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Citations de Marcel Conche (142)


Les oiseaux autour de la prison, les nuages qui passent, les plantes qui germent, vivent leur vie d'oiseaux, de météores ou de plantes, ne savent rien de la guerre, des querelles politiques, de la lutte révolutionnaire, affirment diversement la vie. "Il y a tant d'insouciance, une telle indifférence dans ces nuages qui s'en vont au loin" : l'aventure humaine, dans laquelle Rosa est, de toutes ses forces engagée, n'a, d'un point de vue cosmique, qu'une bien faible importance et, pour beaucoup d'êtres vivants, n'en a aucune. "Combien de royaumes nous ignorent !", s'exclamait Pascal. Pensée "décompressante", si l'on ose dire : pensée apaisante.
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Il est bien clair que la définition 6 du premier livre de l’Éthique : "J'entends par Dieu [c'est-à-dire la Nature] un être absolument infini, c'est-à-dire une substance constituée par une infinité d'attributs dont chacun exprime une essence éternelle et infinie", que cette définition, dis-je, quel que soit l'habillage scolastique, traduit une expérience foncière et irrécusable, quasi mystique, de la Nature comme infinie, "infiniment finie". L'expérience de la Nature chez Pascal, comme "sphère dont le centre est partout, la circonférence nulle part", c'est-à-dire comme ce qui défie toute géométrie, est une expérience métaphysique [...]
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Pour trouver l'amour, il faut penser à la jeune fille, non à l'amour. Ce qui, comme Bastien, en présence de toute jeune fille nouvelle, se demandent : « est-ce celle-ci que j'aimerai?», ou qui multiplient leurs expériences en vue de l'amour, n'aiment jamais. C'est qu'une telle attitude implique un « vouloir-aimer » qui paralyse la naissance de l'amour. Car il est de la nature de l'amour de surprendre la volonté lorsque celle-ci s'y attend le moins.
« Je vais aimer celle-ci » : cela même fait fuir l'amour.
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Sans amour, la vie est quelque chose à côté de quoi nous passons.
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Le meilleur moyen de comprendre une personne et de se demander qui elle aime - mais c'est ce qui, généralement, est profondément caché.
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Un véritable ami est un devin, car il entend non seulement nos raisons, mais les raisons de nos raisons.
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Aimer, c'est vouloir créer ensemble. L'amour implique donc un renoncement à la volonté de puissance, laquelle a un caractère strictement individuel, étant volonté de création solitaire.
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L'amour n'est pas un sentiment seulement, mais une entreprise : il nous engage dans des actions diverses, souvent irrationnelles, pénibles et complexes.
Les tristesses de la vie peuvent nous mettre en un tel état de préoccupations, d'énervement, que l'amour ne trouve plus un sol où se développer. Le désespoir nous place en deça de l'amour.
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Sartre : L'expérience de l'amour est un échec ; il veut rendre vide, creuse, la riche expérience de l'amour. Il ne semble pas connaître la grande joie d'aider l'autre à se révéler à lui-même, à grandir en force et en assurance, à se créer.
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"Le non-agir (wu wei) taoïste signifie la conquête d'une liberté autre que celle qui se définit comme «libre arbitre». Un étudiant en médecine hésite entre deux spécialités: rhumatologie ou dermatologie. Il examine le pour et le contre dans l'un et l'autre cas. Au reste, c'est lui-même qui décide d'accorder du poids à tel argument plutôt qu'à tel autre. Enfin, il «tranche» et choisit. Il a fait usage de son libre arbitre. Mais le choix n'est pas création. Les deux spécialités médicales lui sont proposées par la société. Si elles existent, il n'y est pour rien.

Or il existe une autre forme d'activité et de liberté que celles impliquées par l'action, laquelle suppose le désir et la volonté d'obtenir un résultat pensé à l'avance. C'est une activité et une liberté où l'on ne choisit pas entre des possibles déjà là, mais où l'on invente les possibilités elles-mêmes. C'est la liberté de l'artiste, du poète, du philosophe créateur. Avant que Rimbaud ne l'ait engendré, le Bateau ivre était absolument inanticipable. Or, dans cette oeuvre, le poète s'est exprimé dans son essence la plus intime, la plus irréductiblement personnelle, la moins socialisée, son tao. Plus exactement, il a laissé s'exprimer en lui la spontanéité du tao (ziran: le «spontané»). Pour cela, il a dû laisser de côté la société, ou l'écarter, tout comme un rebelle, pour donner libre cours en lui à l'élan créateur, à l'inventivité essentielle. Le taoïsme ne supprime pas le libre arbitre; il le laisse à la masse des gens ordinaires, à ceux qui ont besoin que la société leur propose des voies, qui ne savent pas trouver par eux-mêmes la Voie (Tao), qui donc ne sont pas capables d'épouser le mouvement créateur de la Vie, et de se faire eux-mêmes créateurs.
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Question de Dina Dreyfus à Canguilhem :
. – Admettez-vous ou non qu'il y a une vérité du discours
philosophique comme tel, c'est-à-dire qu'il puisse être dit vrai ou faux ? ou qu'on puisse dire qu'un système philosophique est vrai ou faux ?


Réponse de Canguilhem :
. – Personnellement je ne l'admets pas.

« Je ne connais pas de philosophie fausse, et par conséquent, je n'en connais pas de vraie. »

p.15
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Épicure pensait qu'en son temps, l'état de civilisation était suffisamment avancé afin que l'on ait tout ce qui est nécessaire pour être heureux, et donc que l'on pouvait, chacun pour soi, arrêter la marche du progrès. Or ce qui était vrai, à l'époque d'Épicure l'est encore plus aujourd'hui où, dans nos pays, la plupart des gens ont ce qu'il faut pour être heureux - s'ils savent vivre en philosophe.
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Ce qui est bref dans le temps immense et infini est long dans le temps rétréci sur le fond duquel se temporalise le Dasein commun.
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Elle est retrouvée.
Quoi ? – L’Eternité.
C’est la mer allée
Avec le soleil.

Dire que l’Eternité est « retrouvée » signifie un retour en arrière : en un moment où elle n’avait pas encore été perdue – le monde grec où, dans l’immanence, l’Eternité est au plus près, puisque la Nature est ce qui est toujours là, offrant sa toute présence sur laquelle, selon l’apparence, glisse le Temps. Platon, qui a scindé le monde, séparant l’intelligible du sensible, est sans doute, comme le veut Nietzsche, le moins grec des Grecs. Pour ceux-ci, des Antésocratiques à Epicure et aux Stoïciens, il n’y a rien d’autre que la Nature. Certes, le Premier Moteur d’Aristote est, peut-on dire, sur-naturel, mais il est posé par la pensée pour rendre compte du monde, de sorte que la théologie est comme le « couronnement de la philosophie de la nature ». Le Dieu judéo-chrétien, qui a fait le Ciel et la Terre, transcende la Nature et l’histoire : « Eux périssent, Toi tu restes […] Toi, le même, sans fin sont tes années » (Psaume 102, 27-28). L’Eternité était donnée avec la Nature. Elle devient objet de foi et d’espérance – dès lors que le Christ est le « Seigneur » de la vie éternelle. Mais le poète retrouve l’Eternité en redécouvrant la Nature – qui ne se réduit pas au monde. Le monde peut être pensé comme périssable, non la Nature. En mai 1873, Rimbaud s’adonne – il l’écrit à Ernest Delahaye – « tout entier » à cette « contemplation » retrouvée de la Nature – qui est plus que contemplation, mais abandon, identification : « Je suis à toi, o Nature, o ma mère ! » Mais l’Eternité ainsi offerte, toujours là pour chacun (cf le « là » des vers 11 et 17), n’a plus rien de l’Eternité immuable : elle est mouvement éternel. Le contraire le l’immuable est immuablement là. Qu’est-ce, en effet , que la Nature ? On n’a d’elle que son aspect, son visage ; mais la partie vaut pour le Tout, et l’on peut dire : « C’est la mer allée avec le soleil. » La mer, qui change sans cesse, fait équipe avec le soleil, qui ne s’arrête pas une seule minute. La mer qui est eau, le soleil qui est feu sont pourtant adversaires, sont des contraires. Les contraires, quoique adverses, sont sous le même joug : Héraclite n’a-t-il pas reconnu l’unité et l’indissociabilité des contraires comme constitutives de l’ordre naturel des choses ? N’a-t-il pas vu dans l’opposition, dans ce que l’on nommera le « moment dialectique », la clé du dynamisme universel ? L’Eternité surnaturelle, promise et espérée, était vie – vie éternelle, excluant la mort. L’Eternité retrouvée est vie mais, pour les vivants, vie mortelle : vie sous le signe du temps, de la précarité, de la mort. La vie se perpétue, certes, mais seulement parce que, comme le dit Héraclite, il y a, indéfiniment, des « destins de mort à naître » (fr. 20 DK). Telle est la Vérité. Le Poète est le gardien de cette Vérité : il la recueille dans ses vers.
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J'aime dialoguer avec les Grecs et ce dialogue est une part essentielle de ma vie. J'ai parfois l'impression que mon bureau de la Maisonneuve, que je trouve pourtant trop petit pour y parler avec un ami, est peuplé de Grecs : Héraclite, Parménide, Anaximandre, Epicure, sont mes visiteurs permanents. Avec eux, ce qui est présent, c'est la Nature. C'est elle qu'ils m'aident à penser, grâce à un étonnement initial, une naïveté première ; non à partir de mots conceptuels aux significations réduites par les définitions, mais des mots encore vivants du langage mi-commun, mi-poétique. La Nature est le Poète premier, ai-je souvent dit, et la philosophie a sa source dans la poésie
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L’attention est sélective ; elle méconnaît volontiers ce qui gêne, et qui pourtant, quoique méconnu, n’est pas sans effet sur nos sentiments et nos pensées.
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L’esprit croit toujours, par son habileté et par ses raisonnements, faire faire au cœur ce qu’il veut, mais il se trompe, il en est la dupe, c’est toujours le cœur qui fait agir l’esprit ; l’on suit tous ses mouvements, malgré qu’on en ait, et l’on les suit même sans croire les suivre.
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J’aime être aimé, mais au sens large, où l’amour est sympathie, affection, amitié, dévouement, gentillesse, plutôt qu’au sens étroit, où il devient passionnel, exigeant, possessif. L’amour large vous met à l’aise : on est compris, accepté tel que l’on est, on donne ce que l’on peut, pas plus, on est bien. L’amour étroit vous met mal à l’aise : on vous demande trop, on vous croit un dieu ou je ne sais quoi, on n’est pas soi, on est un autre. L’amour large est clairvoyant — la haine aussi, mais alors que la haine vous repousse parce qu’elle vous a percé à jour et vous comprend, l’amour vous accueille, vous fait fête, précisément parce qu’il vous comprend.
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Le seul bonheur que j’aime et approuve, qui me laisse en paix avec ma conscience non pas morale (ce n’est pas d’elle qu’il s’agit) mais destinale, est le bonheur de la pensée lorsqu’elle se rend justice à elle-même d’être vraie, et le bonheur actif de la génération des pensées. On sait que la femme peut donner un certain bonheur typique. Je m’en suis toujours défié, et bien que j’aie eu affaire, souventes fois, à la tentation de m’y oublier, moi et l’idéal du moi, dans une certaine immédiateté de douceur, je me suis toujours, à temps, ressaisi, ma conscience philosophique en appelant de moi à moi-même et reprenant le dessus.
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Je n’aime pas les bonheurs que me donnent la musique, la chanson, le cinéma, les romans, car j’y suis trop passif : ce n’est pas moi le créateur, je ne suis que celui qui reçoit. À voir le Parthénon, j’ai eu un bonheur que j’ai aimé, mais parce que j’y étais actif, les ruines sur l’Acropole n’étant que le prétexte à une évocation et invocation quasi mystiques. Bien que les bonheurs purement sensibles, sensoriels ou sensuels, m’aient — étant d’un naturel érotique — souvent tenté, je ne m’y suis guère abandonné, et seulement avec réticence, réserve, voire désaveu de conscience.
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