Cette année, dans le cadre de la programmation cinéma de Quais du Polar, James Grady présentait "Les Trois jours du Condor" de Sydney Pollack au Com?dia, Irvine Welsh "Trainspotting", Jérôme Leroy "Vanishing Point", Richard Price "Assurance sur la mort" et Philippe Jaenada "Laura" à l'Institut Lumière, Bertrand Tavernier "Dans la brume électrique" au CNP Terreaux, David Lagercrantz "Millénium" au Pathé Bellecour, et bien d'autres ! Retrouvez toute la programmation ici : http://www.quaisdupolar.com/wp-content/uploads/2013/06/QDP16_PROGRAMME-BD.pdf
Vidéo réalisée par les étudiants de Factory.
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- "Je supporte pas la douleur", geignit-elle en l'imitant. Si vous voulez savoir ce que c'est la douleur, faites donc un bébé et revenez m'en parler.
- Hé, j'en ai eu six. (réponse de l'homme)
- Pas vous !
- Bon, j'étais dans le coin.
- Notre pasteur assure que Jésus veut qu'on essaie de pardonner , mais je peux vous dire, ces dernières années , je suis à fond pour le dieu des juifs .

Emilio se déshabilla et se mit sous la douche. Il aimait sentir l’eau sur son corps. Il aimait son corps. Il soulevait encore de la fonte un jour sur deux à la caserne. Il sortit de la baignoire, s’admira dans le miroir en pied vissé au dos de la porte de la salle de bains. Ses muscles et sa bite étaient toujours plus impressionnants dans la glace, même si, Dieu sait, il n’avait pas besoin de ça pour être impressionnant. Il avait gardé le physique qui lui avait valu le titre de Monsieur New-York, vingt-deux ans plus tôt, aussi bien que pouvait le faire un homme de quarante-huit ans. Quatre-vingt de tour de taille, cent-dix neuf de tour de poitrine, le biceps à quarante-cinq en contraction et la queue à vingt-deux cinq, fluctuant entre vingt et vingt-cinq. Il connaissait des gars tout en muscles qui avaient des zobs comme son petit orteil. Ça manquait pas. Lui, non. Il était monté comme un âne. Il se massa le sexe pour le faire durcir, raidit ses muscles, fit jouer ses biceps, regarda ses cuisses onduler sur l’ordre de son cerveau. Il fit rouler ses pectoraux sous la peau et son érection s’intensifia : au moins vingt-cinq centimètres.
Tes seins sont des collines dorées de margarine,
Tes tétons sont comme des cerises.
Si la bombe A nous tombait dessus par surprise,
C’est là que j’enfouirai ma trombine.
Buddy relut son poème en plissant le front, remplaça « tétons » par « mamelons », « collines » par « monts ». Raya « bombe A » et écrivit « bombe H ».

Cette nuit-là, Richie fit un cauchemar.
Complètement nu, il se faisait dérouiller par deux gigantesques Noirs portant des lunettes de soleil qui lui enfonçaient la tête dans le béton du terrain de jeu. Tambours vaudous. L’âcre odeur de pisse de l’ascenseur le faisait hoqueter. On l’avait mis à cuire dedans, dans une grande marmite noire au-dessus d’un feu roulant. Clinton Stitch, le chef des Extras, remuait le pipi avec une longue louche terminée par une tête de mort. On l’attacha ensuite sur un chevalet et les Wong lui assouplirent la couenne du tranchant de la main. Teddy les regardait faire en tunique brodée et calotte de soie noire ; il avait les yeux maquillés et une moustache mécheuse de soixante centimètres de long, les mains jointes, cachées dans les manches du vêtement. Soudain, elles apparurent, avec des ongles de cinq centimètres au vernis noir. Il les claqua deux fois l’une contre l’autre et deux gros chinetoques chauves amenèrent P., nue elle aussi, les mains liées derrière le dos. Ils la tirèrent par les cheveux, la forcèrent à s’agenouiller devant Teddy, qui ouvrit sa tunique. Son énorme dard se dressait, orné de chaque côté de tatouages de dragon crachant le feu. P. reçut l’ordre de le sucer, ce qu’elle fit avec avidité, ne s’arrêtant que brièvement pour respirer et gémir : « J’aime ça, j’aime ça. »
Richie se réveilla avec la plus grosse trique de sa vie que quelques coups de poignet transformèrent en giclées couleur nacre.
- Ecoute , [...]. File moi un nom et je te donne une carte Vous-êtes-libéré-de-prison.
- Je suis pas en taule .
- Pas encore .
Vous savez, la vie, la vie et la mort, écoutez les jeunes, la vie et la mort, c’est simple, pour eux. La mort n’est pas grand-chose. La mort, c’est la vie.
A cette heure, le campement des médias le long du train silencieux avait pris l’aspect d’un bivouac militaire de la guerre de Sécession. Le matériel électronique pendait au grillage comme des cartouchières ou des gourdes ; l’aube tourbillonnante transformait en fantômes les quelques cameramen encore debout, marchant d’un pas raide et lent tels des pervers nocturnes.
Sur le terrain de jeu, Richie Gennaro, dix-sept ans, seigneur de la guerre des Vagabonds, était entouré de ses homologues des Rays, des Pharaons et des Bourreaux. Alliés susceptibles. Conversation tendue. À l’ordre du jour…
— Faut arrêter les négros.
— Tu crois que les Boules à Z de Fordham se mettraient avec nous ?
— Si on les a avec nous, c’est réglé.
— Oublie pas les Wong. Ils connaissent le judo les bridés.
— C’est pas avec des prises de judo que tu peux lutter contre ça !
— Hé, range ce truc ! Putain tu veux qu’on se fasse tous agrafer ?
— Et les mecs de Lester Avenue ?
— Nan, c’est des tueurs, ces gars-là.
— Justement. Ils te tuent aussi bien un bamboula.
— Paraît que les bombardiers se sont mis avec les Extras parce que Clinton Stitch a un cousin chez eux.
— Les bronzés, ils ont toujours des cousins partout, t’as remarqué ?
— Les Bombardiers… merde… on est mal.
Le crissement des pneus dans la ruelle jonchée de débris d'ampoules électriques rappelait celui du pop-corn atteignant l'orgasme.