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Citations de Jérôme Baschet (114)


Une véritable irruption populaire a fait vaciller le pouvoir.
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Et là où beaucoup s’affligeaient de ne voir que le marécage stagnant d’une majorité dite silencieuse et passive ont surgit mille torrents impétueux et imprévisibles, qui sortent de leur cours, ouvrent des voies inimaginables il y a un mois encore, renversent tout sur leur passage et, malgré quelques dévoiements initiaux, démontrent une maturité et une intelligence collective impressionnante.
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Le monde commun part de l’autonomie des communautés locales, mais il suppose aussi la conscience d’une « communauté planétaire ».
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Il n’est même plus question de travail, activité subie et ordonnant la vie toute entière, qui impose de se dessaisir de ses capacités manuelles ou intellectuelles et de les engager dans un projet dont la maîtrise revient à d’autres. 
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La société post capitaliste est avant tout une société du temps disponible. 
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Rejeter le règne de l’aujourd’hui néolibéral suppose une conscience historique du passé, indispensable pour briser l’illusion de la fin de l’histoire et rouvrir la perspective d’un avenir qui ne soit pas une répétition du présent.
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Les images ont, depuis quelques décennies, acquis droit de cité parmi les documents qui apportent leur contribution à la compréhension des sociétés de l'Occident médiéval. Cependant, la tâche n'a rien d'aisée, car l'analyse des œuvres visuelles confronte à des difficultés particulière et les historiens, surtout familiers des textes et des matériaux archéologiques, ne sont pas forcément bien armés pour les étudier, dans le respect de leurs modes d'expression et de fonctionnement propres.
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Les images médiévales ont été définies comme des images-objets. Mais la matérialité à laquelle adhèrent nombre d'entre elles est celle d'un édifice, d'un lieu, tout particulièrement de ce lieu rituel qu'est l'église. Il semblerait donc plus judicieux, pour caractériser de telle œuvres, de parler d'images-lieux.
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Mais, au fond, si un système social injuste et oppressif assure sa permanence, c'est moins parce qu'il bénéficie d'un consentement explicite que dans la mesure où il parvient à créer les conditions d'une conformité pratique de tous ceux qui ne peuvent faire autrement que d'y tenir leur place - ou de s'en faire une - pour subsister. « Il faut bien gagner sa vie » est aujourd'hui l'impérieuse loi de l'adhésion sociale : étonnante formule qui dévoile combien la vie entière est soumise aux exigences du salariat et du travail, et même conditionnée par une telle soumission. La redoutable conjonction de la menace de l'exclusion et de l'obligation concurrentielle généralisée démultiplie encore l'efficacité de cette injonction. Mais il faut aussi reconnaître que celle-ci joue à la fois, dans des proportions variables selon les milieux sociaux, des stricts impératifs de la survie et des satisfactions que fait miroiter la consommation des biens matériels ou immatériels - lesquelles ne sont jamais bien loin de dévoiler leur vacuité ou de basculer dans la servitude lorsque l'endettement massif referme le piège du cycle travail/consommation/travail. Finalement, la vie sociale relève d'un incroyable automatisme qui tient à l'incorporation pratique de ses normes : on agit ainsi parce que les choses sont ainsi.
La permanence d'un système social repose donc sur une étrange tautologie : cela tient parce que cela tient. C'est-à-dire aussi… jusqu'au moment où cela commence à ne plus tenir. Jusqu'au moment où, loin d'entretenir les automatismes qui lui permettent de se reproduire, quelque chose comme une secousse collective amorce une dynamique inverse. S'enclenche alors un processus de dés-adhésion, de reconnaissance de l'arbitraire du monde social, donné jusque-là pour un cadre intangible de vie (ce qui oblige aussi à remarquer que, sous les apparences de la stricte conformité sociale, une part d'insatisfaction latente, non exprimée et sans doute en partie non consciente, devait bien être présente antérieurement). La constitution dominante de la réalité commence alors à se déliter, ouvrant la voie à la désobéissance, à l'insubordination, à l'expérimentation d'autres formes de subjectivité et d'autres manières d'agir. Cette dés-adhésion se nourrit de la digne rage que suscitent tant d'injustices, de souffrances, de destructions, de désastres. Elle suppose d'éprouver combien la réalité présente est inacceptable ; elle consiste à in-accepter l'inacceptable. Mais elle se nourrit aussi de l'espérance mobilisatrice - ou du moins de l'intuition - qu'une autre organisation sociale est possible. Elle se fait lutte, réalité contre réalité, mondes contre mondes. (p. 154-155)
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Le bien vivre, c'est d'abord l'affirmation de la vie, humaine et non humaine, contre ce qui la nie, à savoir la puissance destructrice de la production-pour-le-profit. Supposant la critique de l'idéologie du progrès et du développement, le bien vivre pose le dilemme de manière limpide : capitalisme ou vie. Mais le bien vivre, c'est surtout le qualitatif du vivre humain. Par opposition à la quantification marchande qui mesure tout en argent ou en biens matériels, le qualitatif ne se mesure pas. Il peut seulement s'éprouver en termes éthiques et esthétiques, dans le plaisir de l'être et du faire. Enfin, deux principes sont au cœur du bien vivre : d'une part, une éthique du collectif, qui fait prévaloir la solidarité, l'aide à autrui et la convivialité, au détriment des rapports de compétition et de domination ; de l'autre, un principe d'équilibre général (parfois dénommé harmonie), qui doit prévaloir dans les rapports entre les êtres et notamment entre les humains et la Terre Mère. (p. 127)
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Pour donner consistance à cette révolution du temps, il suffit de commencer à énumérer les domaines de production de biens et de services dont l'existence actuelle ne se soutient que de la logique de la société marchande, de la double nécessité d'accroître sans cesse la production-pour-le-profit et de reproduire l'organisation sociopolitique qui la rend possible. Osons donc trancher à la racine et mesurer l'ampleur des secteurs qui, dans une société non marchande, soucieuse de surcroît d'écarter toute séparation entre gouvernants et gouvernés, deviendraient parfaitement superflus. On peut éliminer sans hésiter tout le personnel militaire et policier, poursuivre avec les banques, le système financier et les assurances (ces dernières seules pèsent aujourd'hui 15 % du PIB mondial), sans se priver du plaisir d'ajouter la publicité et le marketing( qui absorbent 500 milliards de dépenses annuelles, soit près d'un tiers des budgets militaires mondiaux). Finalement, le principe d'un autogouvernement à tous les échelons, tel qu'on l'a suggéré dans le chapitre précédent, condamnerait l'ensemble des bureaucraties nationales et internationales à une complète inutilité.
Dens pans considérables de l'appareil industriel seront abandonnés, à commencer par la production d'armes et d'équipements militaires. Les impératifs écologiques et l'affirmation de l'agriculture paysanne rendront caduque une grande partie de l'industrie chimique (notamment l'écrasant secteur agrochimique) comme des biotechnologies fortement contestées (OGM notamment). Le secteur agroalimentaire, exemple type d'une marchandisation perverse des formes de production, s'évanouira, au profit d'une valorisation de l'autoproduction et des circuits locaux de production/consommation. […] on voit que chaque abandon de production de biens et de services aura des effets démultiplicateurs importants, puisque les besoins en édifices (bureaux, installations industrielles), en matériaux et en énergie, en infrastructures et en transports, s'en trouveront diminués d'autant. Le secteur de la construction sera par conséquent ramené à une échelle bien plus raisonnable qu'aujourd'hui, ce qu'accentuerait encore la régénération des pratiques d'autoconstruction (ou du moins une participation directe des utilisateurs eux-mêmes, aux côtés d'artisans plus expérimentés). Chaque suppression dans la production de biens et de services éliminera à son tour toutes les productions nécessaires à son installation, à son fonctionnement, sans oublier la gestion des déchets engendrés par chacune de ces activités. Pour donner un exemple parmi tant d'autres, la suppression de la publicité (jointe à celle des bureaucraties et à d'autres changements technico-culturels) entraînera une diminution considérable de la consommation de papier, c'est-à-dire aussi de toute la chaîne industrielle qui lui est associée, dans laquelle il faut inclure exploitation forestière, produits chimiques, matériaux nécessaires aux installations industrielles, transport, etc.
Sans nier la pertinence de maintenir des échanges à longue distance, le fait de privilégier, dans toute la mesure du possible, les activités locales et de supprimer les absurdes détours de production qui caractérisent l'économie capitaliste (lesquels mènent, par exemple, l'ail chinois jusqu'en Europe et de l'eau - oui, de l'eau ! - des Alpes jusqu'au Mexique) réduira à peu de chose la chaîne commerciale actuelle et restreindra encore les besoins en transport. Joint à l'abandon d'une logique de production et d'organisation centrée sur l'automobile et le fétichisme égolâtre qui la soutient, tout cela entraînera une forte contraction de la consommation énergétique, qui pourra être satisfaite grâce aux énergies renouvelables, produites, dans la mesure du possible, localement. En conséquence, tout ce qui fonde le poids écrasant du secteur énergétique dans l'économie mondiale actuelle s'évanouira pour l'essentiel. (p. 91-92)
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si les fanatiques du libre marché ont dû mettre un peu d'eau dans leur vin antiétatique, ce n'est pas par une soudaine conversion "socialiste", mais parce qu'ils savent pertinemment que, comme au lendemain de 1929, seul l'État peut sauver le capitalisme et ouvrir de nouveaux fronts aux appétits de profit. Il n'y a lieu ni de s'en étonner (depuis les origines du libéralisme, l'État fait office de garant en dernier recours du marché supposément libre), ni de s'en offusquer : sauver les banques à coups de centaines de milliards de dollars ou d'euros (pris sur les budgets publics) relève de la stricte logique d'un système dont l'amoralité est une caractéristique intrinsèque. (p. 25)
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Citation du sous-commandant Marcos :
Quelle autre guérilla a accepté de s'asseoir pour dialoguer cinquante jours après son soulèvement armé ? Quelle autre guérilla en a appelé non au prolétariat comme avant-garde historique mais à la société civile qui lutte pour la démocratie ? Quelle autre guérilla s'est mise sur le côté pour ne pas interférer dans un processus électoral ? Quelle autre guérilla a convoqué un mouvement national démocratique, civil et pacifique, pour rendre inutile le recours à la voie armée ? Quelle autre guérilla demande à ses bases d'appui ce qu'elle doit faire avant de le faire ? Quelle autre guérilla a lutté pour créer un espace démocratique et non pour le pouvoir ? Quelle autre guérilla a utilisé davantage les paroles que les armes ? 
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 L'adhésion à la réalité peut, certes, prendre des formes divers, où tiennent une place variable l'impératif de survie, le miroitement des modèles d'ascension sociale, les séductions addivctives de la consommation, les petits privilèges d'une vie un tant soit peu confortable, les pièges d'une logique concurrentielle qui nous fait obligation de croire qu'il n'y aura pas de place pour tout le monde, la peur de perdre le peu que l'on a et le sentiment d'insécurité méticuleusement entretenue. Même une bonne dose de scepticisme, voire une solide capacité critique ne portent guère atteinte, le plus souvent, à cette adhésion à un système qui a peut-être renoncé à nous convaincre de ses vertus pour se contenter d'apparaitre comme la seule réalité possible, hors du chaos absolu, ainsi que le résume la sentence emblématique de François Furet : « Nous sommes condamnés à vivre dans le monde dans lequel nous vivons. » Il n'y a pas d'alternative : telle est la conviction que les formes de domination actuelles sont parvenues à disséminer dans le corps social
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Derrière le combat des vices et des vertus se profile une autre lutte, plus fondamentale encore. Ce sont en effet le diable et ses troupes démoniaques qui tentent les hommes et les induisent au péché, tandis que Dieu et ses armées célestes s'efforcent de les protéger et de les inciter à la vertu. Le monde est le théâtre de cet affrontement permanent et dramatique entre le Créateur et Satan. Celui-ci est l'une des créations les plus originales du christianisme : pratiquement ignoré dan., s l'Ancien Testament, son rôle est surtout valorisé par l’Évangile qui en fait « le prince de ce monde » (J n 12), « le dieu de ce siècle » (II Cor 4). Il fédère alors la multitude des esprits démoniaques qui pullulent dans le judaïsme populaire, tout en procédant de la dissociation de la figure ambivalente de Yahvé, dieu de colère et de châtiment autant que bienfaisant. C'est alors, en recourant principalement à la littérature apocryphe juive (surtout le Livre d'Hénoch, du 11e siècle avant J.-C.), qu'est précisé le mythe de la chute des anges, qui constitue l'acte de naissance du diable et marque l'entrée du mal dans l'univers. Si, dans le récit initial, la chute est la conséquence du désir des démons, qui ont été séduits par la beauté des femmes, à partir du ive siècle elle est expliquée par l'orgueil du premier des anges, Lucifer, désireux d'égaler Dieu et pour cela chassé du ciel, en même temps que tous les anges rebelles ralliés à sa folle prétention.

Au cours du Moyen Âge, l'importance de la figure du Malin se renforce constamment, tant dans les textes que dans les images, où il n'apparaît guère qu'à partir du IXe siècle. (pp. 539-540)
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Parler de «communauté», de « collectif », ce n’est pas renvoyer à une identité essentialisée (indigène, maya, autre…), mais à la solidarité rendue nécessaire par des conditions concrètes de vie et le désir d’habiter au mieux la Terre, au Mexique et ailleurs. C’est se donner les chances de tenir à distance le bulldozer capitaliste et ses « quatre roues » qui sont, pour les zapatistes, la spoliation, la répression, l’exploitation, la discrimination
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Les sept principes de bon gouvernement

• Obedecer y no mandar (Obéir et ne pas commander)

• Representar y no suplantar (représenter et non supplanter)

• Bajar y no subir (partir d’en bas et non d’en haut/ne pas chercher à s’élever)

• Servir y no servirse (servir et non se servir)

• Convencer y no vencer (convaincre et non vaincre)

• Proponer y no imponer (proposer et non imposer)

• Construir y no destruir (construire et non détruire)
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Loi Révolutionnaire des Femmes Zapatistes

1. Les femmes ont le droit de participer à la lutte révolutionnaire en tout lieu et à tout niveau de responsabilité déterminé par leur volonté et leur compétence, sans distinction de race, de religion ou d’appartenance politique.

2. Les femmes ont le droit de travailler et de percevoir un juste salaire.

3. Les femmes ont le droit de choisir le nombre d’enfants qu’elles désirent et souhaitent élever.

4. Les femmes ont le droit de participer pleinement à la vie de la communauté et d’y exercer des charges lorsqu’elles sont élues librement et démocratiquement.

5. Les femmes et leurs enfants ont droit à la satisfaction de leurs besoins, principalement dans les domaines de l’alimentation et de la santé.

6. Les femmes ont le droit à l’éducation.

7. Les femmes ont le droit de choisir leur conjoint et de ne pas avoir à contracter un mariage par la force.

8. Aucune femme ne pourra être battue ou physiquement maltraitée, ni par un proche, ni par un étranger. Les viols et tentatives de viols seront sévèrement punis.

9. Les femmes pourront occuper des charges de direction dans l’organisation et accéder à tous les grades des forces armées révolutionnaires.

10. Les femmes bénéficieront de tous les droits et seront soumises à toutes les obligations définis par les lois et les règlements révolutionnaires.
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Dans certains pays comme la France, le soulèvement zapatiste, qui s’est fait connaître le 1er janvier 1994, n’a donné lieu le plus souvent qu’à une vision extrêmement étroite, partagée entre une série d’images d’Épinal sympathiques et diverses caricatures cyniques. Les uns y voient la résurgence d’une sagesse indienne immémoriale, issue du fond des âges, voire de l’innocence du paradis perdu, et se prennent à rêver d’une vie réconciliée avec la nature et d’une harmonie communautaire libérée du poids de la mauvaise conscience occidentale. D’autres se gaussent d’une archéo-guérilla hors de saison, relevant d’un folklore nostalgique et alimentant le tourisme révolutionnaire des déçus de toutes les épopées antérieures. Surgissent aussi les sarcasmes qui ironisent sur une cyber-guérilla plus ou moins post-moderne, sur une « guerre de papier » dans laquelle les balles sont remplacées par les mots, et le combat de terrain par l’affrontement virtuel sur le web. Il s’agit là d’un thème vite lancé par le ministère mexicain des Relations extérieures et exploité avec une belle fringale par les médias et leurs serviteurs pressés. C’est que l’aubaine est parfaite pour le grand spectacle de la communication, trop heureux de virtualiser un mouvement social massif et d’occulter les rebelles derrière l’écran du médium qui symbolise son propre triomphe. Du reste, de la cyber-guérilla, on en vient inévitablement à gloser sur la mode médiatique suscitée par la personnalité du sous-commandant Marcos et son art de la communication. Pourtant, le zapatisme médiatique n’est qu’une invention des médias eux-mêmes, une ruse du spectacle ambiant qui s’efforce de neutraliser ses ennemis en les façonnant à son image.
S’opère ainsi une réduction typique de la logique médiatique qui, pour désarticuler les réalités sociales et les rendre incompréhensibles, concentre tous les projecteurs sur le fait individuel. Il ne reste plus alors du zapatisme que Marcos, adulé par ses fans et dénoncé par les propagandistes néolibéraux comme un manipulateur machiavélique. De toute manière, il est impensable qu’un mouvement indigène ne soit pas dirigé par un chef blanc, qu’il s’agisse du sous-commandant ou de Samuel Ruiz, l’évêque « rouge » de San Cristóbal de Las Casas. Se répète ainsi le mépris multiséculaire des dominants pour les mouvements populaires, réputés incapables de s’organiser eux-mêmes et ainsi dépossédés de leur histoire, jusque dans leur révolte. Dans le cas du soulèvement zapatiste, s’y ajoute la volonté d’ignorer l’existence d’un puissant mouvement social indigène et paysan, engageant des centaines de milliers d’hommes et de femmes, dont la formation et l’essor traversent l’histoire du Chiapas depuis les années 1970 au moins.
Toutes ces visions, qu’elles soient suscitées par la mauvaise foi des défenseurs du statu quo ou seulement par l’étroitesse de vue et la naïveté d’une information désinformée, empêchent de comprendre l’importance du mouvement zapatiste. D’où le présent livre, qui voudrait s’efforcer de remédier un tant soit peu à une telle situation.
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PRÉSENTATION DE LA NOUVELLE ÉDITION (2019)
La rébellion zapatiste, par son étonnante capacité de résistance et sa vitalité persistante, a rendu obsolète La rébellion zapatiste, ouvragepublié en 2002 puis repris dans la collection « Champs » trois ans plus tard.
On ne peut, bien sûr, que s’en réjouir, tout particulièrement au moment où cette expérience franchit le cap du quart de siècle d’existence – soit une longévité très singulière pour une aventure rebelle radicale de cette ampleur.
Une édition actualisée de ce livre était donc nécessaire. Non pas que les analyses qui y étaient proposées aient été invalidées au cours des années postérieures à sa publication. Mais parce qu’il y manquait ce qui est devenu l’essentiel et qui, désormais, donne sa perspective à tout le reste : la construction de l’autonomie dans les territoires rebelles du Chiapas, dont la création des conseils de bon gouvernement, en 2003, a marqué l’approfondissement.
Car voilà le paradoxe : la rébellion zapatiste a presque cessé de faire parler d’elle au moment où, pourtant, se consolidait sa dimension la plus remarquable. Il est vrai qu’elle est sortie du domaine de l’événementiel et a progressivement renoncé aux facilités de la personnalisation, jusqu’à la mort autoproclamée du charismatique sous-commandant Marcos. Elle est devenue une révolution invisible, qui invente patiemment et en silence des modalités d’autogouvernement populaire, en complète sécession vis-à-vis des institutions de l’État mexicain. Dans un territoire comparable à celui d’une région comme la Bretagne, cette expérience défend et déploie des formes de vie à la fois ancrées dans la tradition indienne et inédites, qui constituent une alternative concrète aux logiques capitalistes dominantes. L’autonomie zapatiste est ainsi l’une des utopies réelles les plus radicales et les plus remarquables qu’il soit donné de découvrir aujourd’hui, sur notre planète livrée à la folie destructrice et déshumanisatrice de la quantification économique.
C’est donc à la construction de l’autonomie zapatiste qu’est consacrée la nouvelle postface qui clôt ce volume. On peut considérer qu’il s’agit d’un chapitre à part entière et même, en quelque sorte, du chapitre principal de ce livre, celui qui lui donne sa véritable perspective. C’est pourquoi le lecteur qui le souhaiterait serait bien avisé de lire cette postface en premier, après avoir pris connaissance de l’introduction et du prologue historique (désormais prolongé jusqu’au moment de rédaction de cette édition), pour revenir ensuite aux chapitres du livre.
Ceux-ci ont été reproduits ici tels qu’ils figuraient dans l’édition de 2002. Comme on l’a dit, leur contenu est demeuré valide, même s’ils demandent à être complétés. C’est pourquoi on trouvera, à la fin de chaque chapitre, des développements nouveaux indiquant certaines inflexions et clarifications au sein des conceptions zapatistes, ainsi que des éléments qui permettent d’approfondir les analyses initialement proposées.
Une précision encore. L’autonomie se construit dans un territoire propre, selon des modalités particulières. Une telle expérience est nécessairement située, localisée. Mais on aurait tort de la réduire à une affaire locale. Singulière, une expérience d’autonomie ne saurait constituer un modèle qu’il s’agirait de reproduire ailleurs ; mais la démarche qu’elle met en œuvre est multipliable partout, sous des formes chaque fois spécifiques. C’est en cela que la portée de la rébellion zapatiste déborde les frontières du Chiapas et du Mexique. En outre, celle-ci, toujours soucieuse d’imbriquer lutte des peuples indiens, perspective nationale et horizons planétaires, apporte de suggestives contributions à l’effort collectif pour refonder une perspective d’émancipation désirable et crédible – ce qui suppose d’abord de se libérer des pratiques politiques et des schémas de pensée qui ont contribué à mener les espérances révolutionnaires du XXe siècle vers de tragiques échecs. C’est pourquoi il serait regrettable de ne pas accorder à cette expérience rebelle toute l’attention qu’elle mérite.
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