Citations de Jean Racine (1499)
" L'avenir l'inquiète, et le présent le frappe ;
Mais plus prompt que l'éclair, le passé nous échappe. "
PHÈDRE : J'ai voulu te paraître odieuse, inhumaine.
Pour mieux te résister, j'ai recherché ta haine.
De quoi m'ont profité mes inutiles soins ?
Tu me haïssais plus, je ne t'aimais pas moins.
Acte II, Scène 5, (V. 685-688).
JUNIE : Hélas ! dans cette cour
Combien tout ce qu'on dit est loin de ce qu'on pense !
Que la bouche et le cœur sont peu d'intelligence !
Avec combien de joie on y trahit sa foi !
Quel séjour étranger et pour vous et pour moi !
Acte V, Scène 1 : (v. 1522-1526).
J'ai voulu te paraître odieuse, inhumaine.
Pour mieux te résister, j'ai recherché ta haine.
De quoi m'ont profité mes inutiles soins?
Tu me haïssais plus, je ne t'en aimais pas moins.
Tes malheurs te prêtaient encor de nouveaux charmes.
J'ai langui, j'ai séché, dans les feux, dans les larmes.
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps, et transir et brûler.
Toujours la tyrannie a d'heureuses prémices.
Acte I, Scène 1 : (v. 39).
C'est dans les villes les plus peuplées que l'on peut trouver la plus grande solitude.
PAULIN : La cour sera toujours du parti de vos vœux.
TITUS : Et je l'ai vue aussi cette cour peu sincère,
A ses maîtres toujours trop soigneuse de plaire,
Des crimes de Néron approuver les horreurs;
Je l'ai vue à genoux consacrer ses fureurs.
Acte II, Scène 2 : (v. 350-354).
BRITANNICUS : Dans ses égarements mon cœur opiniâtre
Lui prête des raisons, l'excuse, l'idolâtre.
Je voudrais vaincre enfin mon incrédulité :
Je la voudrais haïr avec tranquillité.
Acte III, Scène 6 : (v. 939-942).
BURRHUS : Quoiqu'il soit votre fils, et même votre ouvrage,
Il est votre empereur. Vous êtes, comme nous,
Sujette à ce pouvoir qu'il a reçu de vous.
Selon qu'il vous menace, ou bien qu'il vous caresse,
La cour autour de vous ou s'écarte, ou s'empresse.
Acte IV, Scène 1 : (v. 1108-1112).
BURRHUS : C'est à vous à choisir, vous êtes encor maître.
Vertueux jusqu'ici, vous pouvez toujours l'être :
Le chemin est tracé, rien ne vous retient plus ;
Vous n'avez qu'à marcher de vertus en vertus.
Mais si de vos flatteurs vous suivez la maxime,
Il vous faudra, Seigneur, courir de crime en crime,
Soutenir vos rigueurs par d'autres cruautés,
Et laver dans le sang vos bras ensanglantés.
Acte IV, Scène 3 : (v. 1339-1346).
Mon mal vient de plus loin. À peine au fils d’Égée
Sous les lois de l’hymen je m’étais engagée,
Mon repos, mon bonheur semblait être affermi ;
Athènes me montra mon superbe ennemi.
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps, et transir et brûler.
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,
D’un sang qu’elle poursuit tourments inévitables.
Par des vœux assidus je crus les détourner :
Je lui bâtis un temple, et pris soin de l’orner.
De victimes moi-même à toute heure entourée,
Je cherchais dans leurs flancs ma raison égarée.
D’un incurable amour remèdes impuissants !
En vain sur les autels ma main brûlait l’encens :
Quand ma bouche implorait le nom de la déesse,
J’adorais Hippolyte, et le voyant sans cesse,
Même au pied des autels que je faisais fumer.
J’offrais tout à ce dieu, que je n’osais nommer.
Je l’évitais partout. Ô comble de misère !
Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père.
Contre moi-même enfin j’osai me révolter :
J’excitai mon courage à le persécuter.
Pour bannir l’ennemi dont j’étais idolâtre,
J’affectai les chagrins d’une injuste marâtre ;
Je pressai son exil, et mes cris éternels
L’arrachèrent du sein, et des bras paternels.
Je respirais, Œnone ; et depuis son absence,
Mes jours moins agités coulaient dans l’innocence.
"L'amour n'est pas qu'un feu qu'on renferme en une âme :
Tout nous trahit, la voix, le silence, les yeux,
Et les feux mal couverts n'en éclatent que mieux."
BRITANNICUS : Rome met-elle au nombre de vos droits
Tout ce qu'a de cruel l'injustice et la force,
Les emprisonnements, le rapt et le divorce ?
NÉRON : Rome ne porte point ses regards curieux
Jusque dans des secrets que je cache à ses yeux.
Imitez son respect.
BRITANNICUS : On sait ce qu'elle en pense.
NÉRON : Elle se tait du moins : imitez son silence.
BRITANNICUS : Ainsi Néron commence à ne plus se forcer.
NÉRON : Néron de vos discours commence à se lasser.
BRITANNICUS : Chacun devait bénir le bonheur de son règne.
NÉRON : Heureux ou malheureux, il suffit qu'on me craigne.
BRITANNICUS : Je connais mal Junie ou de tels sentiments
Ne mériteront pas ses applaudissements.
NÉRON : Du moins, si je ne sais le secret de lui plaire,
Je sais l'art de punir un rival téméraire.
Acte III, Scène 8 : (v. 1046-1060).
PHÈDRE : On dit qu’un prompt départ vous éloigne de nous,
Seigneur. À vos douleurs je viens joindre mes larmes ;
Je vous viens pour un fils expliquer mes alarmes.
Mon fils n’a plus de père ; et le jour n’est pas loin
Qui de ma mort encor doit le rendre témoin.
Déjà mille ennemis attaquent son enfance :
Vous seul pouvez contre eux embrasser sa défense.
Mais un secret remords agite mes esprits :
Je crains d’avoir fermé votre oreille à ses cris ;
Je tremble que sur lui votre juste colère
Ne poursuive bientôt une odieuse mère.
HIPPOLYTE : Madame, je n’ai point des sentiments si bas.
Toute invention consiste à faire quelque chose de rien.
ŒNONE : Eh ! repoussez, madame, une injuste terreur !
Regardez d’un autre œil une excusable erreur.
Vous aimez ; on ne peut vaincre sa destinée :
Par un charme fatal vous fûtes entraînée.
Est-ce donc un prodige inouï parmi nous ?
L’amour n’a-t-il encor triomphé que de vous ?
La faiblesse aux humains n’est que trop naturelle :
Mortelle, subissez le sort d’une mortelle.
Acte IV, Scène 6, (v. 1295-1302).
Examinez ma vie, et songez qui je suis.
Quelques crimes toujours précèdent les grands crimes.
Quiconque a pu franchir les bornes légitimes
Peut violer enfin les droits les plus sacrés ;
Ainsi que la vertu, le crime a ses degrés ;
Et jamais on n'a vu la timide innocence
Passer subitement à l'extrême licence.
(Phèdre)
BÉRÉNICE : Un soupir, un regard, un mot de votre bouche,
Voilà l'ambition d'un cœur comme le mien.
Voyez-moi plus souvent, et ne me donnez rien.
Acte II, Scène 4 : (v. 576-578).
Tes adieux sont-ils prêts? T'es-tu bien consulté?
Ton cœur te promet-il assez de cruauté?
Car enfin au combat qui pour toi se prépare
C'est peu d'être constant, il faut être barbare.
[…]
Je viens percer un cœur que j'adore, qui m'aime;
Et pourquoi le percer? Qui l'ordonne? Moi-même.
Acte IV, Scène 4 : (v. 989-992 et 999-1000).