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Critiques de Meir Shalev (56)
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Le baiser d'Esaü

Avec cette variation autour de l'histoire de Jacob et d'Esaü, Meir Shalev fait une nouvelle fois preuve de maestria dans la construction de son récit. Une kyrielle d'histoires tissées autour des principaux personnages -une famille installée en Galilée dans les années vingt- dont la mère est issue de Russes convertis et le père, boulanger, de juifs chassés d'Espagne, nous fait découvrir une autre facette de Jérusalem, celle des « hijos d'Abravanel  ». Le roman est émaillé de termes judéo-espagnols, de dictons, d'anecdotes, ce qui a décuplé mon intérêt.

Shalev est un excellent conteur. La finesse de ses observations, sa langue riche et imagée, offre au lecteur une immersion dans une Jérusalem sépharade grouillante de vie où même les historiettes sur le mazapán sont truculentes:

« Cette semaine, tia Doudoutch a commencé à apprendre à Mikhaël l'art du massepain. Ne prends pas la chose à la légère. Les femmes du Levant cachent les secrets du massepain à deux catégories d'importance.: les femmes odieuses, et les hommes amoureux. Jacob et moi, Benjamin et Mikhaël, chacun à notre tour, nous avons eu droit à cette faveur, mais nous avons appris le le secret caché à tout le monde: la détermination du « punto de mazapán » - l'instant où il faut ajouter les amandes en poudre au sucre fondu.

Ce punto est un fragment insaisissable q'un geste ne peut définir et qu'un diagramme n'est pas capable de diviser. »

Le Baiser d'Esaü est un roman d'une richesse infinie, à l'image de l'oeuvre de Salomo Salomo, le petit Monastirélien, « qui écrivit le Pentateuque sur cinq oeufs d'oie, les adversaires dirent qu'il n'y avait rien écrit.. » alors qu'aucune fioriture ne manquait. Le mieux, c'est de le lire.
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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

Je propose de me concentrer ici sur l'élément-clé en somme du récit : un superbe aspirateur ménager de la marque prestigieuse américaine "General Electric", expédié dans les années 1930 de Los Angeles en Californie par Yeshayahou Ben-Barak à son frère et belle-soeur vivant à Nahalal en Palestine/Israël.



S'il n'y a pas de photos dudit engin dans l'ouvrage de Meir Shalev, il y en a, en revanche, des destinataires du fameux cadeau : le sieur Aharon Ben-Barak et son épouse d'origine russe, Tonia Pekker, les grands-parents maternels de notre auteur.



Ces grands-parents avec leurs 5 enfants menaient une vie pauvre et dure dans une coopérative agricole, appelée moshav et comparable à un kibboutz, dans la vallée de Jezréel au nord du pays. Aussi bien que le grand-oncle d'Amérique, devenu riche et Sam, envoyait des sous à son frère aîné pour aider la famille. Des dollars qu'Aharon renvoya par retour du courrier à Sam. le grand-père du narrateur, enseignant et poète à ses heures, considérait son frangin comme un double traître : traître à l'idéal sioniste et socialiste !



L'expédition d'un aspirateur dernier cri était en fait une douce revanche d'un Sam évidemment offensé, qui spéculait sur la manie de propreté de sa belle-soeur et le fait que le renvoi d'un paquet aussi volumineux poserait un problème insurmontable à son frère dans son bled primitif.



Il est vrai que Sam avait insisté auprès d'un marchand juif, originaire comme lui de Makariv (actuellement en Ukraine), de lui fournir "dem grestn, shtarkstn shtoyb-zoyger" (le plus gros et plus lourd aspirateur, en Yiddish) qu'il avait.



Et, en effet, grand-mère Tonia l'avait "condamné à la réclusion à perpétuité dans la salle de bains verrouillée à double tour".

Lorsque ses filles Batya (la mère de l'auteur) et Batsheva lui demandaient de pouvoir utiliser le "svieper" (Yiddish pour sweeper), la réponse invariable de maman Tonia était : "Vous n'hériterez pas tant que je serai en vie".



Ma brève présentation de ce roman partiellement autobiographique de Meir Shalev prouve, j'espère, que l'auteur dispose d'un sens d'humour incontestable, mais sa fresque familiale ne s'arrête pas là, bien entendu.



C'est surtout une évocation sensible de la rude et pénible situation d'une famille de simples Juifs venant de l'Europe de l'Est pour s'établir comme petits colons laboureurs et cultivateurs en Terre promise à partir de 1928-1929, soit une vingtaine d'années avant la proclamation de l'État d'Israël par David Ben Gourion et la naissance de Meir Shalev, le 29 juillet 1948, à Nahalal.



La protagoniste principale de ce conte de 239 pages, paru en Hébreu en 2009 et agréablement traduit en Français par Sylvie Cohen, est grand-mère Tonia Pekker, le pivot de cette sympathique tribu. Une femme de tête que je vous laisse découvrir.



Le nom de famille "Shalev" me fait toujours penser à un autre nom de famille juif à savoir "Singer" : des familles israéliennes provenant toutes les deux de l'Europe de l'Est et réputées pour leurs talents littéraires.

Parmi les Singer, il y a le Nobel Isaac Bashevis Singer (1902-1991), sa soeur Esther Kreitman (1891-1954) et son frère Israel Joshua Singer (1893-1944).

Dans la famille Shalev, il y a Meir, son père le poète Yitzhak Shalev (1919-1992) et sa cousine la romancière Zeruya Shalev, née au kibboutz Kimmeret en 1959 et auteure des best-sellers "Ce qui reste de nos vies" en 2014 et "Douleur" en 2017.

À ma connaissance, sa terrible grand-mère Tonia n'a rien publié,... faute de temps. Le nettoyage, n’est-ce pas !

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Un fusil, une vache, un arbre et une femme

Est-ce qu’il faut commencer par vous parler de Ruta ? Ca pourrait être un bon début.



Ruta Tavori enseigne la Bible dans un des trois villages qu’a fait fonder le baron Rothschild avant la création de l’Etat d’Israël. Varda Canetti, une jeune universitaire qui travaille sur « la théorie du genre dans les villages du baron » va venir l’interviewer afin qu’elle lui raconte, à cette lumière, l’histoire de sa famille. Ou plutôt, c’est son intention. Mais bien entendu, rien ne va se passer exactement comme cela. Demandez à quelqu’un qui enseigne la Bible, n’a pas d’amie et adore raconter des histoires de vous parler d’un sujet précis et vous pouvez être sûrs que cela va déraper. « Là, vous allez entendre ce que j’ai envie de vous raconter et plus tard, peut-être, je vous raconterai ce que vous avez envie d’entendre. » Nous voilà prévenus.



Déjà, ce n’est pas par cette scène que commence le roman. Non, nous assistons au début au bref tête à tête d’un amoureux ventripotent avec sa dulcinée avant que son téléphone ne l’exhorte à sortir, nous avec, et à subir un interrogatoire salé d’où il ressort qu’il doit se rendre demain aux aurores dans le wadi, sous le grand caroubier récupérer quelque chose de compromettant. Une histoire louche me direz-vous. A raison. Il ne va pas s’en remettre, le ventripotent.



Mais voilà, quelques paragraphes après, que c’est Eitan qui se prépare à présent à partir pour une mystérieuse randonnée nocturne. C’est Ruta qui raconte. Ce qui nous vaut au fil des préparatifs, le récit heureux d’autres randonnées qu’elle a entreprises avec Eitan, son premier mari, il y a plus de douze ans. Avant que Neta, leur fils ne meure tragiquement. Avant qu’Eitan se mure en cet étranger muet et massif. Cet Eitan qu’elle appelle son deuxième mari. Qui ne la touche plus. Ne lui parle plus. Ne vit que pour expier par l’effort, la peine et le silence une mort impossible.



Je me suis emballée ? Vous ne suivez plus ? Où sont passées Varda et ses questions d’historienne ?



Les chapitres se suivent, on ne sait pas toujours qui parle. Parfois, ce sont des brouillons d’histoires que Ruta a écrites pour Neta, son fils. Avant ou après sa mort. Parfois, ce sont les échanges entre Varda et elle. Mais ne vous y fiez pas, ils débordent toujours et les méandres des péripéties reviennent nous happer sans qu’on ait même su comment.



Très vite, on comprend qu’à cette strate là de l’histoire, il faut ajouter celle du Grandpa Ze’ev. Il est un des fondateurs du village. C’est pour glaner des anecdotes sur lui que Varda interroge Ruta. Arrivé sans rien, il a vu venir un jour son frère sur une calèche qui contenait un fusil, une vache, un arbre et une femme. Dans cet ordre-là. Il y tient. Soit tout ce dont on peut avoir besoin pour fonder un foyer. La vache pas trop, quoi que, en tout cas par directement, mais le fusil, l’arbre (un murier) et la femme (Ruth) auront chacun une part importante dans cette histoire.



Mais quelle histoire ? Celle que je vous raconte, qui s’emmêle, concerne la mort du petit Neta, à six ans. Celle de Ruth, l’épouse de Grandpa Ze’ev, des années après qu’elle aura été la risée de tous à chercher obstinément dans le sillage de la herse, dans les cavités exhumées par n’importe qui on ne sait exactement quoi avec un air tragique et perdu. « En ce temps-là, il y avait des gens un peu fêlés pratiquement dans toutes les familles, chacun en proie à son propre délire. (…) -Et la vérité, c’était quoi finalement ? -Quelle vérité ? – Elle était folle ou elle cherchait vraiment quelque chose ? – La vérité se situe entre les deux, dans le juste milieu, son terrain de prédilection. Si elle est sans équivoque, d’un côté ou de l’autre, cela n’a aucun intérêt et ça n’amuse personne. Mais quand elle se trouve entre les deux extrêmes, c’est une autre paire de manches. Je ne vous apprends rien, à vous, l’historienne. Au fond, cela n’a aucune importance. On peut fouiller le sol parce qu’on et cinglé ou qu’on cherche allez savoir quoi. Ce n’est pas incompatible, au contraire. »



Ruth. C’est donc la femme de la calèche, de l’arbre et du fusil. La femme de Grandpa Ze’ev. Tout le village sait ce qui s’est passé avec le voisin aux jolies bottes. Mais personne n’a rien dit. Grandpa Ez’ev a perdu un œil. Ruth sans doute la raison. Ils ont eu deux fils ensuite. Qui se sont tirés dès que possible très très loin.



Grandpa Ze’ev est un monstre. Une ordure sans pitié. Un homme de revanche et de fureur. Il y a des précédents sur cette terre biblique. Ruta et Dovik sont ses deux seuls petits enfants. Il les a recueillis quand leur mère est partie aux Etats-Unis et avec eux, il est aussi un homme doux qui leur apprend les graines, les chemins, la vie.



Voilà, vous savez tout. Grandpa Ze’ev, Ruth. Ruta et Eitan, leur fils Neta. Quelques autres aussi dont les truands du début parce qu’il en faut. Tout s’enroule autour de cela. Dès le premières pages, on a tous les éléments dans un concentré stupéfiant qui nous saute à la figure. Et puis, au fil des chapitres, à condition de renoncer à mettre les choses dans un ordre logique (à quoi bon ?), on aura l’explication de chacun des mystères qui auront été déposés sous nos yeux. Pourquoi Grandpa déteste les geais, comment Ruta et Eitan se sont rencontrés, comment on survit à la mort de son enfant et de son premier mari, ce que c’est que de dormir en ailes de moulin.



Mais ce n’est pas tant pour avoir le fin mot de l’histoire que j’ai continué à tourner avidement les pages. Bien sûr, ça compte mais comme on connait déjà les éléments essentiels dès le début, ce n’est pas le suspens qui nous tient. Ce n’est pas non plus la morale où tout serait bien qui se finirait bien. Ce n’est pas que ça se finisse mal, rassurez-vous. C’est surtout que les personnages sont tous complètement imparfaits, absolument immoraux et fort peu dignes d’être célébrés pour leur exemplarité. On s’y attache avec une incrédulité horrifiée. On ne les excuse en rien, on ne les comprend pas et pourtant, on les aime. Surtout Ruta. Parce qu’ils nous ressemblent étrangement ou parce qu’elle fait du langage et du rire les meilleures manières de continuer à vivre ? Des personnages bibliques sur une terre où cohabitent violence, humour désespéré et désir.



Ce qui m’a scotchée à ce livre, c’est son énergie. Entre tous ces fils, la folie des personnages, leurs émotions qui font les gorges chaudes dans le village taciturne. Le rire, les jeux sur le langage, un plaisir charnel, un rapport aux paysages environnants, aux arbres qui voyagent. Excusez-moi, voilà que je suis encore incompréhensible. C’est ce livre. Un enchantement.

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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

Dans le mochav de Nahalal, une coopérative agricole de Galilée, on considère que l'oncle Yeshayahou est un traître. Car il est parti en Amérique et le pays du capitalisme est mal vu par cette communauté juive d'origine russe. Mais l'oncle Yeshayahou a un plan diabolique. Il connaît l'obsession pour la propreté de Tonia, la grand-mère du narrateur, et lui envoie le tout dernier modèle d'aspirateur General Electric. Un sweeper qui deviendra le moteur des histoires familiales, des tensions intergénérationnelles et des anecdotes les plus folles.

Ma grand-mère russe et son aspirateur américain est un roman d'un auteur israélien reconnu dans son pays, Meir Shalev, que je ne connaissais pas, et dont j'ai appris à savourer l'univers autobiographique et complètement surréaliste en même temps dans lequel il nous plonge dans une invraisemblable histoire familiale qui nous dit pas mal de choses pertinentes sur la société israélienne à ses débuts.



On y apprend pas mal de choses sur un des premiers moshav de Palestine, fondés par une poignée d'Ukrainiens communistes hauts en couleur, et dans lesquelles ces populations juives chassées de leurs pays respectifs et condamnées à assimiler une nouvelle culture et une nouvelle langue.



Sur un sujet qui aurait pu être plein de tragique et de gravité, Meir Shalev préfère la fantaisie et la farce ( un peu à la manière d'un Emir Kusturica dont j'ai parlé récemment) mais n'oublie pas la tendresse et la malice dans ce livre à mi chemin entre le récit iniatique jubilatoire et le documentaire d'une partie d'une population qu'on connaissait fort mal.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

Découvrir l'histoire du sweeper, de l'aspirateur, offert par l'oncle Yeshayahou à sa belle-soeur Tonia,est en réalité découvrir l'histoire de la famille de Meir Shalev et surtout la forte personnalité d'une grand-mère hors norme. Cette famille juive a quitté la Russie après la Révolution d'Octobre pour émigrer en terre d'Israël alors sous protectorat britannique. Elle a vécu au sein du moshav de Nahalal, une coopérative agricole de Galilée.

Tonia a épousé son beau-frère veuf de 14 ans son aîné. Femme au tempérament trempé, elle a comme beaucoup travaillé inlassablement sur la ferme mais surtout elle passait sa vie à traquer la poussière.. transformant sa vie et celle de sa famille en véritable enfer . Alors quand le renégat, le traître , le capitaliste immigré en Californie, celui qui a changé son nom et se fait appeler Sam lui fait parvenir l'aspirateur dernier cri Tonia est d'abord ravie mais va vite se buter et ...

Meir Shalev , écrivain israélien reconnu, a sans aucun doute un réel talent de conteur. Au travers des évènements survenus dans sa famille, grands ou petits, réinventés ou réels, c'est son enfance, son adolescence qu'il nous narre c'est aussi me semble t'il la gestation de la société israélienne contemporaine . Une lecture souvent cocasse, parfois monotone , surtout un regard sur un pan d'histoire, une culture que je ne connais peu ou pas, rien que pour cela elle valait le détour.
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Un fusil, une vache, un arbre et une femme

Sous prétexte de répondre aux questions de Varda, venue faire une enquête sociologique sur le monde du moshav israélien, Ruth Tavori, dite Ruta, déballe tous les secrets de sa famille. Cette pipelette ne se fait pas prier pour dévoiler « les histoires terribles sur les choses terribles qui ont été commises par les hommes terribles qu'elle aime ». Des histoires qui ont commencé avec l'installation de Zeev, son redoutable grand père, dans un village agricole de Galilée.

S'étendant sur trois générations, le récit de Ruta mêle continuellement le passé et le présent pour dire l'amour, la trahison, la vengeance, la violence et le meurtre. Ses histoires dignes des tragédies grecques, Ruta, en bonne conteuse, sait les enchanter par l'évocation de la nature qui tient une place importante dans le roman : le désert, lieu d'épreuves mais aussi de grâce; la végétation et en particulier les arbres aimés de Zeev comme le caroubier et l'acacia participant aux événements, ou encore les fleurs sauvages dont grand-père récolte les graines.

Entre scènes de sauvagerie, jolies métaphores botaniques, petits contes, symboles bibliques et suspense, la voix de Ruta entraine le lecteur dans un univers riche de mélancolie, de douleur, de tendresse, d'ironie et de colère. C'est le roman foisonnant et palpitant d'un auteur malheureusement disparu il y a peu de temps. On y retrouve avec plaisir les prémices de Mon jardin sauvage, un livre délicieux qui exprime tout l'amour de ce romancier-jardinier pour sa terre.
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Mon jardin sauvage

Meir Shalev tient une chronique hebdomadaire dans le quotidien israélien Yedioth Ahronoth. Il y aborde des sujets liés à l'éducation, à la politique et à la culture. Un jour où il avait écrit à propos d'une fleur s'épanouissant dans son jardin, il a remarqué que de nombreux lecteurs en étaient ravis. Depuis lors, il a rendu compte de ce qui se passe dans son jardin tous les mois puis a finalement décidé de collecter certains de ses articles dans un livre en y ajoutant de nombreux nouveaux chapitres.

Ainsi est né cet ouvrage qui n'est ni un roman ni un traité de botanique mais une merveilleuse déclaration d'amour de l'écrivain à son jardin, à tous les végétaux et animaux qui le peuplent. Avec humour il raconte les triomphes et les défaites de son art végétal pour transformer ce qui était une parcelle négligée en jardin d'éden (serpents compris). Ses moments de fureur, de pure extase, de frustration, d'admiration, d'hilarité face à une nature sauvage renvoient à l'histoire de l'homme et à son lien avec la terre mère. Enchanteurs par leur fantaisie et apparente légèreté qui n'en occultent pas l'érudition et la sagesse inspirée de la tradition juive, ces textes laissent transparaitre la passion de l'auteur pour les mots qu'il cultive avec le même soin que celui qu'il réserve à son jardin. Pour lui, l'écriture comme le jardinage demandent beaucoup de travail et de patience pour obtenir un résultat qui apporte plaisir esthétique et stimulation émotionnelle.

Mission accomplie ! Dans cette abondante floraison de pensées et souvenirs, d'anecdotes personnelles, de réflexions sur la vie et les gens, de conseils de jardinage, de recettes de cuisine, de références historiques, bibliques et littéraires, chacun peut trouver son bonheur, butiner librement ce qui lui chante pour en faire son miel. Aucun besoin d'avoir du terrain, de savoir manier la bêche ou encore d'avoir la main verte, il suffit juste de savoir lire pour cultiver son propre jardin !

Les superbes aquarelles et dessins qui illustrent le texte, représentant quelques fleurs et coins du jardin de l'auteur, sont de celles de sa soeur Refaella Shir.
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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

Il arrive que des livres retiennent l’attention par leur titre, qui laisse augurer d’une bonne lecture. C’est clairement le cas ici !



Si l’on ne connaît pas Meir Shalev (ce qui était mon cas), on peut s’attendre à une fiction, mais c’est bien plus que cela : l’auteur nous raconte ici la vie de sa famille, sans concession, avec un humour mordant, jouissif, teinté d’ironie pour notre plus grand plaisir. Sans se prendre jamais au sérieux mais en veillant à l’être dans sa description des faits, il nous embarque dans le destin d’une lignée familiale certes, mais au-delà, il dessine les contours de la société israélienne à ses débuts, de Nahalal à Jérusalem en passant par Haïfa, avec toute sa complexité et ses ambiguïtés. Pour la novice que je suis en la matière, cette lecture a été l’opportunité de comprendre davantage la vie de ces communautés depuis leur arrivée à la fin des années 20 : kibboutz, mochav, travail de la terre, valeurs portées à la modestie et l’entraide, reconnaissance du travail manuel, rejet du luxe et des superficialités…L’occasion d’effleurer et de s’imprégner de cet univers ashkénaze riche et haut en couleurs.



Un délice à parcourir car Meir Shalev a le don de mettre en scène l’ambiance familiale tout au long de la lecture et de le distiller page après page, agrémenté de temps en temps par une photo qui achève de nous plonger dans son récit : passant de digression en anecdotes, on a l’impression d’assister avec lui à un de ses grands repas de famille où chacun y va de sa version des faits, s’interrompant pour raconter une autre histoire qui vient s’intégrer avec une fluidité presque insolente dans la trame du récit. Et l’auteur est un vrai conteur qui sait nous maintenir en haleine pour savoir comment, oui, comment grand-mère Tonia s’est procuré cet aspirateur, pourquoi il est arrivé jusqu’ici et pourquoi elle le garde enfermé dans sa salle de bains dans laquelle personne n’a le droit d’entrer ! Il faut accepter de rentrer dans le jeu de l’écoute attentive de Meir Shalev, qui ne perd pas une occasion d’entrer dans le détail de la grande épopée de sa famille.



Et c’est cela qui constitue aussi le sel de ce texte : l’histoire de l’aspirateur est certes drôle, mais ce sont les personnages tous plus étonnants les uns que les autres qui teintent le récit d’une aura si éclatante. Grand-mère Tonia et son caractère bien trempé, maniaque et autoritaire jaillit tout au long du texte et retentit fortement dans le paysage, mais frères, soeurs, mère, tante et oncle sont tout aussi savoureux et on est happé en un rien de temps dans la narration, avec la volonté d’en savoir plus sur chacun d’eux. L’âne de la famille aurait même eu la capacité de voler, mais plus personne aujourd’hui ne peut le confirmer. Le plus original de tous, c’est bien sûr le sweeper, ou sveeperrr comme dirait Tonia, personnage à part entière doté d’une capacité à penser et qui va créer le terreau de nombreux débats, même bien après sa disparition inexplicable.



Vérité, réalité, mensonge, déformation se mélangent en une joyeuse mêlée familiale avec laquelle l’auteur s’amuse et dans laquelle il tente de faire émerger malgré tout le Vrai, en prenant des pincettes. Avec tendresse, malice et facétie, il nous plonge dans un récit à la croisée du documentaire et de l’autobiographie pour nous faire découvrir la vie de l’un des premiers moshav de Palestine. Il dresse avec intelligence un portrait qui rend hommage à ces populations juives ayant quitté l’Europe de l’Est et qui en voulant mettre en place un idéal du travail agricole en communauté sur la Terre Promise ont développé une culture hybride assez souvent méconnue. Une saga familiale drôle avec une approche intéressante mêlant petite et grande histoire.
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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

Ce livre, je l’ai choisi par curiosité en raison de son titre. Le titre français et l’illustration donnent une bonne idée du ton du récit plein de clins d’oeil humoristiques. Par contre ils induisent le lecteur en erreur sur le sujet du livre, l’aspirateur n’est qu’un fil conducteur, l’essentiel est dans le portrait de la grand-mère et dans la peinture de la vie dans un mochav (coopérative agricole constituée de fermes individuelles, par comparaison avec le kibboutz entièrement collectif). Je crois que le titre d’origine signifie quelque chose comme « Mamie était comme ça », ce qui correspond bien mieux au contenu de ce livre, plein d’anecdotes familiales, d’éléments biographiques et autobiographiques. J'ai beaucoup apprécié de découvrir avec sa famille les débuts de la colonisation juive, bien avant l’État d’Israël. L’auteur a un grand talent de conteur, mais il a aussi les défauts qui vont parfois avec. Parce que des défauts gênants, ce petit livre (à peine plus de 200 pages) n’en manque pas. D’abord une petite carte n’aurait pas été de trop, et surtout un arbre généalogique pour que le lecteur s’y retrouve dans cette famille nombreuse avec des écarts de générations importants. Les quelques photos de famille qui illustrent l’ouvrage auraient pu jouer ce rôle, malheureusement elles sont semées dans l’ouvrage au petit bonheur la chance et bien après que les personnages photographiés soient mentionnés dans le récit. Et surtout, surtout, le récit est terriblement décousu, faisant tantôt des bonds en avant, tantôt des bonds en arrière. Le pire est le passage où l’auteur raconte des enterrements dans sa famille : d’abord celui du grand-père, mort très vieux, puis celui de sa mère, morte à la soixantaine, et enfin celui de la grand-mère. Quelle n’a pas été ma surprise de découvrir dans l’assistance … la mère, enterrée dans les pages précédentes ! Le reste est à l’avenant, un peu trop confus, comme si l’auteur avait tout écrit à la suite sans se relire sérieusement. De digression en digression, le lecteur ne sait plus où il est ni où il va. C’est dommage car il y a des passages savoureux, d’autres cocasses et on sent que l’auteur a une vraie tendresse pour cette grand-mère si maniaque, si tyrannique avec certains et perçue comme totalement hors norme dans le mochav.

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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

Je ne peux pas dire que j'ai détesté ce livre. L'auteur a un vrai talent de conteur, un style entraînant et communicatif.



J'ignorais ce qu'était un mochav (une coopérative agricole) et j'ai découvert l'idéalisme des personnes qui y ont consacré une partie de leur vie.



Meir Shalev partage avec les lecteurs des anecdotes familiales savoureuses et émouvantes. Et puis, il y ces personnages hauts en couleur comme la grand-mère Tonia, une maniaque de la propreté, Aharon, son mari fugueur.



Mais voilà, je n'ai accordé que 2 étoiles à ce livre. Car le récit est très décousu et Meir Shalev nous mène en bateau avec cette histoire d'aspirateur. Et puis, dans son élan, il devient parfois excessif et tire sur la corde. La 4ème de couverture laissait entrevoir certains éclairages sur la société israëlienne mais ceux-ci se sont révélés bien faibles.



Au final, une impression mitigée. Ce n'est pas une déception mais ce n'est pas une grande découverte.







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Que la terre se souvienne

" Un petit orphelin qui a grandi chez son grand-père n'est qu'un tonneau d'histoires "

Baruch, qui a perdu ses parents quand il était un tout jeune enfant, nous raconte toutes ces histoires. Celles qu'ils a entendues, celles qu'il a vécues.

Elles retracent l'aventure d'un groupe de jeunes gens qui, pour fuir l'explosion de l'antisémitisme en Russie, sont venus s'installer en Palestine, des décennies avant la naissance de l'État d'Israël. Animés par des idéaux socialistes, ils fondent une "compagnie de travail", s'installent dans la vallée de Jezreel en Galilée pour travailler la terre et s'y construire une nouvelle vie. Ce qui n'était qu'un campement de tentes puis de cabanes est devenu, à force de travail acharné, un village agricole prospère.

Arrivé à l'âge adulte, Baruch travaille toujours cette terre mais de façon plutôt singulière: il y enterre les pionniers du yishouv dans son jardin transformé en cimetière...



Comme Baruch, Meir Shalev se fait ici le gardien de la mémoire individuelle et collective en racontant le destin de chacun des habitants du moshav pour redonner vie à une époque qui s'efface.

Il s'est inspiré de l'histoire de sa famille, exilée elle aussi de Russie lors de la deuxième aliya, pour nous offrir une polyphonie vivante, colorée et dense car il existe autant de versions que de participants pour chaque événement qui a lieu dans cette vallée de Jezreel . Elle mêle le passé au présent, le tragique au comique pour nous dire les difficultés, les espoirs, les peurs, les amours, les haines, les secrets, les réussites et les rêves de ces hommes et femmes qui ont fait fleurir le désert.

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Le pigeon voyageur

Une histoire douce-amère dans laquelle les pigeons voyageurs transmettent aussi… l’amour

Avant 1948 en Israël, 2 enfants apprennent à élever des pigeons voyageurs pour le Palmach (unité paramilitaire juive sioniste en Palestine) et échangent des missives entre Tel Aviv et un kibboutz du centre du pays. Le « Bébé » et « la Fillette » vont devenir des experts en colombophilie.

Dans les années 90, Yair, guide touristique en Israël, est mal marié à une femme d’affaires américaine fortunée. Sa mère vient de mourir et lui a donné la mission de se trouver un endroit pour vivre et l’argent qui va avec.

Alors Yair tient sa promesse, se cherche une maison et raconte à sa mère sa recherche, les retrouvailles avec Tirza, un amour d’enfance, et la rencontre avec cet américain qui lui raconte l’histoire du Bébé…

Yair tisse son histoire en mêlant ses propres souvenirs à l’histoire du Bébé et de la Fillette, des histoires séparées par 50 ans mais reliées entre elles par… un pigeon voyageur.

Une incroyable histoire d’amour douce-amère et nostalgique… avec cependant quelques longueurs, car à l’issue de cette lecture, la colombophilie n’aura plus aucun secret pour vous !



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Ma Bible est une autre Bible

Je vous propose de faire un détour du côté de la Bible, il est logique que ce soit un juif qui s’y colle, mais un juif agnostique ce qui promet irrévérence et humour.



Meir Shalev est allé puisé dans les livres des Rois, la Genèse ou les Psaumes pour nous livrer ses commentaires à partir d’une quinzaine de récits bibliques, certains très connus d’autres pour lesquels vous êtes obligés d’aller tourner les pages d’une Bible pour lire l’épisode en son entier parce que votre mémoire vous joue des détours ou que vous ne l’avez jamais lu.

Meir Shalev ne prétend pas avoir la bonne explication, pas de bonne parole pour lui, simplement il s’interroge sur le mélange de politique et de croyance dans les temps bibliques. Chaque personnage de la Bible est passé dans sa moulinette et il en ressort que l’homme au fil des siècles n’a qu’assez peu varié, certes les modes de vie ne sont plus les mêmes mais les moteurs sont inchangés : envie, jalousie, violence, goût du pouvoir, mensonges ....On ne se sent pas en pays étranger.



Je vous livre deux ou trois exemples pour vous appâter un peu plus :

David, oui celui de Goliath, Shalev le présente ainsi « un chef de bande charismatique » contraint d’agir pour nourrir ses hommes « David découvrit les avantages du racket ». Voilà le ton est donné.

Malicieusement il présente les affres qui ont du être celles de Jacob qui dit-il le rendent jaloux « Non pas pour les nombreux moutons qu’il possédait ni pour avoir été le père des douze tribus, mais à cause de son premier rendez-vous avec Rachel, sa bien-aimée, devant le puits, dans le pays d’orient »



Sur un sujet plus épineux, Meir Shalev présente l’achat de la terre d’Israël par Abraham, un lopin de rien du tout qui devient la Grotte des Patriaches haut lieu biblique, cet achat est-il un investissement rentable ou un permis de confiscation ? Une évaluation aujourd’hui de cette grotte « en tant que bien occupé, une simple cave avec des locataires protégés, sans ascenseur et inconstructible, entourée de voisins arabes et de religieux, la grotte ne vaudrait guère plus de cent mille dollars » ce qui représente malgré tout par rapport à son prix d’achat une inflation d’un % et demi par an !



Bien d’autres héros sont présents : La reine de Saba, Samuel en campagne électorale, Hanna la femme stérile qui enfanta 7 fois....

C’est gentiment moqueur, parfois décapant, mais jamais irrespectueux. Les réflexions engendrées sont très contemporaines et nous interrogent aujourd’hui par delà les siècles.

Si comme moi vous n’êtes pas un lecteur assidu de la Bible vous allez vous y plonger avec délices et si vous êtes déjà un lecteur attentif des textes sacrés je gage que vous découvrirez des côtés surprenants.
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Mon jardin sauvage

Si vous n'aimez ni la nature, sa faune et sa flore ni le jardinage, passez votre chemin!

Je suis passionnée de jardinage aussi ce livre m'a enchantée. Un peu plus de 300 pages que j'ai dévorées. Meir Shalev, grand auteur israélien, nous explique que son travail d'écrivain est souvent détourné par son jardin qu'il soigne méticuleusement; cela peut paraître paradoxal puisqu'il s'agit d'un jardin sauvage! sauf que si les plantes sont sauvages, il faut trouver graines ou bubes dans la nature et planter au meilleur endroit. Je suppose que le jardin doit être grand puisqu'il héberge arbres, arbustes et toutes sortes de plantes (à fleurs) ainsi qu'une faune diversifiée.

ça ressemble à un jardin, ça? Non, on dirait une prairie disent des personnages peu délicats qui ont envahi le jardin.

Quand il arrive dans ce lieu, sur le devant il y a une pelouse exsangue, grande comme un mouchoir de poche, et entourée de ronces et de mauvaises herbes(?) avec quelques arbres ornementaux ou fruitiers, morts de soif. Derrière, le terrain est en pente et dégage un vaste panorama, ouvert sur la vallée de Jezréel. On trouve un vieux poirier, un citronnier moribond, un pacanier ombreux, deux chênes, trois térébinthes, un margousier, un jacaranda, un vieux figuier de Barbarie et un plant de cannabis.

Un examen superficiel montre qu'il va falloir de l'huile de coude mais notre homme, s'il aime la nature, a peu d'expérience: il a juste observé sa mère et son grand-père. Sur les conseils d'un ami, i sauve le citronnier. Il désherbe mais les "mauvaises herbes" repoussent après l'hiver; un dur combat en perspective mais cyclamens et anémones écarlates fleurissent en abondance. Il recueille graines, tubercules, bulbes etc. un peu partout: voisin, cimetière, bord de route. Il est beaucoup question de scilles dont les fleurs brillent comme la flamme incandescente d'une chandelle. Des enfants de maternelle viennent les admirer.

Un jardin sauvage est un jardin qui comme un autre a besoin d'être travaillé: désherber, cueillir, tailler, semer, planter, arroser...

Il déplore les insectes disparus: des crickets, les lucioles; des animaux aussi se raréfient comme les crapauds...

Il parle aussi des outils: ode à la brouette! les tuyaux d'arrosage sont piqués par les oiseaux, le pivert notamment.

Un peu d'anthropomorphisme : il imagine les sentiments et parle aux bêtes comme aux plantes; des moments d'humour comme la chasse au rat-taupe; match nul!

On ne s'ennuie vraiment pas; de plus les illustrations en noir et blanc et en couleurs sont très belles (on trouvera la table des illustrations en fin de livre)

L'auteur a parfaitement réussi à me faire partager son amour du jardin!

Un livre à relire de temps en temps pour les conseils et les anecdotes.

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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

Une chronique familiale, dans le mochav de Nahalal en Galilée. Une histoire vraie mais ne sait-on pas que chaque histoire à sa propre version?

Tout a commencé quand la maniaque Grand-mère Tonia a reçu de ce traître de beau-frère Yeshayahou un énorme aspirateur depuis l'Amérique. A moins que tout n'ait commencé bien avant cela, quand Tonia a quitté la Russie?



Meir Shalev prend le prétexte de ce fameux aspirateur, catalyseur de la mémoire familiale, pour nous raconter les siens; ses grands-parents, sa mère, ses oncles, leur cheval facétieux, leur âne qui, parait-il, peu voler la nuit. De souvenirs par procuration en souvenirs réels, d'anecdotes savoureuses en souvenances mélancoliques, l'auteur nous dresse le portrait d'une famille israélienne des années 40 jusqu'aux années 70, la sienne.



On rit parfois, on sourit souvent, on est ému tendrement aussi, devant le récit de cet adulte qui se souvient d'un temps qui n'est plus. Un roman qui se lit vite mais qu'on doit prendre le temps de savourer car il peut tenir chaud au creux de l'hiver.

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Le pigeon voyageur

Il met du temps à s'envoler ce récit, à la différence du pigeon voyageur en question justement, qui file, rapide et précis comme une flèche, droit vers sa maison, ici l'histoire tourne et retourne sur elle-même pendant plusieurs centaines de pages avant de décoller vraiment, mais le lecteur patient sera récompensé, car quand elle prend son envol, c'est comme une explosion, un lâcher de colombes, une balle en plein cœur. Et celui qui peut-être n'aura pas accroché tout de suite à la narration de l'auteur, ne pourra qu'être ébahi devant la tournure des choses, et surpris et heureux, il est à parier qu'il dira qu'en fin de compte, l'attente en valait bien la chandelle!



Pour le raconter comme je l'ai vécu, pendant les 200 premières pages je me suis un peu un ennuyée, je n'étais dedans qu'à moitié et je ne voyais pas bien où l'auteur voulait en venir avec ces récits croisés de jeunes hommes malmenés par la vie, la guerre ou leur femme...

Pendant les cent pages suivantes, mon intérêt et mon émotion sont allés crescendo et c'est avec plaisir que j'ai suivi non seulement les amour du Bébé et de sa fillette mais aussi la construction de la maison de Yair, qui est décrite avec une telle précision et une telle passion qu'elle donnerait presque envie de se mettre à la menuiserie!

Autour de la page 380 enfin, j'ai eu l'intense surprise de me retrouver en larmes et avec des frissons dans tout le corps et j'ai poursuivi ma lecture en remerciant le ciel d'avoir inventé Meir Shalev! Ni sur le moment ni avec le recul, je n'ai pu m'expliquer vraiment, le pourquoi du comment de l’émotion pure et dure qui m'a saisie à la lecture de son récit, mais toujours est-il que l'auteur a du déposer quelques chose d'à la fois très délicat et très puissant dans ses mots, pour qu'ils me saisissent avec une telle force!

Les cent dernières pages enfin sont de la même verve et je les ai lu avec une larme à l’œil et le mouchoir à la main.



De l'histoire malmenée du pays d’Israël à l'amour éternel, du deuil filial à la reconstruction de soi, du dévouement au désir et de la petitesse au sublime, c'est avec une grande finesse et tout en simplicité que Meir Shalev nous promène à travers une vie, celle de Yairi, et celles des siens qui, plus ou moins proches, l'entourent. Un petit bijou que ce roman, qui si il traine un peu en longueur, recèle des trésors d'intelligence, de bonté et d'émotion!
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Mon jardin sauvage

"Au premier plan deux champs bordés de cyprès à la silhouette élancée, que surplombaient deux rangées de collines boisées, émaillées de tout un camaïeu de vert. Une vraie palette impressionniste : le vert pâle du chêne du Mont Thabor, le vert foncé du chêne palestinien, le vert éclatant du caroubier et du pistachier - nuance légèrement fanée du térébinthe de Palestine et celle plus vibrante de l'arbre à mastic."



J'ai choisi la même citation que Dominique qui m'a donné envie de lire ce livre et qui, j'espère, me pardonnera. Dans ces lignes, je retrouve ce paysage méditerranéen que j'aime tant décrit avec une précision qui m'a interpellée.







Térébinthe, pistachier, arbre à mastic sont pour moi des essences voisines que je confonds. j'ai donc cherché sur Internet et trouvé que le Térébinthe de Palestine Pistacia palaestina et le Térébinthe Pistacia terebinthus qui donne la térébinthine sont des espèces distinctes, tous les deux de grands arbustes, arbres à feuilles caduques, tandis que Le Pistachier lentisque Pistacia lentiscus est un arbuste plus petit à feuilles persistantes, l'arbre à mastic qui pleure des larmes de sève donne le mastic à Chios, pourquoi seulement dans un petit territoire de cette île?







Je retrouve ces essences dans mes voyages aussi bien en Corse, au Maroc, en Grèce, en Turquie....ils me sont familiers et pourtant je ne m'étais jamais penchée sur la variété et la diversité de ces espèces.



Ce livre semble m'être destiné tout personnellement (quelle prétention! quelle outrecuidance!) non seulement cette flore méditerranéenne m'est chère mais le jardinage a été mon premier métier, et pas très loin du jardin de Méir Shalev! J'ai retrouvé avec joie les noms en hébreu des outils, passoires, cribles et tamis.







Mise  en scène des fleurs des champs comme le coquelicot, l'anémone ou le cyclamen, moins connue la Scille maritime dont j'ai fait la connaissance à Malte. Animaux des jardins : oiseaux, rat-taupe, araignées et serpents divers, mais aussi plus prosaïques fourmis et guêpes.







Chapitres tendres et ironiques quand l'auteur se met en scène désherbant à quatre pattes ou à la recherche d'une graine tombée sous son bureau.



Références aux pionniers venus d'Ukraine ou citations bibliques.







j'ai oublié d'écrire comme c'est drôle.



Livre utile : on y apprend comment préparer les olives!



Lecture délicieuse!



Seul regret, j'ai opté pour la lecture sur liseuse et les illustrations ne sont pas sous leur meilleur jour. Préférez le livre-papier
Lien : https://netsdevoyages.car.bl..
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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

« les meilleures fictions croissent sur le terreau de la réalité », peut-on lire à la dernière page. Le terreau, c’est la terre de Galilée ; la fiction, les anecdotes, liées à l’histoire d’une famille, d’un peuple.

Après la révolution d’octobre, une grande partie de la communauté juive quitte la Russie pour émigrer en Palestine. Ce fut le cas de Tonia, la grand-mère du narrateur qui s’installe à Nahalal où elle épousera Aharon, un émigré de la deuxième aliya. A partir de là, l’auteur évoque ses souvenirs d’enfance , les liens entre tous les membres de la famille, leurs dissensions et leurs habitudes de vie. Le livre est véritable documentaire sur la cuisine, les travaux agricoles au mochav, le langage, la géographie du pays, sa construction. ( peu sur la religion car la famille ne pratique pas). Beaucoup de personnages dans cette saga familiale où domine la fameuse grand-mère russe, « inflexible et exigeante envers elle-même comme envers autrui ». Tonia est de plus maniaque de la propreté : c’est pourquoi, le beau-frère d’Amérique, le traitre qui s’est installé en Californie, lui a envoyé un aspirateur, qui donne le titre à l’histoire et les pages humoristiques qui s’y rapportent. Mais Tonia a une qualité que tous les enfants lui reconnaissent : elle aime raconter les histoires. L’auteur s’en souvient pour nous les rapporter.

Le livre qui oscille entre humour, anecdotes plus ou moins merveilleuses, documentaire et autobiographie est un peu déroutant mais plein de renseignements pour le lecteur curieux. Et les redites, les retours en arrière, les phrases du type « j’y reviendrai » s’ils ralentissent le rythme permettent de mieux s’imprégner de cette histoire ( Histoire ?) originale.

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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

Un récit autobiographique, écrit par Meir Shalev, centré sur le personnage étonnant de sa grand-mère Tonia, arrivée en Israël en 1920 pour rejoindre son mari et s’établir dans le Mochav (coopérative agricole) de Nahalal.



C’est en effet une personnalité remarquable, une femme dure au travail, comme beaucoup à cette époque et plus particulièrement parmi les pionniers, mais aussi une maniaque de la propreté. Maniaque au point de laisser des chiffons à chaque poignée de porte pour essuyer les traces de doigts, maniaque compulsive et imposant à son entourage ses règles très contraignantes de nettoyage et de propreté dans la maison. Elle imposera à ses filles de récurer le sol avant chaque départ à l’école et tant pis si elles ratent la classe.



L’anecdote de l’aspirateur annoncé dans le titre est le fil conducteur de ces mémoires familiales. Mais il est surtout le prétexte à parler d’un tas d’autres choses, des oncles, des tantes, des petits travers de chacun et des bisbilles de famille. C’est un récit plein d’humour, qui m’a paru un peu long parce qu’il se focalise uniquement sur la famille de l’auteur et n’aborde aucunement « les ambiguïté de la société israélienne naissante » mentionnées sur la quatrième de couverture. Je suis donc restée sur ma faim.



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Ma grand-mère russe et son aspirateur américain

Quelle famille que la famille Shalev ! La grand-mère Tonia en est sans doute le personnage dominant mais tous les autres sont dépeints avec beaucoup d'humour par l'auteur, qui sait mieux que personne se moquer des travers de chacun. Grand-mère Tonia est obsédée par l'existence de la moindre saleté pouvant envahir vicieusement sa maison. Elle tyrannise tout le monde, obligeant à une vie spartiate. Parfois le grand-père se sauve mais elle arrive toujours à le retrouver. Certaines pièces dont la salle de bain sont fermées.

L'objet le plus mystérieux de la maison est un aspirateur, qui fut envoyé d'Amérique par un beau-frère, traître à Israël, parti faire des affaires aux USA. Ce "sweeper" est devenu un personnage à part entière dans la saga familiale au même titre que l'âne volant et le cheval caractériel. D'autant que la grand-mère s'aperçoit, horreur ! que la saleté est stockée dans le ventre de ce cheval de Troie. Sa fureur éclate. Elle le nettoie et l'enferme pendant 40 ans dans la salle de bains sans que personne ne puisse le voir. Autant dire aux oubliettes !

A sa mort, l'aspirateur a disparu.

Sous l'humour, on trouve toutefois le rigorisme des premiers pionniers israéliens, la rudesse de leur vie et la naissance complexe de la jeune société israélienne.
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