C'est une valse lente et langoureuse. Une valse à deux temps qui prend parfois les allures d'une marche funèbre.
Un-deux ; un-deux
Un – Premier récit, l'enfant s'imagine l'idylle qu'ont vécu ses parents avant de le concevoir.
Deux – Deuxième récit, la vérité cinglante surgit de nulle part, ternissant l'idylle sans espoir de retour.
Un – L'Inconscient familial rôde, fantomatique.
Deux – La réalité blessante explose en plein coeur.
Dans ce magnifique récit, la culpabilité morbide se mêle à la beauté du verbe, dont l'intensité va crescendo. Un plongeon, un dernier plongeon, mon amour, au coeur de l'atroce. Un secret, un étrange secret percé à jour par un enfant qui n'en est plus un. C'est effrayant comme l'ineffable fait somatiser, comme les non-dits ressurgissent sous des formes détournées, comme le ça, le moi et le surmoi sont capables de s'aligner pour construire une résilience.
N'allez pas croire que les enfants ne comprennent pas… ils savent, tout. Ils remplissent le trou abyssal que l'adulte creuse à leur insu, à l'instar de ce creux qui ronge la poitrine du jeune narrateur et qui se résorbe au fur et à mesure que la vérité se fait jour.
Maintenant, moi aussi, je sais.
J'en profite pour glisser ici un petit mot au sujet de la superbe adaptation ciné de Claude Miller et dont le spectateur est immédiatement poussé dans les yeux de cet enfant, lui-même spectateur de sa propre vie, de sa propre histoire.
Le jeu des acteurs est magnifique, emprunt d'une pudeur infinie qui ne cache pourtant rien de la colère, de la douleur et de la culpabilité dont ils se vêtissent.
Le réalisateur nous perd dans une chronologie où les histoires s'entrecroisent au sein d'un même lieu. 1940, 1950, 1965, 1985… Où sommes-nous ? Quelle place pouvons-nous nous accorder ? Notre présence seule est un acte dérangeant, à l'image de ce petit garçon qui se trouve là où on ne l'attend pas.
Ce film, magnifique, très beau et touchant, me semble respecter à la lettre le récit de Philippe Grimbert, à cela près, peut-être, que le fameux « grand frère » perd un peu de sa vigueur. La violence de la guerre, la cruauté et le pathos sont exclus avec tact, au profit d'une gravité profonde qui convient parfaitement à ces acteurs : Bruel, le beau gosse à la personnalité affirmée est sublime de virtuosité, Cécile de France, la mannequin au corps de sirène développe une aura solaire, et Valentin Vigourt, en enfant lunaire nous arrache les larmes… quelle belle distribution, quel film admirable qui dit sans frapper, qui tait sans mentir, qui fuit et rattrape. Moi je dis Bravo !
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