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Citations de Thibault Bérard (129)


Ce que j’aimais, moi, c’était être là, sans rien dire, avec lui et ses copains, au milieu d’un bar, devant un couscous maousse qu’on ne finirait qu’avec l’aide d’une pinte sans cesse vidée et renouvelée. À les regarder chanter et rire. Dans ma tête, je pensais tour à tour à des trucs hyper sérieux et compliqués, les écrits de Simondon, la part du réel dans le geste documentaire, et à des bêtises, des farces qui me ramenaient à la petite bouffonne que je ne cesserais jamais d’être, et qui n’en revenait toujours pas que personne ne voie l’imposture.
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Théo a un don inné pour la légèreté et l’insouciance mais, à l’inverse, il se sent comme guetté par un drame immense, sorte d’oiseau noir qui n’attendrait qu’une seconde d’inattention pour fondre sur lui. Il n’en dit rien à personne, bien sûr, mais je le connais déjà bien, mille fois mieux qu’il ne se connaît lui-même. Privilège de l’âge, comme j’aime à le penser parce que, bon, on ne m’ôtera pas de l’idée que ce lutin facétieux reste un gamin, si séduisant soit-il.
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Moi-même, j’ai toujours détesté la guimauve, le fameux « charme des premières fois » m’a toujours laissée froide. On nous gonfle avec ce genre de chose, tout le temps, à la télé, dans les pubs, sur Internet, LA PREMIÈRE FOIS ! Vivez de nouvelles expériences, découvrez des territoires, allez à la rencontre des gens !
Faut pas croire, à ce moment-là, mon horizon restait aussi limité qu’un terrain vague de banlieue normande. J’étais pas une romantique, je ne le suis jamais devenue. J’en faisais même un point d’honneur.
Seulement… je vous le demande entre nous – on va dire, entre amis. Comme un service. Donnez-moi ces moments-là. Accordez-moi ce temps, que je n’ai plus devant moi, pour revivre des heures qui ont été celles du début, de l’envol, du jaillissement, de la naissance, de l’attente, de l’espoir, de l’imprévu, de l’inconnu ; de l’inédit.
Offrez-moi ça, d’accord ? Ces heures qui vous gavent de vie, qui vous arrachent des flashs grelottants sans prévenir.
Ces heures où j’ai enfin eu 20 ans.
 
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Notre couple s’est délité, c’est le genre d’histoires qui arrivent tous les jours et dont on pourrait faire un roman si on estime que l’extraordinaire jaillit du quotidien le plus banal…
… sauf que mon histoire n’est pas de ce genre-là.
Alors on passe à l’étape suivante.
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J’ai passé mon enfance à lire, lire, lire – et à faire du sport, du hand, du cross-country, des marathons, pour être dehors autant que possible. Mes parents n’ont rien à se reprocher, ils sont même très bienveillants. Je sais que ma mère est fière que je sois à Paris, que je fasse de la philo… En même temps, elle ne comprend pas trop à quoi ça rime. Et il faut croire que moi non plus, vu que je n’ai plus le goût de rien. Tout ça me semble complètement vain.
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Elle ne dit pas « ma grande », ou «  ma belle », aucun de ces sobriquets débiles qu’une femme mûre se sent parfois obligée de sortir à une gamine de 20 ans. Il y a quelque chose de professionnel dans sa façon de prendre les choses en main. — Montez, je vous emmène à mon bureau. C’est tout près. Encore une chance ! — Votre bureau ? Elle me sourit comme à une éclaircie bienvenue. — Ah, vous parlez. Tant mieux, ça nous facilitera la tâche. Bon, ça suffit. — Attendez, quelle tâche, de quoi vous parlez ? Et lâchez-moi, merde ! J’ai tiré le coude en arrière d’un coup sec et je jette un regard rapide autour de nous, voir dans quelle direction je vais pouvoir me casser d’ici. La rue est déserte, les rideaux sont tirés aux fenêtres des pavillons blanc crème ou grisouille qui la bordent, un dimanche midi c’est particulièrement sinistre – mais ça n’a rien d’étonnant par ici. « Donfran, ville de malheur : arrivé à midi, pendu à une heure »  : une ville qui porte une devise pareille, ça a au moins le mérite d’annoncer la couleur. Basse-Normandie, pas un chat, pas un bruit. Le décor de mon enfance, là où j’ai grandi – entre quatre murs. J’étais venue passer le week-end chez mes parents et ça ne m’avait pas vraiment boosté le moral. — Voilà, vous voyez ? elle dit. Je vous ai lâchée. Je ne vous veux pas de mal, d’accord ? Si vous voulez filer, vous pouvez. C’est ce mot-là, « filer », ce mot un peu canaille, qui m’a fait rester. D’un coup je basculais dans un film de Godard, le genre d’ambiance où les gens se balancent des répliques de ce goût-là comme si rien n’était plus naturel, Il s’agirait de filer en vitesse , ça m’a toujours plu. Si je pouvais vivre dans un film de Godard, je me sentirais sûrement moins dark, moins furieuse tout le temps. J’aurais probablement pas envie de me jeter sous les roues de la première bagnole venue, par un bel après-midi de juin, à l’occasion d’une visite de famille à Donfran, ville de malheur. Mais j’ai beau être jeune et pas mal larguée, je sais bien que la vie n’a rien à voir avec un film de Godard. Les couleurs ne sont jamais aussi éclatantes, il n’y a pas de musique bizarre pour souligner les passages drôles ou absurdes et les gens sont infiniment plus prévisibles. Madame frange cuivrée sourit en désignant Nick Cave, qui tire une tête de croque-mort sur mon tee-shirt. — Je ne suis pas sûre qu’il approuverait. — Hein ? — Nick Cave. Ses chansons sont parfois déprimantes, mais je pense que c’est un homme qui aime la vie. Elle me soûle, je suis à deux doigts de lui dire de me lâcher la grappe, bordel, et à Nick Cave et à tous les groupes que j’aime, parce que j’ai pas besoin d’elle, ni de personne, juste qu’on me laisse me foutre en l’air si c’est ce que je veux… … quand elle fait ce truc complètement dingue, incompréhensible. On pourrait dire ridicule, mais, en revoyant la scène aujourd’hui comme à l’époque, ce n’est pas du tout ce que ça m’a inspiré.
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En me revoyant, je me trouve mignonne, avec mes cheveux noirs tout emmêlés, mon look d’ado rebelle en jean et petit cuir noir, et aussi un chouia godiche. Sandrine Bonnaire dans Sans toit ni loi de Varda, je m’y retrouvais complètement à l’époque, c’était moi.
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Il est juste que les forts soient frappés

La phrase s'affiche tel un blason en lui. Et elle lui semble parfaitement logique, évidente - appropriée, là encore. Il est juste, oui, précisément parce c'est plus injuste que tout ce qu'on puisse imaginer, plus absurde, plus cruel, et donc plus éloigné de l'entendement des simples mortels, que lui et moi, qui sommes jeunes, pleins de vie, si forts, nous soyons frappés. Nous plutôt que d'autres, qui ne s'en relèveraient pas. (p116)
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Incipit :

J'imagine que vous serez d'accord : ce que tout le monde veut, dans la vie, c'est laisser une trace, non ? Résister à l'oubli éternel ? Et bien le scoop, mes amis, le truc pas croyable que je vais vous annoncer ici, dans ces pages et même dès la première, c'est que le but ultime de tout le monde, dans la mort, c'est exactement l'inverse : se faire oublier des vivants. Couper le cordon une bonne fois avec l'avant, pour, enfin, accéder à cette absolue félicité, ce repos parfait des sens et de l'esprit dont on nous rebat les oreilles depuis les siècles des siècles. Avouez que ça remet les choses en perspective. Moi-même, j'ai mis un moment à comprendre ça et, quand j'ai fini par y arriver, je me suis décidée à en faire quelque chose, histoire que ça vous rentre dans le crâne, pour le "jour où" (parce que, vous le savez, ou alors il serait temps, ce sera votre tour à un moment ou à un autre). Décidée avec un "e", ça n'a as échappé aux premiers de la classe, parce que je suis une fille, enfin une femme. J'étais une femme quand je suis morte - une jeune femme, 42 ans, ça vous donne déjà une idée de l'ampleur du drame à venir. (p9)
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