AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Marion Muller-Colard (228)


Je ne sais pas comment Dieu s'arrange avec mes petits arrangements. Je crois simplement entendre, dans le livre de Job, la supplication muette d'un Dieu qui cherche un homme pour le sauver. Le sauver de la relation contractuelle dans laquelle la religion le ligote si souvent.
En Job, Dieu cherche l'homme qui croit en lui pour rien, comme le dit perfidement le Satan. Et à la fin d’un long chemin, il trouve un homme qui croit en lui pour tout. (p. 101)
Commenter  J’apprécie          00
La réponse de Dieu à Job transcende toute théologie. Nombreux sont les théologiens déçus qui estiment que Dieu répond à côté. Mais n'est-ce pas précisément pour nous entraîner ailleurs que là où nos questions nous font stagner ?
Elle ne dit rien de ce qu'il faut penser du mal, elle laisse vacante la réponse à cette immense question qui nous obsède non sans raison. Elle n'est pas une explication, encore moins une justification. Elle est la plus belle invitation que j'ai jamais reçue. Cette invitation à revisiter, avec le Créateur, les fondements inébranlables de la Création. (p. 85)
Commenter  J’apprécie          00
Mourir, c'était arrêter d'être et je savais que ça ne suffirait pas. Disparaître, c'était la possibilité de n'avoir jamais été.
Commenter  J’apprécie          00
Pourquoi alors me définir comme agnostique ? Parce que je crois en Dieu, mais je sonde chaque jour un peu plus à quel point je n'ai pas la connaissance de ce Dieu en qui je crois. Et grande sera ma surprise, j'en suis sûre, s'il m'est donné un jour de voir se démêler sous mes yeux la part de Dieu et la part du Diable. S'il m'est donné un jour, non plus de pressentir la Grandeur, mais de la connaître - de renaître avec elle.
Depuis que sont partis en fumée les contrats inconscients dans lesquels j'avais commodément abaissé la Grandeur pressentie dans mon enfance, je m'en tiens à chercher Dieu - et cela m'occupe bien plus intensément.
Commenter  J’apprécie          00
Mais lorsque j'ai peur, je tire une toile avec des mots, et c'est le seul abri que je sais trouver. On entend le vent, la flamme orange se dresse droite dans son habitacle de fortune, on croit la nuit profonde, mais sait-on jusqu'où l'on verra cette petite lumière, jusqu'où entendra-t-on notre histoire? Á quel rescapé elles indiqueront qu'il y a là des vivants.
Commenter  J’apprécie          30
J'ai toujours aimé les gens-hublot, ceux dont on dit qu'on lit en eux comme dans un livre ouvert. Ta mère a gardé cette transparence, c'est une joueuse mais pas une tricheuse: tout ce qui la traverse se lit sur son visage, et c'est comme une offrande.
Commenter  J’apprécie          10
Ce qu'on appelle ici miracle, c'est l'inconnu. Le seul connu à disposition des médecins prend la forme d'une condamnation. Tu vois nos pas japonais, l'abîme de l'inconnu tout autour? Il nous effraie. Il est pourtant notre chance. Ta mère a le courage d'interpeller l'inconnu. L'inconnu lui répond.
Commenter  J’apprécie          00
Improviser, c'est pouvoir être infiniment.
Commenter  J’apprécie          00
La vérité c'est que nous avons tellement gagné à associer atout et vulnérabilité. Nous avons gagné du fil sous nos pas funambules. Beaucoup de rires, aussi. Et l'amitié de nous passer de toute forme de pitié ou de condescendance: je n'avais aucune santé à lui brandir sous le nez, je n'étais pas garde-malade, nous étions vulnérables et nous avions décidé que c'était la meilleure part de nos vies.
Commenter  J’apprécie          00
Mes chéries, je ne sais simplement pas comment dompter le vertige autrement qu’avec des mots.
Lorsque j’ai commencé cette lettre, un bout de toit venait d’être arraché par cette tempête folle qu’on appelle maladie. Ce serait mentir, Jeanne, de te dire que je n’ai jamais eu peur.
Commenter  J’apprécie          70
L'illusion d'une fusion, nous l'avons saisie par les cornes dans la corrida musclée de notre propre adolescence, quand nous avons compris que nos parents, non, ne nous connaissaient pas mieux que nous-mêmes. Qu'ils étaient les seuls dépositaires d'une mémoire qui faisait un trou dans la nôtre (notre vie intra-utérine, notre naissance, nos premières années), mais que cette mémoire n'était décidément que la leur, pétrie de toute leur subjectivité, de leurs fantasmes et de leurs angles morts, et que sa restitution relevait tout autant de la mythologie du souvenir, tout au moins d’un mélange impartageable des deux.
Commenter  J’apprécie          00
Nombreux sont les théologiens déçus qui estiment que Dieu répond à côté. Mais n'est-ce pas précisément pour nous entraîner ailleurs que là où nos questions nous font stagner ?
Commenter  J’apprécie          00
J'ai perdu tout mes cache-misère. A présent, il me reste la misère.
Commenter  J’apprécie          00
Ce qui me permet de suivre aujourd’hui Jésus comme un Maître, c’est précisément qu’il ne promet pas l’évitement du risque
Vivre la paix d’une bénédiction originelle pour ne pas céder aux tranquillités qui nous privent de la grâce de savoir être dérangés
Commenter  J’apprécie          10
Marion Muller-Colard
(Comment passer de) l'instant où nous réalisons que la vie ne peut se vivre sous garantie à celui où nous serons capables de continuer à nous lever le matin sans certitude, ni perfection, ni sécurité absolue ?
(L'autre Dieu)
Commenter  J’apprécie          20
Dans ma première prière de femme impuissante, toute volonté de contenir l'accident dans une logique échouait. J'avais perdu mes croyances religieuses qui tentaient en vain de rendre lisible une existence indéchiffrable. Je me tenais là, devant l'enfant que la loterie du vivant mavait attribué, et c'était un désir immense qui me taisait tenir debout.
Ma prière n'avait plus rien à marchander, car je découvrais que mon désir était d'ores et déja accompli, et que cet accomplissement ne dépendait pas de la vie ou de la mort de mon fils. Cet accomplissement tenait en sa naissance.
A mesure que les eaux stagnantes de mes superstitions se retiraient, une source jaillissait qui m'emportait soudain sous la force d'une qui évidence inconditionnelle: la vie avait déjà fait son œuvre de majesté. Elle était là, puissante, palpable, têtue, remarquable, palpitante. Elle portait, entre des milliers d'autres, le prénom de mon fils. Entre des milliers d'autres, elle le porterait à jamais.
Nous étions là pour porter la vie et l'ennoblir, et mon fils s'y prenait à merveille, dût-il finir par y laisser sa peau.
Nous étions là pour assurer une puissante résistance au contraire de la vie. Nous étions tous nés d'une injonction divine. Pour le monde comme pour chacun, ce Dieu indifférent à nos comptabilités avait proclamé: «Que la lumière soit! » Et la lumière s'était faite sur la terre. Elle s'était faite sur mon fils, sur chacun d'entre nous, petits êtres vulnérables témoins de l'infinie possibilité de s'extraire du chaos. D'être plutôt que de ne pas être.
Et ceci, ce seul fait de la naissance de mon fils, avait porté son renfort à cette opposition au rien; et ceci ne pouvait simplement pas ne plus être.
Qu'il ait deux mois, six ans ou soixante-dix, l'Autre Dieu qui me soufflait cela s'en fichait à raison. Cet Autre Dieu n'est pas comptable. Seulement, il compte sur chacune de nos vies pour circonscrire avec lui le chaos.
Commenter  J’apprécie          00
On n'a plus rien à compter. On avait trois amis, mais ils ont beau refaire leurs comptes, ils ne tombent plus sur ce qu'on était. On avait bien un Dieu, mais il était le Suprême Comptable. Comment compter sur lui quand une vie plus ne tient plus en chiffres?
Commenter  J’apprécie          00
Puisqu'en effet tout se passe bien, on prend cela pour une évidence et bien vite, cette évidence devient un dû. On voue un petit culte intime et secret à celui qu'on imagine être son Garant - on a un peu d'éducation et on n'est pas totalement ingrat. A tout hasard, on convoque le Garant en situation extrême.
Commenter  J’apprécie          00
Nous pouvons alors commencer une autre histoire. Une histoire d'amour et de grâce - une histoire gratuite, sans système ni commerce.
Car si nous voulons revenir de la plainte autrement qu'en «défenseurs fanatiques de l'ordre rétabli », il nous faut le courage de recréer une façon d'être au monde qui intègre l'irréductible menace. En parcourant avec Job ce chemin du dogme vers la foi, de la garantie vers la confiance, nous arrivons avec Paul Tillich à cette conclusion:
L'acte d'accepter l'absence de sens est en lui même un acte plein de sens : il est un acte de foi.
Commenter  J’apprécie          00
Cette vérité, elle est simple et vertigineuse, elle est tout entière le cri têtu de Job : rien de ce qui arrive à mon vieux frère, à mon fils, aux milliers d'humains sur qui s'abat un violent malheur, aucune maladie de ceux à qui j'ai rendu visite, aucun accident n'est injuste. Rien n'est injuste, car cela voudrait dire que quelque chose est juste. Cela voudrait dire qu'il existe un enclos et un Gardien à cet enclos.
N'en déplaise aux amis de Job dont l'enclos tient encore et qui refoulent à la marge tout témoignage de dévastation. N'en déplaise à notre facilité déconcertante d'éteindre les écrans qui témoignent incessamment du désordre du monde et de la permanence du sort.
Il n'y a pas de système, de dogme, de religion, qui puisse abolir, contenir, détourner les conjonctures qui nous menacent perpétuellement d'un coup du sort.
Tout comme le bonheur, le malheur n'est simplement pas juste. Ce n'est pas une attestation du contraire de la justice, mais simplement de son absence. C'est pourquoi je n'ai pas dit, à l'homme récemment retraité que la maladie contraignait à renoncer à tous ses projets, que sa situation était injuste. Je ne voulais pas suggérer en lui une quelconque cause à cette injustice. Car alors Dieu, après avoir été le bienveillant papa-gardien de nos sécurités, serait devenu le grand méchant loup sadique contre qui, à juste titre, Job intente un procès.
Commenter  J’apprécie          00



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Marion Muller-Colard (619)Voir plus

Quiz Voir plus

Bouche cousu

Comment s'appelle la femme principale de l'histoire?

Amandana
Eva-paola
Marie-line

4 questions
7 lecteurs ont répondu
Thème : Bouche cousue de Marion Muller-ColardCréer un quiz sur cet auteur

{* *}