soirées, ceux à qui j'ai filé des clopes, ceux qui m'ont regardée avec envie, celles que j'ai consolées, celles à qui j'ai filé des fringues et des tampons, ceux avec qui on a eu des débats interminables sur ce qu'on devait faire de nos vies. Ils sont tous là ceux qui affichaient des grandes idées sur la liberté. Ils sont tous là pour m'enfoncer. Et les filles aussi, en première ligne.