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Critiques de Jacques Ellul (48)
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«Je suis sincère avec moi-même» et autres lieux..

On assiste à une remise en question assez radicale de l'humanisme. L'homme va t-il échapper à la philosophie? Face à la science, sous l'influence conjuguée de la psychanalyse, de la sociologie, sans oublier les progrès de la biologie, il semble qu'on ne sache plus très bien ce qu'est l'homme. Le sujet humain s'est vu déchiffré, décodé dans son inconscient et son langage, dans son rapport à autrui. Il ne correspond plus à l'étude traditionnelle qu'en faisait la pensée philosophique en terme de conscience, de sujet et d'objet. Cette crise, issue de ceux qu'on a appelé Les grands maîtres du soupçon...
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Histoire des Institutions, tome 1-2 : L'Ant..

Un véritable ouvrage de référence et une bible pour les étudiants en droit
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La parole humiliée

Cet essai, parfois assez touffu, m'a décontenancé par ses brusques changements de champs (sociologie, théologie, critique du structuralisme) mais intéressé par bien des points, Il sonne encore très actuel alors qu'il a été écrit fin 70 début 80. A bien des égards Ellul a eu la prescience de ce qu'allait devenir la société française trente ans plus tard. Le centre de l'essai est une apologie de la parole ( qui inclut la parole de Dieu) contre une civilisation de l'image absolue. Tout ça est évidemment bien plus nuancé et très construit. Impressionnant quoi que parfois un peu ardu à suivre.
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Anarchie et christianisme

Une analyse sans langue de bois et érudite. Ce qui peut paraître antinomique ne l'est finalement pas tant que ça.
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La subversion du christianisme

un auteur essentiel mais méconnu en France
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La technique, ou, L'enjeu du siècle

Cet essai très fouillé, à la croisée de la critique sociale et de la philosophie, est devenu un classique. Jacques Ellul, philosophe chrétien, a inspiré des gens aussi différents que l'écologiste radical Ivan Illitch et le terroriste Ted Kaczynski (alias Unabomber).
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Silences

Je vais faire un aveu: je ne connaissais absolument pas Jacques Ellul (1912-1994), et c’est vraiment par hasard que ce petit volume est arrivé entre mes mains. Incidemment, j’ai appris que cet auteur n’était pas principalement un poète, mais un historien et un sociologue. Protestant, il a critiqué sévèrement le christianisme (selon wikipedia). Et les poésies qu’il a écrites, il s’est décidé à les publier très tardivement. "Silences" est un recueil de poèmes que j’ai parcouru. Certains, pas tous, m’ont plu. J’en mets un ou deux en citation.
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Anarchie et christianisme

Je suis anarchiste je suis chrétien. Ce livre m'a fait un bien fou.
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Islam et judéo-christianisme

Peut-être le seul livre de Jacques Ellul où je ne l'ai pas suivi... mais je reste tellement attaché à cet auteur que je veux bien croire que je n'ai peut-être pas su l'entendre.
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Pour qui, pour quoi travaillons-nous ?

Une bonne claque à la valeur travail ! Ellul excellent comme toujours.
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À contre-courant: Entretiens

Première prise de contact avec Jacques 'Ellul, penseur qui m'intriguait depuis longtemps, mais de qui je n'avais encore rien lu. J'ai choisi ce livre d'entretiens pour avoir une vue d'ensemble. De ce point de vue, c'est un ouvrage assez réussi puisque les questions balayent la biographie et les ouvrages dans leur diversité (sociologie, théologie, sciences et techniques...) et pourtant leur cohérence. Je vais lire ensuite un de ses essais, "la parole humiliée" pour une (petite) plongée dans l'oeuvre.
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À contre-courant: Entretiens

La forme du dialogue a l'avantage d'être très facile à lire, tout en abordant la pensée de Jacques Ellul en profondeur, l'intervieweur, Patrick Chastenet, n'hésitant pas à se faire l'avocat du diable dans la formulation de ses questions. C'est pourquoi ce livre est à mes yeux un bon moyen d'entrer dans l'oeuvre volumineuse de ce grand penseur. L'ouvrage est à la fois une biographie et un résumé des grands sujets abordés dans son oeuvre.

Je me suis intéressée à Jacques Ellul en tant que précurseur de la décroissance. J'ai trouvé sa position sur le sujet plus subtile que beaucoup de discours écologistes. Il ne conçoit pas l'écologie sans une refondation en profondeur de la société technicienne actuelle, sans une sortie de notre dépendance à la consommation à outrance.

Cet ouvrage m'a permis de découvrir l'imbrication de son travail de théologien et son travail de sociologue. Il voit une relation dialectique entre ces deux domaines. Il pose des constats assez pessimistes sur notre société. C'est comme théologien qu'il trouve l'espérance.
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La Raison d'être. Méditation sur l'Ecclésiaste

Alambiqué et répétitif, érudit jusqu'à la cuite. Je n'en suis pas venue à bout et pourtant j'adore le texte dont il traite. J'ai une approche intuitive de la Bible et le message de l'Ecclésiaste ne m'avait pas parru si complexe... Cependant cet essai a eu le mérite de m'éclairer sur les origines du texte et de me poser des questions. A lire donc (en diagonale) si on a été touché par l'Ecclésiaste.
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La foi au prix du doute: «Encore quarante j..

Ce livre se compose de deux parties:

• un dialogue autour de la croyance entre deux personnages fictifs : Monos et Una. Le but de cette partie est d'amener le lecteur à quitter les préjugés et regarder en quoi, même dans le monde moderne tout est constitué de croyances.

• Dans la seconde partie, Jacques Ellul expose ce qu'est pour lui la foi. C'est une très belle vision. La foi n'a pas de but, elle est uniquement une réponse à l'amour de Dieu offert au monde par Jésus. La foi n'enferme pas au contraire, par son questionnement permanent, elle ouvre l'individu. La foi, habitée de la confiance en Dieu, amène à l'action dans le monde.



Un très beau livre qui délivre la foi de ses carcans mais qui n'est pas facile d'accès.
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Conférence sur l'Apocalypse de Jean - Apocaly..

Cette transcription d'une conférence de Jacques Ellul offre un analyse actuelle et pleine d'espoir de l'Apocalypse. Loin des prophéties de malheur, Ellul nous montre comment comment l'Apocalypse et un message qui nous permet de mieux appréhender la réalité contemporaine et les desseins d'amour de Dieu pour l'ensemble de sa création.
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La parole humiliée

J’ignore, après avoir lu de concrets philosophes comme Nietzsche, sous l’effet de quel désœuvrement on peut, ou l’on a pu, produire des ouvrages comme La parole humiliée, et non seulement les écrire, mais encore les plébisciter comme lecteur. J’ai quitté 40 pages après le premier mot et j’ai fermé définitivement le livre, après y avoir rencontré la complaisance d’un penseur qui, sans doute de bonne foi c’est-à-dire incapable de mesurer sa vanité et sa verbosité, aime à s’écouter pérorer de choses inutiles et systématiquement douteuses, prises évidemment toujours dans un certain sens spécifique n’appartenant qu’à l’auteur, et que cet auteur à la fausse modestie d’exclure de tous les champs plus vastes qu’il ne maîtrise pas et refuse d’examiner. À croire que les années 80, avec des Meschonnic par exemple, n’auraient produit que des cuistres universitariens, s’il n’y avait pas eu de marginaux Muray, par exemple ! On reconnaît la sorte d’auteurs à laquelle appartient Ellul à ce que leurs assertions les plus principielles et censément les plus fortes, de forme toujours précieuse, réalisent un sentiment identique de vérité générale si on les reformule sous une forme contraire : c’est parce que justement ils ne traitent que de généralités déconnectées, de notions, de concepts, d’abstractions, et que c’est le propre de tels éthers de ne pouvoir être davantage réfutés que confirmés. Il manque à ces esprits boomer ce qu’on pourrait appeler le « sens quantique » : l’intelligence s’est figée et racornie à des procédés inessentielles, stylée à des écorces toujours pareilles, rendue progressivement inapte, après les premiers succès que ces auteurs se sont trop attachés à renouveler non pas au nom de la vérité mais de leur notoriété, de leur sensation d’importance, pour ne pas dire de leur carrière, à former des objections favorables et des contradictions propices, en somme à procéder d’une véritable faculté de dissociation. Un grand esprit est toujours temporairement extérieur à lui-même, il lui faut ce recul formidable et centripète pour envisager l’altérité, se l’approprier et en conformer une synthèse irréfragable ; mais ces penseurs-ci « pensent en rond », incapables de sortir d’eux-mêmes, incapables d’affronter des vérités inédites, incapables de flairer dans le fond inspirant de la réalité ; ils paraissent obtusément ignorer les reproches les plus évidents, aveuglés par une focalisation de suffisance ; ils ne sont pas orgueilleux comme Nietzsche pour ce qu’ils savent, ils sont enferrés dans leur illusion d’impeccabilité parce qu’ils sont accrédités et populaires ; ils se croient inattaquables parce qu’ils ont acquis une situation qu’ils se contentent de dérouler sans péril sous des ratiocinations similaires qui se reconnaissent et, prudemment, se confortent entre elles.

Il faudrait que j’illustre nettement ce vice philosophique du développement construit et cependant inutile, et l’on sait que j’en suis capable sur 40 pages aussi bien que sur 400, mais cela d’emblée m’importune d’évidence ; j’en dirais cependant ceci : qu’il suffit de lire ce début en songeant comment un homme qui escompte développer une réflexion sur la parole peut si longtemps atermoyer un-dixième de son ouvrage sur la différence entre voir et entendre, avec moult catégorisations mièvres et sans progrès (comme, lorsqu’il s’agit bel et bien de la parole : la Parole « implique », la Parole est temps, la Parole est paradoxe, la Parole est mystère…), différence qui fait admettre à Ellul, en somme et en une révélation d’importance, que la vue est une succession d’images instantanées (tout comme la pellicule est une suite de photographies sur un film) tandis que l’audition induit davantage la pensée du temps parce qu’on s’attend à ce qu’un son succède à un autre : mais c’est stupide ! Voilà donc de ces messieurs qui, quand ils se forment une image en pensée, sont incapables de se la figurer en mouvement et qui, quand ils écoutent un son, supposent que ce son sans un autre ne veut rien dire ! « Je sais bien tout cela, mais je garde ma simplification abusive » : l’important, c’est que vous le sachiez, et que vous vous gardiez bien, par confort, de revenir de vos erreurs ! Et tout le reste est à l’avenant ; par exemple, une autre idée essentielle : « La parole n’est pas caractérisée par la transmission d’informations », et ce serait, dit l’auteur, à cause de ses multiples « évocations » : ah ? En quoi une évocation n’est-elle pas aussi une information ? « Ainsi pour moi le langage parlé de l’homme ne peut être ramené à n’importe quel assemblage cohérent de signes compréhensibles à l’aide d’un code », et pourquoi ? Parce que « c’est le parti pris de cette réflexion, où je n’ignore pas les autres choix possibles […] je ne les méprise pas, je ne les élude pas, ils sont tout simplement autres. » Merci : encore donc ! Ellul sait qu’il a tort, il le dit lui-même, et il récidive et s’obstine ! Mais que cherche donc ce penseur ? Consentira-t-il à la fin à exprimer une seule chose qui soit indubitable et vraie ? Ah ! justement, l’y voici : « La Parole est seule relative à la vérité. L’image est seulement relative à la réalité » : voilà une distinction à faire, et des plus délicates ! Lisons : « Le vrai, c’est ce que contient la réalité, ce qu’elle exprime ». Ah ! mince ! c’est que l’inverse fonctionne aussi très bien, il me semble (la réalité, pourrait-on dire, c’est ce que contient la vérité, ce qu’elle exprime… en tous cas ça ne me révolte pas davantage) ; je continue : « Qu’est-ce que la Vérité » (nous y sommes en plein, c’est là ce qu’il faut dire) : « Je ne répondrai certainement pas en donnant un contenu [mais il faut] la distinguer clairement de la réalité » Quoi ? Sans contenu ? Mais pourquoi ? Parce que « ceci serait aussitôt contesté, ceci demanderait un immense détour, ceci excéderait mes forces. » : ce n’est que maintenant que vous vous plaignez de pouvoir être réfuté, et aussi que vous manquez de force ? Enfin, une tentative : « Nous pourrons donc admettre qu’est du domaine de la Vérité tout ce qui se réfère à la destination dernière de l’homme. […] C’est encore tout ce qui se réfère à l’établissement d’une échelle de valeurs qui permette à l’homme de prendre une décision personnelle et significative. C’est encore tout ce qui se rapporte au débat de la Justice et de l’Amour, et de leur détermination. » Eh… oui ; la « Vérité », donc. On se représente après cela pourquoi Ellul risque fort peu d’être contesté, car il fait ce qu’on fait de pire : il prend un mot capital, et pour s’épargner la peine d’une contradiction, il donne à ce mot un sens qui n’a manifestement rien à voir avec sa signification usuelle. C’est vraiment très pratique ! Si par exemple vous tenez à parler du langage, et qu’il y a face à vous des gens qui s’y connaissent un peu, des linguistes et des phoniatres par exemple, il ne vous suffit que de dire, par exemple, que le langage est une coloration humaine de l’inanimé divin, ou que la parole est une signification de vie à travers la métaphysique, et, c’est sûr, vous l’emporterez contre tous, personne ne vous contredira, et tous les corollaires que vous établirez sur cette épate échapperont à l’appréhension de vos auditeurs ! Enfin, passons : les quarante minutes que j’ai passées à lire ces quarante pages ne valent peut-être même pas les deux heures qu’il me faut pour en dresser cette synthèse, quand cinq mots suffisent pour dire et retenir le conseil suivant : « Ne lisez pas ce livre ! »
Lien : http://henrywar.canalblog.com
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Islam et judéo-christianisme

Très loin de l'irénisme ambiant et du consensus mou, ce petit livre fort bien argumenté fera grincer quelques dents.

L'intérêt d'Ellul (entre autre) est le quadruple regard - histoire, sociologie, théologie, droit - posé sur ce délicat sujet. Un ouvrage conseillé à tous ceux qui se posent des questions sur l'Islam sans jamais avoir osé le demander. "Ce livre est très important car il aborde un des problèmes les plus délicats de notre monde, délicat par la difficulté même du sujet, à savoir la réalité de l'Islam dans sa doctrine et sa pratique à l'égard des non-musulmans, et délicat par l'actualité du sujet, et les sensibilités qui se sont révélées un peu partout dans le monde" (page 93)
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Israël, Chance de Civilisation

Cet ouvrage est la compilation de plusieurs articles écrits essentiellement sur l'Etat d'Israël et ses relations difficiles avec le monde arabo-palestinien, par J. Ellul, de 1967 à 1992.

Jacques Ellul, réaffirme au fil des articles, son attachement et son admiration pour Israël, la justification de son existence en se fondant d'ailleurs sur la Bible, en réfutant les condamnations institutionnelles (ONU, en particulier) et les critiques d'une certaine idéologie de gauche particulièrement en France et enfin en rejetant le concept de nation palestinienne.

Pas étonnant, que ce grand esprit et intellectuel français (historien du droit, théologien chrétien, et philosophe) ait été boudé par l'intelligentsia française, alors que ce n'est pas le cas aux Etats unis où son oeuvre est étudiée.

Il a été un de mes professeurs à Bordeaux, et j'ai toujours été en phase avec ses écrits théologiques, politiques et sa puissante théorisation de la Technique, non dépassée à ce jour. C'est une satisfaction pour moi de constater que mes intuitions et mon sentiment sur Israël coïncident avec les analyses de J. Ellul. Au fond, je suis, depuis longtemps, "ellulien" avant d'en avoir eu conscience.



Pat
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Anarchie et christianisme

Difficile de concilier « Obéissez moi vraiment, à moi, le Seigneur votre Dieu » (Exode 15, 26) et « Ni Dieu ni Maître ! » Et pourtant, il existe un courant d'anarchisme chrétien, la preuve en est !



Il est passionnant de voir l'auteur se réclamer de deux philosophies (anarchisme et christianisme) alors que leurs communautés respectives se considèrent en totale contradiction. Son discours une incitation de penser par soi-même, en dehors de la doxa de sa ou ses communautés, afin de ne jamais renier ses convictions par la facilité du conformisme. Si je ne devais retenir qu'une seule chose de cette lecture, ce serait celle-ci, car c'est une idée puissante et importante, et applicable à de nombreux domaines même hors des sphères politique et religieuse.



Pour le contenu en lui-même, cet essai développe une pensée fluide bien qu'émaillée de très nombreuses parenthèses intempestives et pas toujours bien justifiées. L'argumentaire est intéressant mais ne me convainc pas toujours, ce qui me laisse en désaccord avec plusieurs points concernant sa vision d'une société anarchiste, et pas des moindres.



Premièrement, être en désaccord avec l'État car il est une autorité ne me semble pas un comportement rationnel ni même juste... (Dans le cas où ce n'était pas l'idée défendue, Ellul aurait dû davantage développer pour éviter l'ambiguïté.)

Si le but est seulement de s'opposer à l'autorité par principe, soit, cela fait sens. Mais si le but est d'être réellement libre, on devrait plutôt pour chaque cas se demander ce qui est juste de faire, indépendamment des obligations, plutôt que de la rejeter par défaut.

S'il y a obligations, il peut aussi être judicieux de s'interroger sur les raisons derrière. Certaines relèvent de l'intérêt général, notamment certains vaccins qui ont permis d'éradiquer des maladies mortelles, puisqu'Ellul évoque la vaccination obligatoire. Il me semble plus juste de se renseigner, peser la balance des bénéfices et risques, puis agir et assumer son choix. Dans le cas où l'obligation (ou interdiction) est absurde, effectivement il faut revendiquer le droit de ne pas y être contraint.

Mais s'y opposer par défaut me paraît dangereux et irresponsable. Parfois une menace ne peut être endiguée que par un effort commun, et le système d'État a au moins cet avantage de pouvoir mobiliser les forces du nombre... bien qu'on ne peut que déplorer que ce soit par la contrainte.



Autre point de friction : l'antimilitarisme. C'est une position que je peux tout à fait comprendre, mais elle n'est qu'évoquée au passage comme si elle allait de soi, et cela manquait de développement.



Ensuite, je le rejoinds parfaitement sur le fait que notre démocratie est imparfaite. Notamment, lorsque l’on voit les dernières présidentielles, tous les premiers candidats dans les sondages sont issus de la classe bourgeoise, et ne peuvent gagner en crédit que par l'aval du système médiatique et des jeux de réseau dans le monde politique. Jacques Ellul se dit d'ailleurs « antidémocratique » dans le sens où il considère que la bourgeoisie a la mainmise sur la démocratie actuelle et en fait un simulacre servant leurs intérêts.

Avec ce constat, je comprends le point de vue d'Ellul : si une philosophie politique est incompatible avec le système en place (ex : les écologistes dans un système capitaliste productiviste), participer à des élections peut être vu comme une perte de temps, d'argent et d'énergie.

On ne peut se battre sur tous les fronts, il faut choisir ceux pour lesquels il y a une chance d'avancer.

Cependant, se présenter à des élections est un moyen de faire apparaître ses idées dans le débat public, y compris en marge des médias institutionnalisés. C'est d'autant plus vrai aujourd'hui où internet permet de toucher des publics sans intermédiaires (Notons que ce livre date de 1988). La bataille ne pourra de toute façon qu'être gagnée que par l'assentiment de l'opinion publique.



*



Toute cette première partie s’intéressait à l’anarchie d’un point de vue chrétien. La seconde présente des arguments pour une lecture anarchiste de la Bible. Voici quelques citations allant dans le sens de cette thèse.



Tout d'abord, Ellul soulève que dans l'Ancien Testament, les rois sont soit de « bons rois » mais vaincus par les ennemis d'Israel, soit de « mauvais rois » qui idolâtrent d'autres dieux, tyrannisent et font régner l'injustice...



De nombreux passages du Livre de l'Écclésiaste critiquent sévèrement l'autorité.

« Si tu vois dans une province le pauvre opprimé et la violation du droit et de la justice, ne t'étonne pas car l'homme qui commande est placé sous la surveillance d'un autre plus élevé, et au-dessus d'eux, il y en a de plus élevés encore... [...] Un avantage pour le peuple, c'est un roi honoré du pays ! »(Eccl. VIII, 9)

« Là où se trouve le siège de la justice, là règne la méchanceté. » (Eccl.)

« L'homme domine sur l'homme pour le rendre malheureux. » (Eccl., VIII, 9)

« Ne maudis pas le roi, ne maudis pas le riche dans la chambre où tu couches, car l'oiseau du ciel emporterait ta voix, l'animal ailé publierait tes paroles. » (X, 20) En anglais moderne nous pourrions traduire par : "Big Brother is watching you."



Le concept même d'État peut être lié au diable si nous considérons les passages suivants dans l'Évangile selon Mathieu.

Lors de la tentation de Jésus dans le désert, « Le diable le transporta encore sur une montagne très élevée, lui montra tous les royaumes du monde et leur gloire, et lui dit : Je te donnerai toutes ces choses, si tu te prosternes et m'adores. Jésus lui dit : Retire-toi, Satan ! Car il est écrit : Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et tu le serviras lui seul. » (Mat. IV, 8-10)

Jésus ne conteste pas que le démon possède les royaumes. Cela peut s'interpréter comme le fait que le pouvoir politique se reçoit effectivement du diable.

Une autre citation de Jésus va dans ce sens : « Vous savez que les chefs des nations les tyrannisent et que les Grands les asservissent. Il n'en sera pas de même au milieu de vous. Quiconque veut être grand parmi vous qu'il soit le Serviteur... »

Quant au célèbre « — Est-il permis ou non de payer le tribut à César ? Devons nous payer ou ne pas payer ? — Donnez une pièce d'argent, afin que je la voie. De qui sont cette effigie et cette inscription ? — De César. — Rendez à César ce qui est à César. » (Marc XII, 13 sq), il montre bien que la monnaie appartient aux autorités politiques puisqu'elle en porte la marque de propriété, mais tout le reste appartient et est sous la seule autorité de Dieu.

Notons que parmi les disciples de Jésus, il y a aussi bien des Zélotes (Simon, Judas) (membres du mouvement de la libération d'Israel du joug romain) que des collaborateurs de l'envahisseur (Mathieu).



L'Apocalypse laisse apparaître un parallèle possible entre la « Bête » et l'État (ici l'Empire Romain). De nombreux détails vont en ce sens :

« trône »

« qui peut combattre contre elle ? »

« toute autorité et pouvoir sur toute tribu, tout peuple, toute langue et toute Nation »

« elle fait que tous les habitants de la terre adorent la première bête »

« elle séduit les habitants de la terre »

« elle leur dit de se faire une statue de la première bête »

« elle anime l'image de la bête, et parle en son nom »

« Elle fait que tous, petits et grands, riches et pauvres, libres et esclaves, reçoivent une marque sur la main droite ou sur leur front, et que personne ne puisse acheter ni vendre, sans avoir la marque de la bête »



Cependant, ces critiques virulentes des autorités politiques sont lourdement contrebalancées par la suite, puisque Paul dit dans ses Épîtres qu'il faut leur obéir aveuglément...

J'ai seulement pris en notes ces quelques citations que je trouve inspirantes et intelligentes (donc je passe sur les inepties de Paul qui ont tôt fait de m'énerver tant elles sont péremptoires et archaïques !). D'ailleurs lui-même ne désapprouverait pas ce que je viens de dire : « Ne vous conformez pas au siècle précédent mais soyez transformés par le renouvellement de votre intelligence. »

« Rappelez-vous que les autorités ce sont aussi des hommes et que ces hommes en tant que tels, il faut aussi les accepter et les respecter. »

« Priez pour tous les hommes, pour les rois et pour ceux qui sont élevés en dignité. »

Commentaire d'Ellul : « Cela peut paraître absolument fou, mais j'ai connu des chrétiens allemands très engagés dans le mouvement de résistance contre Hitler, allant jusqu'aux complots, et qui priaient pour lui ! *Les seuls qui ont organisé une résistance à Hitler, depuis 1936, ont été des protestants allemands de la Bekenntniss Kirche. »

Juste au passage, je trouve malvenu de le formuler ainsi sachant qu'il y a eu d'autres mouvements de résistance par la suite.



Enfin, j'ai (ré)appris que les Évangiles avaient été écrites en grec. Le mot « diable » vient de « diabolos » en grec, qui a un sens proche de « diviseur ».

Mais les nombreuses allusions aux anges et autres créatures célestes m'ont complètement perdue. Si le livre s'adresse à des anarchistes non chrétiens, ce n'est pas très pertinent d'inclure ces étrangetés...



La conclusion est assez décevante par ailleurs. Paul a une vision légaliste de la morale. Ce n'est pas possible de faire concilier ses dires avec l'anarchisme quelles que soient l'agilité des pirouettes que l'on fait. La fin donne l'air de tordre par la surinterprétation quelques citations pour leur faire dire leur exact opposé ; ce que le livre avait pourtant réussi à éviter jusqu'ici.



*



En conclusion, il y a beaux-parents de maladresses dans la forme et l'argumentaire. C'est vraiment dommage car réunir ces deux sujets aurait pu être très intéressant.



À titre personnel, cette lecture m'a rappelé l'importance d'oser exprimer ses opinions plutôt que de les dissimuler face aux personnes pouvant avoir des avis différents. Ce serait se dissimuler soi-même derrière des conformismes limitant la pensée.



« Je pense que dans un dialogue, avec quelqu'un de différent, si on veut être honnête, il faut rester pleinement soi-même, et ni se voiler, se dissimuler, ni abandonner ce qu'il pense. »



Rien que les quelques jours suivants cette lecture, ayant cette maxime à l'esprit, j'ai pu lancer trois conversations qui se sont avérées passionnantes, avec des personnes pour lesquelles je m'étais auparavant interdit d'aborder des sujets un tant soit peu polémiques.

Je remercie Jacques Ellul pour cela, car ses mots m'ont permis de m'enrichir de ces points de vue différents, donc nécessaires !
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L'idéologie marxiste chrétienne: Que fait-on de..

Jacques Ellul commence par sa définition de idéologie :



"Une idéologie est la dégradation sentimentale et vulgarisée d'une doctrine politique ou d'une conception globale du monde; elle comporte donc un mélange d'éléments intellectuels peu cohérents et de passions, se rapportant en tout cas à l'actualité. L'univers politique moderne est encombré d'idéologies, qui rendent l'exercice de la politique à la fois plus facile (pour manipuler la masse par la propagande) et plus difficile (on ne peut décider aucune mesure sans tenir compte de l'aspect idéologique qu'elle prendra)."



Jacques Ellul s'interroge sur les raisons qui font que des chrétiens adoptent l'idéologie marxiste et la cohérence entre le christianisme et le marxisme.



Il mentionne quatre raisons pour cette adoption :



* l'injustice sociale et les inégalités;

* la situation des pauvres. L'église n'a pas assez fait pour sortir les pauvres de la situation d'opprimés;

* le désaccord entre la parole (amour à son prochain) et les actes;

* le "matérialisme". Le christianisme est devenu un spiritualisme désincarné, des sentiments et des intentions, , une contemplation stérile qui ne se traduit jamais en actes.



Pour Jacques Ellul, les chrétiens marxistes, ou devenus marxistes, sont surtout les intellectuels, et il cite une série de noms : H. Lefebvre, E. Morin, Desanti, Castoriadis, DAix, Lefort, Glucksman, ... Et il relève le contraste entre l'intérêt de ces intellectuels et celui des prolétaires : pour les premiers, il s'agit d'une démarche purement intellectuelle, idéologique, tandis que pour les derniers, c'est surtout leur vie, leurs salaires, leurs emplois, ...



Jacques Ellul fait état d'un foisonnement de livres, thèses, manifestes, ... concernant christianisme et marxisme ou plutôt les chrétiens et le socialisme.



Après cette introduction, Jacques Ellul "décortique" plusieurs écrits en particulier les livres "Lecture matérialiste de l'Évangile" (par Fernando Belo) et "Les idées justes ne tombent pas du ciel. Éléments de théologie inductive" (par Georges Casalis).



C'est très intéressant mais, pour quelqu'un comme moi qui a des connaissances limitées en théologie, c'est un peu long. Mais on peut comprendre la démarche de Jacques Ellul. Il s'agit de démontrer les erreurs et approximations de ces chrétiens marxistes. Jacques Ellul montre que, grosso modo, leurs discours partent soit d'une lecture de l'Évangile ne laissant que les parties intéressantes et en supprimant ce qui ne convient pas, soit en essayant d'interpréter l'Évangile d'une façon convenable au marxisme. Le texte est obligatoirement long puisque Jacques Ellul est obligé de montrer les erreurs parfois grossiers. A certains points de la lecture, Jacques Ellul ne cache pas que les auteurs de ces textes ne maîtrisent pas leur sujet.



En tout état de cause, il semble impossible d'être à la fois marxiste et chrétien, lorsqu'on sait ce que Karl Marx pensait de la religion : "Opium du peuple" (( Karl Marx - Religion (Wikipedia) )) (( Karl Marx - La religion est l'Opium du Peuple (Le Point) ))



« La religion est le soupir de la créature accablée par le malheur, l'âme d'un monde sans cœur, de même qu'elle est l'esprit d'une époque sans esprit. C'est l'opium du peuple. » ((Karl Marx, Critique de la philosophie du droit de Hegel.))"
Lien : http://lecture.jose-marcio.o..
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