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Citations de Marion Muller-Colard (228)


L’humain est un animal de rangement : la mémoire a son espace consacré, elle ne traîne pas dans les rues ; on ne croit pas aux fantômes. Ou peut-être, au contraire, y croit-on suffisamment pour tenir la mémoire prisonnière des archives.
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Il y a des moments de la vie où il n’y a rien d’autre à faire que compter sur les grandes eaux de nos dangers pour amener sur la berge ce qui doit être ramené. Qu’est-ce que la berge, on ne le sait pas vraiment. Peut-être l’endroit où nos vies sont racontables.
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C’est un drame typiquement humain que de vouer nos vies à donner ce qui nous manque.
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La réponse de Dieu à Job :
S’il n’existe aucun système explicatif du mal, aucun dogme ni grigri qui fasse l’économie de notre vulnérabilité, il existe la solidité des montagnes, la fidélité des paysages, le foisonnement végétal qui redonne fidèlement ses fruits à chaque saison. Et nous pouvons appuyer les petits pas-de-porte notre marche précaire sur la stabilité du minéral et le renouvellement du vivant.

« Est-ce par ton intelligence que s’emplume
L’épervier, dit Dieu,
Et qu’il déploie ses ailes vers le sud ?
Est ce sur ton ordre que l’aigle s’élève
Et bâtit son aire sur les sommets?
Il habite un rocher et il gîte
Sur une dent de roc inexpugnable ».
Job 39, 26-28.
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La plainte, c’est ce que Martin Luther appelait l ´incurvatus in se, le repli sur soi qu’il estimait être le péché par excellence. Si c’est un péché ce n’est pas au sens moral mais à celui d’une illusion qui nous éloigne du réel.
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Les discours proclament un savoir, la parole raconte un désir. Les discours amènent ce qu’ils ont trouvé, la parole dit ce qu’elle cherche- quand bien même elle ne saurait nommer l’objet de sa quête.
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Je suis à la trace un absent. Ce n'est pas la première fois que cela m'arrive. Le premier absent que j'ai suivi à la trace dans ma vie, ce fut ce fameux Jésus sur lequel couraient tant de bruits que l'inconscient collectif en était saturé. Cela m'a intriguée, je l'ai suivi et la silhouette que j'apercevais à l'horizon de cette filature ne faisait pas tant de bruit que tout ce qu'on m'avait raconté. Et si j'entendais quelque chose, c'était une qualité inédite de silence. Ce qui m'a séduite, c'est cette place immense qu'il laissait dans sa traîne. Et la trace. "Rencontrer un homme, c'est être tenu en éveil par une énigme", écrit Lévinas. Cela vaut pour le Christ et pour toutes nos rencontres. Résoudre l'énigme, c'est la crever et mourir avec. Le but, c'est l'enquête.
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De "l'hospitalité artistique", Jean-François dit qu'elle repose sur la confiance. Quelque chose est confié à un autre. Dès lors, on n'a plus prise. Confier, c'est aussi abandonner. Il a fallu beaucoup abandonner pour que soir dessiné dans un jour nouveau un projet qui n'a jamais été celui de personne. Autre chose qu'un projet : l'accueil simple de ce qui est. Car créer ce n'est pas inventer : c'est laisser venir.
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Je rêve d'une religion qui nous élève en creusant. Qui atteint la hauteur de l'universel en ayant mis le doigt sur le plus petit atome de la plus infime particule de poussière.
Car l'Evangile nous dit en substance qu'il n'existe pas de métaphysique : Dieu est matière, intra-physique. La Parole est chair, nous dit le prologue de Jean. Le Christ ressuscité a encore un corps dont l'abîme des plaies n'est pas même suturé par la résurrection. Notre erreur a été de considérer que l'invisible était hors de portée et donc, hors de matière. Mais l'invisible, comme le suggère Anne Sibran dans son magnifique récit "Enfance d'un chaman", ce n'est jamais que de l'inaperçu.
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"Léhaïm", dit-on, quand on trinque, en hébreu. Et c'est tellement plus juste que notre très réducteur "Santé !" "Léhaïm" : "à la vie" ! Et plus précisément encore, puisque le mot est un pluriel : aux vies ! A la vie une et majestueusement arborescente, jetant tous azimuts autour d'elle des ramifications souterraines, aériennes, invisibles peut-être.
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Ce message nous rappelle, après deux mille ans de christianisme, dont trois bons quarts de domination chrétienne sur le plan géopolitique, qu'il ne faisait pas partie du plan des disciples de jésus de suivre quelqu'un qui se laisserait crucifier et accepterait, sans recourir à aucune défense, toutes les humiliations qui le conduiraient à la mort. Ceux qui attendaient le Messie attendaient tout sauf ça. Le Messie est aussi celui qui arrive lorsqu'on est occupé à attendre quelqu'un d'autre.
En réalité, les disciples n'ont jamais suivi Jésus. Ils ont suivi un homme qu'il ont cru être le Messie. Et suivant le Messie, ils suivaient la perspective d'éviter à jamais de nouvelles humiliations, de venir à bout de l'occupation romaine, de venger tous les exils du peuple d'Israël, de jouir d'être du côté des puissants. On avait une revanche à prendre.
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Que sommes-nous d'autres, pauvres vivants, que les ambassadeurs de tous ceux qui furent avant nous ?
Nous sommes les ventriloques d'une parole qui sourd de la surface de la terre, cette ligne de démarcation dont on peut douter qu'elle sépare si nettement ceux qui se trouvent dessous de ceux qui se trouvent dessus.
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Semez donc une graine de concombre, et vous verrez, en l’observant quotidiennement, qu’elle s’étire pareillement à un dormeur perçant le jour.
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Les enfants adultes ne peuvent pas le savoir, mais il n’y a rien à faire : leurs joues sont ce bout de chair invariable qui porte encore la courbe émouvante qu’ils avaient à la naissance. Se creusent-elles avec l’âge ? Peu importe, on en reconnaît le toucher, cette peau de fruit qui nous a tant émus, la première caresse, d’un revers de phalange, cette virgule maternelle, ce geste aérien qui creuse pourtant le sillon d’une infinie tendresse.
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À trop réfléchir, nos pensées couvrent bien souvent les cris des corps muets qui nous passent sous le nez. Ce sont des ultrasons, les animaux les entendent, pourquoi pas nous ?
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On se souvient par étapes, par association d’idées, chacun trimbale avec soi une mémoire anarchique. Bastien, lui, trimbale une mémoire archaïque qui fait, depuis sa mort, un boucan de casseroles au cul d’un corbillard.
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« Rabbi, qui a péché pour qu’il soit aveugle: lui ou ses parents ? ». Et voilà Dieu de nouveau cantonné à tenir des comptes, et nous voilà dans la jouissance idiote d’experts-comptables traquant les fautes. « Ni l’un, ni l’autre » répond Jésus, et je l’imagine un peu las. Il a autre chose à proposer, il le fait d’ailleurs dans la foulée: « Mais AFIN QUE les œuvres de Dieu se manifestent en lui, tant qu’il fait jour, il nous faut travailler aux œuvres de celui qui m’a envoyé ». (p. 98)
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Pour Job, le contrat dont la rupture brutale engendra la Plainte était explicite: il reposait sur le système rétributif. Les règles étaient claires: Dieu rendait le bien pour le bien, et le mal pour le mal. (p. 42)
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Aujourd'hui elle le jurerait, elle donnerait cher pour le toucher encore, elle marchande comme tous les endeuillés, égarés dans la perte, le toucher même une seule fois, jurer à on ne sait qui qu'on y mettra tant de désir, tant de conscience et d'application, que ce geste-là vaudra pour mille et pour l'éternité. Toucher une fois pour remplir une fiole de cette sensation vive, la fermer aussitôt et la rendre hermétique au temps, à son œuvre d'usure, d'érosion, de Grand Pâlisseur sans pitié. p.159
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Sylvia n'est qu'une ombre à la fenêtre. Ombre chinoise découpée dans le contre-jour du matin. Elle n'a allumé ni lampe, ni plafonnier. Elle n'a rien à voir que la conquête du jour. Prise à témoin dans ce bras de fer du tout petit matin avec l'encre noir de la nuit, elle ne veut pas choisir son camp. Elle ne voudrait ni jour ni nuit, d'ailleurs. Suspendre le temps, l'accrocher à une patère comme un vieux manteau qu'on ne porte qu'en de rares occasions - mais lesquelles ? En quelles occasions Sylvia voudrait-elle arpenter encore la grande scène de la vie humaine, parader sous le regard des autres qui vous disent qui vous êtes ? Sa fille est déjà mariée. Elle est grand-mère à présent. Son fils est mort. p141 et 142
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