L'auteur décadent de la littérature japonaise (Dazai Osamu) - Art Japonais
Les gens prennent toujours un air sérieux quand ils disent des mensonges. Le sérieux de nos dirigeants, ces derniers temps !
“Depuis combien de temps n’avais-je pas fait ce geste : déplier devant moi une carte de la capitale ? Dix ans plus tôt, quand j’étais venu m’installer à Tokyo, je n’avais d’abord pas trouvé le courage d’aller acheter une carte comme celle-là : l’idée de passer pour un campagnard et d’essuyer les moqueries m’avait plusieurs fois fait reculer.
A présent encore, en regardant l’image de Tokyo, pareille à une feuille de mûrier rongée par un ver à soie, je pensais à chacun des êtres qui pouvaient habiter cette ville, à chacune de leurs vies.”
A l'heure actuelle je ne connais ni le bonheur ni le malheur. La vie passe.
Jusqu'ici, j'ai vécu dans l'enfer. Dans le monde des humains, c'est la seule chose
qui me semble vraie.
La vie passe, rien d'autre.
Cette année, je vais avoir vingt-sept ans. Mes cheveux ont blanchi très sensiblement. De l'avis général je parais plus de quarante ans.
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Dans la plupart des films, le mot «fin» apparaît au moment précis où s'unit le couple heureux ; mais ce que nous, spectateurs, aimerions savoir, c'est quelle sorte de vie dès lors commencera réellement. La vie des hommes n'est pas une succession ininterrompue d'épisodes excitants. Le lot des pauvres humains, en général, consiste plutôt à vivre dans une amertume blême et désolée.
- Je suis battu : me voilà amoureux de vous.
Ah ! les voilà.
Le père pose son stylo et se lève. Pour les sirènes il ne prend guère la peine de se déranger mais, dès que les canons de DCA se mettent à retentir, toutes affaires cessantes, il coiffe sa fillette de cinq ans de sa capuche de protection, la prend dans ses bras et pénètre dans l’abri antiaérien. La mère s’y trouve déjà, accroupie dans le fond, leur petit garçon de deux ans sur le dos.
(Incipit)
C’est seulement la forme que prend cette conviction qu’on appelle « aventure ». Vous n’avez pas l’âme aventureuse parce que vous n’avez pas la force de croire. Est-ce donc vulgaire de croire ? Est-ce se dévoyer ? Vous autres, les gens comme il faut, vous vivez dans l’orgueil de ne croire à rien, alors vous êtes insupportables. Et ce n’est pas une question d’intelligence. C’est quelque chose de bien plus vil : la mesquinerie. C’est la preuve que vous êtes obsédés par la peur de ne pas y trouver votre compte.
Pour moi, la vie est sans but.
Je trouve étrange, extraordinaire, que pas une seule fois elle n'ait dit : "Je me sens seule sur terre...". Ces mots auraient certainement éveillé en moi de la compassion, mieux qu'un déluge de lamentations sur la destinée des femmes. Cependant, bien que ces mots de solitude ne soient jamais sortis de ses lèvres, tout son corps était enveloppé des effluves d'un isolement affreux; à son contact mon propre corps s'enveloppait des effluves de la mélancolie plus ou moins cuisante que je portais en moi; toutes ces émanations se mêlaient. Comme "la feuille morte qui descend au fond de l'eau pour se poser sur le rocher", j'étais prêt à m'éloigner, par crainte et par angoisse.
«Le fait qu'un être ait un titre de noblesse ne suffit pas à faire de lui un aristocrate.»