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Citations de Rachel Carson (89)


une civilisation peut-elle mener une guerre sans merci contre des vies sans se détruire elle-même et sans perdre jusqu'au droit de se dire "civilisée" ?
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Ayant toujours aimé les lichens parce qu’ils me transportent à chaque fois dans un autre monde – bagues en argent sur une pierre, étranges petites formes, semblables à des os, à des cornes ou à des coquilles de créatures marines – j’étais heureuse de découvrir que Roger [son petit-neveu] était attentif et réagissait aux variations magiques que la pluie provoquait dans leur apparence. Les sentiers forestiers étaient tapissés avec ce qu’on surnomme à tort de la mousse des rennes bien qu’il s’agisse en réalité d’un lichen. À la manière d’un tapis d’entrée démodé, il crée une bande étroite de gris argenté à travers le vert des bois, en se déployant ici et là pour recouvrir une plus grande zone. Par temps sec, le tapis de lichen paraît mince ; il est fragile et se désagrège sous les pieds. Aujourd’hui, il est saturé par la pluie qu’il a absorbée comme une éponge, il est épais et élastique. Roger semble séduit par sa texture, il s’agenouille pour la toucher avec ses genoux potelés. Il court d’une plaque à l’autre, fait des bonds et plonge dans ce tapis souple et profond avec des cris aigus de plaisir.
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Fable pour demain
Il était une fois une petite ville au cœur de l’Amérique où toute vie semblait vivre en harmonie avec ce qui l’entourait. Cette ville était au centre d’un damier de fermes prospères, avec des champs de céréales et des coteaux de vergers où, au printemps, des nuages blancs de fleurs flottaient au-dessus des champs verts. À l’automne, érables, chênes et bouleaux formaient un incendie de couleurs qui brûlait et tremblait sur fond de pins. Les renards glapissaient dans les collines et les cerfs traversaient silencieusement les champs, à demi visibles dans les brumes matinales de novembre.
Le long des routes, les lauriers, les viornes, les aulnes, les hautes fougères et les fleurs sauvages enchantaient l’œil du voyageur presque toute l’année. Même en hiver, les bords des routes étaient beaux ; d’innombrables oiseaux venaient y picorer les baies et les graines que les herbes sèches laissaient pointer au-dessus de la neige. La campagne était d’ailleurs réputée pour l’abondance et la variété de ses oiseaux, et lorsque les flots de migrateurs déferlaient au printemps et à l’automne, les gens accouraient de très loin pour les observer. Des pêcheurs venaient aussi, attirés par les ruisseaux dont l’eau claire et fraîche descendait des collines, cherchant les trous ombreux affectionnés par les truites. Ainsi allaient les choses depuis les jours lointains où les premiers pionniers avaient édifié leurs maisons, creusé leurs puits et construit leurs granges.
Et puis un mal étrange s’insinua dans le pays, et tout commença à changer. Un mauvais sort s’était installé dans la communauté, de mystérieuses maladies décimèrent les basses-cours ; le gros bétail et les moutons dépérirent et moururent. Partout s’étendit l’ombre de la mort. Les fermiers déplorèrent de nombreux malades dans leurs familles. En ville, les médecins étaient de plus en plus déconcertés par de nouvelles sortes de dégénérescences qui apparaissaient chez leurs patients. Il survint plusieurs morts soudaines et inexpliquées, pas seulement chez les adultes, mais aussi chez les enfants, frappés alors qu’ils étaient en train de jouer, et qui mouraient en quelques heures.
Il y avait un étrange silence dans l’air. Les oiseaux par exemple – où étaient-ils passés ? On se le demandait, avec surprise et inquiétude. Ils ne venaient plus picorer dans les cours. Les quelques survivants paraissaient moribonds ; ils tremblaient, sans plus pouvoir voler. Ce fut un printemps sans voix. À l’aube, qui résonnait naguère du chœur des grives, des colombes, des geais, des roitelets et de cent autres chanteurs, plus un son ne se faisait désormais entendre ; le silence régnait sur les champs, les bois et les marais.
Dans les fermes, les poules couvaient, mais les poussins cessaient d’éclore. Les fermiers se plaignirent de ne plus pouvoir élever de porcs : les portées étaient faibles, et les petits mouraient au bout de quelques jours. Les pommiers fleurirent, mais aucune abeille n’y venait butiner, et sans pollinisation, il n’y avait plus de fruits.
Les bords des chemins, naguère si charmants, n’offrirent plus au regard qu’une végétation rousse et flétrie, comme si le feu y était passé. Eux aussi étaient silencieux, désertés de tout être vivant. Même les ruisseaux étaient sans vie, les poissons morts, et les pêcheurs partis.
Dans les gouttières, entre les bardeaux des toits, des paillettes de poudre blanche demeuraient visibles ; quelques semaines plus tôt, c’était tombé comme de la neige sur les toits et les pelouses, sur les champs et les ruisseaux.
Aucune sorcellerie, aucune guerre n’avait étouffé la renaissance de la vie dans ce monde sinistré. Les gens l’avaient fait eux-mêmes.
Cette ville n’existe pas, mais elle aurait facilement un millier d’équivalents aux États-Unis ou n’importe où dans le monde. Je ne connais aucun endroit qui a fait l’expérience de tous les malheurs que je décris. Et pourtant, chacun de ces désastres a réellement eu lieu quelque part, et de nombreuses communautés bien réelles ont déjà souffert d’un certain nombre d’entre eux. Un effroyable spectre s’est insinué parmi nous sans que nous nous en rendions compte, et cette tragédie imaginaire pourrait aisément devenir une réalité brutale que nous connaîtrons tous.
Qu’est-ce qui a déjà réduit au silence les voix du printemps dans d’innombrables villes américaines ? Ce livre essaie de l’expliquer.
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En ce qui concerne l'élégance du style et la puissance d'évocation, on ne saurait trouver dans les dix dernières années meilleure prose que celle de Rachel Carson dans Cette mer qui nous entoure (...)

George Steiner
langage et silence
chapitre "littérature et post-histoire"
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L’emploi de procédés thérapeutiques de plus en plus puissants et la fabrication de substances chimiques étrangères à l’expérience biologique font que les barrières normales qui empêchaient les agents mutagènes de pénétrer jusqu’aux organes internes, sont franchies de plus en plus souvent.

Sir Macfarlane Brunet.
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Chaque dose nouvelle, si faible soit-elle, contribue à l’amoncellement de substances chimiques dans les tissus du corps, et donc à une intoxication progressive.
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La nature n'est plus équilibrée de la même façon qu'à la période pléistocène, mais elle est toujours harmonieuse, elle rassemble toujours les êtres vivants dans un système hautement organisé, complexe mais précis ; il serait aussi grave de l'ignorer que de négliger la loi de la pesanteur lorsqu'on suit le bord d'une falaise. L'équilibre de la nature n'est pas statique, mais fluide, changeant, toujours en cours d'adaptation. L'homme appartient à la nature ; parfois cet équilibre le favorise ; parfois aussi - et trop souvent par sa propre faute -, l'évolution se fait contre ses intérêts.
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Notre grand sujet d'inquiétude est l'effet différé produit sur l'ensemble de la population par les absorptions répétées de petites quantités de ces pesticides invisibles qui contaminent notre globe.
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En dehors du risque d'extermination de l'humanité par une guerre atomique, le problème crucial de notre époque est donc la contamination de notre environnement par des substances d'une incroyable nocivité - des produits qui s'accumulent dans les tissus des plantes et des animaux, pénètrent même jusque dans les cellules reproductrices, où elles altèrent les éléments qui déterminent l'avenir par le moyen de l'hérédité.
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Ces insecticides ne sont pas des poisons sélectifs ; ils n'identifient pas l'espèce particulière que nous voulons supprimer ; on les utilise uniquement à cause de leur virulence. Ils détruisent toutes les vies qu'ils rencontrent : le chat dans la maison, le bétail dans la ferme, le lapin dans le champs, l'alouette dans le ciel.

[p131]
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Il n'est donc point d'eau qui soit absolument du Pacifique ni absolument de l'Atlantique, ni absolument de l'océan Indien ou de l'océan Glacial antarctique.
Les vagues qui nous vivifient aujourd'hui à Virginia Beach ou à La Jolla ont peut-être, voilà plusieurs année, clapoté à la base d'iceberg ou reflété les rayons du soleil méditerranéen avant de cheminer vers nous par des routes invisibles, les courants profonds qui réalisent l'unité de l'océan. p216
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C'est un plaisir rare, dit Darwin, que de voir les oiseaux sauvages se percher sur les épaules d'hommes, et le plaisir pourrait être beaucoup moins rares si les hommes se montraient moins destructeurs. p151
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Notre esprit à toujours subi l'attrait puissant des îles. Sans doute est-il instinctif pour l'homme, animal terrestre, de trouver une satisfaction à la brève intrusion d'une terre dans l'écrasante immensité des mers. p138
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Les sédiments sont l'épopée de la Terre. Quand nous serons assez savants, nous pourrons y lire toute l'histoire du passé. Car tout y est écrit. p126
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Les grandes sociétés de produits chimiques subventionnent abondamment les recherches sur les insecticides dans les universités ; il en résulte des bourses agréables pour les étudiants, et des postes intéressants dans les laboratoires. Personne, au contraire, ne fournit d’argent pour améliorer des méthodes biologiques qui n’offrent pas les fortunes promises par l’industrie chimique. La biologie demeure donc le fief des fonctionnaires, des mal payés.
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D’une part, grâce à une sélection génétique dont nous reparlerons, les insectes deviennent résistants à nos produits, d’autre part, plus nous détruisons d’insectes plus il en naît, parce que nos campagnes chimiques affaiblissent les défenses prévues par la nature elle-même pour empêcher un développement excessif des espèces.
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Nous sommes à l’âge du poison ; le premier venu peut acheter sans explications à tous les coins de rue des substances beaucoup plus dangereuses que les produits pour lesquels le pharmacien exige une ordonnance médicale. Il suffit de cinq minutes de promenade dans un supermarché pour effrayer le client le plus intrépide, lorsqu’il connaît un peu la nature des produits chimiques offerts à son choix.
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Sommes-nous donc hypnotisés au point d’accepter le médiocre et le nocif, comme si nous avions perdu la force ou la pénétration nécessaire pour exiger le bon ? Selon l’écologue Paul Shepard, pareil état d’esprit idéalise une situation où nous avons tout juste la bouche hors de l’eau, où le milieu naturel a presque atteint le maximum de corruption compatible avec la survie de l’homme. Pourquoi, demande Shepard, devrions-nous accepter d’absorber des poisons sous prétexte qu’ils ne sont pas tout à fait meurtriers, de vivre dans une ambiance pas tout à fait insupportable, de fréquenter des êtres pas tout à fait ennemis, d’entendre des bruits de moteurs pas tout à fait assez stridents pour nous rendre fous ? Qui donc voudrait vivre dans un monde dont la caractéristique est d’être « pas tout à fait mortel » ?
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Car tout finalement retourne à la mer, à Okeanos, commencement et terme de tout, fleuve éternel du temps.
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Dans le monde des êtres vivants, il est peu probable qu'il y ait une relation plus équilibrée que celle que la vie insulaire entretient avec son environnement. Au milieu d'un immense océan, régi par des courants et des vents dont les trajectoires ne changent guère de route, le climat ne connaît que de faibles variations. Il existe peu de prédateurs naturels, peut-être aucun. La lutte âpre pour l'existence, qui est souvent de règle sur le continent, est adoucie sur les îles. Lorsque ce modèle délicat de vie est brusquement modifié, les créatures insulaires ne sont pas préparées à réaliser les ajustements nécessaires à leur survie.
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— Il s’en est fallu d’un cheveu ! Sans son regard rapide, sans ses yeux de lynx, XXX XXXX, en ce moment, ne serait peut-être plus de ce monde ! Quel désastre pour l’humanité ! Sans parler de vous, Hastings ! Qu’auriez-vous fait sans moi dans la vie, mon pauvre ami ? Je vous félicite de m’avoir encore à vos côtés ! Vous-même d’ailleurs, auriez pu être tué. Mais cela, au moins, ce ne serait pas un deuil national ! Héros de Agatha Christie

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