Citations de José Carlos Llop (118)
Le piano facilite la digestion, disait mon grand-père,et il épure les sentiments.L'homme doit toujours faire attention à sa digestion et avoir les sentiments bien épurés; sinon il risque de se transformer en bête.
Dans un couple,le premier qui meurt trahit l'autre.
Un écrivain est un homme qui se retire de la vie.Un écrivain est un homme sans vie.Un écrivain est un homme dont la seule vie est celle qu'il imagine à travers les vies écrites sur le papier;ou dont il se souvient sur le papier,ce qui revient au même parce que le souvenir n'est rien qu'une autre forme de la fiction.
J’ai cherché le pistolet de mon père mais je n’ai trouvé que quelques albums de photos, des pages desquelles me regardaient les yeux de tout un siècle
Le temps est un bon chirurgien et je suis un homme que la peur a transformé en ombre. J’ai baissé les yeux et posé le couteau de cuisine dans l’évier
Ils souriaient en regardant l’écran de leur mobile. Jamais il n’avait vu autant d’expressions de tendresse ou d’affection ou de désir ou d’amour ou de reconnaissance
J’ai connu le grand monde sous les lampes et sur la cuvette de ses toilettes, j’ai vu que tous les hommes sont égaux au lit et dans leur salle de bain […] J’ai connu des ministres, des princes et des magnats. J’ai parlé avec le roi Farouk d’Égypte, avec El Gallo et avec Ava Gardner. […] J’ai vu que le mépris est une monnaie dont la circulation est plus forte que celle du dollar et que la vanité est plus difficile à perdre qu’une paire de bas retenus par un porte-jarretelles
Ce bruit est le bruit de l’Histoire, cette vieille putain, qui s’obstine à passer devant chez nous
Notre maison était située à l‘orée du monde
Quand mes parents se marièrent, je vivais dans un bordel de Singapour et j’écrivais la mathématique des corps dans le livre de comptes d’un entrepreneur chinois aussi obèse qu’un lion de mer
Secrétaire de l'Amirauté,
avec sa nouvelle casaque de taffetas,
sa perruque fraîchement poudrée,
ses bas en coton de Virginie
et ses souliers à boucles d'argent
Les poètes nomment le monde
et c'est ainsi qu'il renaît dans chaque poème.
Ils connaissent le désert et les étoiles,
ils foulent la neige vierge à leur poursuite
d'un oiseau albinos ou d'un ours blanc.
La vérité les éclaire à leur insu.
Ils naviguent sur le bateau d'Ulysse,
ils partagent leur lit avec Helena
et ils ne craignent pas le cri d'Achille.
Mon ami ne recevra plus le New Yorker / qui continuera à arriver à son bureau, au nom / de quelqu'un qui désormais n'est plus personne
Les poètes nomment le monde / et c'est ainsi qu'il renaît dans chaque poème. / Ils connaissent le désert et les étoiles, / ils foulent la neige vierge à leur poursuite / d'un oiseau albinos ou d'un ours blanc. / La vérité les éclaire à leur insu
L’image première est un enterrement / dans un paysage de nord : l’herbe verte / et les dalles funéraires de pierre taillée, une abbaye / où aurait pu vivre Swift et les pies / qui se promènent en frac et portant monocle
La première fois que j’ai séjourné à Bordeaux
j’ai pensé qu’à cette ville il manquait un Dickens.
Mais il y a « Montaigne
et la province bourgeoise
de Mauriac
je n'aime pas la nostalgie. Mais la vie est une succession de pertes. Une manière d'éviter de perdre complètement, c'est d'écrire
Le brouillard où habitent à jamais les premières années de notre vie dans le monde et le plaisir et le rire et la mélancolie de nous les rappeler meilleures ou pires qu’elles n’ont été – c’est là que nous commençons à romancer –, mais jamais exactes ni précises. La plus ancienne voie de Paris est la rue Saint-Jacques, qui suit le chemin qu’empruntaient les mammouths pour aller boire à la Seine.
Ce n’était pas une de ces filles de vingt ans au sexe ardent et peu regardantes sur la façon d’obtenir une bonne note. Elle n’était pas de celles qui tombent sous les pattes et les griffes de Rhinocéros ou de Porcus Singularis, ou – le pire de tous – de Rat Noir (j’ai toujours eu le chic pour donner des surnoms et des sobriquets qui ensuite se répandaient anonymement sur le campus), trois individus qui, dans leurs bureaux de l’université, avaient mis à genoux plus d’étudiantes qu’aucun confesseur n’avait fait agenouiller de pénitents, prêts, en échange de la satisfaction de leur caprice, à remonter leurs notes et à leur attribuer des mentions, et même des bourses pour travailler dans le département pendant quelques mois et alors passer du sol à la table, sur le dos, les jambes relevées et pédalant en l’air en quête d’un appui cosmique.
Dans l’imaginaire de toute vie se cache toujours la fuite, la disparition, l’invention d’une autre vie différente. Toujours. Et la consolation se trouve dans le cinéma, dans les chansons, dans les romans… Mais ce n’est qu’une consolation et nous le savons. Pour le moment, « Henry Lee » avait servi à plus de choses que ce qu’avaient imaginé ses auteurs et ce matin-là j’ai laissé mes pattes telles quelles.