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Critiques de Jean-Marie Apostolidès (33)
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Debord: Le naufrageur

Il est une triste catégorie d'individus dont le plaisir semble consister à tenter de salir tout ce qui les dépasse. Ils ne reculent donc devant aucune bassesse, calomnie ou mensonge quand il s'agit de nuire à ce qui fait de l'ombre à leur pesante médiocrité.

L'auteur de ce pitoyable ouvrage semble en être la parfaite illustration.

Ne s'encombrant d'aucune véracité (les morts ne portent pas plainte pour diffamation ni ne peuvent se défendre par eux-mêmes), ils déversent donc leur venin par tombereau, supposant sans doute que la quantité remplacera la qualité et qu'ils réussiront bien ainsi à semer le doute.

Car ces laudateurs du spectacle régnant espèrent bien également quelque récompense de leurs maîtres.

Mettre tant d'énergie à tenter de décrédibiliser l'auteur de la théorie critique la plus pertinente de notre temps n'a bien sur rien d'innocent et c'est bien cette pensée là qui dérange et qu'il faut à tout prix faire oublier. En détourner surtout les jeunes générations pour que celles-ci ne puissent distinguer aucune alternative au triste destin que l'on veut leur faire.

Il se trouve heureusement encore quelques personnes, sachant fort bien de quoi elles parlent, pour dire leur fait à ces rebuts de l'humanité : https://blogs.mediapart.fr/lechatetlasouris/blog/150116/argent-sexe-et-pouvoir-propos-d-une-fausse-biographie-de-guy-debord
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Les Métamorphoses de Tintin

Qui a lu cet ouvrage ne lira plus jamais de la même façon les albums du héros de Hergé. Tintin et ses aventures y sont disséqués pour nous dévoiler la genèse de l'œuvre, les évolutions psychologiques du héros et les relations interpersonnelles entre les personnages au travers des différents albums. Quel que soit le jugement que l'on peut porter sur ce grand classique de la bande dessinée, l'analyse de l'auteur nous permet de sonder avec jubilation l'univers fictif des aventures de Tintin pris comme un ensemble cohérent et clos sur lui même.
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L'Archipel Tintin

Le monde de Tintin a fait l'objet de bien des analyses et des publications. Voici l'une des plus réussies. L'exploit éditorial est de taille : réunir dans un petit ouvrage, à peine plus de cent pages, 5 essais rédigés par de fins tintinophiles. Dont deux brillantissimes : Benoît Peeters Le monde d'Hergé et Jean-Marie Apostolidès Les métamorphoses de Tintin.

La qualité de ce titre est remarquable. L'article de Jean-Marie Apostolidès, sur l'organisation du monde de Tintin, frôle le génie.
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L'Archipel Tintin

Ce court ouvrage compile les contributions de plusieurs spécialistes reconnus de l'univers de Tintin recueillies à l'occasion d'un colloque intitulé "les albums de Tintin, une mythologie pour notre temps ?".

Ce colloque, qui s'est déroulé au couvent dominicain de la Tourette, en Rhône-Alpes, en mars 2003 a réuni des grands noms de la tintinologie : Benoît Peeters, Dominique Cerbelaud, Albert Algoud, JEan-Marie Apostolidès et Pierre Sterckx.

Chacune des contributions est passionnante et offre au lecteur, amateur ou fondu de Tintin, une vision nouvelle du corpus des albums de Tintin.

On découvre ainsi le côté christique de Tintin à travers les yeux d'un théologien, ou Séraphin Lampion qui nous est présenté ici sous un jour nouveau et qui se voit ainsi réhabilité.

Une lecture très intéressante qui complète les nombreux ouvrages consacrés à Tintin ou à son auteur.
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Debord: Le naufrageur

Il convient de dire tout de suite que ce livre, en plus d'être d'un ennui mortel, n'est pas une biographie... Ce n’est point une biographie de Debord, mais bien un morceau prolixe de journalisme d’investigation contre Debord, où ne sont rapportés que des « témoignages » à charge, où on ne dit rien de son œuvre, de son art et de son temps, de son cinéma, de son courage, à son époque presque solitaire. Donc ce livre n’a aucune valeur pour les historiens, il n’est surtout pas un document. Et l’usage des documents fait par son auteur est parfaitement malhonnête, car il ne choisit que ce qui pourrait être à charge.

Une biographie est un travail d’archiviste, de philologue, d’érudit et d’historien, et elle n’est jamais un travail de supporter, qu’il soit favorable ou hostile.

Avec l’ouvrage d’Apostolidès, nous nous trouvons face au paradigme même d’un mauvais travail, mou, médiocre et faux : mauvais dans l’intention, mauvais dans la méthode et donc très mauvais dans le résultat.

Cette prétendue biographie nous éclaire en fait bien plus sur les obsessions, les petitesses et les bassesses de son auteur lui-même que sur celles qu'il prétend découvrir chez Debord.

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Debord: Le naufrageur

Grande biographie de Guy Debord. Elle est beaucoup plus fouillée que les précédentes, même celle de Christophe Bourseiller, qui n'était pas mal, et surtout pulvérise allègrement l'espèce de gangue hagiographique qui entourait le personnage de Debord. Fini l'édifiant récit de la vie tumultueuse du saint révolutionnaire - qu'on retrouvait encore dans l'exposition à la BNF de 2013, par ailleurs passionnante. Apostolidès, bénéficiant d'une documentation particulièrement riche, issue notamment des archives déposées par plusieurs ex-situs dans des universités, dévoile une personnalité complexe et manipulatrice, à la limite de la perversité, et tente d'en expliquer les ressorts psychologiques.

Sur l’œuvre elle-même, peu de choses nouvelles. Il ne s'agit pas ici d'en proposer une nouvelle analyse, mais seulement de parler de l'homme.
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Les Métamorphoses de Tintin

Si vous ne devez lire qu'un seul ouvrage sur Tintin, parmi la masse des publications anciennes ou nouvelles, c'est bien celui de Jean-Marie Apostolidès. Tout est dit, c'est brillant, et d'une lisibilité exemplaire. Une réussite totale.
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Tintin et le mythe du surenfant

Une analyse originale de l'oeuvre de Hergé et de sa relation avec Tintin, son double plus que sa création. Faut-il pour autant avoir une lecture psychanalytique de toutes les aventures de Tintin ?

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Les robots aussi croient à l'amour fou

Un ‘roman graphique' d‘un nouveau genre : Jean-Marie Apostolidès a choisi, parmi les centaines de dessin de Luc Giard, quelques oeuvres sans rapport les unes aux autres, à partir desquelles il a bâti un scénario. Comme quoi un roman graphique peut aussi être un essai.



« Je suis le robot RW 2743 J. J'ai été fabriqué en Californie en novembre 2083. Ma spécialité est l'empathie artificielle. Mes concepteurs tentent avec moi une expérience unique : ils me chargent de mener la vie des H. Je dois me mêler à la population, trouver un métier, me rendre utile et survivre par mon travail. Jamais auparavant une machine n'avait eu autant d'autonomie. On m'appelle Johnny Bing. »



« Je ne suis qu'un robot mais la sottise des H m'exaspère. Leur pauvre intelligence est incapable de percevoir la complexité du réel. Ils ne peuvent pas régler des problèmes ayant des ramifications planétaires. Ils ne voient rien de leur environnement immédiat.

Il n'est pas difficile de prédire ce qui les guette : un monde gouverné par des machines. Nous, robots, sommes tellement en avance sur eux que nous ne devrions jamais les écouter. Mais notre programme nous oblige à leur obéir. Pendant combien de temps serons-nous encore les esclaves de ces pauvres créatures ? »



« Les H ne cessent de m'étonner par leur insouciance, leur liberté, leur ivresse. Au premier rayon de soleil, les couples se font et se défont comme des fleurs printanières. La légèreté et la joie éclatent partout, créant un étrange contraste avec ma solitude de machine sans amour. Que ne puis-je rire et sauter comme eux ? Qui m'aidera à achever ma mutation ? »



« Ai-je vraiment envie d'être un H ? Je ne crois pas. Leurs capacités sont trop limitées. Par contre, je suis très attiré par les étudiantes de Harvard. Je les appelle des femmes-écriture. Elles m'ont redonné le goût du dessin. »



« 21 janvier 2088. J’ai passé une semaine à errer seul dans Paris. Je pense constamment à Camille. Les H appellent ça l’amour. Si c’est de l’amour, j’aime Camille sans espoir d’en être aimé. Elle m’a prévenu : « Je ne pourrai jamais aimer un robot comme j’aimerais un H. » Elle a ajouté en me fixant dans les yeux : « Même un robot mutant. » J’en faisais, une tête ! »



En cette période du tout à l'intelligence artificielle (2018, je veux dire), un livre sur l'empathie artificielle des robots ne sera pas très longtemps classé en science-fiction.



Evidemment le robot devient excessif et échappe à sa condition de robot, bien décidé à refaire sa vie.



On le verra tour à tour mélancolique, amoureux, cynique, artiste, rêveur (mais comment est-ce possible ?), incompris (souvent), désabusé…



En résumé une fable sur la robotique qui nous dépasse.



Histoire intéressante, surtout grâce au concept de présentation.



Merci à la maison d'édition belge 'Les impressions nouvelles' d'avoir osé cette création.
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Lettres à Hergé - Actualité : 30 ans de la dispar..

Bon livre d'APOSTOLIDES sur Tintin.

Son intérêt majeur réside avant tout sur l'analyse des trois Tintin, le Tintin-Lutin de Rabier, celui d'Hergé et enfin celui de Spielberg.

L'auteur décrète qu'Hergé s'est en son âme et conscience approprié la prime jeunesse du Tintin-Lutin de Rabier.

Cela me semble très contestable, mais respectable.

C'est une hypothèse.

Qu'inconsciemment Hergé l'ait fait, vraisemblablement. Je ne crois pas en la création humaine ex nihilo, toute création prend source d'inspiration consciente ou non dans le passé.

C'est le seul bémol de ce beau livre.

L'auteur replace Tintin dans son espace temporel de création et de son lecteur-spectateur.

Certes, la lecture de cet ouvrage nécessite d'avoir lu au préalable d'autres ouvrages plus accessibles. Je me permets de vous inviter à vous référer notamment à la liste que j'ai proposé à cet effet sur ce sujet.

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L'Archipel Tintin

Excellent, vraiment excellent.

C'est évidemment si bien écrit (mais avec ces auteurs on a l'habitude !), érudit, le fruit de réflexions profondes, parfois truculent, j'en tiens pour preuve l'opération périlleuse "il faut sauver l'assureur Lampion".

Cet ouvrage se lit si bien ! et offre des pensées novatrices.
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L'exécution du testament de Sade

Le livre de Jean-Marie Apostolidès, édité par Bruno Lalonde (Libraire Le livre voyageur), porte le nom de cette cérémonie organisée le 2 décembre 1959 chez Joyce Mansour, en présence d'André Breton et d'autres surréalistes : l'artiste Jean Benoît devait rendre hommage à Sade, dont le testament n'avait pas été respecté autrefois. Pour cela, il avait fabriqué un costume et prévu de se tatouer au fer rouge, sur la poitrine, les quatre lettres du nom du Marquis.

L'essai de J-M. Apostolidès s'ouvre sur les paroles testamentaires de Sade : il explique qu'il veut que son corps soit jeté sans cérémonie dans un taillis. Sa famille ne respectera pas ses volontés : de nombreux manuscrits seront brûlés, et il sera enterré religieusement avec une croix sur sa pierre tombale car la famille se souciait des convenances. C'est donc plus d'un siècle après que sa mémoire sera réhabilitée par le groupe des surréalistes.



(...)



Cet essai qui se lit très bien montre donc comment Sade, au fil des années, a retrouvé sa place et ses lettres de noblesse dans la littérature, et grâce aux surréalistes. Il met aussi en lumière Jean Benoît, un grand artiste encore méconnu et dont l'oeuvre est stupéfiante, héritier audacieux de celui dont il se réclamait.
Lien : http://edencash.forumactif.o..
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Les Métamorphoses de Tintin

Étonnante cette métamorphose car il n’y a pas des métamorphoses mais, dans le temps, une métamorphose continue sollicitée par la bien-​pensance. doxa du moment.

Du caractère primitif de Tintin et Milou il ne reste pas grand-chose juste du « politiquement correct » Drôle d’époque ou la pensée est formatée par des pensées, même si elles se justifient, minoritaires. Nivelage par le bas, écrémage dans la matière, déshabillage de la pensée et apparition de la novlangue et du formatage du lecteur.

Bon Tintin n’est plus raciste, n’est plus catho, n’est plus d‘extrême droite , n’est plus antisémite, n’est plus misogyne mais c’est toujours un homme (encore que d’après le philosophe Vincent Cespedes Tintin serait une femme) ,blanc ( encore que là aussi je le trouve assez rosâtre, disons saumon, pour être une jeune femme fraîche du nord ) et hétérosexuel (ça on ne sait pas mais d’après certains Tintin et Haddock voir Tchang hum ! Hum! D’ailleurs certains l’appelle « Haddotin ») S’il n’est plus antisémite bon... Trop chaud... quoique si les terroristes juifs de L’Or noir ont bel et bien disparu des versions actuelles rien ne dit que Tintin reste un pro-djihadiste dans la mesure où il l’aurait été !là j’arrête hein…. Si... Si... Si… Ah j’oubliais il est féministe Eh oui il aime la Castafiore il n’est plus misogyne ou macho quoique sur 300 personnages il n’y ait que 30 femmes Si... Si... Si…mais bon c’est Haddock qui a convolé !

Mais Tintin n’est pas Hergé !

Bon d’accord la corde que tient Tintin reflète le lien indéfectible entre Haddock et lui même

Bon d’accord Le rossignol (La Castafiore) s’avère être une vieille perruche et le loup (Haddock) un chien battu

Bon d’accord « La décomposition du social est non seulement due à l’absence de sacrifice mais surtout à la consommation excessive de whisky » Ah là... non en fait je n’ai pas bien compris...

Apostolidès le malaxe bien notre Tintin! Waouh! Et dire que je suis passé à côté de toutes ces belles interprétations : stupide que je suis!



Les qualifications, ci-dessus, ne me seraient même pas venues à l’esprit lors qu’enfant j’ouvrais un album de Tintin. Je voyais un Héro dans des situations dramatiques, l’imagination faisait le reste et je n’avais pas la maturité pour apprécier la portée politico-sociale et je ne savais même que cela existait.

Franchement n’a-t-on pas plus de plaisir à s’amuser de Haddock essayant de se débarrasser de son morceau de sparadrap ou cracher sur le lama que de suivre les efforts de Tintin pour l’ amener chez les AAA ?Rire du rossignol milanais qui pousse ses vocalises “Je ris de moi voir si belle en ce miroir » plutôt que de savoir qu’il se compromet, par insouciance, avec les méchants ou encore des dialogues de sourds de Tournesol et Haddock : toutes ces petites scènes n’appelant pas de commentaires psychanalysés mais qui déclenchent spontanément le rire du ventre ?





Donc Apostolidès a une vue étriquée d’adulte, il a par contre oublié, et c’est bien dommage, celle de l’enfant qu’il a été et ses interprétations d’intello doivent être laissées à lui-même. Elles ne donnent qu’une vision bien orientée et réductive de la BD. Il n’y a qu’un intello pour aller chicaner sur les motivations d’un personnage de BD et donner une vision crapuleuse du personnage, d'aller interpréter chaque geste, chaque mot, chaque situation c'est maladif et je ne suis pas sûr que l'autre de Vienne aurait apprécié que sa "science inexacte (très)" serve à psychanalyser des personnages de BD





On appréciera toutefois la relecture factuelle des aventures de Tintin et de tous ses personnages : c’est très (trop) fouillé et cela fait remonter de bons souvenirs au lecteur. Beaucoup de détails oubliés refont surface et donne l’envie de se replonger dans la BD avec le risque toutefois d’être parasité par l’interprétation d’Apostolidès. Même si on est tenté de ne lire, dans ce livre, que ce qui intéresse, en diagonale, car c’est parfois ennuyeux à cause de redites inévitables, on se retrouve à lire beaucoup plus que prévu mais ce n’est pas un mal, c’est instructif.

D’autre part il donne envie d’aller rechercher ses pages d’ origine qui ont disparues de la circulation ou sont rééditées partiellement ne serait-ce que pour apprécier la pertinence de l’analyse d’ Apostolidès qui, quand même, fait référence. A voir! Mais bon où a-t-il vu tout ça Apostolidès ?

Apostolidès et autres essayistes moralistes (de faits) et malsains laissez notre enfance tranquille : on ne lit pas les même BD!

Ne touchez plus à Astérix, à nos Schtroumpfs (oui y’a juste une Schtroumpfette), à Boule & Bill (que des mâles), à Lucky Luke (il est ridicule avec son brin d’herbe aux lèvres), aux moutons du Génie des Alpages (ils sont tous blancs), à Chichille et papa Talon (que des beaufs), ni à Pervers Pépère (un gros dégueulasse), à Wallace et Gromit (un tintin anglophone)

C’est comme ça! la création c’est libre! Y’a rien à psychanalyser !Circulez !

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Debord: Le naufrageur

Abject.
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Les Métamorphoses de Tintin

Ouvrage majeur sur l'oeuvre d'Hergé.

Sorti un an après la mort de ce dernier, ce livre explore avec une grande intelligence les aventures de Tintin.

L'auteur analyse les évolutions de nos héros et, partant, leurs aventures, selon les axes aussi différents que complémentaires comme la psychanalyse, la religion, la politique, la sémiotique, etc.

Une véritable enquête fine et complète qui ravira le lecteur et lui fera prendre conscience de l'importance de l'oeuvre et de l'auteur.

Un incontournable, indubitablement.
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Les Métamorphoses de Tintin

Ce personnage au visage rond d'ébauche immuable auquel tout garçon pourrait s'identifier, que Michel Serres "voit comme un classique du XXe siècle, un monument 'inusable' " n'a-t-il donc jamais changé en cinquante ans ? Est-il véritablement un modèle plutôt fruste dans sa morale manichéenne et passablement fasciste ? Est-il un héros seul avec Milou (bien qu'accompagné d'un groupuscule de personnages secondaires dont certains récurrents) sans âge, sans famille, sans origine, sans sexualité, sans nuance ni doute ni interrogation ? Sa tartuferie idéologique n'est-elle pas du même acabit que celle de son auteur, qui n'eut de cesse qu'il polisse son ouvrage maintes et maintes fois, dans les éditions successives, de tout ce qu'il avait de plus colonialiste, raciste, antisémite, antilibéral, catho-réac ?

Et si, au lieu de placer les aventures dans le contexte historique de leur parution, on utilisait la "méthode synchronique" en partant de l'hypothèse qu'il existe une "évolution interne d'un univers fictif qui est aussi cohérent et clos sur lui-même que le monde de Balzac." (p. 11) ?

C'est à cet exercice que nous convie Apostolidès, en mobilisant l'outillage herméneutique de l'ensemble des sciences humaines, de la politologie à la linguistique structuraliste, de la sémantique à la cinématographie, mais avec une prépondérance fondamentale de l'apport psychanalytique. De cette manière, et surtout en couplant le héros avec Milou, puis avec Haddock, enfin avec l'"univers Lampion", il construit une structure cohérente d'évolution, d'album en album (chacun l'occupant approximativement sur un chapitre), qui fournit des éléments de réponse à tous ces "manques" que l'on a pu dénoncer au départ. Manques et manquements, quand ce ne sont pas des actes manqués.

Du paradigme freudien, on retrouve principalement des concepts tels la gémellité, la quête du Père, la peur de la castration, la Mauvaise Mère, les mythes de l'enfance (quête des origines) et surtout la dichotomie entre les valeurs du bâtard (incarné surtout par le capitaine Haddock) et les valeurs de l'enfant trouvé (Tintin et ensuite d'autres aussi). Le monstre possède aussi un rôle complexe, comme les bijoux, le monde animal, etc. Les analyses les plus spectaculaires reposent sur les quelques scènes oniriques qui se trouvent dans les différents albums et qui sont les seules à être reproduites graphiquement dans le texte.

Mais la mobilisation d'un appareil critique aussi riche peut facilement laisser deviner le foisonnement, la rigueur et la profondeur de ces quelques 300 pages d'analyse littéraire au sens le plus large. Souvent des corpus littéraires ont été passés au tamis de la psychanalyse ; parfois, et à mon sens assez abusivement, leurs auteurs aussi. Mais rarement j'ai lu des résultats aussi probants et, compte tenu aussi de ma passion pour le corpus en question, aussi jouissifs.



La première phrase de la conclusion me semble être opportune à clore mon propos, pour sa pertinence :

"Les aventures de Tintin racontent, sous la forme d'un mythe, l'histoire d'une éducation qui est à la fois politique et psychologique" (p. 291)

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Lettres à Hergé - Actualité : 30 ans de la dispar..

Ce livre est tout d'abord un drôle d'objet... bien qu'intitulé lettre à Hergé, il ne s'adresse qu'en partie à celui-ci, l'auteur se parlant surtout à lui-même, pour nous convaincre nous, d'analyses toutefois très pertinentes et riches d'hypothèses vraisemblables et fouillées.

Avant de le lire cependant, trois avertissements :

- il vaut mieux être Tintinophile, car on fouille là l'essence même de Tintin et de son créateur, et il serait difficile de s'y intéresser d'aussi près sans aimer le personnage

- si on est un peu Tintinologue sur les bords c'est mieux, les références aux théories et autres livres déjà publiés sur le sujet sont nombreuses, étayées mais pas détaillées, c'est donc plus simple lorsqu'on les connait déjà

- un peu de connaissances de toutes les sciences humaines n'est pas inutiles pour toutes les références employées, mises à partie et citées par un auteur érudit, parfois difficile à suivre.



Enfin, avant de lire, s'assurer qu'on n'est pas dans un moment de fatigue.



Une fois ceci convenu, on peut se lancer et hocher la tête à toutes les pages, tant on a envie d'être toujours d'accord avec l'auteur sur ses trouvailles, ses réflexions poussées et ses investigations psychologiques et sociologiques.

Que nous dit-il en substance ?

Que Tintin est le descendant d'une culture et de personnages déjà existants, absorbés, digérés par Hergé dans ses jeunes années.

Que Tintin correspond à plusieurs générations "type", au sens de Max Weber, mais qu'il est donc universel puisque pouvant correspondre à autant de schémas et de profils sociologiques différents, et intemporel, forcément.

Que Tintin, on l'aime, donc. Sans expliquer pourquoi on s'y attache et on l'aime, mais plutôt ce qui fait qu'on peut s'y attacher et l'aimer, dans notre environnement, notre culture, notre monde.



Cette thèse argumentée, riche et terriblement prenante n'a pas fini de nourrir mes réflexions, sauf... quand je serais le nez dans un album de Tintin.
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Lettres à Hergé - Actualité : 30 ans de la dispar..

Les aventures de Tintin tiennent une place à part dans l'histoire du Neuvième Art. Œuvre pionnière naissant dans la Belgique d'avant-guerre, elles ont réussi à s'adapter à la nouvelle donne sociale qui naquit après le conflit et à perdurer jusqu'à nos jours. Grand fan du reporter à la houppe, Jean-Marie Apostolidès se penche sur ce phénomène et propose une série de pistes pour décrypter les clefs du succès du héros de Hergé.



D'où vient Tintin ? De l'imagination de son auteur évidemment, mais pas seulement. Selon Apostolidès, outre Totor, le dessinateur se serait basé – inconsciemment ou pas, la question reste sans réponse – sur un autre Tintin : Tintin-lutin, personnage créé par Benjamin Rabier et Fred Isly au tournant du XXe siècle. Pour l'essayiste, ce proto-Tintin enfantin, même s'il est très éloigné du maître de Milou, représenterait la base sur laquelle le natif d'Etterbeek a façonné sa créature. Cette théorie mêlée de considérations psychanalytiques est tout-à-fait envisageable, même si elle n'apporte pas de conclusion vraiment définitive sur la jeunesse du héros. L'absence d'illustration de ce Tintin-lutin se fait bruyamment remarquer, un ou deux exemples dessinés aurait certainement apportés plus de poids aux propos de l'auteur.



Après cette genèse, Apostolidès partage l'existence de Tintin en trois périodes : les titres d'avant-guerre, les histoires parues dans le Journal de Tintin et, finalement, Tintin post-Hergé. La première époque (en gros jusqu'au Sceptre d'Ottokar), est caractérisée des récits ancrés dans la réalité. Tintin se rend dans la Russie des Soviets ou au Congo belge, des contrées qui faisaient la Une des journaux au même moment. De plus, le ton – très encadré par l'abbé Wallez – se veut résolument éducateur et tenant de la morale catholique de la rédaction du XXe Siècle, cette situation renforce l'enracinement dans le réel. Résultat, ces albums sont datés et, particulièrement dans le cas de Tintin au Congo, guère compréhensibles sans connaître le contexte historique lors de leur création.



La seconde époque est marquée par des aventures nettement plus romanesques et, donc, une certaine intemporalité. Hergé enrichit également son petit monde de nombreux protagonistes secondaires (Séraphin Lampion, Nestor, etc.) le rendant ainsi quasi-autonome, Les Bijoux de la Castafiore représente à ce propos l'exemple parfait du processus.



Pendant toutes ces années, les nouveautés se multipliant, Tintin acquiert une renommée mondiale toujours grandissante. La décès de l'artiste et la gestion discutable des ayants droit - Apostolidès sonne à ce sujet une charge sans retenue contre Moulinsart SA – plonge le Capitaine Haddock et compagnie dans une situation un peu moins reluisante. En effet, Tintin disparaît quelque peu du paysage et le réservoir de nouveaux lecteurs se réduit. Le film de Steven Spielberg arrive donc à point nommer pour relancer la machine. Malheureusement, ce dernier semble recevoir un accueil en-dessous des attentes. Trop virevoltante et écrasant graphiquement (le résultat est à l'opposé de la clarté de la Ligne Claire chère à Hergé), la version américaine des péripéties du locataire du 26 rue du Labrador n'a, à ce jour, pas encore totalement rempli son rôle de passeur du mythe.



Écrit par un passionné de la première heure, Lettre à Hergé avance des idées convaincantes sur la nature et la longévité de Tintin.
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Debord: Le naufrageur

Pas une « grande biographie » , un très mauvais livre et non parce qu'il souhaite remettre en cause l'image que Debord a projeté, à travers ses livres, de sa propre vie ce qui serait plutôt sain pour éviter toute forme d'idolâtrie mais bien parce que le contexte dans lequel les combats de Debord ont pris place est systématiquement escamoté voire falsifié au profit d'analyses psychologisantes sans fondement qui couvrent pratiquement l'ensemble de l'ouvrage, et quand ce n'est pas le cas, une incompréhension complète de la part de l'auteur du projet révolutionnaire qui a animé Debord au long de son parcours.
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Les Métamorphoses de Tintin

Programme alléchant, mais décevant au final. Tintin passé à la moulinette psychanalytique, c'est assez ennuyeux et surtout, cela n'apporte rien, ou si peu, à notre compréhension de l’œuvre d'Hergé (on pourrait généraliser le propos : la psychanalyse apporte très peu à notre compréhension de l'individualité humaine).

Cette réserve faite, Apostolidès connaît parfaitement son Tintin. Je dirais même plus : son Tintin, il le connaît parfaitement. Cela se respecte.
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