Citations de Ursula K. Le Guin (1103)
Rosa la regarda avec une expression d'amour universel qui était pour Xing une insulte obscure mais très profonde.
[Paradis perdus]
L'Histoire doit être considérée comme ce à quoi nous avons échappé. C'est ce que nous étions, et non pas ce que nous sommes. L'Histoire est ce que nous devons désormais ne plus être.
[L'anniversaire du monde]
Bien longtemps avant Dieu, et bien longtemps après aussi, il y a la façon dont les choses se passent, que nous appelons hasard, ou chance, ou destinée ; mais ce ne sont que des mots.
Grâce à la solitude, l'âme évite de faire ou de subir de la magie ; elle échappe à la monotonie, à l'ennui, en étant consciente. Rien n'est ennuyeux si vous en avez conscience. Une chose peut être agaçante, mais pas ennuyeuse. Si c'est une chose agréable, le plaisir ne se dissipera pas tant que vous en aurez conscience. Être conscient est le travail le plus difficile pour l'âme, à mon avis.
Sa voix douce et souriante m'a fait de nouveau perdre les os de mes jambes.
[Solitude]
Je crois qu'une vie ou une époque paraît simple quand on ne regarde pas les détails, de même qu'une planète semble lisse quand on est en orbite.
[La Question de Seggri]
J'ignore si les hommes se cramponneraient à leur statut privilégié ou s'ils exigeraient d'être libérés, mais il est certain que les femmes s'opposeraient à la perte de leur pouvoir, et leur système de relations sexuelles et affectives s'effondrerait.
[Puberté en Karhaïde]
Il me souleva et me serra contre lui. Je sentis son clitopénis comme un poing entre mes jambes. "Oh, doucement, là", lui dit le Portier, et d'autres personnes s'avancèrent, venant de cette pièce que je ne percevais que comme une grande salle, faiblement éclairée, pleine d'ombres et de brume.
[Préface]
Quand on écrit de la science-fiction, on peut quelquefois se permettre d'écrire les mots comme on veut.
Sont-ce les dieux qui allument ce feu en nos cœurs, ou chacun se fait-il un dieu de son désir violent ?
Il est rare qu'une femme gouverne seule très longtemps. Ça met les hommes mal à l'aise.
La paix irrite les hommes, elle leur inspire, si elle dure, une rage impatiente, et que, même lorsqu'ils implorent les dieux de leur accorder la paix, ils travaillent contre elle et s'assurent qu'elle sera rompue, remplacée par la bataille, le massacre, le viol, l'immense gâchis.
Je veux apprendre à traduire à partir de langues que personne ne connaît, que personne ne parle. Ces textes traduits ne seront pas aussi bons que les originaux, mais de toute façon, ce n’est jamais le cas.
Je donnerai à mon rapport la forme d'un récit romancé. C'est que l'on m'a appris lorsque j'étais petit, sur ma planète natale, que la Vérité est affaire d'imagination. Un fait irréfutable peut être accepté ou refusé suivant le style dans lequel il est présenté - tel cet étrange joyau organique de nos mers dont l'éclat s'avive ou se ternit selon la personnalité de la femme qui le porte : ne peut-il même tomber en poussière ? Les faits ne sont pas plus solides, cohérents, réels. Mais, comme les perles, ils ont une sensibilité.
[ Incipit ]
Ce n'est pas la mort qui nous permet de nous comprendre, c'est la poésie.
Que faire face à ses incohérences ? Je pris le parti de lui parler un langage franc et direct : « Je ne puis que vous poser une question, sire : dois-je me considérer comme impliqué dans le crime d'Estraven ?
- Vous ? Non. » Il me dévisagea encore plus attentivement. « Le diable m'est témoin que je ne sais pas ce que vous êtes, monsieur Aï - une anomalie sexuelle, un monstre artificiel, un visiteur venu des Domaines du Vide ? - , mais vous n'êtes pas un traitre, juste l'instrument d'un traitre. Et je ne punis pas les instruments. Ils ne sont nuisibles qu'aux mains d'un mauvais artisan. Je vais vous donner quelques bons conseils. »
J’étais incapable de voir les êtres de cette planète comme ils se voient eux-mêmes. Je m’y efforçais, mais sans réussir à autre chose qu’à voir en chaque habitant d’abord un homme, ensuite une femme, également gêné de les ranger artificiellement dans l’une ou l’autre de ces catégories, si étrangères à sa nature et si essentielles à la mienne.
Essaie de choisir avec soin, Arren, lorsqu'il faudra faire de grands choix. Quand j'étais jeune, j'ai eu à choisir entre être et agir. Et j'ai sauté sur la seconde solution comme une truite sur une mouche. Mais chacun de tes gestes, chacun de tes actes, te lie à lui et à ses conséquences, et te force à agir encore et toujours. Il est donc très rare de rencontrer un espace, un moment comme celui-ci, entre deux actions, où il soit possible de s'arrêter et se contenter d'être, tout simplement. Ou de se demander qui on est, en fait. (p.487)
J'étais encore incapable de voir les êtres de cette planète comme ils se voient eux-mêmes. Je m'y efforçais, mais sans réussir à autre chose qu'à voir en chaque habitant d'abord un homme, ensuite une femme, également gêné de le ranger dans l'une ou l'autre de ces catégories, si étrangères à sa nature et si essentielles à la mienne.
Les Géthéniens pourraient faire rouler leurs véhicules plus rapidement, mais ils n'en éprouvent pas le besoin. Si on leur demande la raison, ils répliquent : "Pourquoi aller plus vite ?". A l'inverse, si l'on demande à un Terrien quel besoin il a de rouler si vite, il répondra : "Pourquoi pas ?"...Les Terriens ont tendance à penser qu'il leur faut aller de l'avant, réaliser des progrès. Les gens de Nivôse, qui vivent toujours en l'an I, ont le sentiment qu'il importe moins d'aller plus loin que d'être là.