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Citations de Leïla Slimani (2064)


Louise regarde la vitre, sa montre, la rue, le comptoir sur lequel le patron s'appuie. Elle se ronge les ongles, sourit puis donc regard devient vague, absent. Elle voudrait occuper ses mains à quelque chose, tendre son esprit tout entier vers une seule pensée, mais elle n'est que débris de verre, son âme est lestée de cailloux.
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Elle a toujours refusé l’idée que ses enfants puissent être une entrave à sa réussite, à sa liberté. Comme une ancre qui entraîne vers le fond, qui tire le visage du noyé dans la boue. Cette prise de conscience l’a plongé au début dans une profonde tristesse. Elle trouvait cela injuste, terriblement frustrant. Elle s’était rendu compte qu’elle ne pourrait plus jamais vivre sans avoir le sentiment d’être incomplète, de faire mal les choses, de sacrifier un pan de sa vie au profit de l’autre.
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Elle voulait cette piscine en compensation de ses sacrifices, de sa solitude, de sa jeunesse perdue.
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Mathilde comprit alors que toute sa vie, son mari aurait peur qu'on lui arrache ce qu'il avait conquis. Pour lui, tout bonheur était insupportable puisqu'il l'avait volé aux autres.
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Il ne le confia à personne, mais s'il avait accepté de faire construire la piscine, c'était pour Aïcha. Pour qu'elle soit fière de lui, pour qu'elle n'ait pas honte, elle, la future médecin, d'inviter un jour ses amis à la ferme. Il ne se vantait pas de la réussite de sa fille. A Mathilde, il disait sèchement : "Tu ne mesures pas la jalousie des gens. Ils seraient prêts à devenir borgnes pour qu'on soit aveugles." Par sa fille, par son enfant, il devenait quelqu'un d'autre. Elle l'élevait, elle l'arrachait à la misère et à la médiocrité. Quand il pensait à elle, une intense émotion l'étreignait comme une brûlure dans le torse qui l'obligeait à ouvrir grande la bouche et à prendre une inspiration. Aïcha était la première de cette famille à faire des études.
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Sans doute est-ce un fantasme de romancier. Nous faisons tous des rêves de cloître, de chambre à soi où nous serions à la fois les captifs et les geôliers.
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Cela peut sembler paradoxal mais il me semble qu’on ne peut habiter un lieu que si on a la possibilité de le quitter, d’en partir. Habiter c’est le contraire de l’emprisonnement, de l’immobilité forcée, de l’inertie. « Si tu ne peux pas quitter l’endroit où tu te trouves, c’est que tu es du côté des faibles », écrit Fatima Mernissi. Lorsqu’elle écrit cette phrase, elle pense bien sûr aux femmes enfermées dans les harems mais aussi, j’en suis certaine, à ces jeunes Marocains qui, depuis les hauteurs de Tanger ou sur les rivages de l’Atlantique, rêvent d’un ailleurs et sont prêts à mourir pour y arriver. Être dominé, être du côté des faibles, c’est être contraint à l’immobilité. Ne pas pouvoir sortir de son quartier, de sa condition sociale, de son pays. (…)
Depuis, cette injustice fondamentale m’obsède : des millions d’hommes sont condamnés à ne pas pouvoir sortir de chez eux. Ils sont interdits de voyage, empêchés, enfermés. C’est ainsi qu’est structuré notre monde contemporain : sur l’inégal accès à la mobilité et à la circulation.
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Venise est une ville sans terre. Sans terroir et sans autre richesse que le sel. On se nourrit du dehors, de l'extérieur, de l'étranger. J'y vois le symbole de ma propre histoire. Peut-être est-ce là que je vis, dans un lieu qui ressemble à cette presqu'île pointue. A une douane qui est par essence un lieu paradoxal. Je n'ai ni tout à fait quitté mon lieu de départ ni tout à fait habité mon lieu d'arrivée. Je suis en transit. Je vis dans un entremonde. (p. 128)
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Elles voulaient toujours savoir ce qu'il y avait à l'intérieur des choses : dans le ventre des animaux, dans les tiges des fleurs, dans les troncs des arbres. Elles voulaient éventrer le monde dans l'espoir de percer son mystère.
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Leïla Slimani
Mais c'est vrai que la violence est quelque chose que j'essai de comprendre, parce qu'elle est toujours aveugle. La violence surgit quand il n'y a plus de mots. Pour un écrivain, c'est fascinant, parce que c'est un aveu d'échec de la parole.
Dans le supplément "MAD" du journal "Le Soir" des 29/02 et 01/03/2020
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Myriam en a parlé à Paul et elle a été déçue de sa réaction. Il a haussé les épaules. « Mais je ne savais pas que tu avais envie de travailler. » Ça l’a mise terriblement en colère, plus qu’elle n’aurait dû. La conversation s ’est vite envenimée. Elle l’a traité d’égoïste, il a qualifié son comportement d’inconséquent. « Tu vas travailler, je veux bien mais comment on fait pour les enfants?» Il ricanait, tournant d’un coup en ridicule ses ambitions à elle, lui donnant encore plus l’impression qu’elle était bel et bien enfermée dans cet appartement.

Une fois calmés, ils ont patiemment étudié les options. On était fin janvier : ce n’était même pas la peine d’espérer trouver une place dans une crèche ou une halte-garderie.

Ils ne connaissaient personne à la mairie. Et si elle se remettait à travailler, ils seraient dans la tranche de salaire la plus vicieuse: trop riches pour accéder en urgence à une aide et trop pauvres pour que l’embauche d’une nounou ne représente pas un sacrifice. C’est finalement la solution qu’ils ont choisie, après que Paul a affirmé: «En comptant les heures supplémentaires, la nounou et toi vous gagnerez à peu près la même chose. Mais enfin, si tu penses que ça peut t’épanouir... » Elle a gardé de cet échange un goût amer. Elle en a voulu à Paul.
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Il sait combien Louise leur est nécessaire mais il ne la supporte plus. Avec son physique de poupée, sa tête à claques, elle l'irrite, elle l'énerve. "Elle est si parfaite, si délicate, que j'en ressens parfois une forme d'écoeurement", a-t-il un jour avoué à Myriam. Il a horreur de sa silhouette de fillette, de cette façon qu'elle a de disséquer chaque geste des enfants. Il méprise ses sombres théories sur l'éducation et ses méthodes de grand-mère. Il moque les photos qu'elle s'est mise à leur envoyer sur leur téléphone portable, dix fois par jour, sur lesquelles les enfants soulèvent leur assiette vide et où elle comment: "j'ai tout mangé."
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Le destin est vicieux comme un reptile, il s'arrange toujours pour vous pousser du mauvais côté de la rampe.
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Son visage est comme une mer paisible, dont personne ne pourrait soupçonner les abysses.
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Myriam ... s'est plainte de ne pas voir ses enfants, de souffrir de cette existence effrénée ou personne ne lui faisait de cadeau ... Sylvie lui a reproché de consacrer trop de temps à son métier ... elle l'a traitée d'irresponsable, d'égoïste ... c'était sa faute ... si ses enfants étaient si insupportable, tyranniques, capricieux.
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On lui a toujours dit que les enfants n'étaient qu'un bonheur éphémère, une vision furtive, une impatience. Une éternelle métamorphose. Des visages ronds qui s'imprègnent de gravité sans qu'on s'en soit rendu compte. Alors toutes les fois qu'elle en a l'occasion, c'est derrière l'écran de son iPhone qu'elle regarde ses enfants qui sont, pour elle, le plus beau paysage du monde.
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Il n'est pas allé à sa rencontre. Il voulait lui laisser encore quelques minutes. encore quelques secondes avant de l'abandonner dans une nuit interminable.
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Elle comprit très vite que le désir n’avait pas d’importance. Elle n’avait pas envie des hommes qu’elle approchait. Ce n’était pas à la chair qu’elle aspirait, mais à la situation. Être prise. Observer le masque des hommes qui jouissent. Se remplir. Goûter une salive. Mimer l’orgasme épileptique, la jouissance lascive, le plaisir animal.
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Elle ne sait pas ce qui fait plaisir à Richard. Ce qui lui fait du bien. Elle ne l’a jamais su. Leurs étreintes ignorent toute subtilité. Les années n’ont pas amené plus de complicité, elles n’ont pas émoussé la pudeur. Les gestes sont précis, mécaniques. Droit au but. Elle n’ose pas prendre son temps. Elle n’ose pas demander. Comme si la frustration risquait d’être si violente qu’elle pourrait l’étrangler.
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Ecrire a été pour moi une entreprise de réparation. Réparation intime, liée à l'injustice dont a été victime mon père. Je voulais réparer toutes les infamies : celles liées à ma famille mais aussi à mon peuple et à mon sexe.
Réparation aussi de mon sentiment de n'appartenir à rien, de ne parler pour personne, de vivre dans un non-lieu
J'ai pu penser que l'écriture me procurerait une identité stable, qu'elle me permettrait en tout cas de m'inventer, de me définir hors du regard des autres. Mais j'ai compris que ce fantasme était une illusion.
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