AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Leïla Slimani (2066)


Loin de Paris, dans la petite maison de province, elle renoncerait à ce qui selon elle la définit vraiment, à son être vrai. Celui-là même qui, parce qu’il est ignoré de tous, est son plus grand défi. En abandonnant cette part d’elle-même, elle ne sera plus que ce qu’ils voient. Une surface sans fond et sans revers. Un corps sans ombre.
Commenter  J’apprécie          200
Dans le frigidaire de Myriam, il y a des boites. De toutes petites boites, posées les unes sur les autres. Il y a des bols, recouverts de papier aluminium. Sur les étagères en plastique, on trouve de petits morceaux de citron, un bout défraichi de concombre, un quart d'oignon dont l'odeur envahit la cuisine dès qu'on ouvre la porte du frigo. Un morceau de fromage, dont il ne reste que la croûte. Dans les boîtes, Myriam trouve quelques petits pois qui ont perdu leur rondeur et leur vert éclatant. Trois pâtes. Une cuillerée de de bouillie. Une effiloché de dinde qui ne nourrirait pas un moineau mais que Louise a pris le soin de ranger.
C'est, pour Paul et Myriam, un sujet de plaisanteries. Cette lubie de Louise, cette phobie de jeter la nourriture, commence par les faire rire. La nounou racle les boites de conserve, elle fait lécher les pots de yaourt aux enfants. Ses employeurs trouvent cela ridicule et touchant.
Paul se moque de Myriam quand elle descend, en pleine nuit, les poubelles qui contiennent des restes non consommés ou un jouet de Mila qu'ils n'ont pas le courage de réparer. "Tu as peur de te faire gronder par Louise, reconnais-le !" et il la poursuit dans la cage d'escalier en riant.
Commenter  J’apprécie          200
- Votre frère s'est fait du souci pour vous. Il vous a cherché. Le bruit courait que vous étiez en prison.
- Mais nous sommes tous en prison. Tant que nous vivrons dans un pays colonisé, nous ne pouvons pas nous dire libres.
Commenter  J’apprécie          190
Ahmet Altan écrivait : "Je ne suis pas en prison. Je suis écrivain."
Commenter  J’apprécie          190
Leïla Slimani
Non, à cet instant ils appartenaient tous deux à un camp qui n'existait pas,
un camp où se mêlaient de manière égale, et donc étrange,
une indulgence pour la violence
et de compassion pour les assassins et les assassinés.
P 341
Commenter  J’apprécie          190
Elle l'amusait, lui qui ne savait pas rire avec ses dents, qui mettait toujours ses mains devant sa bouche comme s'il trouvait que la joie était, de toutes les passions, la plus honteuse et la plus impudique.
Commenter  J’apprécie          190
Cette nounou, elle l'attend comme le Sauveur, même si elle est terrorisée à l'idée de laisser ses enfants. Elle sait tout d'eux et voudrait garder ce savoir secret. Elle connaît leurs goûts, leurs manies. Elle devine immédiatement quand l'un d'eux est malade ou triste. Elle ne les a pas quittés des yeux, persuadée que personne ne pourrait les protéger aussi bien qu'elle.
Commenter  J’apprécie          190
Elle compris très vite que le désir n'avait pas d'importance. Elle n'avait pas envie des hommes qu'elle approchait. Ce n'est pas à la chair qu'elle aspirait, mais à la situation. Être prise. Observer le masque des hommes qui jouissent. Se remplir. Goûter une salive. Mimer l'orgasme épileptique, la jouissance lascive, le plaisir animal. Regarder partir un homme, ses ongles maculés de sang et de sperme.
Commenter  J’apprécie          180
Leïla Slimani
[ Emmanuel Macron, interpellé par un ancien combattant lui demandant : « Quand mettrez-vous les sans-papiers hors de chez nous ? » a répondu que les personnes éligibles au droit d'asile seraient accueillies mais que « ceux qui peuvent vivre librement dans leur pays doivent être raccompagnés », jurant encore de « continuer le travail. » ]

► Réaction de Leïla Slimani, ambassadrice du Président pour la francophonie :

« Il me semble qu'Emmanuel Macron aurait pu défendre avec plus de vigueur et de froideur ceux que cet homme rêve de mettre dehors. Il aurait pu lui répondre sèchement qu'on ne parle pas ainsi des gens en les résumant au vocable 'sans-papiers' », s'émeut l'écrivaine et journaliste franco-marocaine. Il « aurait pu lui dire, puisqu'il faut défendre la 'pensée complexe', que l'immigration est une question ô combien complexe parce qu'elle est humaine, douloureuse, existentielle. »

« Il aurait pu lui rappeler que lesdits 'sans-papiers' ne sont pas sans visage. [...] Ils sont étudiants, nounous, chefs cuisiniers, chercheurs en sciences sociales, écrivains, gardes-malades, parents, enfants, soutiens de famille », insiste encore Leila Slimani pour qui « personne ne devrait avoir le droit de parler avec légèreté ou condescendance des exilés, des travailleurs de l'ombre, des invisibles qui n'ont peut-être pas de papiers mais qui ont des droits. » Avant de conclure : « Et le premier d'entre eux est celui d'être respecté, regardé dans les yeux. Et défendu. »
___

>> https://www.huffingtonpost.fr/2018/11/10/leila-slimani-reproche-a-macron-ses-propos-sur-les-migrants_a_23585569/
Commenter  J’apprécie          182
Elle boit et l'inconfort de vire, la timidité de respirer, toute cette peine fond dans les verres qu'elle sirote, du bout des lèvres.
Commenter  J’apprécie          180
Myriam et Paul sont débordés. Ils aiment à le répéter comme si cet épuisement était le signe avant-coureur de la réussite.
Commenter  J’apprécie          180
Quelques jours auparavant, alors que Myriam discutait de ses recherches avec son amie Emma, celle-ci s’est plainte de la femme qui gardait ses garçons. « La nounou a deux fils ici, du coup elle ne peut jamais rester plus tard ou faire des baby-sittings. Ce n’est vraiment pas pratique. Penses-y quand tu feras tes entretiens. Si elle a des enfants, il vaut mieux qu’ils soient au pays. » Myriam avait remercié pour le conseil. Mais, en réalité, le discours d’Emma l’avait gênée. Si un employeur avait parlé d’elle ou d’une autre de leurs amies de cette manière, elles auraient hurlé à la discrimination. Elle trouvait terrible l’idée d’évincer une femme parce qu’elle a des enfants. Elle préfère ne pas soulever le sujet avec Paul. Son mari est comme Emma. Un pragmatique, qui place sa famille et sa carrière avant tout.
Commenter  J’apprécie          180
La solitude agissait comme une drogue dont elle n’était pas sûre de vouloir se passer. Louise errait dans la rue, ahurie, les yeux ouverts au point de lui faire mal. Dans sa solitude, elle s’est mise à voir les gens. A les voir vraiment. L’existence des autres devenait palpable, vibrante, plus réelle que jamais. Elle observait jusqu’aux moindres détails les gestes des couples assis aux terrasses. Les regards en biais des vieillards à l’abandon. Les minauderies des étudiantes qui faisaient semblant de réviser, assises sur le dossier d’un banc. Sur les places, à la sortie d’une station de métro, elle reconnaissait l’étrange parade de ceux qui s’impatientent. Elle attendait avec eux l’arrivée d’un rendez-vous. Chaque jour, elle rencontrait des compagnons en folie, parleurs solitaires, déments, clochards.

La ville, à cette époque, était peuplée de fous.
Commenter  J’apprécie          181
Myriam admire chez Louise cette capacité à jouer vraiment. Elle joue, animée de cette toute-puissance que seuls les enfants possèdent.
Commenter  J’apprécie          180
L’érotisme habillait tout. Il masquait la platitude, la vanité des choses. Il donnait du relief à ses après-midi de lycéenne, aux goûters d’anniversaire et même aux réunions de famille, où il se trouve toujours un vieil oncle pour vous reluquer les seins. Cette quête abolissait toutes les règles, tous les codes. Elle rendait impossible les amitiés, les ambitions, les emplois du temps.
Commenter  J’apprécie          180
Si les membres du Rotary insistèrent, s'ils se montrèrent si bienveillants, si attentionnés à l'égard d'Amine, c'est aussi parce qu'il était marocain et que le club voulait prouver, en intégrant des Arabes parmi ses membres, que le temps de la colonisation, le temps des vies parallèles, était terminé.
Commenter  J’apprécie          170
Elle était jalouse de son mari. Le soir, elle l'attendait fébrilement derrière la porte. Elle passait une heure à se plaindre des cris des enfants, de la taille de l'appartement, de son absence de loisirs. Quand elle le laissait parler et qu'il racontait les séances d'enregistrement épiques d'un groupe de hip-hop, elle lui crachait: "tu as de la chance." Il répliquait: "Non, c'est toi qui as de la chance. Je voudrais tellement les voir grandir." A ce jeu-là, il n'y avait jamais de gagnant.
Commenter  J’apprécie          170
“Ici, c’est comme ça”. Cette phrase, elle l’entendrait souvent. À cet instant précis, elle comprit qu’elle était une étrangère, une femme, une épouse, un être à la merci des autres. Amine était sur son territoire à présent, c’était lui qui expliquait les règles, qui disait la marche à suivre, qui traçait les frontières de la pudeur, de la honte et de la bienséance.
Commenter  J’apprécie          170
Mouilala vouait au sultan une touchante déférence. Comme les autres femmes, elle montait la nuit sur la terrasse pour voir le visage du souverain dans la lune. Elle n'avait pas apprécié que Mathilde se mette à rire quand elle avait pleuré à cause de l'exil de Sidna Mohammed chez la Madame Gascar.
Commenter  J’apprécie          170
Aïcha connaissait ces femmes aux visages bleus,. Elle en avait vu souvent, des mères aux yeux mi-clos, à la joue violette, des mères aux lèvres fendues. A l'époque, elle croyait même que c'était pour cela qu'on avait inventé le maquillage. Pour masquer les coups des hommes.
Commenter  J’apprécie          170



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Leïla Slimani Voir plus

Quiz Voir plus

Le pays des autres

De quelle région est originaire Mathilde ?

La Lorraine
La Bretagne
L'Alsace
l'Aquitaine

5 questions
61 lecteurs ont répondu
Thème : Le Pays des autres de Leïla SlimaniCréer un quiz sur cet auteur

{* *}