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Citations de Robert Bober (103)


page 81 [...] Un jour, Betty trainait un peu à l'atelier avec une tartine de pain, comme elle fait souvent après l'école et comme c'est juste après la colonie de vacances, Jacqueline lui avait demandé de chanter une chanson de la colonie. Bien entendu, à la CCE (Commission Centrale de l'Enfance. Organisme créé avant la Libération par l'Union des Juifs pour la Résistance et l'Entraide dont la tâche était essentiellement la sauvegarde des enfants juifs) on ne leur avait pas appris, aux enfants, à chanter les chansons de Tino Rossi, aussi Betty a chanté une chanson en yiddish :

"Es hot di kleyne Tsipelè
Farbisn zich a lipelè
- Tsipelè, vos veynstu ?
An apelè, dos meynstu ?
- Neyn, neyn, neyn,
Ver zogt dos, az ich veyn (1) ?"

(1) C'est la petite Tsipelè
qui mord sa petite lèvre.
- Tsipelè, pourquoi pleures-tu ?
Est-ce une pomme que tu veux ?
- Non, non, non,
Qui ose dire que je pleure ?

Pour chanter, Betty s'était appuyée sur la machine de son père, pas très loin de Charles qui comme Maurice s'était arrêté de piquer à la machine pour ne pas faire de bruit. D'ailleurs, à part Mme Paulette, bien sur, tout l'atelier s'était arrêter de travailler. M. Albert, lui, essayait de tracer un vêtement sur un matelas de tissus, mais c'était surtout pour occuper ses mains et il suffisait de les voir trembler pour savoir que le petit bout qui chantait était la prunelle de ses yeux.
A la fin de la chanson, Charles, comme il fait souvent, a essuyé ses lunettes puis il a avancé sa main vers Betty. Il a caressé -non, pas caressé-, il a seulement touché du bout des doigts la tresse blonde qui reposait sur l'épaule de Betty. C'est à ce moment que le visage de Mme Andrée est devenu aussi blanc que la neige en Pologne. Alors j'ai applaudi. J'ai applaudi parce que c'était ce qu'il y avait de mieux à faire. Les autres aussi ont applaudi parce que c'était ce qu'il y avait de mieux à faire. [...]
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Mme Sarah le suppliait de quitter son caftan et de se faire couper la barbe :
- Mieux vaut un Juif sans barbe, qu'une barbe sans Juif !".
Lui ne s'en remettait qu'à la justice divine jusqu'au matin où une autre justice l'a expédié à Drancy. avec dans sa poche la clef de la synagogue.
(p. 46)

"Votre liste de gens à marier sent le savon, madame Sarah." Ce qui d'ailleurs était vrai.
"Vous préfériez peut-être l'époque où c'était le savon qui sentait les gens à marier, monsieur Léon ?"
Pour une fois j'ai pas eu la réplique parce que tout le monde à l'atelier vous dira que personne, même moi, n'a jamais osé faire une plaisanterie avec le savon.
(p 47)
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Voilà. On vient dans un atelier pour apprendre un métier. On apprend à regarder. On apprend à écouter. Et on apprend aussi comment vivent les hommes. (p. 35)
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J'aimais bien ces repas. Des repas partagés. Ce partage, tu en parles dans - Des goûts et des Dégoûts-, ce petit livre qui a été publié par "L'Echoppe" en 1996 et que Pierre Alechinsky a accompagné de dessins.
Comme ce texte a eu une sortie discrète, cette fois encore, je te cite : "Déjeuner ensemble n'est pas forcément partager un repas. On ne partage un repas que si chacun mange la même chose. Au restaurant, chacun vit sa vie alimentaire, c'est le régime de la séparation. Au fond, un repas est réussi lorsque tout le monde mange la même chose et lorsque la même chose aime également tous les convives ( imaginairement bien entendu). " (p. 40)
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Être privés de récréation nous semblait aller de soi. On portait une étoile jaune parce qu'on était juifs et on nous punissait parce que c'était comme ça que les choses devaient se passer. On ne se disait même pas que ce n'était pas normal.






(En fait, ce n'est pas une punition, l'instituteur fait rester les deux garçons pendant la récréation pour leur faire cadeau d'un livre : c'est le premier jour d'école de port obligatoire de l'étoile jaune, le 8 Juin 1942.)
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Et puis un jour- nous sommes alors en 1959-vous êtes là tous les deux, sur le petit écran comme on disait alors. Vous êtes là, assis l'un en face de l'autre parce que toi, Pierre, tu animais avec Pierre Desgraupes "Lectures pour tous", cette émission, la toute première dans laquelle on pouvait voir en gros plan les visages de ceux qui écrivaient des livres, et parce qu'André en avait écrit un : - Le dernier des Justes-
Je ne vais pas raconter ici l'importance de ce livre, dire en quoi il était fondateur, inaugural. D'autres l'ont fait et, j'en suis persuadé, on continuera longtemps encore à le faire. Mais je voudrais essayer de te dire ce que j'ai appris ce soir-là en vous regardant, en vous écoutant.
C'est ce soir-là, j'en suis sûr maintenant, que j'ai appris à écouter les silences. Ceux d'André" étaient impressionnants. Comme s'ils permettaient aux mots de ne pas s'égarer. (p. 37)
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Alors, je fais ce qu'on peut faire de mieux. Je relis les livres que j'ai aimés. Parfois même, je m'y ajoute. Et je fais comme Erri de Luca : " Je cherche dans les livres la lettre, la phrase qui a été écrite pour moi et que donc je souligne, je recopie, j'extrais et j'emporte". (p. 28)
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- lire c'est vivre-

(...) Pour expliquer ma surprise, il faut dire ce qu'était cette émission. Et pour le dire, le mieux, c'est de reprendre ce que tu en as dit dans-Autobiographie d'un lecteur-
"Nous donnions à lire le même livre à cinq ou six personnes. Nous leur demandons de "souligner, à la première lecture, les phrases qui, spontanément, leur avaient plu pu déplu". Le questionnement, en principe, ne concernait que les phrases soulignées. (...)
"Par leurs soulignements, les lecteurs s'approprient le livre, disais-tu." (p. 21)
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Mais ce que vous ne savez pas, c'est que je me suis sauvé juste avant d'entrer au Vel' d'Hiv' (...). Ca court vite un garçon de quatorze ans. Ca court vite surtout quand il ne se retourne pas pour voir ses parents une dernière fois...
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J'appelle des visages, des souvenirs, et ce ne sont pas toujours ceux que j'appelle qui se présentent.
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- Avec l'accent qu'il a, Raimu, il ne peut pas être un bon comédien, a encore dit Mme Paulette
- Madame Paulette, a encore répondu Léon, est-ce que je vous dis qu'avec l'accent que vous avez, vous ne pouvez pas être une bonne finisseuse ? Ne vous fâchez pas, je l'ai pas dit. Je l'ai pas dit parce que ça n'a rien à voir. Mais avec Raimu justement ça a à voir. Ca a à voir parce que son accent, c'est la vérité et un comédien qui n'a pas la vérité, il aura beau marcher sur les mains ou grimper au plafond, ça ne sera jamais un grand comédien.
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Ecoute ce texte, Pierre :
"Que tirerons-nous de ces questions ? Que tirerons de toutes les réponses qui nous entraîneront à poser d'autres questions, puisque toute question ne peut naître que d'une réponse insatisfaisante ?
- La promesse d'une nouvelle question. "

C'est dans- Le Livre des Questions- d'Edmond Jabès. (p. 177)
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Il y a là deux lignes qui m'arrangent bien : "Je vis, d'abord- j'écris, parfois, ensuite. Mais il m'arrive de sentir davantage ce que veut dire vivre en écrivant"
[Pierre Reverdy ]
Qui m'arrangent bien aussi, ces trois autres vers:
je vais essayer d'écrire
Déjà je sais ce que je voudrais dire
Il me manque les mots que les autres ont pris. (p. 45)
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Alors regardons ces cannes. Regardons les de près.
Quelques-unes ont été regroupées au musée du Judaïsme de Vienne. On les appelait alors "bâtons de promenade viennois".

Il avait raison, Schnitzler : les autres ne l'oubliaient pas.

C'est grave à la directrice ce de chemisée que j'ai retrouvé la trace d'un cousin, arrière-petit-fils lui aussi de Wolf Leib Fränkel. Ce cousin était le fils du photographe auteur du portrait de notre arrière- grand-père, et je me faisais une joie de le rencontrer. Il m'a fallu déchanter car je n'avais pas imaginé qu'il refuserait de me recevoir. Traumatisé par la déportation de ses parents, il a décidé de cesser d'être juif et il a effacé toutes les traces pouvant le révéler. La rencontre espérée n'eut donc pas lieu.

Et je ne sais pas comment on fait pour cesser d'être juif. (p. 86)
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Si tu le vois consacrer son temps au classement de ses papiers, de ses écrits, si tu le vois dater et ranger d'anciennes photographies de famille, et s'il le fait de la manière la plus consciencieuse possible, de la manière la plus précise possible, alors il y a lieu de s'inquiéter : dans sa volonté de faire survivre qulque chose et de laisser quelque chose et de laisser quelques signes, il faut simplement voir la présence de la mort qu'inconsciemment peut-être il a appelée.
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Mais elle ne m'énervait pas comme les assimilés qui, eux, avaient pourtant cessé de m'énerver le jour où j'ai compris qu'ils ne se sentaient pas vraiment juifs. Encore que, depuis qu'ils ont eu leur part de surprises entre l'étoile jaune, Drancy et la route vers l'Europe de l'Est qu'ils méprisaient tant, ils me sont devenus plus fraternels ou, plutôt, je leur suis devenu plus fraternel puisque ceux qui en sont revenus vont sûrement rester juifs jusqu'à la fin de leurs jours.
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- Pourquoi ? C'est cher PIcasso ?
- Exactement, je ne peux pas dire. Peut-être... dix millions.
- Dix millions ?
Je me suis aussitôt demandé, comme les peintres sont aussi payés à la pièce, combien Picasso pouvait peindre de tableaux par mois.
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"A mon âge , lorsque je traverse un cimetière, j'ai l'impression de visiter des appartements."
Woody Allen

page 336
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Si je regarde ma bibliothèque pour voir où toi tu es "rangé", c'est juste après Dubillard et juste avant Marguerite Duras. L'ordre alphabétique a plutôt bien fait les choses. C'est un bon voisinage.

page 188
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Les larmes c"est le seul stock qui ne s'épuise jamais
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