Citations de Lieve Joris (50)
Elle souffrait de troubles de l’audition et de l’élocution, et pas qu’un peu. Les mots sortaient difficilement de sa bouche, elle avait au fil des ans développé son propre langage. Fonny finissait par parler de la même manière avec elle, conjuguant à peine ses verbes, laissant tomber des adjectifs, de sorte que les phrases étaient fichées en terre tels des poteaux nus.
Il est intelligent, il a fait du grec et du latin à l’école, il suit les infos, aime Willem Elsschot et Jacques Brel et sait tout sur les Première et Deuxième Guerres mondiales mais quand il s’agit de drogue et de l’état de son fils aîné, il n’est pas malin.
Celui qui n'a pas d'enfant peut au moins laisser des mots.
Chez moi, on me demande parfois si je ne me sens pas seule ou si je n’ai pas peur au cours de mes voyages. Comment éprouver un sentiment de solitude ou de crainte dans un pays où, au bout de trois jours déjà, quelqu’un qui a pris la peine de se souvenir de votre nom vous repère dans la foule ?
J’avais l’habitude des choses étranges que voulaient savoir les vieux hommes des hauts plateaux, mais les questions de Mbiyo Mbiyo dépassaient tout. Comment se faisait-il qu’il y eût des Blancs et des Noirs ? Y avait-il des Belges qui pouvaient tuer une bête sauvage avec une lance ? Quelles tribus vivaient en Belgique ? Avions nous aussi des Hutu et des Tutsi ? Et en Asie, quelles tribus habitaient là ? Combien y avait-il de pays au monde ? L’Océanie était-elle à l’origine attachée à l’Union soviétique ?
Mbiyo Mbiyo lisait les réponses sur mes lèvres, comme s’il ne se fiait pas totalement aux traductions de Kizeze. Il n’avait pas terminé l’école primaire ; remâchait-il ces questions depuis lors ? Une encyclopédie pour enfants, voilà qui serait utile dans cet environnement. Mais dans ses questions filtrait aussi, de la même manière que dans celles des vieux hommes sur la colline de Bijombo, une certaine ironie – comme s’il se payait ma tête.
Il se réveilla en sursaut, chercha à tâtons le corps chaud de sa femme, comprit ou il était et lutta contre l'angoisse qui refaisait surface. La violence était cyclique- il n'avait jamais rien connu d'autre. Il y avait toujours eu la guerre.
Repartir au front. Toujours la guerre. Il aurait préféré rentrer dans le ventre de sa mère. Mais il n'avait pas le choix- depuis longtemps, il n'était plus un homme libre.
J’ai eu la chance d’avoir des gens comme Kapuscinski et Naipaul qui m’ont précédée et qui montrent le chemin avec une torche bien forte.
En trentrant du travail, Mme Taher raconte invariablement des histoires sur le vent poussiéreux qui souffle dans les rues du Caire, ou sur le trafic intense qui l'a obligée à attendre au moins dix minutes avant de pouvoir traverser.
Il se réveilla en sursaut, chercha à tâtons le corps chaud de sa femme, comprit où il était et lutta contre l’angoisse qui refaisait surface. La violence était cyclique – il n’avait jamais rien connu d’autre. Il y avait toujours eu la guerre.
Dans un environnement où tout a été détruit pendant la guerre, les gens veulent reconstruire quelque chose qui leur rappelle le passé. Ils veulent que ça ait l'air vieux.
Les morts sont omniprésents ici. ça commence dans la cour de mon immeuble et rayonne dans toute la ville.
Le reste de la ville flotte autour de moi comme un manteau trop ample.
Jadis, Varsovie était située à l'Ouest du royaume de Pologne, entre-temps le pays a été tellement grignoté que Varsovie se trouve à l'Est. C'est une ville ressuscitée de ses cendres, un corps couvert de cicatrices.
Je voulais savoir comment on vivait dans des régions dont personne ne parlait. Je voulais voir quelque chose d'arbitraire, de fortuit.
Comme si souvent dans ces contrées, il fallait s'arrêter pour comprendre ce qui se tramait autour de soi. C'était un monde d'hommes où l'information était enregistrée de manière silencieuse et se transmettait par un regard en coin, un sourire mystérieux ou un seul mot.
Au bar Amicale à la Tshopo, à trois heures du matin, un soldat a lancé une grenade qui a tué ledit soldat et deux civils? Le soldat était ivre mort, et cherchait la gabarre avec des citoyens paisibles qui fêtaient l'anniversaire d'un abbé. Les corps des civils reposent à la mairie de la Tshopo. Il s'est avéré que la dispute concernait une femme que le soldat et l'abbé convoitaient tous les deux. 3que fait un abbé à trois heures du matin dans un bar, dit Adèle, indignée, et avec une femme par-dessus le marché!"