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Citations de J.M.G. Le Clézio (1811)


Un jour viendra dans le grand vent et les fortes vagues
Je hisserai ma voile de nuage et naviguerai librement sur la mer !

Li Bai
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Chaque goutte de rosée est une parcelle de temps
qui emplit en la ployant la coupelle des fleurs
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Quelque chose du mystère de la Bretagne s'est transmis ici, est resté vivant malgré la modernité. Cela passe par certains hommes, certaines femmes, héritiers de traditions ancestrales, peut-être parce qu'ils ont été éduqués par la terre, par le vent et les saisons plutôt que par l'école communale. [...]
C'est à eux que je voudrais dédier ce petit conte, non comme une confession ou un album de souvenirs, mais comme une chanson bretonne, un peu entêtée et monotone, de celles que dit encore dans les tempêtes la Roche qui chante, ou de celles, j'imagine, que mes ancêtres ont répétées jadis en frappant la terre du pied, dans la chaleur des fêtes de nuit, avec le fond sonore aigrelet du biniou et de la bombarde, et que le vent a emportées.
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Hommes, femmes, enfants marchent sous le soleil, le grand pâturage doit leur sembler merveilleux sous le ciel bleu. Ce doit être comme d'échapper à l'enfer des combats pour arriver dans un pays idéal où règne la paix. La Suisse en quelque sorte. Au détour du chemin, ils sont surpris par la patrouille allemande. Fusillés à la mitraillettes, tous, sans quartier, hommes, femmes, enfants. Dans les herbes. Les corps sont enterrés sommairement par les soldats (peut-être par des prisonniers) dans des tranchées, les tranchées sont recouvertes de terre, et l'herbe repousse sur les tombes. Quelqu'un l'a vu, un berger peut-être, ou un des fugitifs qui est parvenu à échapper au massacre. Et cela reste dans la mémoire de cette montagne, sans en sortir, la mémoire de l'herbe et des bories, des oiseaux que la fusillade a effrayés, dans les échos des détonations qui se sont répercutés sur la falaise vaine des montagnes, à la frontière. Si près de moi, que j'ai dû les entendre, un grondement d'orage, qui se mêle au bruit de l'eau qui cascade entre les rochers.
Est-ce qu'on est le même lorsqu'on a entendu cela dans son enfance. Est-ce qu'on peut oublier ? La mémoire, ce ne sont pas des mots, des histoires.
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Je ne peux pas dire que je me souviens de mon premier été. Je sais seulement qu'il y a au fond de moi un éblouissement, un éclair. La lumière du soleil au fond de la vallée, les champs de blé mûr, l'eau de la rivière, les rochers, le ciel nu.
J'ai trois ans.Est-ce qu'on peut mettre des mots sur ce qu'on ressent à cet âge ? Sans doute pas des mots, sauf ceux-ci : c'est la première fois.
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Annah est assise dans l'embrasure de la grande fenêtre en ogive. C'est l'endroit qu'elle aime le mieux au monde. Elle l'aime parce que c'est l'endroit du monde où l'on voit le mieux la mer et le ciel, rien d'autre que la mer et le ciel, comme si la terre et les hommes avaient cessé d'exister. Elle l'a choisi parce qu'il est tout à fait isolé, si haut, si secret que personne ne pourrait la trouver là. Comme l'aire d'un oiseau de mer, accrochée à une falaise, qui semble voler au-dessus du monde.
(Orlamonde)
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Ce qui était inquiétant surtout, c'est que je ne parvenais plus à retrouver mes souvenirs à présent. Ce qui existait aujourd'hui avait effacé d'un seul coup tous mes souvenirs d'enfance, laissant seulement la sensation douloureuse d'un vide, d'une mutilation, d'un malaise vague, aveugle, qui empêchait mes sentiments d'autrefois de se rejoindre avec ceux du présent. Dépossédé, exilé, trahi, ou peut-être seulement exclu, alors il y avait pour moi de goût de mort, ce goût de néant.
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Ensuite, il y a comme un grand vide dans ma vie, jusqu'au moment où, par hasard, j'ai retrouvé le jardin de la villa Aurore, son mur, sa porte grillée, et la masse des broussailles, les lauriers-sauce, les vieux palmiers. Pourquoi, un jour, avais-je cessé d'entrer par la brèche du mur, et de me faufiler à travers les ronces en guettant les cris des oiseaux, les formes fuyantes des chats errants? C'était comme si une longue maladie m'avait séparé de l'enfance, des jeux, des secrets, des chemins, et qu'il n'avait plus été possible de faire la jonction entre les deux morceaux séparés. Celui qui avait disparu en moi, où était-il? Mais pendant des années, il ne s'était pas rendu compte de la rupture, frappé d'amnésie, rejeté à jamais dans un autre monde.
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Là, dans le jardin, à l'intérieur des murs, les chats errants étaient chez eux, et ils le savaient. Ils vivaient par meutes de centaines, accrochés aux rochers de l'ubac, ou bien a demi cachés dans les creux du vieux mur, se chauffant au soleil pâle de l'hiver.
Je les connaissais bien, tous, comme si j'avais su leurs noms...
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Depuis toujours, Aurore existait, là, au sommet de la colline, à demi perdue dans les fouillis de la végétation, mais visible tout de même entre les hauts fûts des palmiers et des lataniers, grand palais blanc couleur de nuage qui tremblait au milieu des ombres des feuillages. On l'appelait la villa Aurore, bien qu'il n'y ait jamais eu de nom sur les piliers de l'entrée, seulement un chiffre gravé sur une plaque de marbre, qui a disparu bien avant que j'aie pu me souvenir de lui. Peut-être qu'elle portait ce surnom à cause de sa couleur de nuage justement, cette teinte légère et nacrée pareil au ciel du premier matin.
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...Le Nigéria entre dans la phase terminale d'un massacre terrible, l'un des plus grands génocides du siècle , connu sous le nom de guerre du Biafra. Pour la mainmise sur les puits de pétrole à l'embouchure de la rivière Calabar , Ibos et Yorubas s'exterminent , sous le regard indifférent du monde occidental.
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L'Afrique, c'était le corps plutôt que le visage. C'était la violence des sensations , la violence des appétits , la violence des saisons.
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En Afrique, l'impudeur des corps était magnifique. Elle donnait du champ,
de la profondeur, elle multipliait les sensations , elle tendait un réseau humain
autour de moi.
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La Compassion

(...) Du Fu, l'amoureux des beaux chevaux qui l'ont conduit vers l'aventure autrefois, dans sa jeunesse, regarde son fidèle compagnon qui va mourir- est-ce la première fois qu'un poète parle de son cheval, comme le fera plus tard Francis Jammes de son âne ?
Il écrit ce huitain:

" Mon cheval malade

Je t'ai monté depuis bien longtemps
Sous les grands- froids, vers les passes militaires
Vieux, dans la poussière, tu ne ménages jamais tes forces
La saison est froide, et tu es malade, que cela est triste!
Tu n'as pas une résistance physique plus forte que les autres
Toujours est-il que tu es plus fidèle à ton maître
Un cheval est peu de chose mais ton sentiment est si profond
Tu m'émeus tellement que je compose pour toi ce poème. "

( p.105)
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Bai Juyi

Bai Juyi appartient à une autre époque. Né en 772, bien après Li Bai et Du Fu, il n'a pas connu les années terribles de la guerre civile au temps d'An Lushan.Mais il a été témoin dans son enfance des conséquences de cette guerre, le désordre, la famine, l'insécurité sur les routes.(...)
Contre la guerre, Bai Juyi n'écrit pas à propos des généraux, ni des grands héros. (...)

La longue série des guerres et des crimes de la dynastie Tang, et sutout la cruelle injustice des affaires publiques, le peuple accablé de taxes et de conscriptions tandis que la cour impériale vit une ère de plaisir et d'intrigues de sérail, inspirent la révolte des poètes de la fin de ce règne, dont Bai Juyi est le héraut.Ainsi ,cette fable critique dans laquelle il met en scène le peuple sous l'aspect d'un bœuf attelé à une lourde charette, obligé de travailler jour et nuit (...)

" Le bœuf tire à grand peine le lourd chariot, il suerait du sang
Mais l'assistant du Chancelier a comme seul souci de gouverner
Son affaire c'est de bien mettre en harmonie le Yin et le Yang
Le coup du boeuf se casserait en deux qu'il resterait indifférent ! "

( p.133)
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Introduction

Ce livre est aussi un livre d'amitié. Il doit beaucoup à ma rencontre avec un homme étonnant, le professeur Don Qiang, poète, érudit et calligraphe. Au long des années, au fil de nos rencontres, est né le projet de recueillir les poèmes de la dynastie Tang, de proposer une nouvelle traduction en langue française, illustrée par les calligraphies de Don Qiang.Ensemble nous avons choisi les poèmes, comme les moments les plus représentatifs de cette dynastie exceptionnelle. Grâce à cette nouvelle lecture, nous avons découvert le profond humanisme de la poésie Tang, née au milieu de la tourmente des guerres et des famines, dans l'incertitude du lendemain.Malgré l'abîme du temps écoulé, en lisant ces poèmes nous avons ressenti une proximité avec les artistes de cette époque, nous avons compris à quel point elle ressemble à la nôtre. C'est cette émotion que nous souhaitons partager.
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Du Fu et Li Bai, une amitié

" À Du Fu, sur le mode ludique

Sur le mont Fankou je rencontre Du Fu
Il porte un chapeau de paille pointu sous le soleil de midi
Depuis la dernière fois, dis-je, tu as encore beaucoup maigri:
Tu subis des supplices pour faire des poèmes à la perfection."

L'amitié entre les deux hommes est bien réelle, sans doute parce qu'ils sont complémentaires. (...)
Ce qui les rapproche, malgré leurs caractères contraires, c'est l'amour de la poésie. Ils ne renoncent jamais à la création, même dans les circonstances les plus difficiles, lorsqu'ils fuient tous les deux l'avancée de l'armée rebelle, même lorsqu'ils sont en prison, en danger de mort.ils composent sans cesse, l'un dans l'emportement, l'autre dans la réflexion (...)
Et au même instant, la poésie leur permet d'exprimer une plainte, un désir, un espoir qu'ils ne trouvent pas dans la réalité.

( p.89)
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Étangs- miroirs par Don Qiang

J'aime emmener, quand le soleil est au rendez-vous, des amis français découvrir des lieux secrets de Pékin, que je juge essentiels pour comprendre la Chine.
(...) (*À propos d'un petit Jardin dans Pékin: Jardin aux miroirs clairs)

Jardin aux miroirs, dans une résidence impériale : cela ne manque pas d'évoquer immédiatement un des lieux les plus célèbres de la France, la galerie des Glaces du Château de Versailles.

Comparaison n'est pas raison, aimait dire le grand sinologue René Étiemble.Pourtant, une simple comparaison du Jardin aux Miroirs Clairs et de la galerie des Glaces fait ressortir une des différences essentielles de ces deux cultures qui s'attirent et s'apprécient. Pendant que la Galerie des Glaces est un lieu de grand apparat construit par un souverain qui se comparaît au soleil, et que dans les glaces se reflétaient des hommes éblouis plus ou moins narcissiques, le Jardin aux Miroirs Clairs reflète le ciel et les nuages flottants. Car les miroirs en question ne sont rien d'autre que des petits étangs aux eaux claires, autour desquels sont disposés des pavillons, des petits ponts et des kiosques. Avec des étangs- miroirs, les Chinois réussissent à se tailler un bout du ciel au sol même d'un jardin.

( p.179)
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La Nature

Chez les poètes Tang, la nature est à la fois plus proche et plus réelle. (...)
Les poètes sont sur le seuil, ils cherchent à
le (* le monde) comprendre, non pour en jouir, mais pour atteindre à l'évidence, à la révélation- au silence.

Écoutons encore Li Bai :

" Assis devant le Mont Jingting

Les oiseaux s'effacent en s'envolant vers le haut
Un nuage solitaire s'éloigne dans une grande nonchalance
Seuls, nous restons face à face, le Mont Jingting et moi
Sans nous lasser jamais l'un de l'autre"

( p.149)
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Li Bai l'aventurier

Quelle force le pousse à voyager ? Pourquoi abandonne-t-il tout, sa femme, ses enfants, ses biens, sa sécurité, pour se lancer sur les chemins, au risque de sa vie? La Chine des Tang, même si elle n'est plus dans l'état de guerre permanent des règnes qui ont précédé, n'est pas un lieu de tout repos.Les routes ne sont pas sûres. (...)
Le plus souvent Li Bai voyage seul, à pied.(...)
Il lui arrive de voyager avec des compagnons de route- Du Fu, entre autres- mais généralement il est seul, et lorsqu'il prend congé de ses amis les adieux sont déchirants, parce qu'ils ne sont pas sûrs de se revoir. Dans la Chine du VIIIe siècle, on peut voyager, mais les nouvelles ne circulent pas, et partir, c'est disparaître.

( p.19)
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