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Critiques de Jean Rouaud (277)
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Les Champs d'honneur

Jean Rouaud redonne vie à sa famille autour de la première guerre mondiale dans ce roman qui ressemble à un long poème plein de gravité, mais aussi de légèreté. Son grand-père haut en couleur et sa tante confite en religion resteront sans doute longtemps dans ma mémoire. Les pages sur la vie des poilus dans les tranchées recouvertes d'un nuage vert d'yperite sont d'une terrible et noire beauté. Jean Rouaud écrit vraiment dans une langue magnifique.
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Les Champs d'honneur

Une famille comme il y en a tant, fauchée par la grande guerre, amputée à vif… Depuis, elle boîte et souffre, comme tant d’autres familles. Les anciens savent pourquoi, les jeunes le devinent un peu. Mais de cette guerre, il est peu question néanmoins, Rouaud préfère parler d’un grand père taiseux et de sa 2 CV qui fuit, qui un jour se leva de sa chaise pour visiter l’île du levant et ses camps naturistes, il préfère parler de cette vieille tante bigote. Et comme il parle de cette famille avec énormément de tendresse et surtout énormément de talent, c’est magnifique.
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Les Champs d'honneur

Il y a quelques semaines, j'ai relu les « Vies minuscules » de Pierre Michon, une sorte de chronique familiale avec un regard assez péjoratif sur les ancêtres de l'auteur, des carangues noueuses, et sur lui-même. Quand on commence le livre De Rouaud, on a l'impression qu'il suit les mêmes traces. Mais le ton est beaucoup plus léger, à commencer par une représentation sympathique du grand-père plutôt idiosyncrasique de l'auteur et de son contrôle kamikaze de sa « 2CV ». Comme Michon, Rouaud utilise peu de mots, mais il est beaucoup plus visuel et expressif. Par exemple, le portrait humoristique retenu de sa pieuse tante Marie est tout simplement inoubliable. Mais ensuite, la Première Guerre mondiale surgit et nous obtenons une image des horreurs dans les tranchées à travers la famille de son père et de son grand-père. le titre "Champs d'honneur" se veut clairement sarcastique. Apparemment, ce livre était le premier De Rouaud (immédiatement récompensé par le Goncourt) : il semble d'une simplicité trompeuse, mais efficace et expressif.
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Qui terre a, guerre a

L’auteur part du roman jamais terminé de BALZAC, finalement intitulé Les paysans, qui devait s’intituler Qui terre a, guerre a.

Il s’appuie également sur le film Jeremiah Johnson Sydney POLLACK.

Pourquoi un tel grand écart de temps (un film de 1972 et un roman de 1844) et de support ? Pour nous parler de la guerre, inévitable, toujours.

Ce livre se situe entre le roman et l’essai philosophique.

J’ai parfois eu un peu de mal à suivre l’auteur dans ses bonds historiques, mais j’ai surligné pleins de passages éclairants.

Un écrit qui raisonne tristement avec l’actualité, mais une lecture éclairante sur le besoin humain de faire la guerre.

Des citations :

Conclusion de Balzac : la fin de l’aristocratie, c’est la parcellisation des sols et l’appauvrissement assuré pour les nouveaux propriétaires.

A propos de l’agriculture moderne : Plutôt que de collectivisé au nom du peuple – cette entité humaine à qui ont promet tout et qui n’a droit à rien – on procède au regroupement des parcelles par rachat, spoliation ou concussion. Le regroupement n’est plus obtenu au nom de l’Etat mais par une entente entre possédants sous l’autorité d’une nouvelle aristocratie financière, portant haut l’étendard de grands groupes agro-industriels.

…mais il est possible aussi d’acheter les caméras – rachat en cours, sur le point d’être bouclé, car ce n’est pas avec l’espérance d’un bénéfice juteux que les hiérarques se partagent la presse te l’audiovisuel. Pour imposer la loi du silence rien de mieux que le tintamarre inepte des chaînes.

… l’agriculture n’est rien d’autre que la continuation de la guerre par d’autres moyens.

Car depuis sa victoire sur le règne animal, depuis qu’il s’est assuré la suprématie terrestre, l’homme n’a plus pour ennemi que son pareil, que son double. Plus d’incarnation supérieur devant qui se soumettre, s’incliner.

Voilà ce que c’est que d’avoir préféré le jour à la nuit. Avec la myriade d’étoiles on contentait tout le monde. Avec l’élection du soleil, c’est le dieu seul.

Je suis plus homme que toi, par quoi on s’octroie une parenté divine. Aton fils du Soleil et César descendant de Vénus.

L’image que je retiendrai :

Celle souvent répétée de la bande jaune du pantalon de Jeremiah Johnson, résidu de la vie d’en bas, celle des hommes qui se font la guerre et que Jeremiah a fuit.
Lien : https://alexmotamots.fr/qui-..
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Les Champs d'honneur

Désolée, je n'ai pas du tout été sensible à ce roman d' "histoire familiale" (auquel je reconnais cependant des qualités.)

Ce qui m'a dérangée?

Que l'auteur mette sa plume au seul service de sa "virtuosité stylistique" au détriment du récit "autobiographique".

Le chapitre sur la pluie par exemple aurait certes obtenu un 10 sur 10 bien mérité à une rédaction de Certificat d'Etudes répondant au sujet: "décrivez la pluie dans votre région." Mais toutes ces pages dans un roman, c'est juste ... chiant comme la pluie.

L'histoire familiale est prise en charge par un narrateur tellement à distance, un témoin si peu empathique, qu'aucun sentiment ne peut plus passer.



Je suppose que ce que les critiques parisiens avaient apprécié dans ce bouquin était un certain "exotisme" de ce qu'ils pensent être la "France rurale".

(Je crains que cette vision soit toujours d'actualité si j'en juge par la question6 page 201 du dossier élaboré pour Flammarion par une certaine Johanna Pernot = "En quoi la famille de Jean Rouaud est-elle représentative de la France des campagnes?"

- Mais en rien, mademoiselle, rien du tout!:

La famille décrite est typiquement celle de certains habitants d'un BOURG du 20è siècle, lieu de résidence des commerçants, artisans et notables, absolument sans rapport aucun avec la vie et les mentalités des zones rurales alentour!

(Je suis une bretonne de la génération De Rouaud, je puis affirmer que les ruraux de la génération de son grand père n'avaient pas de voiture, ne prenaient pas de vacances, et surtout restaient à une distance prudente du curé même dans les familles très catholiques!)



Bref, moi j'attends d'un livre qu'il m'apprenne quelque chose, ou qu'il me distraie, ou qu'il me touche par des sentiments sincères,

"Les champs d'honneur" ne coche pour moi aucune case car l'unique souci du "bien écrire" crée une barrière infranchissable.

Petite déception donc...
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Les Champs d'honneur

Un roman choisi sur les rayons de la médiathèque car il allait me permettre de progresser sur plusieurs des challenges de lecteurs de Babelio auxquels je me suis inscrite cette année.

Mais cette fois quelle belle surprise que ce beau texte qui retrace l’histoire d’une famille, évoquant tour à tour des voyages cocasses des grands parents en deux chevaux asthmatique, ou plus tragiquement la mort de deux oncles pendant la première guerre mondiale.

Un roman attachant, avec des personnages plus vrais que nature, qui chacun, à leur façon, ont dû surmonter es décès qui ont profondément modifié le cours de leur vie …

Un roman qui nous entraîne de la Loire Inférieure (devenue Atlantique depuis) jusqu’au Var (pour une escapade croustillante du grand-père) jusqu’aux champs de bataille de la première guerre mondiale à la recherche du corps d’un frère, que le même grand-père, plus jeune, ramena jusqu’au caveau familial.

Un roman plein de tendresse et de douceur !

Un prix Goncourt bien mérité !
Lien : http://les-lectures-de-bill-..
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Sur la scène comme au ciel

N° 1521 – Décembre 2020



Sur la scène comme au ciel – Jean Rouaud - Les éditions de Minuit.



Saint Thomas d’Aquin craignait l’homme d’un seul livre. On peut donner à cette maxime le sens qu’on veut mais en ce qui concerne jean Rouaud, son œuvre est tellement consacrée à sa famille qu’on peut sans doute dire qu’il est cet homme, cet écrivain qu’il n’est pas forcément nécessaire de craindre. En effet après « Les champs d’honneur » qui mettait en scène son grand-père, « Les hommes illustres » qui parlait de son père, « Le monde à peu près » dont il évoquait le deuil et « Pour vos cadeaux » qui était consacré à sa mère, le présent roman lui est également dédié. Il clôt ce vaste hommage familial que notre auteur a décidé d’explorer et qui a nourri son œuvre romanesque.

Il va donc nous parler de sa mère, Annick, morte à près de 95 ans et qui menaçait de faire une centenaire et lui d’évoquer les mannes de Jeanne Calment qui fut un temps la doyenne de l’humanité. Il met en exergue sa propre citation « Elle ne lira pas ces lignes », euphémisme pour indiquer qu’elle est déjà morte à la date de la publication de ce livre. Depuis qu’on l’a découvert grâce à son prix Goncourt en 1990, il ne cesse d’écrire sur sa parentèle ce qui chez lui témoigne d’une véritable envie. Autour du thème du souvenir l’auteur alterne ses propres réflexions et donne la parole à cette femme, fragile silhouette en deuil, trop tôt veuve et chargée de famille, revenue à la vie par le miracle des mots. Je me suis toujours interrogé sur le sort posthume des hommes et des femmes qui sont morts sans laisser de traces, de leur parcours ici-bas, chanceux ou malheureux et sur l’opportunité offerte à un descendant complice que la notoriété a distingué, de leur redonner vie dans les pages d’un livre. C’est à la fois un hommage et une forme de résurrection.

Il est beaucoup question de mort, de la Camarade , mais surtout de notre passage sur terre, transitoire, bref au regard de l’âge de la planète et surtout imprévisible puisque, même si nous faisons semblant d’être immortels et vivons en occident sans penser à notre destin, nous sommes mortels et seulement usufruitiers de notre propre vie. Il poursuit ses réflexions personnelles sur la solitude qui accompagne la vieillesse, celle qui tient la main de la « grande faucheuse » parce que, face à elle, dans ce combat perdu d’avance, on est toujours seul, deux thèmes qui collent à la condition humaine.

Il profite des derniers instants de ses personnages pour se livrer à des considérations personnelles sur les souffrances qu’on pourrait aisément épargner aux agonisants. Il note les derniers moments de cette mère qui, au pas de la mort, est partagée entre la certitude qu’il n’y a rien que le néant après elle et la volonté de croire qu’on y retrouve ceux qu’on a aimés dans une improbable résurrection. Reprenant Montaigne, ce qu’elle craint ce n’est pas la mort mais de mourir parce que ça n’a pas de sens ! Jean Rouaud va même lui faire parler de son cher époux, Joseph, le père de l’auteur, trop tôt disparu, en lui faisant révéler des détails sur sa vie et pour cela il fait même appel aux souvenirs de ses amis de jeunesse, quand il n’était encore que collégien ou maquisard en réaction contre le STO. Il parle lui-même de cet homme, que son métier de « représentant de commerce » tenait éloigné du foyer familial comme d’un être lointain, presque d’un étranger, d’un absent avant même sa disparition.

Je suis toujours partagé après avoir refermé un roman de Jean Rouaud. J’aime son parti pris personnel d’écriture qui explore son passé personnel et celui de sa parentèle mais, tout au long de cette chronique, je n’ai cessé de déplorer la longueur de ses phrases. Même si elles sont bien écrites, humoristiques parfois, elles n’en sont pas moins un peu trop longues ce qui ne facilite pas la lecture. Je note que vers la fin de ce roman, l’une d’elles ne fait pas moins de quatre pages!
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Les Champs d'honneur

Opus d'ouverture d'une œuvre autobiographique, ce premier roman de Jean Rouaud, lauréat du prix Goncourt en 1990, nous invite à un voyage mémoriel, nostalgique et savoureux. A la finesse de sa plume sublime, guidée par le flot virevoltant des souvenirs, il retrace avec une infinie tendresse, les figures intimes et touchantes des aimés disparus. Bien que deux décès familiaux initient son propos, celui-ci ne laisse jamais place à la tristesse, tant l'auteur sait y insuffler humour et images poétiques. Ses peintures vivantes et colorées, nous donnent à parcourir,en même temps que les routes champêtres de sa « Loire-Inférieure »- aujourd'hui Loire-Atlantique – les us oubliés d'une époque révolue. Clore l'ouvrage provoque un petit pincement, celui que l'on ressent à se séparer d'un être cher, à revenir d'une douce échappée belle. Bien heureusement, il nous reste à poursuivre la saga avec Des hommes illustres...
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Les Champs d'honneur

Il vous faudra peut-être attendre de dépasser les dix premières pages pour entrer dans l’écriture poétique de Jean Rouaud. Il faudra vous laisser le temps d’ingurgiter ses premiers mots racontant la pluie en Loire-Inférieure lorsqu’il était gamin. Après ça, sûrement, vous commencerez à apprivoiser les portraits des disparus. Il y aura d’abord Joseph, puis Marie et Alphonse. Comme avant, il y avait eu l’autre Joseph, Emile, Eulalie et aussi Aline et Pierre. Vous découvrirez leurs joies, leurs peines lorsqu’ils étaient vivants et le vide qu’ils ont laissé une fois parti. Vous verrez quels objets les maintiennent encore un peu dans le monde des vivants. Vous vous amuserez d’ailleurs de ces petites anecdotes en apparence pas très importantes. De petits événements qui font exister les petites gens. Et puis, il y aura les événements plus grands : les guerres. Alors, pas d’intrigue pour ce court roman, mais vous constaterez que les pages s’enchaînent docilement et sans doute serez-vous triste de quitter ces personnages de la vie ordinaire. Ont-ils réellement existé ou tout a été inventé ? Je vous laisse le découvrir si cela vous intéresse…



Voici comment j’ai vécu ma première découverte de Jean Rouaud. Peut-être en sera-t-il de même pour vous ou peut-être que non, mais j’espère vous avoir donné (un peu) envie.


Lien : https://marcelpois.wordpress..
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La fiancée juive

N°357– Aout 2009

LA FIANCEE JUIVE – Jean ROUAUD - Gallimard.





J'ouvre toujours un recueil de nouvelles avec intérêt et même parfois avec une certaine appréhension. Je pense toujours que, sauf à ce qu'un thème commun existe entre les textes qui le composent, il est parfois difficile à l'auteur de colliger des récits qui n'ont souvent les uns avec les autres que la parenté qu'il veut bien lui donner. Chez Rouaud, c'est un peu différent. Il nous avait jusqu'à présent habitués à des romans où il avait choisi d'évoquer ses souvenirs personnels à travers l'histoire de sa famille. Il poursuit donc cette quête de mémoire, évoquant la mort de son père «  s'affalant brutalement dans la salle de bains sous on ne sait quelle corruption de l'organisme, sans crier gare, à quarante et un an, le lendemain de Noël», le courage de sa mère. devenu veuve. Il le fait, cette fois un peu différemment, comme une longue lettre que l'auteur adresse à sa fiancée juive, et qui se termine par une série de poèmes chantés. Il lui avoue, presque sur le ton de la confidence, des souvenirs de jeunesse comme on se raconte à une femme à qui on va confier sa vie, pour la vie. On ne voit qu'elle, elle est unique et occupe l'espace « Ailleurs, c'est comme un grand désert si n'y est pas ma belle Nadja ». Ce blues amoureux qui a quelque chose de triste et de joyeux à la fois est « compacté » dans un CD qui accompagne le recueil.



A travers neuf « chapitres » d'inspiration autobiographique, c'est aussi une atmosphère [eh oui!] d'un temps pas si lointain pourtant, tissée à force de mots tressés comme si, à l'échoppe rudimentaire et bretonne des sœurs Calvaire répondait « la crèche à journaux » qui fut aussi le gagne-pain de l'auteur, dans le XIX° arrondissement parisien. C'est que, avant d'obtenir ce prix littéraire prestigieux, opportun et, pour une fois, bien conforme à l'esprit de ses fondateurs, il a dû attendre, espérer, faire autre chose, désespérer aussi en rédigeant des articles sans intérêt pour un journal régional, mais continuer à écrire dans l'ombre sans se décourager, parce que, nous le savons aussi, l'écriture est avant tout un plaisir solitaire, en attendant son heure qui, heureusement, a fini par venir. Il n'en finit pas de puiser dans cette histoire familiale dont il et maintenant à la fois l'échotier et le chantre, le sauveur de mémoire, se positionnant, lui, le vivant, et de livre en livre, parmi tous ces morts. Cela mérite bien une remarque personnelle en forme de critique qui rappelle à tous les candidats au succès une dure réalité «  Le monde de l'édition... ne publie pas de nouvelles... à moins d'avoir déjà un nom... ». Et, nous l'oublions pas que «  l'écriture est une pensée qui pleure », et il y a bien de quoi pleurer aussi quand des professionnels passent à côté de tant de talents!



Mais revenons à l'écriture qui, nous la savons aussi prend sa source dans l'enfance et les terres qui l'ont portée «  En fait de lieu, il n'y en a qu'un, c'est celui de l'enfance » et lui de dérouler l'écheveau de ses souvenirs personnels que non seulement le temps [non, on n'y échappe pas!] n'a pas effacé, mais au contraire a embelli et enrichi. Pour lui, ce lieu n'a pourtant rien d'extraordinaire« Vous parlez d'un trésor ...Campbon, Loire inférieure, ...un bourg à peu près à mi-chemin entre Nantes et St Nazaire... », ses études chez les frères non plus où la liberté restait à la porte de l'établissement, à part peut-être ce maître d'école en soutane qui a éveillé sa curiosité, ses étés de vacances où on s'ennuyait ferme...



Entre simplicité des mots et complexité de la vie, il égrène ses souvenirs qui sont l'occasion d'en faire ressurgir d'autres, les nôtres, pas si éloignés des siens cependant.



 Hervé GAUTIER – Aout 2009.http://hervegautier.e-monsite.com
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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Le Monde à peu près

Après Les champs d'honneur, et Des hommes illlustres, Rouaud poursuit sa biographie familiale en évoquant un jeune garçon myope: lui-même. Ce troisième volume me déçut beaucoup à l'époque. L'auto dérision est un genre courageux, et beaucoup plus difficile que la satire, territoire très éloigné de celui de Rouaud, et très différent de l'écriture poétique et miraculeusement humaine, dans laquelle il excelle. Donc cet essai n'est pas un coup de maître, et cet auto-portrait désabusé rate son but; il parvient même, O paradoxe, à m'agacer et à me rendre insupportable cet adolescent qui préfère vivre dans un flou artistique, quitte à se plaindre de l'opacité du monde, et à louper toutes les occasions qui lui seraient un tant soit peu favorables. Le bon-heur évité systématiquement, , au profit de son symétrique, le mal-heur. Si bien que cet écrivain magnifique, à s'auto flageller, dégringole au niveau du pleurnichard! C'est malin! Autant être binoclard! Plus tard, Rouaud écrira avec plus de sympathie pour lui-même Comment gagner sa vie honnêtement, de nouveau un grand Rouaud.Et dira avec plus de lucidité sa difficulté à accepter d'être heureux.

Aujourd'hui, à contretemps, je suis plus émue en pensant à ce jeune garçon obstiné à ne voir rien, à voiler la réalité du présent. Cependant ce n'est pas la lecture du roman qui a produit cet effet, mais celle des oeuvres qui précèdent ou qui suivent ce volume.

Comme s'il y avait, littérairement parlant, un point d'impossible pour cet auteur sensible: nous émouvoir autant en parlant du jeune garçon endeuillé , qu'il nous émeut en parlant des chères figures qu'il a perdues.
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Manifestation de notre désintérêt

Envers quoi ? La société marchande et la consommation à outrance, avec pour conséquences les dérèglements climatiques et la solitude de plus en plus grande. La dématérialisation et la fin du partage (vous payez, vous ne pouvez pas prêter et en plus vous n'avez rien de concret en main)

Ce que nous pouvons faire ? Baisser les yeux devant toutes les nouveautés que l'on nous propose et qui sont aussitôt dépassées. Dire non aux marché financiers et à nos politiques qui ont contribué au chômage, à la misère et à ce qui fait notre quotidien depuis 2008. Oser leur dire "Votre appareil ne nous intéresse pas" (Haddock dans Le Trésor de Rakham le Rouge).

Résister, sans bombes ni violence.
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Les Champs d'honneur

Au champ d'honneur, les petits péchés se taisent, pour chanter les héros disparus de la légende familiale.

Grand-père était grippe-sous, diabétique(hum les bonbons!!), gros fumeur et un brin voyeur sur l'île du Levant (chut!!), seuls restent en mémoire les rodéos improvisés dans sa 2CV (son armure, sa cellule),ses bons mots lorsque la goutte de pluie perlait au bout de son nez, ses noces d'or avec une grand-mère râleuse au grand coeur et les recommandations de cette dernière lorsqu'il "roulait à l'aveuglette", ses recueillements intempestifs dans l'abbaye de Melleraye.

La petite tante bigotte garde un visage lumineux et même si ces sempiternelles prières un brin supersticieuses prêtent à sourire,elle n'en garde pas moins une aura scintillante. On lui pardonne car "il y allait de son honneur de vieille institutrice de ne pas s'en laisser conter par ces jeunes esprits outrecuidants".

Julien le fossoyeur, lui honore les morts et ramène même les dentiers.. qui s'égarent parfois sur les buffets pour des usages à ne pas ébruiter sous peine d'en rire.

L'embarras de papa, le pudique qui parle de "robinet" là où d'autres lancent des pénis et phallus à toute volée est charmant.

Et puis, il y a Pierre aussi, qui "sourit du fond de l'horreur" de la guerre en écrivant "à celle qu'il aime tant" Pierre qui laisse un orphelin....

Et ainsi de suite, Jean Rouaud avec sa verve, ses images, son humour imparable, sait naviguer sur le registre émotionnel pour camper sur Les champs d'honneur de beaux portraits de famille.

Prix Goncourt 1990. Plus rien à ajouter!
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Les Champs d'honneur

Je pensais trouver dans ce bouquin -vu le titre- un récit sur la 1ere GM. Ce n'est le cas qu'au dernier chapitre qui reste très court.

On pourrait penser que ce livre est d'une grande tristesse, et bien pas du tout, il réserve de ces surprises qui laisse béatement heureux.

C'est une bonne pioche !

Je ne connaissais pas l'auteur et je dois dire que son écriture est une douceur, elle fourmille de mille petits détails qui pour certains vous renvoient à votre propre enfance, elle est pleine de sensibilité, d'affection.

Dans ce livre il nous raconte le décès de quatre de ses proches, et croyez le ou non, il y met tant de délicatesse que ce n'est jamais larmoyant. Il y a même des passages où le burlesque l'emporte sur le reste. il n'écrit pas, il peint.. Je relirai Rouaud et je le conseille, c'est vite lu car d'un abord aisé et c'est un moment plein de tendresse.
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Les Champs d'honneur

On m'a offert ce livre dont, je l'avoue, je n'avais que vaguement entendu parler. Je l'ai dévoré avec enthousiasme et un plaisir fou. Quel style magnifique, et quel humour subtil ! J'ai lu la suite, "Des hommes illustres", sans retrouver le même plaisir. J'ai ensuite tenté "Kiosque", que j'ai trouvé un peu décevant. Mais je relirai certainement "Les champs d'honneur".
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Comédie d'automne

Ce livre est une friandise, plus spécialement un cocobat (tube de réglisse fourré à la pâte d’amande): intense et sucré tout à la fois. Rouaud raconte avec intelligence et subtilité les derniers jours avant l'obtention du Goncourt pour son premier roman. Il oppose son désir d'être écrivain à la clique germanopratine, qui comptabilise prioritairement ses intérêts éditoriaux : l’absurde de la littérature quand elle veut être rentable.

Ici on ne parle pas de transfuge de classe, terme malheureusement en vogue, renvoyant à une époque prérévolutionnaire, et qui permet encore aujourd’hui de rappeler aux uns et aux autres d’où ils viennent et où ils doivent aller. Rouaud est à sa place, celle d’un grand écrivain de langue française ; pas de volonté d’être devenir autre chose et encore moins un mondain du Café de Flore.

Son récit ne se circonscrit pas à ce seul évènement. Rouaud évoque le parcours de l’écrivain débutant, tel Sisyphe, construit par la volonté et la ténacité. Il parle de ses amitiés, de son amour distant avec sa mère, et de son admiration pour quelques compères.

L’écriture est magnifique, profonde et intelligente, pleine de sens et de vérité.

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Vous avez connu Rimbaud ?

Je qualifierais cette bande-dessinée de documentaire graphique en référence au roman graphique, dont le sujet est Arthur Rimbaud... Habitant à deux pas de l'endroit où fût écrit "le bateau ivre" j'avoue avoir eu, au prime abord, un sentiment négatif... "encore un documentaire sur Rimbaud" me suis-dit. Oui sauf que Jean Rouaud et Rachid Maraï nous parlent non seulement du poète mais de l'homme Arthur Rimbaud , et non seulement à travers sa mère, Izambard et Delahaye mais aussi de Germain Nouveauqui l a aidé à la copie des "Illuminations" Charles- Auguste Bretagne (sans qui Rimbaud n'aurait pas rencontré Verlaine et sans doute la notoriété) Jules Borelli et Alfred Bardey qui ont connu le Rimbaud explorateur en Ethiopie....Que l'on soit Rimbaldien ou non, je vous recommande cet ouvrage très riche, très instructif. Bravo aux auteurs.
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Les Champs d'honneur

Des phrases magnifiques qui s'enchaînent les unes aux autres avec une belle musicalité. La vie des gens simples, la campagne, les deuils, le grand-père, des quantités de détails qui font mouche car nous avons tous, peu ou prou, côtoyé des familles semblables, nous en sommes issus, de ces villages, ces églises, ces champs et, ce qui ajoute à la perfection, c'est l'humour : juste ce qu'il faut, au moment où il faut, au détour d'une virgule. J'ai savouré ce livre que j'ai lu avec le sourire, et parfois avec émotion.
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Les Champs d'honneur

Comme s’il bâtissait son album de photos familial, l’auteur campe chaque personnage dans l’histoire. Après avoir situé géographiquement le berceau familial, parlé longuement de la pluviosité, la 2 CV d’un grand-père discret prend la route au gré de l’humeur du conducteur. Le lien avec la Grande Guerre, on ne le perçoit pas de suite ! Puis viennent la douleur de l’absence, le poids de la solitude comme les tourments inévitables d’un quotidien très sombre pour lequel Jean Rouaud extirpe un point d’humour de la plupart des situations. Alors que le corbillard conduisait la petite tante, toute légère, à sa dernière demeure, « dans le grand virage, menant au cimetière, il manqua même de verser… Biloche fils estima qu’on ne pouvait plus avancer sans mettre en péril la sécurité du mort ». Une petite phrase parmi de nombreuses qui viennent alléger le contexte, c’est ainsi tout au long du récit, pour ne pas sombrer dans le drame profond de cette période.

Malgré cela, l’émotion prend le dessus dans une dernière partie où les mots tellement justes posent le point d’orgue d’une histoire dans laquelle de nombreux lecteurs auront trouvé une résonance.

Je me suis littéralement régalée de l’écriture en « beau français » et du style, irrespectueux de la chronologie comme les souvenirs qui remontent et défilent, sans que l’on puisse en maîtriser le flux.




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Kiosque

En nous racontant son quotidien dans "son kiosque" , Jean Rouaud nous fait une magnifique peinture d'un Paris populaire .

A travers une galerie de personnages touchants ; des discrets, des rêveurs, des utopistes, des écorchés , des nostalgiques , "ses clients" de la rue des Flandres côtoyés durant 7 années , c'est toute l'actualité des années 80 qui y est racontée: Beaubourg et la pyramide du Louvre ; les réfugiés cambodgiens ,les guerres d'Iran et de Yougoslavie ; les lendemains de l'utopie soixante-huitarde ; la fin d'une certaine presse quotidienne.



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