Citations de Martin Page (537)
Quand on constate que l'on est un des rares à observer des principes moraux dans les rapports humains, il peut être tentant de sombrer dans l'amoralité, non pas par conviction ou par plaisir, mais simplement pour ne plus souffrir, car il n'y a pas plus grande douleur que d'être un ange en enfer, alors qu'un diable est chez lui partout.
Les frontières de mon corps ne sont plus bornées par les jalons des poignées de main et les bises, ces petits gestes qui nous font exister physiquement.
Je ne me fais pas de soucis, l'espèce humaine survivra. Nous sommes les véritables cafards du monde : increvables. Mais la Terre ne nous appartient plus, nous en avons rendu les clés.
Pour le moment, elle désirait être un fantôme pour se débarrasser de l'image qu'on avait d'elle. Elle ne savait pas comment elle voulait qu'on la voit. Ce qui était certain, c'est qu'elle ne voulait pas qu'on la voit d'une manière qui l'enfermerait dans un rôle ou une personnalité. Elle voulait qu'on lui laisse la liberté d'évoluer et de changer. Elle pensa à tous les gens qu'elle connaissait, et elle constata que trop tôt on les enfermait dans une image, untel sera timide et matheux, untel sera sportif et drôle. Et les gens obéissent à l'image que l'on a d'eux-mêmes. Ils y collaborent. Parce que c'est plus simple. Parce qu'ainsi on a une place.
Le monde nous enseigne la douleur, la tristesse et la peur. Et comme nous sommes bien élevés, nous incorporons tout ça, nous en faisons notre vie. Il faut que nous apprenions à ne pas être de bon élèves. La joie et le bonheur sont beaux parce qu'ils procèdent de la désobéissance. C'est cela vivre : apprendre à désobéir.
Il y a des gens à qui les meilleures choses ne réussissent pas. [...]Je m'en rends compte aujourd'hui, j'appartiens à l'espèce de ceux qui n'arrivent pas à rentabiliser leurs avantages, pour qui ces avantages sont même des inconvénients.
-Pourquoi n'as-tu plus d'amis?
-Ils ont moisi. Je n'avais pas remarqué qu'ils avaient une date de péremption[...]Ce qu'ils disaient commençait vraiment à sentir mauvais.
J'ai une dette envers mon jeune moi, et donc envers moi-même : ne pas rester attaché à mes blessures. L'attachement au malheur, le souvenir des souffrances, ce n'est pas la fidélité, c'est continuer les brimades. Mais cette fois c'est notre main qui frappe (...) Être malheureux, c'est trahir. La joie est un acte de courage politique.
On ne déménage jamais. On pense qu'en quittant tel appartement, tel quartier, la vie recommencera différemment, mais c'est toujours la même merde rehaussée d'espoirs déçus. J'ai constaté que ceux qui déménagent le plus sont les plus déprimés. Penser que la géographie résoudra leurs problèmes existentiels est d'une grande naïveté.
Il y a quelque chose de troublant à fréquenter Beckett et à constater que c'est quelqu'un de normal. Il ne parle pas comme un livre, il ne joue pas à l'écrivain.
Je lui parle de Sanaa et de ses envies extravagantes. De sa mélancolie.
- Casse-lui la gueule.
- Pardon ?
- Les gens veulent changer de vie, mais il ne comprennent pas que c'est violent, que c'est comme se faire casser la gueule.
- Je ne vais pas la frapper.
- Suggère-lui d'engager quelqu'un pour le faire. Changer de vie est une noble ambition. Mais ça commence forcément par des point de suture.
Quand on a connu le désert culturel, humain et esthétique des petites villes de banlieue et de province, Paris est une oasis. Il faut ne pas avoir grandi à Paris pour être amoureux de cette ville, comme il faut avoir été pauvre pour apprécier la valeur de l'argent.
Espérant une vie un peu plus douce, Antoine pris la résolution de couvrir son cerveau du suaire de la stupidité.
C'est fou comme, en prison, on se considère vite comme coupable. Ça m’énerve. Etre jolie n'est pas un appel au viol, ni même à la drague ! Je ne sais pas si tu peux imaginer à quel point j'en veux à ce type.
(Max):
Le désespoir est mon adversaire. Pas la vie. Alors je me bats.
(p.57)
« Il paraît que la vue baisse quand on reste longtemps en prison, à force de ne pas pouvoir regarder au loin. Quand il ne fait pas beau, je sors et j'observe les nuages pour exercer mes yeux. »
« Le monde est effrayant, il lui manque un plafond. »
« J’ai choisi de m’enfermer chez moi, dans ma propre maison. Pourtant, je n’ai pas commis de crime. » (p. 34)
« On devrait se permettre d’aller à la rencontre de ceux qu’on ne connaît pas. » (p. 15)
Je me dis que t'imaginer heureux t'aidera peut-être à aller mieux. On appelle ça le pouvoir de l'intention. Je ne suis pas sûre d'y croire, simplement cette idée me réconforte.