Citations de Hélène Vignal (78)
Transformer la réalité en histoires permet de la rendre acceptable et de continuer à faire partie du monde.
Pauvres cons de mecs avec vos mâchoires serrées, vos résignations à en crever.
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Il l'avait regardée, un regard un peu appuyé, pas un de ces regards furtifs et distraits, non. Il l'avait regardée assez longtemps pour qu'elle se sente exister. Aspirée entre ses longs cils épais, elle avait eu le sentiment d'entrer dans son monde.
Je ne sais pas si je suis d'accord quand elle dit qu'on a beaucoup de chance. Je trouve que j'ai peut-être trop de chance, je voudrais voir comment ça fait quand on en a moins. Oui, je voudrais changer avec quelqu'un qui a moins de chance que moi, pour voir. Vivre la vie ordinaire des gens ordinaires, tant pis.
J'ai eu mal. Il m'a dit Ça va ? J'ai dit Oui. Qu'est-ce qu'il aurait fait si j'avais dit non ? Il aurait dû s'enlever de mon vagin et rester en plan avec sa gaule.
Choisir la liberté c'est choisir la solitude. C'est comme ça. Et il arrive un moment où c'est plus un choix.
J'ai voulu être libre, et je le suis. Seule aussi. Très seule. Je l'étais déjà un peu, avant. Avant le débarquement de l'armée d'emojis qui font biper mon téléphone. Je l'étais parce que j'avais choisi de m'écouter. Du premier doigt que j'ai glissé entre mes cuisses à huit ans, pour y découvrir un trésor, jusqu'à aujourd'hui. J'ai choisi d'écouter ce qui bat en moi. Choisir la liberté c'est choisir la solitude. C'est comme ça.
Elle donnerait tant de versions de sa propre histoire que personne ne pourrait deviner laquelle était la bonne. Comme tous les ambulants, elle apprit ainsi que transformer la réalité en histoires permet de la rendre acceptable et de continuer à faire partie du monde. Car elle savait d'instinct qu'on pardonne mal aux rescapés d'avoir vu le pire et d'en être revenu.
Je donnerais n'importe quoi pour vivre dans une autre famille. Être trois à table. Mes parents et moi. Pouvoir leur parler, leur demander de l'aide, des conseils...
voilà c'est assez simple, ma vie est assez monotone. Je m'appelle "Nour" ce qui veut dire "lumière" paraît-il, j'ai quatorze ans et dans la vie je fais essentiellement des photos du fleuve et des boîtes avec les déchets de Satmine.
Je ne sais pas depuis quand je me pose des questions. Se poser des questions, ce n'est pas plus bête que de croire tout ce qu'on nous dit.
J'imagine bien que mes parents en entendent de toutes les couleurs, me concernant.
Je suis différente des autres immatures et je sais qu'on le leur fait souvent remarquer. Alors ma mère ne sait rien faire d'autre que de me câliner longuement, car le seul remède est de se serrer l'une contre l'autre jusqu'à ce que la douleur s'atténue.
On les aura, ces vacances, nom de nom! On va le faire! On peut plus faire marche arrière,d'façon. On n'est pas plus bêtes que les autres, les gamins! Il est pas né celui qui m'empêchera de payer des vacances à mes gosses! Ils vont voir de quel bois j'me chauffe! Après tous les coups qu'j'ai pris, c'est pas une saloperie de métro rose qui va m'faire baisser les bras!
Et j'ai compris un truc important : la peur et le plaisir ne vont pas ensemble.
Si tu veux du sexe sans amour, si tu veux démêler les deux, le temps de comprendre quelque chose, il faut être prêt à payer la note. On te le pardonnera pas. En tout cas si t'es une meuf.
La nuit, on ne voit que la lumière des choses.
Tout ça, disent mes parents d'un air un peu désolé, il vaut mieux ne pas le dire aux autres, dans le village et dans les autres villages autour non plus. Ils ne comprendraient pas, parce qu'ils sont un peu endormis. Pas endormis comme le contraire de réveillés, endormis comme le contraire d'intelligents. Ils ne sont pas forcément méchants, les autres, mais ils ne sont pas du tout au courant des trucs que connaît Maurice Lepoivre (…). Mes parents disent que les autres, ce sont des gens ordinaires. Nous, on a de la chance de connaître Maurice Lepoivre parce qu'il nous évite d'être des gens ordinaires (…). On a beaucoup de chance.
Les rapports entre mamère et ma grand-mère sont une sorte de cauchemar : on dirait qu'elles se courent après dans un labyrinthe pourri dont toutes les sorties sont bouchées.
Oui je suis une pure. Comme le sont les guerrières.
Oui je suis une vraie. Une qui ne triche pas.
Oui je suis une grosse. Une qu’a pas l’intention de se faire toute petite.
Et je suis aussi sacrée s’il faut. Parce que je suis une reine, en vrai.
Je suis une hyper sensible, il paraît. Encore une catégorie. Encore une raison de me mettre une étiquette. On s'est pris la tête avec mes parents là-dessus combien de fois ? Hypersensible ça veut dire que tu sens trop. Comment peut-on être trop sensible ? Hypersensible, en vrai, ça veut juste dire que la majorité des gens ne sentent pas assez.