James S.A. Corey

Votre empire a les mains beaucoup moins sales en décidant quand commence l'Histoire et quelles périodes doivent être passées sous silence.

- Votre patron projette de construire un abri assez solide afin de constituer la clé de voûte du prochain groupe d'idiots qui débarquera ici pour mourir. Je n'arrive pas à décider si ce type est un nihiliste ou le deuxième homme le plus idéaliste que j'ai croisé dans ma vie.

- Bon, fit Holden d'un ton grave, nous avons un gros problème. Il n'y a plus de café.
- Il nous reste de la bière, dit Amos.
- Oui, mais la bière, ce n'est pas du café. J'ai envoyé une demande de dépannage au Béhémoth, mais je n'ai pas reçu de réponse, et je ne nous vois pas nous lancer dans l'espace immense et inconnu sans café.

Posthumain.
Ce mot apparaissait dans les médias tous les cinq ou six ans, et chaque fois il revêtait une signification différente. Une hormone permettant la repousse neurale ? Posthumaine. Des robots sexuels avec intelligence factice incorporée ? Posthumains. Du routage en réseau auto-optimisé ? Posthumain. C'était un mot issu du vocabulaire de la publicité, frappant et vide de sens, et il avait toujours pensé que les gens qui l'utilisaient étaient assez limités quand il s'agissait d'imaginer ce dont les humains étaient capables.

- Vous savez ce que j'aime sur cette planète ? lança-t-il en guise de salut.
- Rien ?
Il lui adressa une petite grimace en feignant d'être vexé.
- Moi, j'aime la période rotation. Trente heures. On peut effectuer une journée complète de travail, traîner à se saouler au bar, et profiter quand même d'une nuit de sommeil complète. Je ne sais pas pourquoi on n'y a pas pensé, chez nous.

Avoir un plan, voilà qui fait toute la différence.
Je profite mieux de l'oisiveté quand je sais qu'elle ne sera pas éternelle.

Il fuyait la conversation, mais ne quitterait pas physiquement les lieux. Naomi attendit que le silence s'installe, que le désarroi et l'inquiétude qui l'avaient irrité le ramènent vers elle. Quinze secondent suffirent.

- Naomi, répéta Holden. A toi. Réponds, s’il te plaît.
Le silence radio était pareil à une menace. Miller s’était interrompu, la mine sombre, l’air désolé. Holden se demanda combien d’autres personnes avaient vu cette expression sur le visage de l’ex-inspecteur. Elle semblait calibrée pour accompagner des paroles telles qu’ "Il y a eu un accident" et "L’ADN correspond à celui de votre fils". Le capitaine sentait que ses mains tremblait. C’était sans importance.

- Les gens vous parlent de la guerre? demanda Miller.
- Souvent.
- Il y en a qui y comprennent quelque chose?
- Non. Je pense d'ailleurs qu'aucune guerre n'a de sens. C'est une folie qui est dans notre nature. Parfois elle ressurgit, et parfois elle se calme.
- On dirait une maladie.
- L'herpès de l'espèce humaine? dit le missionnaire avec un petit rire. J'imagine qu'il y a des manières pires d'y penser. Je crains qu'elle nous accompagne tant que nous serons humains.

- La patronne veut que vous descendiez au bureau, d'accord ?
Bobbie regarda l'heure une fois encore.
- Tout de suite ?
- Non. Demain, à l'heure habituelle. Elle m'a simplement demandé de vous appeler à quatre heures du matin pour être sûre que vous seriez bien là demain.

— Nous sommes prêts, informa Elvi.
— C’est exagéré, corrigea Fayez. Disons que nous avons atteint un niveau arbitraire 'de ça-ira-comme-ça-bordel-de-merde' et que nous appelons ça 'être prêts'.

— Voilà, c'est pour ça que jamais je ne pourrai assumer un commandement, dit-elle.
— Vous n'aimez pas prendre une décision difficile quand les infos manquent ?
— C'est plutôt que je ne suis pas une irresponsable suicidaire, répliqua-t-elle.

La voix était basse, rude et avec des tonalités curieuses, comme si les cordes vocales de l'homme avaient été tirées de sa gorge et trainées dans la boue.

- Mouais. Tu peux dire ce que tu veux sur le crime organisé, au moins il est organisé.

Une enfance passée dans la pesanteur avait façonné à jamais sa façon de voir les choses.

_ Comment savons-nous à quoi ressemble un mort pour la protomolécule ?
_ Nous... Nous ne le savons-pas, j'imagine. Mais pas de battement de coeur, c'est quand même un signe révélateur.

Une opération de l'Alliance des Planètes extérieurs était la hantise constante des services de sécurité de Cérès. S'inscrivant dans la tradition d'Al Capone et du Hamas, de l'Ira et des Guerriers rouges, l'APE était aimée des gens qu'elle aidait et redoutait de ceux qui se mettaient en travers de son chemin. C'était à la fois un mouvement social, une nation en devenir, et un réseau terroriste, et elle manquait totalement de conscience institutionnelle.

Lorsqu’on construit, on essaie de matérialiser une aspiration. Et quand on meurt, on emporte avec soi ses intentions. Les édifices sont tout ce qui reste.

En ce moment, il lui fallait le calme de son propre esprit, et curieusement, elle s'y sentait à l'aise. Quelque chose s'était produit au cours de ces derniers jours. elle n'aurait su dire quand et comment, mais les pensées noires s'étaient évanouies, soit étendues à une échelle si vaste qu'elle n'en distinguait plus l'horizon.

Dans l’espace, rien n’est jamais totalement immobile; on se mettait simplement en orbite inverse avec un autre objet.