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Citations de Mahi Binebine (93)


Pour Ne Pas Oublier
       
J'ai appris que la guerre contient tous les éléments d'une spirale qui se nourrit d'elle-même. Voilà pourquoi la violence est si insatiable et la paix si éphémère. ...
Laborieuse, minutieuse, attentive, quotidienne, vigilante. ... Je persiste à croire que la paix ne s'obtient que si l'on est persuadé qu'elle n'est pas dans notre naturel, mais dans notre désir, un désir construit.
...
Il faut que les pays s'évertuent à promouvoir de nouvelles ententes, de nouvelles discussions, une nouvelle hiérarchie de valeurs, qu'ils exigent en permanence et activement des éclaircissements.
       
– Lídia Jorge
(Traduit du portuguais par Geneviève Leibrich)
       
*
       
L'Immortel
       
Je me nomme la Paix. Je suis immortel puisque je suis sans mémoire. J'ai traversé toute l'histoire, seul, fuyant d'une contrée vers une autre. Cependant, je ne me souviens de rien de ma longue vie. ...
Ne craignez rien ! Mes attributs sont humains : j'ai une date de naissance, mais hélas oubliée, je porte un nom propre, j'aime la vie... j'habite sur la terre depuis la nuit des temps. C'est moi l'inventeur de la flûte de roseau, j'ai appris aux premiers hommes l'art de la semence. C'est moi le créateur de l'amitié entre le cheval, le chameau et l'homme. C'est moi qui ai martelé les premiers métaux bien avant Vulcain, créant ainsi la charrue et le pendentif. J'ai sculpté la pierre et fait cuire la brique, j'ai dessiné la première lettre sur l'argile, je suis toujours vivant et je ne mourrai pas.
Je suis de la dynastie des immortels comme les arbres, les nuages et les cieux. Je suis un immortel sans mémoire, car la mémoire est donnée aux hommes éphémères. Je suis parmi vous, je vous suis antérieur, et ceux que je rencontre me racontent mes périples. La mémoire de la veille n'est pas effacée encore, et le jardinier qui m'accompagne m'en rapporte les détails. ... Et je ne veux plus quitter ce jardin. Les bûchers se préparent de toute part. Savez-vous que le feu annonce la fin de mon immortalité ? Moi qui ai traversé le temps en fuyant les brasiers.
Je ne suis pas lâche, mais comme les hommes j'aime la vie. Je veux me reposer en aimant la fleur, dans un grand jardin comme la terre.
       
– Jabbar Yassin Hussin
       
Extraits, pp. 46-9 / 40-5
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« Des artistes, disais-tu, les gens ne retiennent que les paillettes, la bonne humeur, la poésie, l’ivresse. Ils ne voient rien des coulisses hantées par le doute, la solitude, l’angoisse, la pitance incertaine, les chutes inévitables quand les muses traînent la patte… » Et tu ajoutais, péremptoire : « Les saltimbanques ne meurent jamais parce que nous avons tous besoin de rêves… »
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Mais s'il concevait le moindre soupçon de vol, le coupable était perdu. On l'entraînait la nuit vers l'esplanade des puisards et, tandis que deux gaillards le maîtrisaient, un troisième lui ôtait son pantalon en un tournemain. C'était toujours Omar qui, dégainant son sexe raide, enfourchait en, premier le malheureux. Venait ensuite le tour du reste de la bande chauffée à blanc, rugissant face au gamin qui avalait la poussière, nu, à demi conscient. Puis, on ébruitait l'affaire pour que la victime disparaisse à jamais de la Grand-Place.
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Le temps passe plus vite lorsqu'on a des repères.Les repères de Dada étaient ses lunes. La nuit l'esclave rêvait les yeux grands ouverts.
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Ainsi est faite la mémoire des hommes : des tiroirs qui s’ouvrent et qui se referment par un mot, un parfum, une couleur, un frisson.
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"- Dites-moi, maître, comment un homme de votre stature dont la culture islamique est connue de tous peut-il boire du vin? Au jour du jugement dernier, ce chapelet que vous égrenez témoignera devant Dieu que vous avez bu du vin!
Le poète éleva son chapelet sans quitter des yeux l'importun et plongea lentement les perles dans le verre. Nous le regardâmes, interloqués.
- Lui témoignera que j'ai bu du vin, et moi je témoignerai qu'il a nagé dedans!"
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Ghizlaine était de plus en plus belle. Je regardais ses seins que ses larges tuniques ne parvenaient plus à dissimuler. Deux poires, presque mûres, surmontées de raisins secs qui piquaient la toile brodée, et qui paraissaient frustrées de ne pouvoir s'épanouir au grand jour. Je les devinais malheureuses, ces poires, et rêvais de les consoler de mille caresses, de mordre dans leur chair fondante, d'y enfouir mon nez et ma raison et de m'y oublier.
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En enfilant le gilet bardé d'explosifs j'étais déjà poussière. Cela me procurait une sensation étrange. Je faisais corps avec la terre, le ciel et les étoiles qui mitraillaient la nuit noire. Les paroles du chaikh scintillaient dans mon esprit et je me sentais invincible. Non, on ne peut rien contre un homme qui veut mourir. Et moi je le voulais ardemment. Nabil, Azzi, Khalil, Fouad, Hamid voulaient aussi mourir. En vivant à Sidi Moumen, cernés de macchabées, d'éclopes et de rampants, nous étions en réalité, presque morts. Alors un peu plus ou un peu moins, quelle importance!
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Du fin fond de ma solitude, quand les souvenirs de mon naufrage m'assaillent et me tourmentent,quand le poids de mes fautes devient trop lourd à porter et que mon esprit, déjà vieux et fatigué, se met à tournoyer tel un manège infernal,quand les pleurs de Yemma tombent sur moi comme une averse de feu et que la douleur de Ghizlane dilue dans mon âme son funeste poison, je m'en vais rôder dans le ciel de mon enfance.
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Ah ! La disgrâce. Voilà un mot que seuls peuvent concevoir pleinement ceux qui ont mangé dans la main d'un tyran.(...) Limoger un proche est plus charitable que de le suspendre pour une durée indéterminée, c'est-à-dire une soirée, une semaine, un mois, un an... ou la vie entière ; l'abandonner dans le doute ; laisser l'incertitude lui ronger cœur et entrailles est la pire des sanctions ; une dent gâtée qu'on ne soigne pas, qu'on n'arrache pas non plus, qui vous empêche de dormir et dont le harcèlement incessant vous rend fou.
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Voyez, le but suprême de ma drôle d'existence n'est rien d'autre que de rendre heureux le roi. Je ne vis que pour cela. Et rien ne me procure autant de joie, autant de satisfaction que le visage illuminé de Sidi.
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En fait, les gens sont assez partagés à mon sujet. Les vieux, par exemple, pensent que ma folie - assez douce, à dire vrai - est due exclusivement au printemps. Ou plutôt aux petites graines du printemps que tout un chacun respire dans nos parages. Ces graines là, affirment-ils, ont dû s'incruster à tout jamais dans ma tête. Pire : elles ont sans doute germé dans mon esprit et envahi peu à peu jusqu'aux derniers recoins de mon être. Je suis donc devenu à leurs yeux une sorte de compromis entre humain et plante. Dans un sens, ils n'ont pas tort, vu que ma vie à Kétama se réduit à sa plus simple expression : je végéte de l'aube au couchant entre le café Atlas et mon lit.
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Quand l’œil ne voit pas, le cœur ne souffre pas. Savoir peut être la source de bien des maux.
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L'écoulement du temps est ce qu'il y a de plus démocratique dans l'univers... de plus juste. Pauvres et riches vieillissent pareil.
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Cela fait des années que je lutte avec les mots. Ils ne m’obéissent plus, ou seulement à moitié. Ils se défendent, déjouent mes ruses, m’appâtent à leur tour, m’entrainent sur des ornières incertaines. Mais je continue à écrire. Parce que je n’ai pas le choix. Parce que je mourrais, autrement. Je garde mes stylos à billes vides comme des reliques de mes soupirs.
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Dès ma tendre enfance, j’avais su que j’étais né au mauvais moment, au mauvais endroit, mais que je n’étais pas voué à la misère ni à l’ignorance. J’étais un étranger parmi les miens, une âme oubliée des cieux égarée dans la boue.
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Dieu est beau et Il aime la beauté. C’est pourquoi Il a mobilisé une nuée d’anges pour veiller sur Ses enfants préférés : les créateurs. S’Il lui arrive de les étrangler ou de les nourrir de vaches enragées et de tourments, il est rare qu’Il les tue. Les artistes ont beau cracher au ciel, pester et blasphémer, ils ignorent que ces épreuves-là sont en réalité un cadeau, des outils indispensables à l’élaboration de leur œuvre. Qui peut raconter la faim mieux qu’un indigent, le désespoir mieux qu’un homme au bord du suicide ? Comment parler d’amour si l’on n’a pas ressenti au creux de sa poitrine le feu de la rupture ? Je sais cela pour avoir longtemps avancé en eaux troubles. Pour m’être battu à armes inégales dans un monde d’hommes, fait par et pour les hommes. Je n’ai jamais baissé la garde, ma fille. J’ai rendu coup pour coup, j’ai lutté bec et ongles pour exercer dignement mon métier. La liberté ne se donne pas, elle s’arrache.
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La joie est devenue mon métier, la légèreté mon royaume .
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Les saltimbanques ne meurent jamais parce que nous avons tous besoin de rêves.
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Je m’appelle Hayat. En arabe, cela signifie « la vie ». Voyez-vous ça ! J’étais « la vie » à moi seule, avec sa fraîcheur, sa lumière et ses promesses. En vérité, les enfants de la terre devraient tous porter le même prénom que moi. Ceci pour rappeler aux adultes que le dernier des marmots qui court pieds nus dans la rue du Pardon est un monde à lui seul. Un monde d’une richesse infinie, complexe, imprévisible, inconstant parfois, mais d’une extrême fragilité.J’ai dû naître sans cheveux car je n’ai pas le souvenir de blessures anciennes. Mère avait dû aimer le bout de pâte blanche qu’elle venait d’enfanter. Pour m’avoir baptisée de la sorte, elle avait dû nourrir de grandes ambitions à mon endroit. La drôle de créature qui gigotait sans cesse portera un prénom qui la dépasse. Tu t’appelleras la vie, mon enfant. Tu seras l’ombre et la lumière, l’eau, le feu, le ciel criblé d’étoiles, la lune muette et Sa Majesté le Soleil. Tu seras le fruit mûr, le sourire de l’ange, la brise des soirs d’été et les saisons capricieuses. Tu seras le fluide qui naît de l’étreinte des amants, la caresse du papillon à l’orée d’un baiser, tu seras le parfum entêtant des belles-de-nuit devenues insomniaques, tu seras, tu seras, tu seras…
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