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Citations de J.M.G. Le Clézio (1806)


Non, l’œil ne suffit plus, tant il y a à voir. Il faudrait avoir dix mille yeux, et ce ne serait pas assez. Il faudrait être vite comme les mouches, lent comme les arbres, grand comme les baleines et haut comme les condors. Et ce ne serait pas assez. Il faudrait être plusieurs comme les microbes, il faudrait être lourd comme l’osmium, doux comme la terre, froid comme la neige. Il faudrait être eau comme l’eau, et feu comme le feu. Et moi, je ne suis qu’un!
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Petite Croix entend le murmure qui grandit, qui s'élargit autour d'elle [...] il jaillit en tous sens comme des gouttes, il fait des nœuds, des étoiles, des espèces de rosaces.
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Mon identité est là : cest une identité nomade. Il faut bouger pour apprendre. Je ne voyage pas pour écrire ce que j'écris, mais j'écris pour pouvoir voyager. Ce qui est un peu différent. P51
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La ville était étendue sur la terre, espèce d’immense nécropole aux dalles et aux murs éblouissants, avec le quadrillage des rues, des avenues et des boulevards. Tout était prêt, on aurait pu dire, et fixe pour que les choses se passent ainsi. C’était un plan méthodique, où il ne manquait rien, presque rien. Il y avait des trottoirs de ciment, aux petits dessins réguliers, les chaussées de goudron marquées par les pneus, les arbres debout, les réverbères, les immeubles verticaux qui s’élevaient à des hauteurs vertigineuses, les fenêtres, les magasins pleins d’écritures, les bruits, les vapeurs. Un peu plus haut, il y avait ce plafond gonflé, ni bleu ni blanc, couleur d’absence, où pendait le rond du soleil. Une étendue distraite, un désert mouvementé, une mer où les vagues avançaient les unes derrière les autres, sans jamais rien changer.
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J'ai dû trouver ma liberté plus tard en France, cette liberté, c'était de pouvoir écrire, d'inventer des histoires et des personnages. A compter de ce jour-là, je pouvais réaliser ce qu'il m'était impossible de faire dans la vie de tous les jours.
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II l'avait lu dans la bouche de Polonius dans Hamlet, qui dit :
« To thine own self be true,
And it must follow, as the night the day,
Thou canst not then be false to any man. »
(Envers toi-même tu dois être vrai
Et de même que la nuit succède au jour
Tu ne dois jamais être faux envers qui que ce soit.)
C'est devenu ma devise, be true to your- selves, soyez vrais avec vous-mêmes, soyez fidèles à vous-mêmes, suivez le conseil admirable du grand Shakespeare. On peut en effet s'interroger sans fin sur le pouvoir des mots, dans notre monde de violence et d'injustice. Je crois aussi qu' on trouve la réponse à cette question dans la littérature.
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Lalla se lève, elle marche sans faire de bruit jusqu'à la porte, pour voir les dessins des éclairs. Mais le vent commence à souffler, et les larges gouttes froides tombent sur la terre et crépitent sur le toit; alors Lalla va se recoucher dans les couvertures, parce que c'est comme cela qu'elle aime entendre le bruit de la pluie : les yeux grands ouverts dans le noir, voyant par moments le toit s'éclairer, et écoutant toutes les gouttes frapper la terre et les plaques de tôle avec violence, comme si c'étaient de petites pierres qui tombaient du ciel.
Au bout d'un instant, Lalla entend le jet d'eau qui jaillit des gouttières, et qui frappe le fond des tonneaux de kérosène vides; elle est heureuse, comme si c'était elle qui buvait l'eau.

P. 160-161
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II ne faut pas oublier également que Marrakech est une oasis : lorsqu'on franchit le désert, on arrive à Marrakech. Cet esprit de l'oasis est un élément important dans la culture de cette ville, cela a un sens profond pour l'histoire parce que l'identité africaine s'est pour partie forgée dans cette ville.
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Cette vie de la guerre, je crois qu'elle m'a sensibilisé à tout ce qui peut se passer, parce qu'un enfant est une sorte d'éponge, il capture absolument tout ce qui se passe.
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C’était comme un secret, en parler, croyait-elle, risquait de le perdre, à la manière d’un rêve fragile qui s’efface aussitôt qu’on commence à le mettre en mots.

(Stock, p.53)
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L’avantage d’avoir grandi dans une ville c’est qu’on y prend l’habitude d’aller pieds nus, tandis que je voyais mes collègues de l’université trébucher sur leurs hauts talons noyés par la boue, ou glisser dans leurs tongs, en battant des bras comme des oiseaux sur la banquise. (Stock, p109)
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L’exotisme est un vice, parce que c’est une manière d’oublier le but véritable de toute recherche, la conscience. C’est une invention de l’homme blanc, liée à sa conception mercantile de la culture. Ce désir de possession est stérile. Il n’y a pas de compromis : celui qui cherche à s’approprier l’âme d’une nation en arrachant des bribes, en collectionnant des sensations ou des idées, celui-là ne peut connaitre le monde ; ne peut se connaitre lui-même. La réalité est à un autre prix. Elle demande l’humilité.
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C'est à l'Afrique que je veux revenir sans cesse, à ma mémoire d'enfant. À la source de mes sentiments et de mes déterminations. Le monde change, c'est vrai, et celui qui est debout là-bas au milieu de la plaine d'herbes hautes, dans le souffle chaud qui apporte les odeurs de la savane, le bruit aigu de la forêt, sentant sur ses lèvres l'humidité du ciel et des nuages, celui-là est si loin de moi qu'aucune histoire, aucun voyage ne me permetta de le rejoindre.
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Penser était dangereux. Marcher était dangereux. Parler, respirer, toucher étaient dangereux. Les éclats se ruaient de toutes parts à l’assaut, les signes aux grands bras pleins d’éclairs bondissaient devant les yeux. La page blanche immense était étendue comme un piège sur le monde, elle attendait le moment où tout serait vraiment effacé. Les hommes, les femmes, les enfants, les animaux et les arbres bougeaient derrière ces peaux transparentes, et le soleil mitraillait de toute sa chaleur blanche et dure. Tout était comme ça, il n’y avait probablement rien à faire. Et un jour, sans doute, on serait devenu pareil aux autres, un vrai signal de lumière, à l’angle d’un carrefour, une lampe un peu clignotante, un peu étoile aux rayons effilochés, prisonnière du dessin. On ne pourrait plus dire non, ni fermer les yeux en s’en allant. On aurait sa vie d’insecte fanatique, tout seul au beau milieu des autres, et on dirait oui, oui, je t’aime, tout le temps.
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Je vais regarder la fièvre monter dans le ciel du crépuscule, les éclairs courir en silence entre les écailles grises des nuages auréolés de feu. Quand la nuit sera noire, j'écouterai les pas du tonnerre, de proche en proche, l'onde qui fait vaciller mon hamac et souffle sur la flamme de ma lampe. J'écouterai la voix de ma mère qui compte les secondes qui nous séparent de l'impact de la foudre et qui calcule la distance à raison de trois cent trentre-trois mètres par seconde. Enfin le vent de la pluie, très froid, qui avance dans toute sa puissance sur la cime des arbres, j'entends chaque branche gémir et craquer, l'air de la chambre se remplit de la poussière que soulève l'eau en frappant la terre.
Tout cela est si loin, si proche. Une simple paroi fine comme un miroir sépare le monde d'aujourd'hui et le monde d'hier. Je ne parle pas de nostalgie. Cette peine dérélictueuse ne m'a jamais causé aucun plaisir. Je parle de substance, de sensations, de la part la plus logique de ma vie.
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Est-ce ma faute, si je suis de la race des voleurs ? Le blanc a toujours tout volé à tout le monde. Les juifs, les arabes, les hindous, les chinois, les nègres les aztèques, les japonais, les balinais. Quand il en a eu assez de voler des terres, et des esclaves, le blanc s’est mis à voler de la culture. Aux Juifs il a volé la religion, aux Arabes la science, aux Hindous la littérature. Quand il a eu fini de voler le corps des nègres, il leur a volé la musique, la danse, et l’art pictural. Quand sa religion chrétienne, religion devenue minable, une vraie religion d‘épicier, ne l’a plus satisfait, il s’est retourné vers la religion de l’Inde.
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Fuir, toujours fuir. Partir, quitter ce lieu, ce temps, cette peau, cette pensée. M’extraire du monde, abandonner cette propriétés, rejeter mes mots et mes idées et m’en aller. Quitter pour quoi ?pour qui ? Trouver un autre monde, habiter une autre ville, connaitre d’autres femmes, d’autres hommes, vivre sous un autre ciel ? Non, pas cela, je ne veux pas mentir. Les chaines sont partout. La ville, la foule, les visages connus sont partout. Ce n’est pas cela qu’il faut quitter. Un déplacement géographique, un petit glissement vers la droite, ou vers la gauche, à quoi bon ? Fuir, c’est-à-dire trahir ce qui vous a été donné, vomir ce qu’on a avalé au cours des siècles. Fuir : fuir la fuite même, nier jusqu’à l’ultime plaisir de la négation. Entrer en soi, se dissoudre, s’évaporer sous le feu de le conscience, se résoudre en cendre, vivement, sans répit.
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La mer profonde, violente, d'un bleu sombre au-delà des barrières de corail, aux vagues hautes comme des collines mouvantes que frangent les nuages d'embruns. La mer lourde et lisse des journées qui précèdent l'ouragan, sombre sous le ciel chargé de nuages, quand l'horizon est trouble et fume pareil au bord d'une cataracte. La mer presque jaune du crépuscule, en été, nappe d'huile sur laquelle passe des frissons, en cercles brefs, où s'allument les étincelles du soleil, sans aucune terre qui ferme l'espace. La mer comme le ciel, libre, immense, vide d'hommes et d'oiseaux, loin des continents, loin des souillures des fleuves, avec seulement, parfois, au hasard, des poignées d'îles jetées, si petites, si fragiles qu'il semble qu'une vague pourrait les submerger, les effacer à jamais. La mer, le seul lieu du monde où l'on puisse être loin, entouré de ses propres rêves, à la fois perdu et proche de soi-même.
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Aller à la recherche de ces mers et des îles où passèrent autrefois les navires, parcourir l'immense champ de bataille où s'affrontèrent les armées et les hors-la-loi, c'était prendre sa part du rêve de l'Eldorado, chercher à partager, près de deux siècles plus tard, l'ivresse de cette histoire unique : quand les terres, les mers, les archipels n'avaient pas encore été enfermés dans leurs frontières, que les hommes étaient libres et cruels comme les oiseaux de la mer, et que les légendes semblaient encore ouvertes sur l'infini.
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Elle semblait un oiseau, légère, pétillante.
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