Citations de Jean Giono (2688)
(...) Panturle s’est dressé ; il est allé à la table ; il a pris sa pipe et son tabac, puis il est revenu s’asseoir ; il a bien bourré sa pipe du pouce et maintenant, il l’allume avec un morceau de braise. Il a pris la braise directement dans le feu avec ses doigts. Il la tient sur le tabac et il pompe des joues. Et, enfin, la fumée vient et, au bout d’un peu, elle est bien épaisse. La braise est devenue noire entre ses doigts.
Deuxième partie
Chapitre 3
Tous les réseaux de son sang se sont mis à chanter comme la résille des ruisseaux et des rivières de la terre. Elle pose sa tête sur les poils de la poitrine. Elle entend le cœur et le craquement sourd de ce panier de côtes qui porte le cœur comme un beau fruit sur des feuillages.
Chapitre 4
Ce devait être vers le milieu du matin et Gédémus a tourné la tête pour regarder derrière lui. La Trinité est au fond des landes comme un petit tas de cendres froides. Un peu plus tard il a encore regardé et il n’y avait plus de La Trinité, il n’y avait plus que le ciel à la place. Alors, devant, il y avait du ciel, et du ciel aussi de chaque côté ; et, sous les pieds, il y avait ce sol poreux qui sonne comme un plafond de cave ; plus d’herbe mais des touffes de genévriers, tout arc-boutés. On était cette fois dans le grand large du plateau comme au milieu d’une mer.
Chapitre 3
Arsule écoutait les mots mais, autour des mots, elle écoutait le silence aussi parce que, vraiment, il y avait eu tout à l’heure dans ce silence quelque chose de pas naturel.
Chapitre 3
Il y avait aussi dans la terre le père de la femme, un tout vieux et une petite d’une heure, morte pendant qu’on la faisait.
Première partie
Chapitre 2
Elle a baissé la tête vers Panturle : un visage maigre et rouillé comme un vieux fer de hache. Toute la vie est dans le feu de l’œil.
Première partie
Chapitre e
Le vent soulève le ciel comme une mer. Il le fait bouillonner et noircir, il le fait écumer comme les montagnes. Il n’y a plus de soleil. Il n’y a plus ces plaques étales d’azur paisible ; il n’y a plus que la course des nuages. Ils descendent vers le sud.
Première partie
Chapitre 1
(...) voilà le clocher bleu qui monte au-dessus des bois comme une fleur et, au bout d’un petit moment, voilà sa campane qui sonne l’angélus avec la voix d’une clochasse de bouc.
Première partie
Chapitre 1
Le bonheur, voyez-vous, c’est encore la meilleure corde pour attacher les rodomonts. (...)
Un tour avec la corde du bonheur, et le voilà sans défense comme un arbre.
Le voilà à ne plus oser bouger ni ses bras, ni ses jambes, ni sa langue, à peine un peu ses yeux…
Chapitre 13
Alors, le vin est bu, et, le vin bu, tu le sais, c’est amer.
Alors, les soucis sont là et, tu le sais, les soucis, c’est amer aussi.
Alors, tout ce qui est amer t’a attendu, et c’est là, en travers de ton chemin. (...)
Alors compagnon, l’autre, l’ancienne, la née du malheur s’avance, et, c’est fini !
Chapitre 9
Le malheur est autour de lui comme une ruche de guêpes.
Chapitre 5
Quand il fut nuit, je fis mon lit à côté d’un pré qui chantait de toutes ses herbes, et, la figure contre les étoiles, je me mis à dormir à mort.
Chapitre 3
La vie s’appuyait contre ma bouche avec son bon goût mais, la chose amère était montée jusqu’au ras de ma gorge et j’en étouffais.
Chapitre 2
L’an dernier, à cette maison que tu vois là-bas, fermée et tout aveugle de volets, il y avait une épicerie. (...) elle restait ouverte très tard, avec toutes ses lumières, parce qu’elle faisait déjà de mauvaises affaires et qu’en restant tard, elle espérait toujours que quelqu’un viendrait quand il aurait fait le tour des autres magasins fermés.
Chapitre 1
Le dernier doigt du soleil lâche le pin, là-haut. Le soleil tombe derrière les collines. Quelques gouttes de sang éclaboussent le ciel ; la nuit les efface avec sa main grise.
Ce qui m’a le plus rebuté, c’est ce village de Chalanche, au plus froid de ces montagnes perdues ! Avec son climat atroce durant la mauvaise saison, son isolement complet du reste du monde, son manque de confort et de modernité, son absence totale du moindre commerce, et j’en oublie…
– Allons, tout n’est pas si noir, ici ! Il y a aussi des avantages, pour qui sait vivre proche de la nature… Et votre fille a cette faculté de se fondre à cette vie de chez nous qui, je vous l’accorde, est plus rude que celle des gens de la plaine… mais à mon avis tellement plus enrichissante, bien que ce ne soit pas en monnaie sonnante et trébuchante !
Chapitre 33
La jeune fille regarda les étoiles qui s’allumaient une à une. Et elle s’endormit. Le souffle de la bête faisait bouger ses longs cils.
Chapitre 6
Loin vers la forêt, au-delà de la route, un perdreau entendit, s’éveilla, vola d’un vol court. Il retomba dans l’herbe, s’endormit, retrouva sa peur, s’envola, retomba, s’endormit, et il resta enfin dans l’herbe, frissonnant mais alourdi de nuit.
Chapitre 6
« Ça m’a fait comme au printemps, quand toute la neige glisse d’un coup et déshabille la montagne. »
Moi, ce qu'il me fallait, c'était un bon pieu, bien solide, pour faire le pivot de la ronde. J'avais beau fouiller le hangar et tourner comme un mouton lourd dans la grangette, c'était zéro en beaux chiffres.