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Critiques de Théophile Gautier (514)
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Le Capitaine Fracasse

Ayant lu dans ma prime jeunesse le Capitaine Fracasse, il ne me restait en mémoire que la difficulté à lire ce texte aux mots bien compliqués et aux références littéraires un peu difficiles pour moi, à l'époque. Mais voilà que j'apprends qu'aux Fêtes Nocturnes de Grignan où, chaque été, depuis plus de trente ans, une pièce de théâtre est jouée en plein air et où je me rends régulièrement depuis une dizaine d'années, du 23 juin au 22 août 2020, ce sera "Fracasse", d'après le Capitaine Fracasse, roman de Théophile Gautier, la mise en scène étant de Jean-Christophe Hembert.

Décision est prise, je dois me replonger dans ce roman, car il me plaît toujours de lire auparavant, le roman ou la pièce avant de voir le spectacle.

Bien m'en a pris, car j'ai vraiment apprécié la lecture de ce roman de cape et d'épée, plein de romantisme dont la fantaisie est remarquable.

L'histoire se déroule en Gascogne, entre Dax et Mont-de-Marsan, au XVIIe siècle. Un jeune baron, le dernier héritier des Sigognac vit mélancoliquement dans la misère et la solitude, dans son château en ruines, au milieu de ses terres en friches. Il a pour seule compagnie, son vieux et fidèle serviteur Pierre, son chien Miraut et son chat Béelzébuth. Il est le dernier descendant d'une famille illustre qui s'est peu à peu ruinée.

Voilà qu'un soir, une troupe de comédiens ambulants dont le chariot s'est embourbé se présente à sa porte pour lui demander l'hospitalité pour la nuit. Sigognac les reçoit et tombe sous le charme de l'une des comédiennes, Isabelle.

Les comédiens, en route pour Paris vont proposer au baron de se joindre à eux : " Il faudrait que Monsieur le baron allât à Paris, l'oeil et le nombril du monde, le rendez-vous des beaux esprits et des vaillants..." Après avoir hésité, il quittera son château pour suivre la troupe. L'un des acteurs va trouver la mort en cours de route, lors d'une tempête de neige et Sigognac le remplacera, Capitaine Fracasse devenant alors son nom de scène.

Dès le départ du château, les péripéties vont s'enchaîner et se dérouler à une allure folle. Que d'aventures dans ce livre ! Et, si le dénouement final n'est pas vraiment une surprise, Théophile Gautier réussit néanmoins à nous tenir en haleine jusqu'au bout.

Même si le roman se déroule au XVIIe siècle, les valeurs d'amitié, d'entraide, de fraternité qu'il véhicule sont toujours d'actualité. D'autre part, la description de la vie des comédiens ambulants est particulièrement intéressante et fidèle, et les personnages attachants. Quant aux descriptions du château, de son mobilier, des alentours, du voyage entrepris par cette troupe itinérante, elles sont splendides et savoureuses, le vocabulaire étant riche en termes souvent tombés en désuétude, ce qui leur apporte un charme fou. Les envolées lyriques des comédiens sont aussi des moments forts de l'épopée. Les aventures toutes plus épiques les unes que les autres, à la limite du burlesque parfois, et les rebondissements incessants qui émaillent le récit, alliés à cet amour pur entre Isabelle et ce capitaine Fracasse font que celui-ci s'apparente presque à un conte.

Le capitaine Fracasse est en tout cas un bel hommage rendu au théâtre avec une écriture flamboyante et se révèle un merveilleux roman d'amour.

J'ai hâte de me retrouver cet été dans la cour du château de Grignan pour assister à cette représentation qui pour moi, sans nul doute, me ravira, en espérant de toutes mes forces que cette période folle de pandémie et de confinement ne soit plus qu'un mauvais souvenir.


Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Arria Marcella

Trois jeunes gens visitent Naples. Dans un musée, l'un d'entre eux, Octavien, le plus jeune et le plus romantique, s'enflamme et se perd à la vue de l'empreinte d'un buste de femme pétrifiée dans des cendres de Pompéi, et récupérée dans la demeure d'Arrius Diomèdes. Les jeunes gens visitent Pompéi et s'organisent un souper sur les ruines de la ville. Plus tard, ne trouvant pas le sommeil, Octavien retourne sur le site archéologique. A la lumière de la lune, les bâtiments semblent moins abimés, les rues mieux pavées. Au détour d'une rue, quand le jour se lève, les maisons de Pompéi sont intègres, il entend des bruits, croise un homme habillé "à l'antique". Les siècles ont reculé devant les soupirs de son cœur, Octavien parcourt le Pompéi de l'an 79, quand la belle Arria Marcella se déplaçait comme l'on danse entourée de ses servantes.



Cette nouvelle très courte de Théophile Gautier tient à la fois du romantique et du fantastique. Romantique par son héros, Octavien, qui fuit la réalité et se délecte de la vision d'une empreinte de lave figée sur la courbe d'un corps féminin. Les images du passé sont pour lui bien plus vivantes que les femmes de chair qu'il croise tous les jours. T. Gautier se focalise sur les sentiments et les sensations de ce jeune, qu'il met souvent en comparaison avec ses deux amis venus avec lui visiter l'Italie, amis "bien de et dans leur temps". Le fantastique, lui, apparait par petite touche, avec la complicité la lune de son amie; les ruines sont cachées, jusqu'à ce qu'elles apparaissent dans leur glorieuse jeunesse, avant que le volcan ne crache son flot de feu et de mort, et s'animent sous les pas des vivants. Sous nos yeux, l'auteur fait revivre Pompéi, son architecture, ses habitants, ses activités. "Un prodige inconcevable le reportait, lui, Français du XIXème siècle, au temps de Titus, non en esprit, mais en réalité, ou faisait revenir à lui, du fond du passé, une ville détruite avec ses habitants disparus ; car un homme vêtu à l'antique venait de sortir d'une maison voisine."

Et bien sûr, bientôt apparait la belle, la merveilleuse, la "désirante" Arria Marcella, dont l'empreinte du buste avant tant émut Octavien. Et Arria Marcella constitue à elle seule un élément essentiel du romantisme et du fantastique de la nouvelle, elle dont le désir d'être aimée fait revivre Pompéi pour permettre la rencontre du fantôme et du jeune homme, dans un même "espace-temps".

Cette nouvelle de T. Gautier parle d'amour et du désir, et de la mort, de l'Eros qui vainc le Thanatos. Pour un temps, pour un temps seulement. Alors sonne le glas de la réalité pour Octavien, personnifié par la colère du vieux père de Marcella, ou par l'écho des cloches de l'église chrétienne qui résonne et traverse les siècles pour retentir dans la ville qui bientôt cessera d'exister.



L'histoire d'Arria Marcella est magnifique, la plume de T. Gautier sublime et poétique, j'ai été transportée dans le corps et l'âme d'un jeune homme qui traverse le temps à la rencontre de son premier et son dernier amour, sa coupe d'ivresse suprême. Une très belle lecture, que je recommande à tout le monde !

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Le Roman de la momie

Je viens de lire une critique negative de ce livre sur un blog dedie a la lecture. La lectrice disait ne pas avoir aime les details trop longs et qui s`etalaient sur des pages et des pages. J`avoue que j`ai sursaute a cet avis trop injuste envers un roman magnifique. Comment trop ? Alors que, justement, ce sont les descriptions minutieuses qui font le charme de ce roman.



Et puis comment parler de l`Egypte ancienne, celle des pharaons au faste sans pareil, celle des palais joyaux de l`architecture, des pyramides, des chambres aux tresors infinis. Comment ecrire toute cette beaute sans passer par les descriptions.



Comment exciter l`imagination des lecteurs sans decrire les couleurs, les formes et les senteurs de la vie quotidienne en ce temps la.



En fait, les details dans ce genre de litterature deviennent plus qu`indispensables : vitales au recit.

Sinon a quoi ressemblerait Nefertiti sans le tableau de mots peint par les ecrivains decrivant son nez, sa bouche, ses yeux....



Et finalement, le detail est au reve ce que le printemps est a la nature, il l`a reveille, fait eclater ses couleurs et accentue la beaute des choses.
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Le Roman de la momie

Les premières pages de ce livre nous plongent en plein milieu du XIXème siècle à quelques encablures du Nil, dans la vallée de Biban-el-Molouk. Un jeune aristocrate anglais, Lord Evandale et un égyptologue allemand, le docteur Rumphius, y découvrent, grâce à l'aide d'un escroc grec dénommé Argyropoulos, une tombe inviolée. Depuis plus de trente-cinq siècles, nul n'a foulé le sol de la chambre funéraire dans laquelle repose le sarcophage d'un pharaon. Mais quand on ouvre le lourd couvercle de basalte noir, les trois hommes trouvent, à leur grande stupéfaction, la momie parfaitement conservée d'une jeune femme d'une magnifique beauté appelée Tahoser. Un mystérieux papyrus est enfoui près de la momie, que le docteur Rumphius va déchiffrer, révélant les secrets de l'histoire de cette jeune femme. C'est ainsi que commence le Roman de la momie...

Le roman de la momie , c'est l'histoire d'un triangle amoureux sous l'Égypte ancienne, une histoire d'amour impossible.

Nous sommes à Thèbes. Tahoser, jeune égyptienne de seize ans, fille du grand prêtre Petamounoph, vit dans un palais doré. Elle est riche.

Elle aime secrètement Poërie, intendant des biens de la couronne. Mais il est Hébreu, ce qui rend toute liaison amoureuse impossible, d'ailleurs il est indifférent aux sentiments de la jeune Égyptienne et en aime une autre, Ra'hel, dont l'amour lui est réciproque.

La beauté de Tahoser est extraordinaire, elle ne laisse aucun homme indifférent, suscite les convoitises et les désirs, à commencer par le Pharaon. En effet, tandis que la jeune femme imagine un stratagème pour s'approcher du jeune Hébreu, Ahmosis, le Pharaon tout puissant qui domine l'Égypte, tombe amoureux d'elle au moment où il revient vainqueur d'une expédition. Mais être désiré par l'homme le plus puissant de toutes les nations est un privilège qui peut s'avérer fort fâcheux si l'on repousse ses avances...

Voilà pour l'intrigue amoureuse ! Cela dit, cette intrigue révèle au lecteur peu de surprises.

Le récit vaut davantage pour la richesse des descriptions avec un soin du détail qui permet à notre imagination de nous enrouler dans un tourbillon envoûtant de couleurs et de parfums enivrants.

Théophile Gautier s'est fait ici autant peintre que conteur.

Cette peinture m'a évoqué la lecture de Salammbô, roman de Gustave Flaubert, dont la description de Carthage était tout aussi flamboyante.

Nous voici plongés dès les premières pages dans la féérie d'un conte oriental empli d'enchantements et de sortilèges. le Roman de la momie, aux accents fantastiques, c'est un récit digne d'un conte des mille et une nuits.

Le Roman de la momie, c'est un péplum haut en couleurs, romantique et sensuel à souhait. Évoquant les splendeurs de l'Égypte ancienne, Théophile Gautier y célèbre un idéal de la beauté, paradis des parnassiens qui lui était cher. Et puis, il a fait de ce personnage fabuleux qu'est Tahoser, une jeune femme furieusement moderne pour l'époque où ce récit fut écrit, souhaitant être maître de son destin, décidant par elle-même qui elle veut aimer, quitte à décevoir et attirer les foudres du puissant Pharaon.

Ici le mouvement d'une barque poussée d'une rive du fleuve à l'autre préfigure autant le voyage de l'amour que celui de la mort.

Déroulant les pages de ce conte teinté d'exotisme, j'ai retrouvé dans cette lecture mon âme d'enfant, celui qui croyait aux rêves échevelés des contes anciens, poussant à mon tour une barque secrète et m'y glissant comme on se glisse dans un songe merveilleux, devenant visible aux yeux des seuls personnages que je retrouvais sur l'autre berge.

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Le Roman de la momie

Les caprices d'un lord anglais revenu de tout ont parfois du bon, surtout quand ils permettent d'exhumer du néant une histoire d'amour vieille de 3000 ans. Un amour impossible. Une histoire intemporelle. Un coeur brisé par l'indifférence ou l'incompréhension de l'être tant aimé. Un sentiment si fort, si exclusif qu'il fait prendre des risques inconsidérés. Et au bout du chemin, une tristesse insondable, la désillusion, l'amertume de l'échec et du rejet…

Cette histoire d'amour impossible se déroule au temps lointain de l'Egypte des pharaons. Elle est racontée sur un rouleau de papyrus jauni par le temps, coincée sous le bras d'une momie de femme. Une momie si admirablement conservée, si belle, si coquette que notre lord anglais n'eut aucune difficulté à l'imaginer vivante. Il tomba d'ailleurs éperdument amoureux de celle qui se nommait Tahoser.

Fille d'un grand prêtre d'Egypte, Tahoser est riche. Son extraordinaire beauté en fait l'objet de bien des convoitises, de bien des désirs. Tous les hommes sont à ses pieds, sauf le jeune Poëri, dont elle est précisément secrètement amoureuse. Mais Poëri est un hébreu. Outre cette croyance incongrue envers un Dieu unique, il a, comme tous les Hébreux vivant en terre d'Egypte, un statut de quasi-esclave. Et pour corser le tout, il est promis à une autre… Mais Tahoser au coeur ardent et au caractère entier ne s'arrête pas pour si peu, et commet mille folies pour attirer l'attention du jeune chanceux (qui manifestement n'en a pas du tout conscience) et se rapprocher de lui. Toute occupée à ses frivolités, elle ne voit pas que Pharaon vient de jeter son dévolu sur elle. Pharaon ! Dieu sur terre. Celui-là même qui fait courber l'échine à tous les vivants et à toutes les nations du monde connu. Quelqu'un à prendre très au sérieux, même pour la volcanique Tahoser qui peut difficilement lui dire d'aller se faire voir… Bref ! Elle se retrouve coincée entre le bellâtre insignifiant, la promise qui roucoule, et Pharaon au caractère chatouilleux. L'embrouille est totale. Alors quand Moshé (Moise) décide de mettre dans l'histoire déjà bien confuse son petit grain de sel !!!!

Laissez Théophile Gautier vous embarquer dans ce conte flamboyant des mille et une nuits… Entrez dans la cité de Thèbes la munificente, l'odorante, la colorée, la lumineuse. Laissez-le aussi vous guider vers ses zones d'ombre où vous trouverez bassesse, magie, aigreur, et ressentiment.

Je crois qu'on apprécie ce livre, et notamment ses longues descriptions d'un monde presque enchanté, si on prend tout son temps pour le lire. J'ai toujours eu le dico à portée de la main. D'abord parce qu'en matière de civilisation égyptienne, je n'y comprends goutte, ensuite parce que l'érudition de Théophile Gautier m'a rendu au fil des pages quelque peu modeste.



Challenge XIXème siècle



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Le Capitaine Fracasse

Dans un petit château délabré au fin fond de la Gascogne, le baron de Sigognac s’ennuie à mourir. Elevé depuis sa plus tendre enfance dans la misère et le dénuement, il voit sa jeunesse se flétrir entre les quatre murs pourrissants de la demeure familiale et s’est résigné depuis longtemps à être le dernier descendant de la noble – mais fauchée – lignée des Sigognac. Jusqu’au soir où un événement inattendu vient rompre ce morne train-train : portée par la tempête, une troupe de comédiens vient chercher refuge au château. Le cœur et les yeux de Sigognac sont immédiatement attirés par la plus jeune des actrices de la troupe, la charmante Isabelle abonnée aux rôles d’ingénues, et, poussé à la fois par l’ennui et l’amour naissant, il prend la décision de partir aux côtés des comédiens quand ceux-ci quittent la Gascogne. Pour plaire à la belle, il pousse même le vice jusqu’à se faire acteur et endosse sur scène l’extravagant habit du Capitaine Fracasse, matamore et faux brave de comédie ! Voici le dernier descendant des Sigognac sur les routes et les planches, prêt à affronter amours, aventures et périls également, car un jeune et orgueilleux noble, le duc de Vallombreuse, poursuit l’innocente Isabelle de ses assiduités et, pour arriver à ses fins, il ne reculera devant aucune vilénie, rapt, assassinat et viol inclus…



Cela doit faire une douzaine d’année que je n’avais pas relu ce grand classique de Théophile Gautier et, si je me rappelais clairement les grandes lignes de son intrigue, j’avais tout oublié en revanche de ses particularités stylistiques. Il faut avouer que celui-ci a de quoi un peu rebuter au premier abord : grands envolées lyriques parfois un peu pompeuses, interminables descriptions, personnages à la limite du caricatural, héros bourré de vertus jusqu’à la nausée… Les cent premières pages ont été, je l’avoue, un peu difficile à passer, mais, une fois cet obstacle surmonté, je suis à nouveau tombée sous le charme de ce chef d’œuvre ardu mais plein de séduction de la littérature française. Certes, la langue est un peu lourde et difficile d’accès pour un lecteur du XXIe siècle, mais elle séduit également par sa richesse et son éloquence. Lire « Le Capitaine Fracasse », c’est éprouver le plaisir du beau mot, de la phrase joliment tournée, du calembour habilement trouvé – plaisir peut-être un peu superficiel, mais non négligeable pour autant !



D’autant plus que l’intrigue est beaucoup moins classique et artificielle que l'on pourrait le croire. Pour l’apprécier à sa juste valeur, il suffit de comprendre que la thématique principale du « Capitaine Fracasse » n’est ni l’amour, ni la vengeance, ni l’aventure, mais le théâtre. Le style est grandiloquent, les dialogues manquent de naturel, les personnages de réalisme ? Quelle importance puisque ce ne sont pas ces qualités-là que l’on recherche dans une pièce de théâtre comique ! Dans « Le Capitaine Fracasse », scène et vie réelle se mêlent et se confondent ; Scapins, Leandres, Tyrans et Soubrettes se mêlent au commun des mortels pour égailler de leur joyeuse fantaisie la trop morne réalité. On s’aime et on se hait avec la même folie et la même démesure que sur les planches de la scène. Qu’importe alors si tout ceci sonne un peu toc, un peu creux, un peu factice, puisque ce n’est pas pour leurs vrais visages que l’on aime les comédiens, mais bien pour leurs masques ?



Un fort réjouissant roman que ce « Capitaine Fracasse » : à lire avec un brin de second degré mais à lire tout de même !

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Spirite

Spirite est une longue nouvelle écrite dans un style ronflant, baroque et finalement lourd, comme on en rencontre parfois dans la littérature du XIXème siècle.

Un dandy parisien, Guy de Malivert, est soudain abordé par un esprit, alias Spirite, " l'âme " d'une pauvre vierge éperdument amoureuse dudit Guy et qui s'est laissée mourir car croyant son idole amoureux d'une autre.

La pauvre petite était un canon de beauté mais s'est retirée dans un couvent sans même avoir jamais connu ni l'amour ni les plaisirs de la vie.

Elle revient donc en esprit conquérir son hidalgo pour lui faire connaître son merveilleux paradis.

Bref, du cul-cul à souhaits, de bons gros clichés du romantisme et du gothique à la pelle. À oublier assez vite à moins d'aimer vraiment les violons qui couinent ou d'avoir quatorze ans et toute sa naïveté (en outre comme l'a si bien énoncé Montherlant dans La Reine Morte : « Je hais le vice et le crime. Mais, en regard de la naïveté, je crois que je préfère encore le vice et le crime. »).

En somme, une fois encore, vous me direz : " Ceci n'est que votre avis, c'est-à-dire, pas grand-chose ". Et vous aurez raison...
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Le Club des Hachichins - La Pipe d'Opium

l''écrivain Théophile Gautier a durant sa vie beaucoup voyagé et a eu à visiter des pays comme l'Algérie,la Belgique,l'Espagne, l'Italie, la Grèce, la Turquie, l 'Egypte, la Russie ...Il est fort possible qu 'au cours de ses visites en Turquie, en Egypte, en Algérie a eu fréquenté des milieux où l 'on prenait des substances opiacées ou on fumait dans des pipes le kif ( le kif signifie, en arabe, l 'opium) . Si cette supposition est juste, on peut penser que les deux nouvelles "Le Club des Hachichins" et "La Pipe d' Opium" sont inspirées de ces voyages .

"Le Club des Hachichins" est une nouvelle parue en 1840 C 'est dans une vieille maison de l' Île Saint-Louis, l 'hôtel Pimodan, baptisé "Le Club des Hachichins"que se tenaient les séances mensuelles de consommation de l 'opium .Ce

club constitue un milieu fermé et où ne sont admis que les adeptes .Ces derniers sont peu nombreux .On y trouve parmi eux des artistes, des écrivains, des poètes tels : le médecin aliéniste,Moreau, les poètes Nerval et Baudelaire

et Théophile Gautier ,Balzac...

Ces adeptes qui prennent l 'opium, ils le font en tant

qu 'esprits curieux et expérimentant les effets de cette drogue dont on vante par ouïe-dire les vertus comme l'état euphorique qu 'elle procure .On pense, aussi, parmi ces milieux qu 'elle stimule l 'imagination ! Alors par curiosité, ils expérimentent .

Une fois les adeptes réunis, on leur sert dans des petites soucoupes de porcelaine, un morceau de pâte verdâtre .

Cette dernière est servie en toute petite quantité avec une cuillère de vermeil .Lorsque chaque adepte aura mangé sa part, on lui sert alors du café à la manière arabe, c 'est-à-dire avec le marc et sans sucre . Une fois la substance opiacée ingurgitée,et que les effets de la drogue se manifestent : les rêves doux ou cauchemardesques sont là ! Sous l 'effet de cette drogue, certains vous diront qu 'ils sont au paradis mais d 'autres vous diront qu 'ils ont des hallucinations, des visions bizarres .

Les adeptes de l' opium ne retrouve leur lucidité et leur état normal qu 'une fois dissipées les brumes de la drogue.

Cette lecture est un perturbante et il faut éviter autant

que possible ces substances qui s 'attaquent aux neurones du cerveau .

La deuxième nouvelle intitulée "La Pipe d 'Opium", est le récit où l 'auteur et son ami, Alphonse Karr fument par curiosité une pipe d 'opium . l 'auteur raconte son "rêve

d 'opium", et où il n' est question que de délires et

d 'hallucinations .











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La Cafetière

Ce livre de Théophile Gautier , je l' ai lu juste par hasard et vu que cette nouvelle est brève et courte , il m' a été très facile de la lire en peu de temps .

Dans ce récit, il s' agit de plusieurs amis qui sont ensemble au cours d' une soirée . La nuit, le narrateur essaie de s' endormir mais ne trouve pas facilement le sommeil . Il est intrigué au cours de son sommeil par divers bruits .

Tous les objets qui l' entourent s' animent . Une musique se fait entendre et les personnes qui sont dans la salle se mettent à danser ....Réalité ou rêve ? le narrateur est bien intrigué .

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La cafetière et autres contes fantastiques

Une belle petite nouvelle fantastique et simple à déguster! La narrateur passe une nuit très agitée dans une chambre d'ami où il est recueilli par un ami après une forte pluie, des images dans la chambres se mettent en mouvement , puis se mettent à danser comme dans un bal, puis la cafetière se met à bouger, noyé pourtant dans sa frayeur, notre narrateur jette sa carcasse de peur lorsqu'il découvre une belle femme isolée, il danse avec elle, malheureusement quand elle tombe, en voulant la relever, il se retrouve en main avec une cafetière brisée...c'est fantastique, l'auteur nous met dans une certaine frayeur mais seulement ça ne fait pas frémir de peur plutôt d'égaiement!
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Emaux et Camées

Au préalable je salue le fantastique travail de Claudine Gothot-Mersch, professeur aux Facultés universitaires Saint-Louis de Bruxelles, qui a présenté, établi et richement annoté la présente édition. C’est aussi elle qui a ajouté en appendice l’Albertus, écrit en 1831-1832 alors que Gautier avait vingt ans seulement.



Je vous invite chaleureusement à lire ces « Émaux et Camées ». Le recueil est en principe l’application la plus directe des principes de l’école du Parnasse, qui prône « l’art pour l’art ». On attribue traditionnellement une certaine froideur à ces poèmes, or, je suis moyennement d’accord avec cette affirmation.

Le vocabulaire surprend par sa richesse, par son utilisation très précise, une des principales caractéristiques de Gautier qui s’évade par la poésie : que ce soit à Venise ou dans l’Antiquité.

À noter encore de nombreuses références littéraires (cf. le poème Préface), des descriptions d’œuvres aussi, sorte d’ecphrasis parfois, plus la culture que la nature.
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Le Capitaine Fracasse

Vouloir faire une critique du Capitaine Fracasse et n'en retenir que l'aspect descriptif est - à mon sens - fort dommage ! Et préjudiciable à ce roman.



Certes des passages sont très longs pour les lecteurs de notre siècle plus habitués à un style expéditif.

Mais il est utile de rappeler ce roman (comme d'autres de la même époque) que nous avons aujourd'hui dans les mains d'un seul tenant était à l'époque distillés en épisodes dans les périodiques !

Puis ces auteurs n'avaient d'autre choix que de décrire : sinon comment permettre au lecteur d'avoir la vision la plus nette et la plus précise. Impossible pour eux de ne pas rentrer dans tous les détails pour faire en sorte que tout lecteur lise bien la même histoire!

Si je vous dis "imaginez vous un château"... chacun prendra l'image qui lui plait. Si je vous le décris en long, en large et en travers : tout le monde verra le même !



Le feuilleton est un style à part entière qui a ses règles et ses codes; la description diluée en fait partie.



Alors si vous n'aimez pas les grandes phrases et les chapitres entiers de description d'un lieu... n'ouvrez pas Fracasse !

En revanche si vous aimez l'art de manier les mot... vous allez être servi !



Pour ma part, je suis friande de feuilleton. Je ne suis pas loin du "plus c'est long plus c'est bon" et Fracasse m'a beaucoup amusée !

On y retrouve tous les clichés du roman de cape et d'épée; la glorification de l'honneur, l'amour bouffon qui pousse le héros, la troupe de fidèles amis, le hasard qui fait toujours bien les choses... et le happy end un peu niais !



Mais Fracasse c'est surtout le jeu des mots ! Lisez ce livre doucement, prenez le temps de sentir le plaisir de Gautier dans son écriture. Il faut savoir que Gautier écrit Fracasse en fin de carrière. L'homme est abouti, reconnu... Fracasse c'est sa récréation. Il y met tout son coeur et se redonne le plaisir de la plume.



C'est là le sel de cet ouvrage... Lire pour lire. L'histoire n'est que la serveuse du verbe.

Alors vous prendrez beaucoup de plaisir quand vos yeux tomberont sur des phrases telles que: "sa poignée de main était froide comme celle d'un serpent" !
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Le Roman de la momie

Contrairement à ce que son titre pourrait légitimement laisser croire, le "Roman de la momie" n'est pas un roman. C'est un récit qu'il faut rapprocher du conte et plus particulièrement du conte oriental. Tout y est : le voyage dans un pays enchanté comme est l'Egypte Ancienne décrite ici avec brio par Théophile Gautier, les personnages au caractère entier et passionné, à la limite du manichéisme, la magie, la vieille servante qui s'apparente à une sorcière hideuse, le couple d'amants dont l'amour est voué au désespoir, une femme aimé de trop (oui, quand il y a deux femmes pour un même homme, il y en a toujours une de trop!), les serviteurs dévoués, les sortilèges et les dieux. Bref, Théophile Gautier propose à la curiosité d'un lecteur à l'imagination fertile un conte de mille et une nuits sous le ciel étoilé de l'ancienne Thèbes, à l'époque glorieuse des Pharaons qui dominaient le monde connu.



Alors oui, c'est vrai, je l'accorde à certains lecteurs qui se laissent facilement rebuter dès qu'une description dépasse la longueur d'une phrase, le récit est très descriptif mais j'ajoute que c'est ce perfectionnisme dans la narration qui permet de compenser une intrigue assez peu prégnante qui réserve assez peu de surprises ; c'est ce souci du détail qui permet de véritablement plonger le lecteur dans un dépaysement total, le transportant véritablement dans l'Egypte des anciens millénaires.



Je reviens à mon fil rouge : le conte. Comme dans un conte, le lecteur trouvera plusieurs incohérences qui lui feront lever le sourcil lorsqu'il s’avérera que les explorateurs anglais venus déterrer de la momie trouveront on-ne-peut-plus facilement une tombe inviolée à exhumer, lorsqu'une humble servante juive sale, vieille et réduite en esclavage se hissera auprès de Pharaon dans son char royal, lorsque Tahoser, notre héroïne, traversera nuitamment le Nil à la nage faisant fi des crocodiles et que les rues de Thèbes, la plus grande ville orientale de l'époque, resteront désespérément vides... De même le lecteur attentif pourra s'étonner qu'un rouleau de parchemin trouvé dans une sépulture puisse, retranscrit en latin, correspondre à ce récit dont la prose est clairement inspirée du style littéraire français du XIXème siècle.



Mais laissez là tous ces éléments sans importance, fermez juste les yeux (pas facile de lire les yeux fermés, je sais) et laissez-vous transporter dans un monde à la fois féerique et cruel où les princesses aiment avec tant de passion qu'elles abandonnent le luxe pour se faire servante, où les rois sont si épris que leur rage devient leur ruine et que l'histoire est si bien écrite que, vous, lecteur, succomberez à son sortilège envoûtant.





Challenge ABC 2012 - 2013
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Le pied de momie et autres récits fantastiques

En lisant le Pied de Fumiko de Tanizaki, je me suis souvenue du Pied de momie de Théophile Gautier (1811-1872). Et j'ai relu cette courte nouvelle fantastique avec délectation. Du grand art : une histoire captivante parfaitement conçue, une écriture légère avec un vocabulaire ciselé de mots rares. Un soupçon de fétichisme morbide, désamorcé par l'humour pince sans rire, l'ironie, les clins d'oeil à Balzac (La Peau de chagrin) et l'auto-dérision car le narrateur est son double, amateur d'art et gros fêtard. Théophile Gautier écrit ce conte fantastique et le publie en 1840 (vingt ans avant le Roman de la momie) dans le Musée des familles, une revue populaire illustrée, sous la rubrique « contes étrangers ».



Le narrateur est un dandy parisien désoeuvré et désinvolte. Il entre dans une boutique de curiosités poussiéreuses tenue par un marchand juif inquiétant. Celui-ci propose au narrateur d'acheter des instruments dont il vante la férocité et la beauté... ""regardez ces rainures pour égoutter le sang, ces dentelures pour arracher les entrailles." Mais le narrateur est las des instruments de carnage. Au milieu du bric-à-brac, il déniche un pied de momie embaumé au joli grain de peau dont il compte se servir comme serre-papier. le brocanteur matois se fait prier mais accepte de lui céder le noble pied contre cinq louis d'or. Il le prévient ensuite que le pharaon risque d'être très courroucé par l' usage fort peu respectueux qu'il réserve au pied de sa fille chérie…

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Arria Marcella

Je n’ai pas vraiment accroché à cette nouvelle de Théophile Gautier. Je me suis beaucoup ennuyé et c’est à cause d’Octavien, le personnage principal qui visite Pompéi en compagnie de deux amis, Fabio et Max. Vu par les yeux de l’un d’eux, le récit de la visite aurait probablement été plus gai, plus désinvolte voire plus ironique.



Octavien a un esprit rêveur et introverti, un véritable romantique. Son imagination est plus digne d’intérêt que la réalité pour lui. La façon dont il voit Pompéi ne met pas en avant la beauté de ce site antique et son admiration, mais la réduit plutôt à de la nourriture pour son imagination, qui se mélange à son état d’esprit taciturne et triste. Je suppose que le style de l’auteur peut être qualifié de beau mais il ne m’a pas enivré. Il a même plutôt eu tendance à dégrader mes propres très agréables souvenirs de cette ville.



La deuxième partie m’a plus accroché. L’impossible se produit et renvoie le jeune homme un peu avant l’éruption, et l’on profite alors de la vie pompéienne, ses commerces, son théâtre et, bien sûr, de ce miracle d’amour qui rapproche deux être séparés par des millénaires. Rêve ou sorcellerie, on n’en saura rien ; c’est le propre du fantastique. Cela n’a d’ailleurs pas vraiment d’importance.



Malgré cette partie plus « vivante », le genre de plume poétique employée n’est pas vraiment pour moi. Dommage. Je me demande, du coup, si je dois attendre la même chose d’autres récits de Théophile Gautier comme Capitaine Fracasse ou Le roman de la Momie.

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Le Capitaine Fracasse

Le roman est annoncé dès 1836, mais il ne paraîtra en revue (Revue nationale et étrangère) qu’en 1861, et en volume en 1863. La fille de l’auteur raconte, que pour obliger son père à l’écrire, son éditeur, Charpentier, conditionnait le paiement au fait que Gautier produise régulièrement un manuscrit, dont chaque feuille était timbrée après son paiement par le caissier. Pourtant Gautier semble avoir tenu au livre, qu’il évoque et annonce régulièrement. Il connaît un grand succès publique : quatre réimpressions en 1864, suivie d’une édition illustrée par Doré en 1865. Ce succès ne s’est pas démenti depuis, et l’oeuvre reste sans doute la plus connue, éditée et lue de l’auteur ; elle a eu l’honneur de plusieurs adaptations, notamment cinématographiques.



Maxime Du Camp témoigne des intentions de l’auteur « Gautier rêvait quelque chose comme Le roman comique, avec l’éblouissement de son style et le richesse de son ornementation. » Et on retrouve beaucoup d’éléments du Roman Comique de Paul Scarron dans Le capitaine Fracasse. Dans les deux textes, une troupe de comédiens de campagne est au centre du récit, et nous les suivons dans leurs pérégrinations, dans l’exercice de leur métier, dans les représentations, répétitions. Mais aussi dans leurs amours et histoires romanesques : le capitaine Fracasse et la belle Isabelle, amoureux parfaits, ont comme ancêtres et modèles le Destin et L’Etoile, Les deux couples sont allés chercher refuge dans une compagnie théâtrale, alors qu’ils sont de noble extraction, mais des malheurs et mystères planant sur leur naissance les ont obligé de prendre cet expédient. Les deux couples ont un persécuteur noble et perfide, Vallombreuse et Saldagne, qui poursuivent de leur assiduité la jeune première qui n’en veut pas, ayant donné son coeur à son compagnon d’infortune. Sans oublier qu’un baron de Sigognac était un personnage secondaire du Roman Comique...



Mais Gautier s’est inspiré d’autres sources, celles du XVIIe siècle, où est censé se passer le roman, comme Saint-Amant, Scudéry, Antoine de Sommaville etc. Parmi les auteurs plus récents, Gautier semble se souvenir de Goethe ( Les années d’apprentissage de Wilhelm Meister ), le personnage de Chiquita évoque irrésistiblement Mignon. Gautier était un lecteur frénétique et boulimique, de toutes sortes d’ouvrages, doué d’une mémoire exceptionnelle, qui lui permettait de nourrir ses écrits de réminiscences diverses et variées.



Le roman commence dans le château délabré des Sigognac, sous le règne de Louis XIII. Le dernier rejeton de la noble famille végète dans la misère. Une troupe de comédiens égarés arrivent dans son château, et par amour pour une jolie comédienne, Isabelle, il part tenter l’aventure avec eux. Il va revêtir le masque du Matamore, et jouer sous le nom de Capitaine Fracasse. Mais les charmes d’Isabelle provoquent une violente passion chez le jeune duc de Vallombreuse. Orgueilleux et sûr de son droit, il ne va reculer devant rien pour la séduire, usant de force s’il le faut, et tenter de se débarrasser de son rival, Sigognac-Fracasse, en recourant entre autres à des assassins.



D’après le témoignage de Maxime du Camp, Gautier aurait pendant longtemps caressé l’idée d’un roman burlesque, avec un personnage comique, hâbleur mais lâche. On en est loin : le baron de Sigognac est un véritable héros de chevalerie, courageux et invincible. Dans Le Roman Comique, le comédien le Destin, était le même type de personnage positif, mais il avait en pendant inversé Ragotin, ridicule à souhait, provoquant des véritables catastrophes en cascades. Cet aspect n’est au final pas présent dans Le capitaine Fracasse, même si certains personnages secondaires peuvent prêter, sans doute plus à sourire qu’à rire aux éclats. Nous sommes plus dans une sorte de second degré, dans un jeu subtile entre l’imitation et la récréation, entre le presque semblable et le différent, entre le référence et son détournement. Sans qu’il soit nécessaire de toutes les comprendre pour prendre plaisir à la lecture. La narration de Gautier est sacrément efficace, les moments de l’action sont presque cinématographiques, construits de façon endiablée, même si on se doute que les choses vont arriver, l’auteur arrive à embarquer son lecteur dans le suspens, en en rajoutant parfois. La comparaison entre l’enlèvement d’Isabelle et de l’Etoile est sur ce point très significative : la narration est infiniment plus trépidante et prenante dans Le capitaine Fracasse.



Etrangement, à première vue, le roman de Gautier détaille bien plus les choses sur le théâtre au XVIIe siècle que ne le faisait Le roman comique. Les différents emplois (types de personnages) sont par exemples très détaillés, la façon de transformer un jeu de paume en salle de représentation l’est aussi, les pièces jouées sont décrites, de très nombreux auteurs cités etc. Et pour autant que je puisse en juger, c’est très juste dans l’ensemble et montre à quel point Gautier connaissait tout cela, et visiblement l’aimait. Il familiarise ses lecteurs avec ce théâtre du XVIIe siècle qui pour eux (comme pour nous) appartenait à un passé révolu. Alors que Scarron, qui décrivait une pratique au présent, passait bien plus rapidement sur de nombreux aspects, qui devaient sembler évidents.



L’image du XVIIe siècle à l’heure actuelle est surtout celle du classicisme, des règles, des formes parfaites. On oublie souvent le baroque, le spectaculaire, le sensationnel, l’extrême, le grotesque, qui ont aussi caractérisé ce siècle, surtout dans sa première moitié. Gautier, à la fois associé au romantisme, défendant férocement le jeune mouvement contre les tenants du classicisme, mais en même temps si sensible à la forme, défenseur de la beauté avant tout, présenté souvent comme un précurseur des Parnassiens (donc des néo-classiques) ne pouvait que se retrouver dans ce siècle et ses deux pôles aussi opposés que nécessaires. Puisque son roman parle de théâtre, si on doit le ranger dans un genre, ce serait sans conteste une tragi-comédie, un genre bien oublié maintenant, mais caractéristique de la fin du XVIe et surtout du premier tiers du XVIIe siècle. Entre rires et larmes, entre malheur et bonheur, tout en action, en combats, enlèvements, mais aussi en amours, sentiments, avec une fin heureuse et des nobles personnages qui ont souffert, lutté, craint, avant d’arriver au bon port. Comme dans Le capitaine Fracasse.
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Deux acteurs pour un rôle

Un conte en trois actes merveilleusement diabolique et très amusant du grand Théophile Gautier (1811-1872). L'histoire très colorée est inspirée du Faust de Goethe et joue sur les contrastes. On est vite immergé dans l'atmosphère viennoise du Jardin impérial, puis on s'enfonce dans une brasserie caverneuse à la Hoffmann et enfin on rejoint le théâtre de Carinthie. L'humour se glisse dans les détails, les métaphores animalières, les expressions prises au pied de la lettre, la satire mordante des honnêtes bourgeois et aussi celle des vaniteux comédiens, bien égratignés. Et puis il y a ce rire inimitable.



Résumé du premier chapitre/acte : Un rendez-vous au Jardin Impérial.

« On touchait aux derniers jours de novembre » Heinrich, un jeune comédien bien impatient attend « dans les vapeurs bleuâtres du soir » une jeune fille dans le jardin impérial à Vienne. Il est vêtu d' un costume élégant de velours noir à brandebourgs d'or « un peu théâtral » mais porte encore la casquette à feuilles de chêne des étudiants. « L'ironie se blottit dans les plis de ses yeux ». Katy apparaît au bout de l'allée suivie de son barbet noir . Son teint habituellement d'une "blancheur de cire vierge" a pris « sous la morsure du froid des nuances de rose » et elle « ressemble à râvir à la statuette de la Frileuse » (d'Houdon). Elle tente de dissuader Heinrich de poursuivre ses activités théâtrales car ses parents ne veulent pas d'un acteur, désargenté qui plus est, pour gendre. Heinrich a abandonné ses études de théologie à Heidelberg pour « se livrer » au théâtre et espère bien connaître la gloire et faire fortune. Katy rêve de s'assoir à côté de lui « près d'un beau poêle de Saxe ». Or Heinrich est irrésistiblement attiré par les grands rôles passionnants qu'il compte incarner. Et justement dans une nouvelle pièce, il prend le masque du démon et tient des propos blasphématoires, ce qui inquiète sa pieuse fiancée revenue toute troublée de la représentation au point de faire des cauchemars. En plus Heinrich risque de prendre de mauvaises habitudes avec ces damnés comédiens. Il la rassure en lui montrant qu'il porte toujours la petite croix en or qu'elle lui a offerte. Ils se séparent. le brouillard rend la frêle silhouette confuse. Heinrich « pirouette sur ses talons » et s'en va d'un pas décidé au gasthof de l'Aigle à deux têtes…



Muhahahahahaha !





On trouve le texte facilement en ligne et il est aussi disponible en audio.
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Le Roman de la momie

De Théophile Gautier, je n'avais lu jusqu'à présent que ses oeuvres fantastiques et, tout bêtement, je pensais retrouver le même genre littéraire en lisant le Roman de la Momie. Or, pour moi, ce n'est clairement pas le cas même si une étiquette "fantastique" figure bien sur sa fiche Babelio.



Le Roman de la Momie s'apparente plutôt au récit historique. Car même si une intrigue amoureuse s'installe autour du personnage de Tahoser (la superbe momie), c'est bien l'Égypte ancienne, avec ses moeurs, ses rites, son architecture..., qui est au coeur du récit.



Apparemment, Théophile Gautier n'avait pas mis un pied en Égypte au moment de la rédaction de son roman. Je ne l'aurais jamais cru si la source n'était pas fiable car il réussit à nous immerger totalement au coeur de l'Égypte pharaonienne. Le vocabulaire très riche et imagé ainsi que les nombreuses descriptions détaillées qui parcourent le roman transportent le lecteur vite et bien ! On apprend beaucoup sur la vie quotidienne à cette époque, et pas seulement sur les rites funéraires. C'est ce que j'ai le plus apprécié.



Le dénouement est des plus surprenants. Jamais je n'aurais imaginé ce genre de fin en ouvrant le Roman de la Momie ! Agréable surprise...



Après tous ces éloges, j'ai tout de même un reproche à faire à ce roman, qui est aussi celui de sa qualité (dans toute chose, il faut de la mesure) : les descriptions sont beaucoup trop répétitives.

Attention, j'aime les passages descriptifs même s'ils sont longs (j'adore ceux de Zola par exemple). Ici, ce ne sont pas les descriptions en elles-mêmes qui ont fini par me rebuter (elles sont très belles), mais le fait que ce soit toujours les mêmes choses qui soient décrites (notamment les tenues vestimentaires, à chaque nouveau personnage, même les très secondaires).



Le Roman de la Momie me laissera donc un goût plus mitigé que les oeuvres fantastiques de Théophile Gautier, qui m'a toutefois encore prouvé que sa plume était excellente.
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Le pied de momie et autres récits fantastiques

Le pied de momie

Une petite histoire fantastique qui nous entraîne dans le monde de la momification, la science de l'immortalité.



Notre narrateur, après avoir acheter le pied de la momie d'une princesse égyptienne et qu'il le lui est restitué, se voit transporter la nuit, comme récompense de la princesse, dans le monde des momies où il retrouve tous les pharaons, des princesses, des reines et tous ceux qui ont subi la momification...on lui fait comprendre que cette momification leur a permis d’être éternels...



Une nouvelle, vite lue!
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Arria Marcella

Publiée pour la première fois en 1852 et sous-titrée "Souvenir de Pompéi", "Arria Marcella" est une nouvelle fantastique dont l'histoire se déroule en Campanie, dans la ville de Pompéi.



Trois amis sont en vacances en Italie et lors d'une visite au musée de Naples, suivie de celle de la citéde Pompéi, Octavien tombe amoureux d'une jeune femme en voyant sa silhouette, particulièrement le galbe de son sein, prisonnière à jamais de la cendre.

Car oui, cette femme est morte depuis très longtemps, elle a péri dans l'éruption du Vésuve de 79 après Jésus Christ.

Après un dîner bien arrosé, Octavien retourne en fraude sur le site pour y passer la nuit, c'est alors qu'il traverse le temps pour se retrouver en 79 après JC, quelques temps avant l'éruption.



Théophile Gautier a choisi d'ancrer sa nouvelle fantastique dans le réel, le vérifiable.

La villa d'Arrius Diomèdes existe bel et bien, par contre elle ne se visite plus (en tout cas pour ma part elle était fermée et non accessible au public, juste visible à travers les grilles de la porte), comme d'ailleurs la majorité des plus belles villas de Pompéi, elle se situe en périphérie de la ville, juste avant la célèbre Villa des Mystères et 18 corps y ont été retrouvés.

Mais ce récit est avant tout une nouvelle fantastique, et cela se ressent rien qu'au champ lexical utilisé par l'auteur tout au long du récit et ce dès le début : "Il faisait une de ces heureuses journées si communes à Naples, où par l'éclat du soleil et la transparence de l'air les objets prennent des couleurs qui semblent fabuleuses dans le Nord, et paraissent appartenir plutôt au monde du rêve qu'à celui de la réalité."

Le basculement dans le fantastique se fait à la faveur de la nuit et Octavien se retrouve alors dans une Pompéi entièrement de bout et qui s'anime.

A partir de ce moment, il vit son rêve, se mêle à la population, assiste à une pièce de théâtre, rencontre la fameuse femme dont il est tombé amoureux et suit son esclave pour la rejoindre dans sa villa le plus simplement du monde et sans poser aucune question : "Ma maîtresse vous aime, suivez-moi."

Octavien se laisse complètement porter par les évènements et ne maîtrise plus rien. Pour expliquer cette situation et son retour à la vie, Arria Marcella lui déclare : "Ton désir m'a ramenée à la vie", ponctuée d'autres déclarations au caractère fort romantique : "la croyance fait le dieu, et l'amour fait la femme", ou encore "Rien ne meurt, tout existe toujours; nulle force ne peut anéantir ce qui fut une fois."

J'ai été frappée par l'obéissance aveugle d'Octavien à cette femme, il est littéralement sous son charme, ne pense plus et se laisse entièrement happée par cette femme d'un autre siècle (et morte, ne l'oublions pas).

Durant une scène de repas entre ces deux personnages, le côté fantastique laisse place à un côté romantique.

Et puis, comme bien souvent dans le genre fantastique, l'auteur se rappelle au souvenir du lecteur en introduisant la peur, car si Octavien semble avoir oublié, le lecteur lui se souvient que cette femme est morte et s'interroge sur les motivations qui la poussent à agir ainsi.

J'ai trouvé qu'il se dégageait du personnage d'Arria Marcella un côté sombre et inquiétant, comme si elle allait brusquement se transformer en serpent et avaler tout cru Octavien.

C'est là que de façon très intelligente Théophile Gautier réintroduit le fantastique, cette fois-ci par le biais du père d'Arria Marcella, et de façon plus crue : "Arria, Arria, dit le personnage austère sur un ton de reproche, le temps de ta vie n'a-t-il pas suffi à tes déportements, et faut-il que tes infâmes amours empiètent sur les siècles qui ne t'appartiennent pas ? Ne peux-tu laisser les vivants dans leurs sphères ? Ta cendre n'est donc pas encore refroidie depuis le jour où tu mourus sans repentir sous la pluie de feu du volcan ? eux mille ans de mort ne t'ont donc pas calmée, et tes bras voraces attirent sur ta poitrine de marbre, vide de coeur, les pauvres insensés enivrés par tes philtres."

C'est dit très clairement, Arria Marcella est morte, lui-même est mort, et ce moment de romantisme revêt alors la forme d'un piège.

Puis c'est le retour à la réalité, soit par le biais d'Arrius Diomèdes et de sa déclaration soit par le biais du son de cloche, cela n'est pas défini clairement mais l'enchantement est brisé.



Théophile Gautier maîtrise de bout en bout le fantastique ce qui donne une nouvelle des plus agréables.

C'est non seulement très bien écrit, mais c'est aussi très maîtrisé et bien défini, que ce soit les paysages, les lieux de l'action ou les personnages avec leurs caractères différents.

J'ai beaucoup apprécié cette maîtrise et j'ai littéralement dévoré cette nouvelle.

En plus, je trouve l'histoire originale et intéressante, tout comme le lieu de l'action.

Revenant d'ailleurs il y a peu de Campanie, et ayant bien entendu été à Pompéi (deux fois plutôt qu'une), j'ai retrouvé lors de cette lecture certaines de mes impressions et de mon ressenti de la ville mais de façon plus générale des paysages de la Campanie et du Golfe de Naples : "Quiconque a vu une fois cette lumière d'or et d'azur en emporte au fond de sa brume une incurable nostalgie.", ce que je ne peux que confirmer.



"Arria Marcella" réunit tous les ingrédients d'une bonne histoire fantastique mêlée d'un soupçon de peur et de romantisme.

Cette nouvelle est extrêmement agréable à lire, pour le style narratif de Théophile Gautier mais aussi pour s'imaginer ou revivre Pompéi, cité ensevelie qui a traversé les siècles et ne cesse, aujourd'hui encore, de fasciner les esprits.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
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Le pied de momie

Le narrateur de la nouvelle est :

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