Citations de Henri Bergson (416)
Le raide, le tout fait, le mécanique, par opposition au souple, au continuellement changeant, au vivant, la distraction par opposition à l'attention, enfin l'automatisme par opposition à l'activité libre, voilà, en somme, ce que le rire souligne et voudrait corriger.
Nous cherchons seulement quel sens précis notre conscience donne au mot "exister", et nous trouvons que, pour un être conscient, exister consiste à changer, changer à se mûrir, à se créer indéfiniment soi-même
L'art vise à imprimer en nous des sentiments plutôt qu'à les exprimer.
Le rire n'a pas de plus grand ennemi que l'émotion
L'origine de la guerre est la propriété, individuelle ou collective, et comme l'humanité est prédestinée à la propriété par sa structure, la guerre est naturelle.
Le hasard est donc une intention qui s'est vidée de son contenu.
Pour l’idéaliste, il n’y a rien de plus dans la réalité, que ce qui apparaît à ma conscience, ou à la conscience en général.
[...] l'âme de la société est immanente au langage qu'il [l'homme] parle, et [...] , même si personne n'est là, même s'il ne fait que penser, il se parle encore à lui-même. En vain on essaie de se représenter un individu dégagé de toute vie sociale. Même matériellement, Robinson dans son île reste en contact avec les autres hommes [...].
Une œuvre géniale, qui commence par déconcerter, pourra créer peu à peu par sa seule présence une conception de l'art et une atmosphère artistique qui permettront de la comprendre ; elle deviendra alors rétrospectivement géniale : sinon, elle serait restée ce qu'elle était au début, simplement déconcertante.
Un organisme qui est animal, c'est-à-dire mobile, pourra en effet profiter de sa,mobilité pour aller chercher des animaux sans défense et s'en repaître, tout aussi bien que des végétaux. Ainsi, plus les espèces se faisaient mobiles, plus sans doute elles devenaient voraces et dangereuses les unes pour les autres. De là dut résulter un brusque arrêt du monde animal tout entier dans le progrès qui le portait à une mobilité de plus en plus haute ; car la peau dure et calcaire de l'Échinoderme, la coquille du Mollusque, la carapace du Crustacé et la cuirasse ganoïde des anciens Poissons ont probablement eu pour origine commune un effort des espèces animales pour se protéger contre les espèces ennemies. Mais cette cuirasse, derrière laquelle l'animal se mettait à l'abri, le gênait dans ses mouvements et parfois l'immobilisait.
Si le végétal a renoncé à la conscience en s'enveloppant d'une d'une membrane de cellulose, l'animal qui s'est enfermé dans une citadelle ou dans une armure se condamne à un demi-sommeil.
Ma personne, à un moment donné, est-elle une ou multiple? Si je la déclare une, des voix intérieures surgissent et protestent, celles des sensations, sentiments, représentations entre lesquels mon individualité se partage. Mais si je la fais distinctement multiple, ma conscience s'insurge tout aussi fort ; elle affirme que mes sensations, mes sentiments, mes pensées sont des abstractions que j'opère sur moi-même, et que chacun de mes états implique tous les autres.
Je suis donc - il faut bien adopter le langage de l'entendement, puisque l'entendement seul a un langage - unité multiple et multiplicité une ; mais unité et multiplicité ne sont que des vues prises sur ma personnalité par un entendement qui braque sur moi ses catégories : je n'entre ni dans l'une ni dans l'autre ni dans les deux à la fois, quoique les deux, réunies, puissent donner une imitation approximative de cette interpénétration réciproque et de cette continuité que je trouve au fond de moi-même. Telle est ma vie intérieure, et telle est aussi la vie en général.
Car l’unique raison de croire à une extinction de la conscience après la mort est qu’on voit le corps se désorganiser, et cette raison n’a plus de valeur si l’indépendance de la presque totalité de la conscience à
l’égard du corps est, elle aussi, un fait que l’on constate.
Le rire n'a pas de plus grand ennemi que l'émotion.
Percevoir signifie immobiliser.
En général, quand un même objet apparaît d’un côté comme simple et de l’autre comme indéfiniment composé, les deux aspects sont loin d’avoir la même importance, ou plutôt le même degré de réalité. La simplicité appartient alors à l’objet même, et l’infini de complication à des vues que nous prenons sur l’objet en tournant autour de lui, aux symboles juxtaposés par lesquels nos sens ou notre intelligence nous le représentent, plus généralement a des éléments d’ordre différent avec lesquels nous essayons de l’imiter artificiellement, mais avec lesquels aussi il reste incommensurable, étant d’une autre nature qu’eux. Un artiste de génie a peint une figure sur la toile. Nous pourrons imiter son tableau avec des carreaux de mosaïque multicolores. Et nous reproduirons d’autant mieux les courbes et les nuances du modèle que nos carreaux seront plus petits, plus nombreux, plus variés de ton. Mais il faudrait une infinité d’éléments infiniment petits, présentant une infinité de nuances, pour obtenir l’exact équivalent de cette figure que l’artiste à conçue comme une chose simple, qu’il a voulu transporter en bloc sur la toile, et qui est d’autant plus achevée qu’elle apparaît mieux comme la projection d’une intuition indivisible. Maintenant, supposons nos yeux ainsi faits qu’ils ne puissent s’empêcher de voir dans l’œuvre du maître un effet de mosaïque. Ou supposons notre intelligence ainsi faite qu’elle ne puisse s’expliquer l’apparition de la figure sur la toile autrement que par un travail de mosaïque. Nous pourrions alors parler simplement d’un assemblage de petits carreaux, et nous serions dans l’hypothèse mécanistique. Nous pourrions ajouter qu’il a fallu, en outre de la matérialité de l’assemblage, un plan sur lequel le mosaïste travaillât : nous nous exprimerions cette fois en finalistes. Mais ni dans un cas ni dans l’autre nous n’atteindrions le processus réel, car il n’y a pas eu de carreaux assemblés. C’est le tableau, je veux dire l’acte simple projeté sur la toile, qui, par le seul fait d’entrer dans notre perception, s’est décomposé lui-même à nos yeux en mille et mille petits carreaux qui présentent, en tant que recomposés, un admirable arrangement. Ainsi l’œil, avec sa merveilleuse complexité de structure, pourrait n’être que l’acte simple de la vision, en tant qu’il se divise pour nous en une mosaïque de cellules, dont l’ordre nous semble merveilleux une fois que nous nous sommes représenté le tout comme un assemblage.
C'est sur cette question de l'égale possibilité de deux actions ou de deux volitions contraires que nous nous arrêterons d'abord: peut-être recueillerons-nous ainsi quelque indication sur la nature de l'opération par laquelle la volonté choisit
p. 38 : [Le] respect de l'opinion d'autrui ne s'acquiert que par un effort continu; et pour dompter en soi l'intolérance qui est un instinct naturel, je ne connais de plus puissant auxiliaire que la culture philosophique.
Il n'y a pas de comique en dehors de ce qui est proprement humain
Il y a des scènes de la vie réelle qui sont si voisines de la haute comédie que le théâtre pourrait se les approprier sans y changer un mot.
Ne nous bornons donc pas à dire, comme nous le faisions plus haut, que la mystique appelle la mécanique. Ajoutons que le corps agrandi attend un supplément d'âme, et que la mécanique exigerait une mystique.