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Citations de Marcel Conche (142)


On ne peut décrire que le présent ou le passé, ce qui a lieu ou a eu lieu. Qu’en est-il donc de ma journée d’aujourd’hui ? N’ai-je pas vécu exactement à ma façon, sans contrainte, faisant de chaque heure un libre emploi ?
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Une description suppose des traits plus fins. Anticiper ce que sera, ou serait, une journée — qui se compose d’innombrables petits événements inanticipables — serait la vivre à l’avance. Mais on ne peut vivre à l’avance l’avenir : il faudrait qu’entre le présent et l’avenir aucun temps ne se fût écoulé.
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Je suis, et je me sens, philosophe français. Il faut, toutefois, préciser un peu. Il y a deux France, l’une du Nord, l’autre du Midi, l’une colonisatrice, l’autre colonisée. Le Limousin, berceau de la poésie courtoise, est ma patrie, et la langue limousine, langue par excellence de la poésie lyrique des troubadours, ma langue d’origine. Maternelle ? Non. À la maison, il ne fallait pas parler « en patois ». Il fallait dire « violette » et non « pimpanella », « pie » et non « agassa ».
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Chacun connaît la première des quatre antinomies de Kant, la thèse et l’antithèse. Il est clair qu’à l’âge de six ans je me prononçais nettement pour la thèse : « Le monde est limité dans l’espace. » La thèse, il est vrai, dit également que « le monde a un commencement dans le temps ».
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Car, « ce qui est normal pour l’homme, ai-je écrit dans mon texte » Devenir grec », ce n’est pas – pas simplement – de manger, de boire, de dormir, d’aimer, toutes choses que les bêtes font aussi, ce n’est pas vivre, mais c’est de ne pas vivre sans réfléchir, c’est-à-dire sans se demander ce qu’il fait au monde, ce qu’est le monde, ce que signifie la vie – bref, ce qui est normal pour l’homme, c’est de ne pas vivre sans philosopher ».
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Tout individu humain a vocation à devenir philosophe. Il y a pourtant, comme vous l’observez, bien peu de philosophe, l’homme, la plupart du temps, se laissant asservir aux valeurs de la collectivité : les succès de vanité, les situations de pouvoir, les récompenses d’honneur lui font oublier son essentielle vocation, s’oublier lui-même au bénéfice d’une image, d’un être-pour-autrui insubstantiel. Certes, je suis entré moi-même dans la société et le monde des intellectuels, m’y suis fait une place, mais je ne puis pas dire avoir jamais pris au sérieux les avantages de carrière ou d’honneur que l’on y gagne. Je me suis toujours senti un « homme sans qualités ».
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Un jeune homme de dix-huit ans est, en général, ce que j’appellerai un homme « collectif » : il porte la marque de son milieu et des idées de son milieu, des idées aussi, des habitudes et des goûts des jeunes de son âge, et puis des rencontres, des découvertes qu’il a pu faire, des aventures qu’il a eues. Je ne fus jamais un homme collectif. Je fus, dès le début – dès la petite enfance, je crois, où je jouais toujours seul, ma grand-mère craignant les « mauvaises fréquentations » - un être humain singulier, et ainsi je n’ai guère eu de peine, tant j’étais libre, à m’abstraire d’une société close et à faire le choix de la raison, c’est-à-dire de l’universel. [...] Or, jusqu'à lâge de dix-huit ans, j'ai vécu comme dans une bulle - la bulle familiale -, sans vrai contact avec l'extérieur et sans en recevoir de vraie influence. J'étais, en effet, sans ami, ni amis, n'avais pas voyagé,i pratiqués un sport : je n'étais jamais entré dans un musée, jamais allé au théâtre et seulement une fois et demi au cinéma ; je n'avais aucune culture musicale ni, en général, artistique.
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Car, sur les questions ultimes, il faut répondre par oui ou pas non.
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La philosophie ne suppose aucune aptitude particulière : elle ne suppose rien de plus que l' « intelligence générale » - laquelle, toutefois, admet des degrés. La raison est présente en chacun : elle n'est, en effet, que la capacité de poser la question "pourquoi?", ou d'y répondre. L'intelligence, qui n'est, elle, que la capacité d'user de la raison en vue de comprendre ou d'expliquer, est aussi présente en chacun, mais alors que la raison est universelle, l'intelligence comporte un élément de personnalité. Elle n'est ni universelle et impersonnelle comme la raison, ni particulière comme l'aptitude, mais bien singulière. L'individu lui-même se montre dans la manière qu'il a d'user de sa raison : dans le tour de son intelligence.
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Donner la vie et élever,
aider à vivre sans s’approprier,
œuvrer sans rien attendre,
guider sans dominer,
voilà la Vertu intime.
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J’aime ce silence de la Nature avec ses multiples bruits car il me met en difficulté avec moi-même et m’oblige à penser. Je crois qu’il n’y a qu’une Nature mais je ne crois pas que la Nature soit une. La Nature est la totalité des choses. La première création de la Nature, c’est l’univers : la Nature (infinie) se dégrade en univers (indéfini). Ensuite, dans l’univers se trouvent des mondes innombrables. Le hérisson vit dans son monde, l’abeille vit dans son monde, de même la fourmi, etc. Pourquoi « monde » ? Parce que l’abeille reçoit les impressions qui n’ont de signification que pour elle, des significations « abeille », mais elle ne reçoit pas les significations « fourmi ». Et toutes ces significations « abeille » forment pour l’abeille un réseau, une structure, donc un monde fini. Ces mondes sont dissemblables et incommunicables. Le hérisson n’a rien à dire à l’abeille et réciproquement. L’homme peut étudier le hérisson, mais ne peut pas se mettre à la place du hérisson pour vivre le monde en hérisson. Il ne peut pas atteindre le for intérieur du hérisson, qui est inatteignable par la connaissance puisque celle-ci ne saisit que l’objectivable. On peut comprendre comment fonctionne un hérisson mais on ne peut pas éprouver le sentiment de soi du hérisson, si tant est que le « soi » signifie quelque chose quand on parle d’un hérisson. Par conséquent, il n’y a pas d’unité entre ces mondes dissemblables. Il existe une infinité d’espèces et, donc, une infinité de mondes, sans unité de surplomb – cela Epicure l’avait bien vu. La Nature est le tout de cette infinité de mondes mais elle n’est pas comme un dieu qui voit tout, un principe totalisant. La Nature est une multiplicité inassemblable, un ensemble non unifiable, une totalité intotalisable.
Cependant, dans le silence de la Nature, je perçois non pas la multiplicité des mondes, mais la Nature comme une. C’est un problème de comprendre comment la Nature, malgré son infinie diversité, peut être toujours la même Nature. C’est ce problème philosophique que je ressens dans le silence de la Nature. Certes le ruisseau me dit : « Je suis le ruisseau » ; le vent me dit : « Je suis le vent ». Mais la Nature me dit : « Je suis tout cela mais je suis aussi la Nature, je suis ce qui fait qu’il y a tout cela, le vent, les fleurs, le ruisseau, l’abeille, etc. ». Quand j’écoute la Nature, je suis partagé entre le sentiment de la multiplicité et celui de l’unité fondamentale. Ma conception de la Nature, qui est dans l’infini et dans l’éternité, est une conception métaphysique, puisque la métaphysique est cette partie de la philosophie qui a affaire à la totalité de ce qui est. Le silence de la nature devient alors métaphysique parce qu’il amène dans mon esprit des idées. Si je suis dans la solitude profonde dans la Nature, si je tourne mes regards vers la profondeur illimitée du ciel, vers l’infini du ciel, je songe que nul savant, ni Einstein, ni ses successeurs, ne peut atteindre la totalité de la Nature. Un cosmologiste ne peut dire quel rapport il y a entre l’Univers du big-bang et la totalité de la Nature. Par conséquent, je peux continuer de m’appuyer sur mes évidences immédiates qui me disent que l’univers est infini (indéfini), que nous sommes environnés par l’infini. La clef de la sagesse est qu’il faut penser toute chose sur le fond de l’infini.
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Que de philosophes ont choisi de se laisser influencer par des livres qui leurs ont été nuisibles ! Je songe, par exemple, aux ravages que Heidegger a faits en France. Je ne nie pas, cependant, qu'il y ait un bon usage de Heidegger. Il y a aussi probablement un bon usage des plantes carnivores.
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Car autant le sacré, de par son essence numineuse, est de soi troublant, inquiétant, quoique fascinant, autant la religion est apaisante, calmante. Le sacré émeut, déconcerte, annihile la créature; la religion sauve l'individu de son néant, lui ôte l'inquiétude essentielle et, sous réserve de sa foi, de sa confiance, de sa bonne volonté, lui rend l'être et la paix en lui traçant un chemin à suivre pour aboutir au bonheur. La science moderne qui n'est plus assujettie à la philosophie, n'a pas en vue la vérité pour elle-même, mais comme moyen pour soumettre et dominer; elle est au service de la puissance. La religion n'a pas non plus en vue la vérité pour elle-même, mais comme moyen de salut. Seule la philosophie a en vue la vérité pour elle-même, au risque de la souffrance, peut-être du désespoir. Or, la vérité, qui est le tout de la réalité, enveloppe aussi bien le rationnel que l'irrationnel. La philosophie a donc affaire à de l'irrationnel. Cet irrationnel n'est pas le sacré, lequel suppose l'expérience religieuse et l'ouverture au surnaturel, mais le démonique. Certes, la philosophie est l'œuvre de la raison, "du bon sens", comme dit Descartes. Mais, au contraire de la raison scientifique qui passe à côté du merveilleux et du mystère sans le voir, la raison philosophique reconnaît, identifie l'irrationnel, le merveilleux, le mystère.
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Au sein de l'énormité du temps et de l'espace, en un point de la nature infinie, ou peut-être infiniment infinie, comme le veut Spinoza, l'homme a le sentiment de l'englobant et du sans-bornes comme d'un mystère insondable contre lequel bute la raison.
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Le pouvoir que Max Weber nomme "charismatique", est un pouvoir d'ensorcellement. Il suppose que l'on ait foi en la personne d'un prophète, d'un chef, d'un grand démagogue. Que l'on puisse employer ici le mot "foi" montre l'analogie avec le domaine religieux. La crainte révérencieuse, la confiance, la fascination sont les éléments d'une attitude foncièrement irrationnelle. Et de même que le croyant en Dieu est imperméable aux arguments que l'on peut dresser contre la religion, de même l'individu ensorcelé par le prophète ou le chef n'est capable d'écouter rien d'autre.
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On voit, par exemple, les théistes donner plusieurs "preuves" de l'existence de Dieu, qui ne sont en réalité que des arguments, car, si "preuve" il y avait, une seule suffirait;…
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La philosophie n'a donc pas en vue le bonheur. Elle a en vue la seule vérité. Or, il est très possible que la vérité soit douloureuse, soit pénible, soit destructrice du bonheur ou le rende impossible. La religion, à la différence de la philosophie, est sous la catégorie de l'utile. Elle promet le bonheur et dit ce qu'il faut faire et ce qu'il faut être pour mériter ou pour l'obtenir. Dès lors, l'illusion est plus importante que la vérité si elle procure le bonheur.
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Je dois refuser d'admettre la possibilité de la légitimité du supplice des enfants. Or croire en l'existence d'un Dieu créateur du monde serait admettre la possibilité de cette légitimité. Ainsi, d'un point de vue moral, je n'ai pas le droit de croire, je ne puis croire en Dieu. Il est donc moralement nécessaire de nier l'existence de Dieu. (...) Il est indubitable, en effet, que le supplice des enfants a été et ne devait pas être, et que Dieu pouvait faire qu'il ne soit pas. Comme Dieu ne s'est pas manifesté dans des circonstances où, moralement, il l'aurait dû, s'il existait, il serait coupable. La notion d'un Dieu coupable et méchant apparaissant contradictoire, il faut conclure que Dieu n'est pas.
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J'hésite, cependant, à me dire athée, car le mot "Dieu" a peu à peu perdu, pour moi, toute signification. Il me paraît sans objet, et je ne crois pas qu'il y ait lieu de nier ce qui n'est rien.
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Epicure ne conçoit pas le bonheur solitaire : il appartient à l'essence même du bonheur d'être partagé.
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